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sur 463 notes
En 1954, la famille Benacquista quitte l'Italie pour s'installer en banlieue parisienne. Les parents, Cesare et Elena, connaîtront le sort des déracinés. Dans ce bouleversant récit des origines, leur petit dernier, Tonino, restitue avec fantaisie cette geste. Il raconte aussi les batailles qui ont jalonné sa conquête de la langue française. Avec Porca miseria, Tonino Benacquista trace la lumineuse trajectoire d'un autodidacte que l'écriture a sauvé des affres du réel.


« Les mots français que j'entends ma mère prononcer le plus souvent sont cholestérol et contrariété. Je m'étonne qu'une femme ayant tant de mal à amadouer sa langue d'adoption puisse connaître deux termes selon moi si savants. Contrariété l'emporte de loin. Elle finit par se l'approprier comme s'il la débarrassait du devoir d'aller mieux, et qu'une fois prononcé, rien ne l'obligeait à développer, tout était dit, contrariété. Les soirs où l'affrontement avec son mari devient inévitable, elle assène le mot ruine, en italien, c'est la note la plus aiguë de son lamento, la rouiiiina, dont le sens est sans équivoque : c'est l'émigration, le départ maudit, la faute originelle, la source de tous ses maux, la contrariété suprême ».

Une expression italienne qui me vient de l'enfance c'est Porca Miseria! Une de nos voisines avait tendance à le placer dans toutes ses phrases. A la maison nous l'avons adopté et on le sortait en toutes occasions, avec un petit côté dramatique, comme si on suppliait un dieu quelque part! Porca Miseria!

Un nouveau roman de Benacquista portant ce titre, je ne pouvais que m'y plonger. Benacquista c'est du roman noir, toujours tissé d'un humour délicieux qui rend extraordinaires les petites choses de quotidien. du regard qu'il pose sur monsieur et madame tout le monde, il en fait des aventures singulières. Il manie si bien l'absurde que tout devient crédible! Mais cette fois, Tonino se plonge dans son enfance, sa vraie vie et livre un roman différent de ses écrits habituels.

Presque tous les auteurs ont a un moment donné écrit sur leur enfance. Benacquista aura attendu 60ans pour le faire. Comme il le dit » il lui aura fallut le recul nécessaire pour se lancer dans cet exercice délicat où l'enfant et l'adulte croisent leur regard » et bien je vous affirme que c'est réussi!

De l'arrivé en France à l'hiver 54, un des plus froids, en passant par le dialecte italien de ses parents qui y mêlent petit à petit du français, donnant un langage propre à sa famille. de la fratrie à qui il invente des destinées fantastiques, aux disputes parentales ou encore l'alcoolisme paternel, il analyse son héritage: de par son père Benacquista ceux qui « tordent le cou des lapins et retournent leur peau comme un gant » et par sa mère Polsinelli, ceux « qui taillent des costumes sur mesure »… « qui piquent et brodent dans leur atelier de couture » il nous avoue sa répulsion pour la lecture.

« La lecture n'est pas un refuge mais un fardeau » dit-il. Pourtant il aime la lange de Molière mais Tonino ne veut pas la lire, il veut l'écrire! Il veut devenir « Fabricant de fictions » La Lecture devient un travail de conquête et un travail souvent pénible. Il nous raconte son désarroi d'enfant devant un roman classique: sans repère, dans le fond comme dans la forme. Il nous avoue son besoin d'écrire, de raconter, de mettre sur papier ses rêveries et ses élucubrations. Et ce parcoure est jalonné d'anecdotes tantôt touchantes, tantôt hilarantes. Son roman est une merveilleuse déclaration d'amour aux siens, à la littérature, à certains professeurs, à la profession qui reconnait son talent et à nous qui lisons ses mots.

Vous y trouverez sa plume exceptionnelle, son ironie, sa maitrise de la fiction et, de la pudeur, délicate et étonnamment bienvenue.
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Autobiographie assez étonnante de ce fils d'émigrés italiens illettrés devenu auteur de romans. Son père est alcoolique, sa mère regrettera toute sa vie d'avoir quitté l'Italie et s'enfonce très tôt dans la dépression. Il est le dernier né de la fratrie, le seul né en France, et il parle très bien français, mais il déteste lire, il ne dépasse d'ailleurs jamais les premières pages des romans qu'on lui impose à l'école. Et pourtant, il deviendra romancier. Dans Porca Miseria, Tonino Benacquista nous explique quel a été son cheminement. Une agréable lecture qui m'a donné envie de découvrir les autres romans de cet auteur, que je ne connaissais pas encore.
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Confidences sur le parcours d'un homme ayant tout d'abord tenu les livres en respect avant de s'y plonger et de devenir écrivain. Les souvenirs d'une enfance par toujours facile auprès de parents immigrés italiens et quasiment illettrés, un père alcoolique et une mère semblant porter toute la misère du monde sur ses épaules.
Sa première tentative lecture, La guerre du feu, le rebute (je pense comprendre!) mais son amour pour la langue française, son charme et sa beauté, il l'écrira. Alors il écrit, mais faute d'idées de récit, ce sera ses rédactions scolaires qui lui permettront de laisser libre cours à son imagination, des interrogations écrites il en fera également des rédactions, un peu comme si la réponse à toute chose se faisait en lettres.

Mais c'est aussi l'histoire d'une famille comme tant d'autres, qui a quitté les terres pour la ville, une langue pour une autre, et une société où l'étranger à cette époque n'était que de la main d'oeuvre. Je reconnais un peu l'histoire de ma famille aussi dans ces lignes, cette amour de l'un comme de l'autre pays, cette envie de repartir mais rester pour que les enfants puissent avoir le nécessaire, chaque immigré connait le mal du pays et Benacquista, de manière très intime, a fait le rapprochement entre son enfance, les regrets de ses parents et cette envie de raconter qui la tenailler depuis toujours.
Très beau texte, j'y découvre un auteur vers lequel mes lectures ne se sont jamais tournées, il a fallu voir ce titre Porca miseria, maintes fois entendu aussi, pour que je fasse sa connaissance, une belle connaissance.
Lien : https://leslecturesdestemilo..
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Cette biographie de Tonino Benacquista, auteur que j'admire déjà beaucoup pour ses romans, m'a appris le chemin parcouru par cet immigré italien venu en famille dans les années 54 s'installer dans une banlieue française comme tant d'autres déracinés confrontés aux difficultés de la langue, du froid hivernal et de toute adaptation à la vie quotidienne.
Pour cet enfant, c'est malgré le poids familial qu'il va s'en sortir, malgré le père alcoolique méchant et la mère dépressive, sans les frères et soeurs qui auront un destin très différent les uns des autres. Et c'est la gloire de notre école d'alors qui donnait à la lecture des classiques une priorité de lui avoir ouvert les voies peu faciles d'accès à la culture , même s'il a d'abord résisté longuement.
J'ai apprécié la sincérité de l'auteur, son témoignage rejoint ce que j'ai connu de la vie des gens du Nord de la Meurthe et Moselle fils d'émigrés italiens, je crois aussi me retrouver dans ces portraits de pauvres familles, qui n'ont que la seule voie des études à réussir pour changer de milieu en fuyant leur univers toxique.
J'ai aussi été touchée par les mêmes choix de livres et de films cités par l'auteur, en me demandant si ces références culturelles parlaient encore autant à la génération suivante pour orienter et sublimer sa vie.
Un bel hommage à tous les résilients d'une jeunesse ardue !

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L'intimité d'un auteur, c'est un matériau précieux. Il y puise toute sa vie durant pour écrire, créer, nouer et dénouer, toucher du doigt l'universalité de la singularité. Tonino Benacquista dont j'ai beaucoup aimé nombre de ses fictions nous offre avec PORCA MISERIA un touchant récit d'enfance, récit de vie. Enfant d'immigré, il nous raconte le déracinement et l'enracinement des enfants dans une autre culture. Il nous raconte son chemin vers le pays littérature, écriture et lecture. Il parle d'amour tout simplement.
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Une autobiographie agréable à lire car malgré tout , malgré un père alcoolique, une mère dépressive,, l'auteur revisite son histoire et celle de sa famille avec sérénité et bienveillance. soulignant son regret de n'avoir jamais vu son
Père à jeun.
A travers ce récit, l'auteur évoque des facettes de l'émigration italienne en France .
Chez les Italiens dans les années 1900-1950, il y a ceux qui restent et ceux qui partent.LesPolsinelli, c'est-à-dire la famille d'Elena, mère de l'auteur, sont de ceux qui restent .Les Benacquista , la famille de Cesare, pere de l'auteur,sont de ceux qui partent.Il y a le mirage de l'Amerique .Des 1900, le grand-père choisit de travailler 6 mois par an à New York plutôt que d'exploiter sa ferme, Cesare choisit de tenter sa chance en France, il agit par atavisme, rester en Italie aurait été faillir. Devenu ouvrier spécialisé en région parisienne, il fait venir sa famille, un déplacement déchirant pour Elena .
Cesare et Elena sont des parents nourriciers, sans plus.Mal intégrés , ils ne peuvent pas insuffler la confiance à leurs enfants. Auraient-ils mieux réussi en Amérique? Ou en restant en Italie? Ce sont des questions que l'auteur se pose dans de courtes fictions à la fin du livre.
Soeurs et frère trouvent chacun leur voie pour une émancipation, l'auteur ce sera dans la lecture et dans l'écriture.
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Tonino Benacquista signe là une émouvante autobiographie qui témoigne que l'on peut devenir un écrivain de premier plan alors que rien ne nous y disposait.
Né en France mais de parents italiens qui ne maîtrisent pas la langue française, qui ne lui ont rien appris (J'élabore mes règles de conduite partout ailleurs que chez moi) et dont il rêve qu'ils se séparent enfin, lui l'alcoolique et elle la désenchantée, Tonino Benacquista reconnaît d'abord "préférer le pur ennui à la lecture", ce qui ne l'empêche pas de prendre goût à l'écriture de textes libres, y compris au moment de rendre une copie de mathématiques !
Sa principale source d'inspiration ? La télévision, cette "boîte magique qui contient toutes les histoires que sa mère ne lui a pas racontées pour l'endormir".
En classe de quatrième, deux livres vont lui révéler à quoi sert la littérature, Les Chroniques martiennes, nouvelles de Ray Bradbury, et Cyrano de Bergerac. A son Panthéon personnel figurent aussi, avec Goscinny, Gotlib et ses Rubrique-à-brac avec lesquelles il "s'amuse à réfléchir".
Dans ce parcours qui l'a mené au statut d'écrivain, Tonino Benacquista souligne son attachement à la France : "Quel autre pays aurait donné à un enfant né de parents illettrés le goût d'écrire ?"
Un livre bien plus profond à mes yeux que les ouvrages d'Annie Ernaux qui s'est complue à se lamenter sur des origines sociales pourtant bien plus enviables que celles de Benacquista.

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Quel mécanisme déclenche l'envie d'écrire, quel vécu fait prendre la plume à l'écrivain, d'où lui vient sa première inspiration ?
Autant de questions auxquelles on aimerait être capable de répondre, autant de clés qui éclairent l'aventure littéraire.
C'est en racontant sa jeunesse que Tonino Benacquista nous livre les éléments qui ont fait de lui le grand auteur qu'il est devenu.
Petit dernier d'une fratrie de cinq enfants, il est le seul à être né en France après l'émigration de ses parents depuis l'Italie lors de l'hiver 1954.
Avec des parents qui se seront toujours sentis clandestins dans la ville communiste de Vitry-sur-Seine où ils s'installent, il ne trouve pas sa place dans le monde que l'école lui propose. Rien dans son parcours scolaire ne l'intéresse. Il veut écrire mais il n'aime pas lire, il veut laisser libre court à son imagination mais on lui impose une norme d'apprentissage. Définitivement, il n‘entre pas dans le moule.
L'alcoolisme chronique de son père et l'incurable nostalgie de sa mère, vont l'obliger à se débrouiller seul, traînant comme un boulet le néant de leur éducation.
L'auteur nous raconte le choc de son premier livre, le roman qui l'ouvrit à la lecture, la libération de son imagination par le cinéma, ses premières lignes écrites, ses premiers succès en librairie. Il parle aussi de sa peur dévorante de s'éloigner de son cocon et de son sentiment d'illégitimité persistant.
Il y a tellement de réflexions intéressantes dans ce récit, tellement de phrases d'une justesse étonnante que j'avais envie de tout relever pour m'y replonger ensuite.
On peut néanmoins souligner que ce n'est pas une lecture simple tant elle est profonde et qu'il faut prendre le temps de tout appréhender.
Ce récit, court mais si dense, est tout à fait passionnant et il changera certainement notre regard sur l'immigration, sur la transmission comme sur l'école.
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En général, je ne lis pas d'autobiographie ou de souvenirs d'enfance d'écrivain, encore moins quand il s'agit d'un écrivain dont je n'ai jamais lu la moindre ligne. Mais le titre « Porca miseria » a accroché mon oeil car il m'a fait retomber en enfance moi aussi : ce juron suprême, il était interdit de l'utiliser mais il arrivait qu'il s'échappe des lèvres de ma nonna quand elle était plus que passablement énervée (on savait alors qu'il valait mieux se faire tout petit ou changer de sujet de conversation, voire partir en courant tout simplement…).

J'étais curieuse de découvrir l'histoire de Tonino Benacquista, né en France de parents italiens ayant immigrés dans les années 50, avant tout parce que ma nonna est arrivée en Belgique à la même époque que ses parents et parce que ma mère est de la même génération que lui. le parallèle entre les souvenirs de l'auteur et ceux de ma famille était tentant et j'ai effet retrouvé pas mal de motifs et de situations qui m'ont fait sourire. J'ai apprécié le regard tantôt bienveillant tantôt sans concession qu'il porte sur les siens, sur leur vie de famille qui n'est pas idyllique. Sa famille est loin d'être parfaite mais il l'aime et elle a contribué à faire de lui ce qu'il est. Sa découverte (tardive) du plaisir de la lecture et sa passion pour l'écriture tiennent également une très grande place dans ses souvenirs. C'est toujours très intéressant de voir comment se construit (et parfois se déconstruit) la personnalité d'un écrivain.

Mais je sais pourquoi je lis peu d'autobiographies d'habitude. Il y a un espèce de « pacte » entre l'auteur et le lecteur auquel j'ai parfois quelques difficultés à adhérer : en choisissant de lire une autobiographie, on accepte que l'auteur ne se livre pas totalement alors même qu'il annonce se livrer. Les souvenirs évoqués sont-ils réellement racontés de la manière où l'enfant l'a vécu ? Les sentiments ressentis, les événements vécus ne sont-ils pas transformés par le prisme de l'âge, de l'expérience, de la maturité ? Pourquoi certains souvenirs sont-ils racontés et d'autres (volontairement) tus ? L'auteur les réinterprète-t-il ou raconte-t-il la vérité, toute la vérité ? Au fil de ma lecture de « Porca miseria », j'ai trouvé que l'auteur adulte qui s'analyse avait parfois tendance à prendre trop de place, trop à mon goût.

Mais il n'empêche que j'ai pris plaisir à découvrir un auteur que je ne connaissais absolument pas. Son histoire m'a donné envie de lire un autre de ses livres pour découvrir son univers romanesque.
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Quel plaisir de rencontrer à nouveau cet auteur qui m'a si souvent enchantée à travers ses récits . Sur Luocine vous ne trouverez que « Homo Erectus », « Romanesque » qui m'avait un peu étonnée et la BD « le guide mondial des records » , parce que tous les autres je les ai lus avant Luocine.

Il était temps que je connaisse un peu mieux sa vie et d'où lui vient cette extraordinaire faculté de m'embarquer dans ses histoires. Je me doutais bien qu'il était d'origine italienne mais pour le reste … Ses parents sont d'une tristesse infinie, son père alcoolique et sa mère profondément malheureuse de vivre en France n'ont pas su donner du bonheur à leurs enfants. En revanche ce juron italien, « Porca Misera » que l'on peut traduire par « putain de vie » ou « chienne de vie », il a l'impression de l'avoir entendu à longueur de journée dès le réveil de son père. En plus Tonino est le dernier enfant, né bien après les autres, il n'a donc pas vécu avec la fratrie qui aurait pu égayer ses journées. le plus surprenant pour moi c'est qu'il n'aimait pas lire alors qu'il le dit lui-même cela lui aurait permis de s'évader de cet univers gris et même souvent très noir ! Il n'empêche que lorsqu'il s'accroche à la lecture De Maupassant « Une vie » il comprend bien mieux que n'importe quel analyste distingué le drame de Jeanne ! Cet enfant qui a adopté la langue française, alors que ses parent n'ont fait que « subir » la vie en France, a su lui rendre un grand hommage. J'ai aimé aussi ce qu'il raconte de ses voisins qui sont d'une si grande gentillesse avec lui et toute sa famille ce qui l'empêchera toujours de penser que les Français sont racistes



Son art à lui, c'est d'inventer des histoires, trouver des personnages et de les faire vivre, il ne puise pas dans les livres ses intrigues et ses caractères mais dans le sens de l'observation des autres. J'ai été contente de mieux le connaître et j'ai souffert avec lui lorsqu'il a connu une période de dépression doublée d'agoraphobie sévère. On comprend mieux en lisant ce livre pourquoi tous ses personnages ont des des fêlures énormes et restent toujours humains. Benaquista, c'est un rire un peu triste en connaissant mieux sa vie on se dit qu'il aurait pu être tragique. Mais c'est avant tout un conteur prodigieux.
Lien : https://luocine.fr/?p=17256
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