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EAN : 9782080420701
368 pages
Flammarion (11/10/2023)
3.83/5   20 notes
Résumé :
"Cette entreprise de pompes funèbres a accompagné la moitié des obsèques auxquelles j'ai assisté. Je les regardais sans les voir. D'eux, je tenais surtout à ne rien savoir. Jusqu'à ce treizième cercueil en commun. Par provocation, par défi, pour me rassurer, j'ai voulu passer de leur côté. M'entendre dire ce que leur répètent les familles endeuillées : “Je ne sais pas comment vous faites, moi je ne pourrais pas...”

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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Il est des livres qui arrivent soudainement, brutalement - Comme la mort.
Une lecture qui m'a secoué, dérangé, forcé à voir, à réaliser.
Un récit qui, dès les premières pages, a curieusement enterré tous les ouvrages sur le développement personnel que j'avais pu lire jusque-là, sans pour autant réussir à mettre en pratique leurs nombreuses méthodes pour lâcher-prise et me concentrer uniquement sur l'instant présent.
« Demain dès l'aube » ne propose aucune sorte de leçon - Dans un premier temps, l'auteur se contente d'observer, de rendre compte du travail effectué par tous les ouvriers de l'après-fin.
L'écriture est à la hauteur du recueillement et de l'expérience, chaque phrase devient importante, « légère » de conséquence ; car on se laisse guider, sans renoncer, à deviner ce qu'il y a sous le drap ou derrière le hublot du crématorium. La grande prouesse de ce livre est que la narratrice nous épargne du sensationnalisme, elle nous invite, nous glisse dans ses silences, ses appréhensions qu'elle teinte subtilement d'une légèreté et d'un humour parfois aussi impromptu, que « désaltérant » - on sort la tête du trou juste quand il faut 😉
Les mots exhalent la terre, la glaise, la moisissure, la profondeur bourbeuse du caveau, et les exhumations inéluctables n'incitent pas à l'inhumation.
« J'ai voulu regarder ce que personne ne veut voir, aller vers ce qui me fout le plus les jetons, ce qu'il advient de nous après le certificat de décès, ce qui se passe quand on est livré aux pompes funèbres, me rassurer ».
« Elle n'est jamais belle la mort, ne l'idéalise pas » lui répond un fossoyeur.
À l'image de ces êtres solitaires, par choix ou non, livrés à la mort encore plus seul que seul, sans famille, sans ami, sans une seule immortelle déposée sur le cercueil en pin, lors d'une cérémonie express.
À voir tous ces morts défilés, entourés, aimés ou ignorés, ils deviennent un seul et même visage fermé - il devient aussi le nôtre.
Tout au long de cette immersion, j'ai été stupéfait par le nombre de « clients » que recevaient tous les jours comme pendant les nuits, les pompes funèbres. Des défunts de tout âge, de toutes les morts, naturelles ou accidentelles.
Je n'échapperai pas au truisme en ajoutant que « Demain dès l'aube » fait surtout prendre conscience de la lumière exceptionnelle de nos vies.
Tous les regrets, les erreurs, culpabilités, souffrances, devraient être mis sous terre avant nous. Je pense à ce premier enterrement, ou à cette deuxième possibilité de voir seulement l'essentiel, ce pouvoir d'exister encore et que l'on peut perdre d'une seconde à l'autre, non pas par fatalité, mais par notre volonté.
Combien de morts-vivants voyons-nous déambuler autour de nous, sur le trottoir d'en face ? Sommes-nous identiques à eux, à tenter d'obtenir, de dessiner une vie bien rangée, organisée, dans ce désir avouable ou non qu'elle soit validée par une quelconque déité ? Un désir si profond, si embourbé, qu'il annule, recouvre tous les autres, à commencer par celui de pouvoir réussir à se connaître, à se soulever tout seul, à s'extirper de cette trajectoire toute faite.
Il faut vivre sa vie à l'extérieur, le plus possible - Travailler à l'extérieur, jouer dehors avec son chien, rester sous la pluie, sourire sous les tempêtes, se laisser porter par le vent, ne plus avoir peur qu'il vous saisisse et vous emporte. Tout cela n'est qu'un jeu, une découverte, une exploration qui n'en finit pas…
Avant cette dernière lecture, je m'étais longtemps préparé à ne pas être préparé par le départ de mes proches- tout simplement en interrompant les liens ou du moins à ne plus les entretenir, à les laisser s'effilocher. Ne plus alimenter, dépendre, m'abrutir, me réfugier dans un univers affectif au risque de basculer lors de son inexorable destruction.
Cette défaillance prend certainement sa source lors d'annonces dramatiques successives - Nous n'avions pas encore vingt ans. Je me souviens encore de ce Noël, juste avant de déballer mes cadeaux - Un appel. Ma meilleure amie - un autre - Morts dans un accident.
Je me souviens, plus terriblement encore, de ce mutisme, de ce tabou absolu - de l'empathie, de la consolation, de la protection que je n'ai pas eu ce matin-là - Une détresse, une souffrance qu'il a fallu très vite intérioriser alors qu'apparaissaient mes premières larmes de Noël.
Rétroactivement, la décision fut prise à cet instant : Plus d'attachement, plus de morts, ni de Noël.
Aujourd'hui, je crois que je n'ai plus le temps ni l'envie de continuer à sécuriser mon extrême sensibilité.
Caroline de Bodinat a subrepticement découpé un petit centimètre de ma clôture, là où l'air peut enfin passer - il ne reste plus qu'à forcer avec la tête.
Un récit essentiel, à la découverte encore des autres, et donc de nous-même, de notre étonnante insignifiance a essayé d'être, de paraître, ou de disparaître… pour rien.
Un livre qui nous accouche une seconde et dernière fois.
Un livre qu'il est encore temps d'ouvrir.
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Caroline de Bodinat a été plusieurs fois accompagnée par les Pompes Funèbres Caton, entreprise familiale à taille humaine, loin de « majors » que l'on a l'habitude voir oeuvrer. Désireuse de se plonger dans cet univers, elle décide d'y faire un stage. Pendant des mois, elle découvre, travaille, apprend, aux côtés de femmes et d'hommes dévoués à leur métier. Des êtres humains à la profession opaque et dénigrée, des « croque-morts » qu'on hésite à inviter, des professionnels profondément humains et perfectionnistes, dévoués à une tâche essentielle mais que l'on juge encore ingrate. Des passeurs.

L'autrice rend compte chronologiquement de son immersion dans ce milieu. Un biome bien à part, avec ses indispensables qualités, ses horaires de fous, ses imprécisions interdites. Les débuts sont complexes, il est difficile de trouver le bon ton, la bonne note, comme si se caler sur cette partition nécessitait des années d'un solfège spécifique.

Le récit vogue entre rire et larme, entre légèreté bienvenue et aspects sombres du métier. Ainsi, l'autrice dresse un inventaire exhaustif de tout ce que peut contenir la fonction des Pompes Funèbres. Aller chercher un corps peu importe l'état et peu importe l'heure du jour ou de la nuit. Utiliser le four au crématorium. Mettre en beauté une femme encore vivante il y a quelques heures. Exhumer. Créer le capitonnage d'un cercueil. Nettoyer le marbre. Faire au mieux, exiger le sans-faute. Un métier sous pression, donc, dans lequel des êtres mettent de côté leur propre histoire afin de gérer avec empathie celle des autres.

Pourtant, c'est avec une réelle délicatesse qu'ils accueillent tous l'autrice. Tout en lui demandant le même sérieux qu'à un véritable professionnel, ils l'accompagnent en étant soucieux de son bien-être.

Au fur et à mesure du récit, l'autrice évoque ses fantômes. Cette partie plus intime à mes yeux n'apporte rien au récit, bien au contraire. Ses doutes, ses questionnements m'ont plusieurs fois sorti de ma lecture. J'ai eu parfois la sensation que son immersion était une excuse à l'exorcisation de ses propres démons depuis des décès dans sa famille. Dommage.

Bilan :
Un récit de qualité et d'une grande sensibilité qui met en lumière des professionnels brillants d'humanité, qui ouvre la porte d'un métier méconnu, qui permet de se rendre compte que ces accompagnants sont aussi présents pour les vivants que les morts.
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En immersion dans une entreprise de Pompes Funèbre pendant 10 mois , Caroline de Bodinat rend hommage à ces personnes de l'ombre qui prennent en charge les vivants après un deuil . Sujet sensible et réflexion sur l'après vie qu'on préfère ignorer bien souvent . Elle a souhaité explorer toutes les facettes du métier,en arrière avec son carnet de notes, de la préparation des corps , crémation , exhumation , jusqu'à marbrière . J'ai été émue de voir avec quelle délicatesse on l'a préparée à toutes ces étapes. Récit qui n'est pas triste , son expérience est racontée avec une pointe d'humour . Profession redoutée pour ce qu'elle représente , j'en retiendrai cette question qu'on leur pose fréquemment "Comment faites vous ? je ne pourrai pas ". Une pensée pour Franck
Bel hommage à cette profession , que l'on n'a pas applaudie , mais qui est tellement nécesssaire



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un vrai coup de coeur pour cette lecture. Dès le début, je fus intriguée par ce milieu si particulier, qui demande autant d'empathie que de protection de soi pour tenir tout au long de sa carrière.
L'auteur m'a touchée par sa sensibilité, cet investissement personnel qu'elle effectue au départ à reculons... c'est un métier tellement dur et complexe.
Mais elle avance progressivement, comme pour exorciser ce qu'elle a vécu lorsqu'elle a perdu elle-même des proches.
Un petit sourire au coin des lèvres lors des passages où ses collègues se moquent gentiment d'elle, des larmes lors de la perte d'un membre de cette "famille", je suis passée par de nombreuses émotions pour finir sur une satisfaction en refermant ce livre.
Complet quant aux descriptions du métier et touchant quant à la sensibilité de l'auteur, voici un livre qui mérite d'être connu
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La journaliste Caroline de Bodinat s'immerge au sein des Pompes Funèbres Caton de la région Centre afin d'explorer de l'intérieur le fonctionnement d'une entreprise funéraire. Au contact des patrons et des employés, elle observe et participe aux différents métiers et tâches : l'accueil, l'accompagnement, la levée des corps, les soins de conservation, la thanatopraxie, l'inhumation, le travail du marbrier et du fossoyeur, l'ouverture et fermeture de caveau, le déplacement de sépulture… Elle parle aussi de son rapport à la mort et dresse in fine un beau portrait collectif de ces travailleurs de l'ombre qui oeuvrent pour accompagner les derniers instants, nos derniers instants.
Lien : https://puchkinalit.tumblr.c..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Quand, dans un dîner on dit qu'on travaille dans le funéraire, les visages se ferment.. La moitié des convives ne nous serrent pas la main en repartant .
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