La psychologie déborde la physiologie. La matière de celle-ci, qui, au physiologiste, semblait un tout complet et absolu, n'est plus qu'une partie, non isolable, aux yeux du psychologue, qui la voit se former, par une différenciation et une fixation contingentes, d'une réalité plus vaste et plus mouvante, fournie par la conscience.
Comme il parlait, ainsi il écrivait. Faisait-il, entre l'une et l'autre de ces deux occupations, une grande différence? Quand on le lit, on croit l'entendre. C'est, dans la disposition des idées, le même ordre subtil, libre et vivant, l'ordre du coeur de Pascal, plus profond et plus vrai peut-être que l'ordre gros et palpable des démonstrations géométriques. C'est le même langage pittoresque, personnel, plein de trouvailles et d'images révélatrices. C'est la même vivacité, la même vigueur d'attaque et d'argumentation.
Le point de départ des recherches philosophiques de William James se trouve dans ses études d'anatomie et de physiologie. Par profession comme par doctrine, il conduit ces études d'après une méthode strictement expérimentale. Or c'est précisément cette préoccupation de prendre l'expérience pour unique guide, qui l'amena à franchir les limites de la physiologie, pour s'engager dans le domaine des recherches psychologiques, où il devait s'illustrer.
La condition de la psychologie est, ainsi, analogue à celle de la physiologie. Si celle-ci pousse suffisamment loin ses recherches, elle voit, à un certain moment, se dresser devant elle des énigmes qui la surpassent.