Il est tard et tout est calme.
Le délicat diadème lunaire et le firmament ont soupoudré de brillants le paysage nocturne.
Je suis confortablement installé dans mon divan, Farouche-mon chat- somnole à mes pieds, le thé infuse et le feu crépite joyeusement dans l'âtre…j'ai envie de calme, de « cocooning », de m'accorder une pause, une parenthèse enchantée…
Entre mes mains, la
Grande Encyclopédie du Merveilleux, livre imposant par la taille et l'épaisseur mais paradoxalement léger, presque'aérien.Mes doigts effleurent la sublime couverture, délicatement, lentement. Je souhaite me laisser imprégner par la magie.
Je l'ouvre, le feuillète, lis au gré de mon inspiration quelques passages, me laisse envouter par les superbes illustrations, passe des pages, m'arrête, reviens en arrière…La chaleur ambiante et l'heure tardive commencent à agir, une douce torpeur m'envahit, je ferme les yeux, j'entends le ronflement du feu, le sifflement du bois libérant ses résines parfumées avant d'exploser en mini feux d'artifice.
Mon esprit vagabonde, rebondis d'associations d'idées en associations d'idées;
Tolkien, Merlin, Fantasia et Fantasia 2000, une nuit sur le mont chauve, la pastorale, Salamander, ancien jeu vidéo, Salamandres, esprits du feu…
Le ronflement des flammes devient de plus en plus hypnotique, je me projette dans cette fournaise pour y rejoindre la bergamasque endiablée des salamandres, je danse avec elle, virevolte dans les volutes, m'élève à travers la cheminée…
Je suis à l'air libre, vaporeux, le paysage brille d'une douce phosphorescence, vibrante, vivante…
Les salamandres filent devant moi et s'en vont rejoindre les représentants du Petit Peuple, réunis pour une bacchanale effrénée, lutins, elfes, sylphes, fées, ondins, satyres…il y sont tous, sous le couvert bienveillant du petit bois de pins, ils y célèbrent la vie et la nature,
Je me tiens en retrait, je n'ai pas envie de briser le charme, de les effrayer, de les troubler mais je ne suis pas dupe-et eux non plus- ils savent que je suis là, preuve en est les sourires que parfois ils lancent en ma direction, sourires qui deviennent invitations.
Je franchis le pas ( tout immatériel que je sois) pour me joindre à eux, l'accueil est chaleureux, je rentre dans la ronde, la farandole semble durer une éternité mais je ne suis pas fatigué, je me sens pousser des ailes, la musique s'accélère, devient syncopée, paroxystique.
Tout tourne à une vitesse vertigineuse, un prodigieux maelstrom.
Et soudain, une note diaphane résonne dans l'air cristallin, il est temps pour le Petit Peuple de rentrer dans son univers, nos mondes ont cessés momentanément de se chevaucher…je perds ma légèreté, me sens lourd,seul, emprisonné dans un corps, un frisson me parcourt.
J'ouvre les yeux, Farouche dort toujours, le thé est froid et seules quelques braises rougeoient encore dans l'âtre, parfois ravivées par un invisible courant d'air, ou un facétieux élémentaire en retard se dépêchant de rejoindre son monde.
Je referme le livre- en ayant au préalable pris le soin d'y glisser comme marque page un papier d'Arménie- me lève, range l'ouvrage dans la bibliothèque, au coté de
la Grande Bible Des Fées,
Ai-je rêvé ? Dans le doute, vais mettre un peu de lait, de miel et de pain dans une soucoupe à l'entrée du jardin, on ne sait jamais…
Fred-Fichetoux-Beg mode la fée activé