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Alexandra Laignel-Lavastine (Éditeur scientifique)
EAN : 9782207260593
720 pages
Denoël (26/02/2009)
5/5   3 notes
Résumé :

"J'ai écrit ce livre de sang et de larmes avec mon sang et mes larmes", explique l'auteur de cette extraordinaire chronique clandestine de la tragédie des Juifs de Roumanie, une œuvre unique, élaborée au cœur même de la tourmente. En cela, ce monument littéraire, pour la première fois traduit en français, occupe une place de premier plan dans ce qu'on a appelé "la bibliothèque de la Catastrophe".... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Considéré comme un ouvrage de référence en ce qui concerne les études sur la Shoah en général et sur le rôle joué par l'État roumain et les crimes antisémites commis sur son sol en particulier (Jean Ancel, Radu Ioanid, Carol Iancu…), le Livre noir de Matatias Carp a été initialement publié en 3 volumes à Bucarest entre 1946 et 1948.

Nicolas Trifon en a parlé en 2009 ici (https://www.courrierdesbalkans.fr/cartea-neagra-le-livre-noir-de-la-destruction-des-juifs-de-roumanie-1940-1944). Voilà ce qu'il fait remarquer, en résumé.
Selon lui, contrairement à ce qui annonce l'introduction (« la présente édition constitue – à l'échelle mondiale et plus de soixante ans après sa parution – la première traduction intégrale de cet incroyable monument qu'est Cartea neagră de Matatias Carp » [p. 12]) « plusieurs annexes et une partie de la chronologie du livre n'ont pas été traduits, vraisemblablement parce qu'ils présentaient moins d'intérêt ».
Il affirme même que progressant dans la lecture « on réalise assez vite si on s'en donne la peine que ce que nous avons entre les mains est moins un document d'époque annoté qu'un ouvrage de synthèse sur la question, rédigé par A. Laignel-Lavastine à partir du livre de M. Carp et des nombreuses autres données qui se sont accumulées sur ce thème depuis sa parution. En effet, on s'éloigne du document initial sur bien des points, à commencer par le titre dont l'intitulé en roumain est Cartea neagră : fapte şi documente : suferinţele evreilor din România, 1940-1944 [« Le livre noir : faits et documents : les souffrances des Juifs en Roumanie, 1940-1944 »]. le volet iconographique du livre a été lui aussi bouleversé. Aux illustrations d'origine, on a ajouté des photographies provenant d'autres sources. Certaines sont peut-être plus parlantes et de meilleure qualité graphique mais on s'éloigne ainsi du document annoncé, et le lecteur a d'autant plus de mal à faire la différence entre les photos recueillies par M. Carp, signalées par un discret astérisque, et celles qui ont été rajoutées, que les légendes d'origine ont été à leur tour enrichies de précisions supplémentaires. Des intertitres ont été introduits dans le premier chapitre du deuxième volume dont l'intitulé a été modifié : au titre initial « Aperçu historique général » on a préféré « L'une des premières tueries de masse du début de l'agression contre l'URSS ». Tous les chapitres sont précédés d'une présentation détaillée donnant des renseignements complémentaires sur le sujet traité et accompagnés d'un appareil de notes fournissant maintes informations, fort instructives, mais souvent sans lien direct avec le texte présenté ni indispensables pour sa compréhension. L'un dans l'autre, en nombre de signes, le texte de A. Laignel-Lavastine se rapproche de celui de M. Carp.
[…]
Rédigé dans la clandestinité, le Livre noir est l'oeuvre d'un seul homme (secondé par son épouse) qui a pris de gros risques en achetant à des officiers allemands des documents et des photos et en soudoyant des fonctionnaires du ministère pour soutirer des dossiers comprenant des procès-verbaux et des rapports. Fils de sénateur, avocat, juif non pratiquant, M. Carp immigrera en 1952 en Palestine avec sa famille. Pourtant, en 1947 encore, il se montrait confiant dans l'avenir de la Roumanie ».
En fin, dans son article, Nicolas Trifon, souligne l'importance du témoignage de l'ethnologue Isaac Chiva, enregistré au début des années 2000 (pp. 278-290). « Il avait 16 ans lors du pogrom de Iaşi en juin 1941. Son témoignage, qu'il a longtemps hésité à rendre public, permet de prendre la mesure des effets dévastateurs de l'antisémitisme d'État roumain et de la difficile et parfois impossible réconciliation entre les Roumains de confession juive ou issus de milieux de confession juive et les Roumains de confession chrétienne ou issus de milieux de confession chrétienne. »

Sur ce livre je dirais encore qu'il doit, malgré tout, être présent dans toute bibliothèque de culture roumaine qui se respecte.
Il est richement illustré, présente des cartes, ainsi qu'un précieux index des noms cités. Je lui reproche néanmoins l'absence des diacritiques roumaines pour ces même noms propres.
À noter également, deux textes éclaireurs : « Mon oncle, Matatias Carp », par Adrien Gérard Saimot, ainsi qu'une postface signée Radu Ioanid.
Si on considère les nombreuses notes de bas de pages on a effectivement l'impression d'avoir entre les mains un ouvrage historique collectif.
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En Roumanie comme ailleurs en Europe et aux États-Unis à la même époque, l'antisémitisme s'est manifesté sous diverses formes, dont une préférence donnée aux citoyens de souche (roumanophones , chrétiens, et ayant servi dans l'armée roumaine pendant la Première Guerre mondiale). Monde ) au détriment des autres, mais il y avait aussi des formes d' antifascisme et d'humanisme et pas seulement à gauche, car la dictature carlistes était conservatrice et de droite, mais menait néanmoins une guerre civile contre les Légionnaires des fascistes et des antisémites menés par Corneliu Zelea Codreanu qui finit par être emprisonné et exécuté comme beaucoup de ses partisans. Dans ce contexte, de nombreux juifs ont été intégrés et le père de Matatias, Horia Carp, était l'une des grandes figures de la vie intellectuelle roumaine entre des guerres Matatias devient ainsi un avocat réputé. Plus tard il sera exclu du barreau en raison de ses origines. le roi Carol II abdique, permettant l'arrivée au pouvoir du maréchal Antonescu (autoproclamé Pétain roumain) de prendre le pouvoir avec l'aide des légionnaires. Ce régim e de type fasciste systématise les persécutions des Roms et des Juifs , s'allie à Hitler contre Staline , engage le pays dans la Seconde Guerre mondiale sur le camp de l'Axe et, avec les nazis, se livre à des crimes antisémites .

Matatias Carp décide alors de devenir l'archiviste des persécutions des Juifs en Roumanie. Sa fonction de président de l'Union des juifs roumains lui permet de bénéficier de nombreux contacts dans tout le pays, de recueillir de nombreux reportages et photos envoyés par ses correspondants juifs, victimes de persécutions ou de massacres, et par des humanistes et justes. a réussi à soudoyer un officier allemand pour lui acheter des photos.
Matatias Carp enregistre tout au fur et à mesure que l'information lui parvient. Il a un ami humaniste au ministère de l'Intérieur qui lui permet de se rendre au ministère le dimanche pour y recopier les archives. Il travaille en partenariat avec sa femme. Immédiatement après la guerre, Carp obtint, grâce à des amis juristes qui enquêtaient sur les procès de Bucarest ouverts contre les responsables du régime d'Antonescu pour crimes contre l'humanité, divers dossiers d'enquête. De tous ces documents, il tire une série de rapports, publiés en trois volumes après la guerre entre 1946 et 1948 à Bucarest, sous le titre Cartea Neagră (le Livre noiR). Le nombre d'exemplaires est modeste, car le nouveau régime combattait ce qu'il qualifiait de nationalisme bourgeois ou de cosmopolitisme et se méfiait du sionisme , avant même que l'État d' Israël ne soit proclamé .
le livre est très vite mis à l'index par le parti communiste car il révèle l' antisémitisme profond du peuple roumain  », une manière de présenter les choses qu'analyse ainsi Neagu Djuvara . : « La position descriptive de Carp et Mircu est cathartique , car elle suscite l'horreur chez les jeunes générations, et les incite à prendre des mesures pour que cela ne se reproduise plus, alors que la thèse de « l'antisémitisme comme partie intégrante de l'identité » génère de nouvelles formes de xénophobie , car le jeune lecteur se retrouve antisémite simplement parce qu'il est né roumain, ce qui ne l'encourage pas à éprouver de l' empathie pour les victimes, et qu'il peut grandir pour adhérer aux fantasmes des bourreaux.
Carp n'adopte pas un point de vue nationaliste, mais un point de vue socio-politique : il n'écrit pas les Roumains mais le fascisme roumain et décrit toute la tragédie sans jamais accuser d'être un peuple ou un pays entier. collectivement coupable par sa propre identité : au contraire, il analyse les crimes rendus possibles par l'effondrement de l' État de droit, désintégration qui a déchaîné les forces les plus bestiales de l'humanité. Carp écrit : La Roumanie n'a hébergé ni chambre à gaz ni crématorium sur son sol, ni procédé à l'exploitation industrielle des dents, des cheveux ou de la graisse des victimes. Ayant adopté des méthodes de mise à mort classiques, pratiquées depuis la nuit des temps, le fascisme roumain s'est cependant illustré dans l'extermination des juifs par un certain nombre de techniques originales : des hommes battus à mort ou asphyxiés dans des charrettes de plomb, d'autres vendus (dans les colonnes des marches de la mort) pour être tuées et les vêtements vendus au plus offrant ; d'autres coupés en morceaux pour que leur sang serve à oindre les roues des chars.
Malgré son point de vue réaliste et dénué de tout nationalisme, Matatias Carp est marginalisé par l' État communiste et émigre en 1952 en Israël, où il meurt l'année suivante. Le livre, traduit et publié en France pour la première fois en 2009, reste, avec Marius Mircu, Raoul Rubsel, Carol Iancu, Radu Ioanid ou Matthieu Boisdron, l'une des principales sources d'information sur le sort des 756 930 juifs roumains. 369 000 avaient encore la nationalité roumaine en 1940, et 356 237 sont recensés au recensement de 1951.
L'extermination par le régime Antonescu de plus de 6la moitié des Juifs roumains est une des manifestations de l'holocauste de l'Holocauste. Mis en oeuvre par le fascisme. en Roumanie  : cela fait en moyenne 240 victimes par jour (juillet 1941-Août 1944) et c'est le bilan le plus lourd depuis la « solution finale » nazie .
Trouvez ce livre, c'est un volume de 700 pages...
Si vous ne devez lire qu'un extrait, lisez l'incroyable lettre du maréchal Antonescu le 27 Octobre 1941, adressée au Dr Filderman... (page 378)

C'est Ubu, revu par Pétain.
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Le 23 août 1944, l’armée Rouge n’a pas seulement libéré la terre roumaine, elle a aussi libéré les âmes. Pour la première fois dans l’histoire du pays, une promesse de liberté et de démocratie pointait à l’horizon. 
(p. 192)
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L'Armée rouge a libéré la Transnistrie au cours de la deuxième quinzaine de mars 1944. Partis le 10 mars de la région d'Uman, les soldats soviétiques ont traversé le Bug dans la nuit du 16 et atteint la rive du Dniestr quatre jours plus tard. La rapidité de l'attaque a vite désorganisé les armées fascistes, en proie à une véritable débandade. Les survivants du calvaire de Transnistrie étaient physiquement sauvés [voir chapitre VII]. Leurs âmes, en revanche, étaient perdues à jamais.
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 À Buzău, par exemple, la police légionnaire arrête une vingtaine de jeunes sionistes âgés de 16 à 20 ans. Après avoir été torturés pour qu’ils avouent leur appartenance au mouvement communiste, ils sont traînés devant la cour martiale. Finalement acquittés, ils auront un peu plus tard à payer au prix fort cette « farce » légionnaire. Fichés par la Sûreté de l’État, ils seront par la suite déportés en Transnistrie, où presque tous seront tués. 
(p. 84)
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Quant au ministre de la Justice, le professeur Ion V. Gruia, dont la chemise était un peu moins verte que celles de ses collègues, il aura droit à toutes sortes de louanges pour avoir édicté son célèbre statut des Juifs. Plus tard, des Juifs payeront cher ses services d'avocat dans différents procès fondés sur des lois qu'il avait lui-même édictées… Pour l'heure Gruia était surtout impatient de congédier les magistrats, les procureurs et les avocats juifs du pays.
(p. 86)
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Au côté du général Antonescu, le chef du gouvernement, les Gardes de fer se rendent progressivement maîtres de la rue, défilent, patrouillent et chantent – surtout, ils chantent : leurs chants de haine, de sang et de mort.
(p. 82-83)
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