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3,77

sur 500 notes
Troisième tome de Céline auquel j'ai eu le plaisir de lire jusqu'à présent et, pour moi, c'est une réussite.

Le titre est souvent souligné comme étant suggestif du format de la narration et, de fait, dans ce bouquin on passe souvent d'un château à l'autre de la vie de l'écrivain. D'abord son château à Meudon, où vit Céline avec sa compagne et une horde de chiens qui lui servent de protection/compagnie, dans la misère la plus sale et rejeté de son voisinage qui garde souvenir de son passé collaborationniste. Céline vit ainsi des minces profits de ces bouquins et des certaines consultations ci et là par la rarissime clientèle locale qui daigne lui demander service.

C'est dans cette partie du bouquin qui tient lieu la plus grande partie des discours aigris et incendiaires de l'écrivain contre ses détracteurs, Sartre, Breton et Roger Vailland d'entre autres. Céline se révolte aussi contre Gaston Gallimard qui prend la plus grande partie du gâteau lui laissant dans la misère absolue. Si certes il est possible de voir dans ces propos des jérémiades ennuyeuses, la sincérité des critiques et aussi le fait qu'on puisse voir le côté du "méchant" dans toute cette suite d'événements finit par les rendre intéressantes à mon avis. Il est aussi digne de remarquer que le tout est rempli d'un humour très réussi.

Après s'ensuit des confessions choquantes sur son passage en prison au danemark, et finalement son séjour à Siegmaringen avec Lily et le chat Bebert. À ce stade du livre, j'ai cru retrouver une certaine similitude de ton avec Mort à Crédit, en ce que la trame devient un enchaînement d'anecdotes sur les hôtes de Siegmaringen et sur ce lieu. Or, cela étant exactement ce qui m'avait donné du mal dans mort à crédit, à voir la succession d'anecdotes cocasses plus ou moins connectés les unes aux autres, cette partie du récit m'a moins satisfait que la "première moitié" on pourrait dire.

Il vaut la peine aussi de mentionner un passage au milieu du livre quand l'écrivain se déclare prit de fièvre, et à partir de laquelle la narration devient de plus en plus et délirante. L'effet stylistique est absolument prenant, même si j'ai eu du mal à m'y mettre dans certains pages où ça devient trop bordélique et la divagation de l'auteur en plus de la succession frénétique des sujets m'ont donne du fil à retordre. le tout c'est un chapitre qui m'a laissé essouflé.
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Faudrait-il encore parler du style de Céline ? de cette créativité enthousiasmante, des superbes fulgurances, des mots inventés à propos et qui sonnent comme s'ils avaient logiquement toujours existé ou comme s'ils devenaient soudain nécessaires à exprimer une idée. Cet art de transcrire la langue parlée, cette illusion de facilité d'écriture, de faux « naturel » qui ferait presque oublier le travail d'écriture, le labeur que cela suppose.
Ah, Céline ! Oserais-je dire qu'il a été avant tout hué et montré du doigts par les résistants de la dernière heure, plus lâches que lui en ce qu'ils n'ont absolument pas choisi leur camps avant de savoir avec certitude qui l'emporterait ? Voilà un Céline bien amer, et pour cause : le voici devenu sous-homme, monstre que les braves gens sont près à lyncher, tout légitime qu'ils sont à lui cracher dessus à présent que la guerre est gagnée.
Céline, tel un paria, se retranche dans son « château », son logement de Meudon où est installé son cabinet médical. Ah, Céline ! Quelle mauvaise foi, quand même ! C'est qu'il faut oser, avoir un incroyable toupet, pour s'aventurer dans une oeuvre qui hurle à quel point le monde est injuste et cruel envers lui. Mais pourquoi donc cet acharnement ? La terre entière le méprise, lui qui n'a absolument rien fait ni rien écrit de mal. Voilà : il a tout à fait oublié ses écrits, son antisémitisme, ses positions accablantes, ses relations pendant la guerre. Mais non, cela reste injuste quand même et le laisse bien aigri. Alors, il écrit sa révolte, il gueule comme le monde entier est contre lui.
Même ses patients se méfient de lui, même les pauvres le prennent de haut. Les éditeurs ? Peuh ! Ils le ruineront, le tueront et danseront sur sa pauvre tombe d'artiste laborieux et pauvre. Quant à ses pairs… Sartre, Malraux, il les déteste tous. Non, vraiment, quelle vie de malheur pour un homme qui n'a rien à se reprocher !
Il faut sacrément aimer Céline pour sourire avec tendresse de ces plaintes éhontées. On se dit alors : « Il a osé ça, le bougre ! », et on est partagé entre une légère indignation et une admiration au moins pour l'audace. Céline est décidément à part, inclassable, aussi vil qu'admirable, détestable et splendide. Cette première partie est une sorte de pamphlet outré, de procès à charge contre ses détracteurs, contre la terre entière ou presque, contre ses rivaux surtout, nombreux et féroces.
Et soudain, il tombe malade, comme si la vie ne l'accablait pas déjà suffisamment. Il est décidément maudit. La fièvre le ramène à l'autre château : à Sigmaringen. Il rêve, il hallucine, il se souvient, on ne sait pas bien. Il est emporté là, dans ce château, et ses souvenirs vont venir se glisser entre deux motifs de plaintes. C'est que lui aussi a fui, le lâche, pour s'éviter l'importunité réservée aux collaborateurs. C'est avec les derniers fidèles à Pétain qu'il part se réfugier à Sigmaringen, avec tous ses semblables, pauvres réfugiés presque innocents, rescapés du lynchage public. Là-bas, on espère tous ensemble, comme en colonie de vacances, tandis que les Américains se rapprochent, que les russes avancent. Que c'est beau cet ultime élan, cette façon d'espérer encore, cette foi indéfectible alors que tout est déjà perdu !
Céline délire, et dans son délire il rit de lui et des autres, revient avec humour sur cette débâcle, sur cette absurde déroute. le récit prend un forme extrêmement comique. C'est une bande de bouffons perdus, d'illuminés retranchés dans l'espoir fou que leur destin va s'améliorer par l'oeuvre de je ne sais quelle magie. Et c'est magnifique : avec un beau recul, il décrit le grotesque de leur situation d'alors, eux les pauvres vichystes en exil. Les descriptions sont divines, drôles, caustiques. Leur existence à tous prend un tournant ridicule, du protocole des promenades quotidiennes de Pétain à la nourriture hautement laxative, et puis les allemands, l'espoir fou qu'ils peuvent encore gagner, que la nouvelle Europe est à deux pas du triomphe. Ah, c'est loufoque ! Et c'est beau, ce recul sur leur ridicule condition d'alors. Une débâcle racontée avec un bel humour, une saine autodérision.
D'un château l'autre … sans ordre, sans lien évident, sans transitions, un récit dénué de chronologie, de suite logique entre les différents événements, souvent des scènes de vie au château que Céline écrit comme elles lui viennent, comme un délire de fièvre. Aucune ligne narrative sinon une sorte de délire de la mémoire. Il est malade, c'est tout, et sa maladie est provisoire, une diminution passagère. Voilà là le superbe parallèle, l'élément liant : la vie à Sigmaringen était aussi une régression, une parenthèse dans la vie, une sorte de maladie, de fièvre, dont il s'est rétabli. La maladie tout comme l'exil ne sont que des parenthèses, un petit détail historique, une chimère que l'on oublie bien vite une fois que l'on en est sorti.
Céline sait être tendre, aussi. Il aime son épouse, femme douce et compagne de toujours, qu'il protège même en idée, à qui il pense sans cesse. Que deviendra-t-elle ? Il s'en soucie beaucoup. Il y a aussi le chat, animal sans attache, peu fidèle, solitaire et fier, qui lui correspond assez. Et enfin, quelques patients fidèles, des nécessiteux et des souffrants, juste de quoi s'assurer que non, Céline n'est pas un monstre : il élit, sélectionne, jauge. Il hait les intellectuels qui le lui rendent bien mais éprouve une infinie tendresse pour Mme Niçois, sa voisine et patiente, femme simple et fragile. Il choisit, selon ses propres critères, qui il aime et qui il voudrait voir mort. Céline est entier, voilà. Cruel sans doute, froid, rude, mais encore capable d'amour. Céline est duel, et surtout un peu fou, j'y songe à chaque fois que je le lis. de cette sorte de folie, d'illumination élevée de celui qui a compris la vie sans jamais prendre la posture hautaine d'un sage pour autant. de cette sorte de fou supérieur à qui j'aimerais beaucoup serrer la main.
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Céline antisémite. Mince ! Comment un type pareil a pu tomber dans le panneau ! Quelle écriture ! J'ai voulu savoir ce qu'il en avait écrit de Sigmaringen. Sigmaringen, c'est là où toute la clique à Pétain s'est réfugiée en Allemagne à la fin de la guerre. Je n'ai pas été déçu. Livre à classer absolument dans les "gothiques". Et cet humour sans en avoir l'air...
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Céline. Ses textes sont ... pas du jémiard, pas du chiqué, que du ressenti, du qui sort de la tripe, de la vraie mouscaille qu'on a dedans et qu'on sait pas emballer... lui sait .... il te la file mieux que si tu la suintais direct ... La lecture des petits points rend la lecture parfois difficile ... ses textes peuvent être tellement plus forts lorsqu'ils sont dits et joués à voix haute que seulement lus pour soi-même. Il fallait oser. Oser cela et l'écrire, avec son sang, sa vérité, ses colères, sa vilénie, sa souffrance, nue, crue, humaine, ... il fallait du courage ... de la sincérité, ... pas de pruderie, pas peur des mécontents, des fâcheux, pas chercher les encensoirs et l'assentiment, juste laisser filer le ressenti qui parfois ne ment pas ... et travailler tout cela ... marcher dedans, reprendre, réécrire, ressasser, ... Monsieur Céline, quelle souffrance, quel délire, quel déchirement ... quel courage ... Merci
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Autant j'ai aimé Mort à crédit et Voyage au bout de la nuit, autant je n'ai pas aimé ce livre. Des pages et des pages de récriminations, de jérémiades, de rabâchage, voire de haine, d'un vieil homme qui ressasse sa frustration, sa rancoeur et qui clame sa misère alors qu'il devrait être couvert d'éloges. Les seules parties intéressantes sont les descriptions du « village français «  et des portraits de ceux qui ont fuit en Allemagne en 1945.
Écrit dans le style Celinien, très haché, avec beaucoup de phrases inachevées, qui ne facilite pas la lecture ni la compréhension.
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Un morceau d'homme, un morceau d'histoire. Cette trilogie est complètement folle. Style et récit complètement radicalisés. Je lis dans les critiques qu'il faut juger l'oeuvre et non l'homme. J'ai quand même le sentiment que LF Céline nous livre un bout de son âme et de son histoire. Moi, je juge l'homme également. On devrait pouvoir le juger au regard d'une morale alternative, Nietzchéenne en quelque sorte. Par ce prisme, on lirait dans son défaitisme, sa passivité, son flegme, les traits les plus caractéristique des anti-surhommes. le minable par excellence! Et pourtant, LF Céline (l'auteur ou le narrateur, qu'importe!), homme de tous les vices politiques, est sacrément sympathique! Effet d'une prime à l'authenticité, certainement.
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Après le roman Sigmaringen de Pierre Assouline, je m'étais promis de lire le récit qu'en avait fait Louis-Ferdinand Céline, une vingtaine d'année après son séjour forcé dans cette petite ville du sud de l'Allemagne. Mon mari s'y était attelé avant moi et m'avait prévenue d'une certaine difficulté de lecture ainsi que d'une structure pour le moins tarabiscotée.
Divagations, imprécations, rancoeurs peuplent la majorité de la logorrhée de l'auteur avec ici et là quelques brefs retours au calme et à un style moins argotique. « Je m'excuse de parler tant de moi-même... je m'appesantis... des déboires?... vous avez les vôtres!... ces gens de lettres sont terribles! si affligés de moimoiïsme. »
Au bout de quelques pages (la patience est de mise), le miracle s'accomplit : on ne fait qu'un avec le narrateur et toute la démesure qu'il met à raconter ses années d'exil, en fuite avec les hommes du gouvernement de Vichy, prend tout son sens.
Cependant, je n'aurais pu apprécier autant ce récit de Céline si je n'avais lu en premier lieu le roman de Pierre Assouline.
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Mon second Céline après 4ans et la claque fangeuse et brutale que je me suis prise avec Voyage au bout de la nuit. Des Lectures sont passées et ont continués à forger mon esprit de lecteur, comme si toutes ces lectures avaient qu'un seul et unique but, celui de me refaire lire un Céline. Mais j'ai compris maintenant, je sais comment aborder un LFC .

D'un château l'autre c'est cet ami, enfin cette connaissance adossée au bar, celle qui a bu plus que de raisons et que tu ne connais que d'après les autres : "mais oui, il est fou. On ne comprend rien, son parler est désastreux, c'est un pauvre type !!!". Alors toi, tu t'approches parce que les gens torturés c'est ta came et tu entends quelque chose "...". Ces trois petits points qui vont te changer ta vision de l'écriture, du roman et de la littérature. .

Il va se passer quelque chose, une soudaine fascination prendra forme, de la peur et surtout beaucoup d'incompréhension. Toujours accoudé au bar cet individu va commencer à te parler et ne va plus s'arrêter, un flot continu de paroles ponctuées de manière très aléatoire, c'est faux. Au fil de son discours tu perçois une cohérence, des noms qui reviennent, des endroits, des esquisses de descriptions pour planter un décor bien trop sombre déjà. Une fusion entre toi et ton interlocuteur s'installe et tu es happés. .

Il va te débiter soixante et trois ans d'histoire, dans les grands lignes, tout en prenant bien soin de te perdre deux trois fois, pour savoir si tu suis et bien sûr que tu le suis. Tu ne le lâches plus. Ce que tu prenais pour du charabia prend la forme d'une poésie, de phrases claires... et voilà que se dessine, l'amour, le vrai, l'amitié, les trahisons et L Histoire celle de la Guerre, celle de Céline. Cet individu qui se vide plus que de raisons et qui ne cessera de parler qu'une fois que le glas aura sonné... Il ira cassé sa pipe au Nord et d'un Château L'autre il s'en ira avec Lili et ses chiens pour son plus beau Voyage au bout de la nuit. .

Céline c'est ce compagnon étrange qui n'est intéressant que si on s'intéresse à lui. .
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Céline sur la route de la débâcle, celle d'après la libération, celle des puissants déchus ! C'est drôle et pitoyable à la fois, c'est monstrueux et dérisoire ; une fuite vers nulle part, vers le Danemark, pour rien. La langue est complètement hachée, ponctuée de borborygmes, on chute, on se relève, ça hurle, ça fait mal ! après 40 ans, l'impression de ce livre est toujours présente dans ma mémoire !
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Il y a quelque chose de pourris dans le royaume du Danemark , comme dirait Shakespeare ...
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