J'ai imaginé au crépuscule que nous assistions tous deux
aux nuages, les nuages, lentement,
qui dans le soir déplacent le peu de vent
gris et bleu en fins lambeaux expirés par le jour calme,
juste avant son achèvement.
Je ne sais ce dont nous nous étions défaits à leur passage
mais nous avons vu alors que le ciel était clair et rose,
et j'ai formé pour nous ce voeu transparent :
celui de ne désirer rien un jour
que d'être chaque soir ensemble spectateurs du ciel.
(extrait de "Ce qui demeure") p. 101
CONCILIATION DU TEMPS
ET DE L'ESPACE
Je demande, sous les nuages, un peu de clarté au vent,
au ciel, seulement qu'il se glisse
dans la faille que lui ménagera le temps.
Je n'espère pas obtenir de raisons : ce que c'est qu'être sur la
terre
ni que me soit découvert aucun horizon vaste, séjour tranquille :
ni l'azur ni le firmament ne me disent rien de la lumière ;
j'ai besoin du nuage, et d'éprouver le temps peu à peu
qui le fend, qui le crée par l'interstice : lentement, un rai bleu.
J'attends le moment où sans avoir plus de fondements
le cœur et le monde s'éclairent ;
j'attends une lumière qui ne soit pas une éternité lointaine,
mais un passage qui coïncide avec celui du temps.
p.22
Nous monterons aux montagnes d'espace
légers, de notre consentement.
Comme le souffle délié lorsque l'on respire
nous apprendrons ainsi à aimer, nous élever
depuis la terre.
Le dessin de crête entre ciel et neige
et de givre bleu, sera le partage
notre aune spirituelle
à la toute lisière.
(extrait de "En partage") p. 9
CONCILIATION DU TEMPS
ET DE L'ESPACE
C'est l'oiseau, cet élément lointain qui figure seulement une
trace, qui, à l'endroit où il a cillé, décide du ciel — et l'ac-
complit.
Il faut à l'infini, pour qu'il devienne l'espace, un passage qui
désigne en noir sa fragilité, le brise, et le brisant le découvre
jusqu'alors incréé.
p.27
Gestes et oiseaux, fleurs et mots.
(extrait)
La démesure de ce qu'un être un jour ressent,
il se demande comment loger
cela en lui, sa cavité.
C'est comme le ciel tout entier qui pèserait
sur la ravine,
voudrait s'y faufiler.
On trouve heureusement au jardin
des fleurs étrangères à tout épanchement,
des tulipes
à la poussée si pleine de rectitude,
dont le bulbe, l'origine tint au creux d'une paume,
tandis qu'on serrait
l’outil à retourner la terre de l'autre main.
Avec Husnia Anwari & Belgheis Alavi accompagnées de Kengo Saito (rubâb)
Nous, femmes poètes, nous n'avons d'armes que nos mots, de moyens de résistance et de liberté de parole que par nos poèmes, le plus souvent. Pour soutenir dans un élan solidaire les femmes afghanes qui sont, depuis longtemps déjà mais particulièrement dans le contexte actuel, réduites au silence dans leur pays, nous souhaitons faire entendre leurs voix : des landays de femmes pachtounes exilées ou appartenant au cercle littéraire clandestin de Kaboul, le Mirman Baheer, aux poèmes en dari de femmes souvent assassinées d'avoir écrit comme Nadia Anjuman à qui Atiq Rahimi a dédié son livre Syngué sabour. Pierre de patience. Pour que sur la scène emblématique de la Maison de la Poésie, toutes accueillies, nous puissions dire la force qui nous unit en poésie à travers le monde, un ensemble de femmes poètes françaises est en train de se constituer autour d'Husnia Anwari, journaliste franco-afghane et poétesse féministe, et Belgheis Alavi, enseignante chercheuse à l'Institut national des langues et civilisations orientales, qui liront sur scène accompagnées au rubâb par le musicien Kengo Saito.
Avec : Laure Gauthier, Laurence Werner David, Sophie Loizeau, Judith Chavanne, Véronique Pittolo, Rim Battal, Zoé Besmond de Senneville, Marie-Hélène Archambeaud, Sanda Voïca, AC Hello, Julia Lepère, Orianne Papin, Virginie Poitrasson, Anne Savelli, Marcelline Roux, Lika Mangelaire, Séverine Daucourt & Maud Thiria
Manifestation à l'initiative de Maud Thiria, organisée avec l'aide de Séverine Daucourt
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