En le feuilletant chez un bouquiniste, j'ai tout de suite su que ce recueil de poèmes me toucherait. Né en 1941, Jean-Pierre Colombi est vu comme" le poète de l'effacement" . En effet , c'est la nature qui est au centre de tout, le " Je " apparaît mais se fait discret, il observe le monde dans son dépouillement, sa beauté pure. Cela m'a fait penser à Philippe Jacottet.
" J'écoute la musique immobile des choses
Une sorte de coeur enfoui dans la patience"
Les mots glissent au fil de l'eau, ils s'enroulent autour des pierres du ruisseau, les images aquatiques nous bercent:
" La pluie marchait comme les chats
sur la pointe des feuilles sombres
elle mouchetait chaque mur
de petites bannières d'eau"
Le ciel, les nuages , le vent sont des espaces d'apaisement, de sérénité.
" Beaux nuages mouvants belles mesures d'ombres"
Si la mort est évoquée, elle ne l'est que comme achèvement, elle s'intègre au mouvement du monde .
J'ai aimé les mots sobres, simples, souvent les mêmes, qui reviennent comme un leitmotiv, d'un poème à l'autre. J'ai aimé la lucidité du regard, la fusion de l'être et de l'univers. Comme le poète, j'aimerais" boire de l'ombre" ou " regarder les champs pour mieux voir en moi-même"...
Une belle leçon de vie, où la lumière poétique scintille à travers les ténèbres... Encore un poète contemporain à découvrir!
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Encore une pluie transparente
Je me penche sur le jardin
sur les feuilles des géraniums
et les grandes mauves sauvages
Puis c'est une heure d'embellie
Une lumière de miroir
revêt les herbes du jardin
Elles semblent porter de longues flammes blanches
Des nuages Des bleus dorés dans les nuages
des lignes de silence éteint
J'irais au nord d'une patience enracinée
afin que ma vie me repose
De grandes eaux murées dans l'ombre Des nuages
dont les parois retentiraient
Des reflets aplatis sur les pierres Le jour
devenait un petit buisson
Puis je m'étends sous quelques feuilles lumineuses
De mes mains de fumée j'atteins
sur mes genoux de lentes vibrations Le ciel
semble une seule feuille bleue
p. 156
Les oiseaux chantent profusément
J'écoute dans leurs cris une source lointaine
La terre ensemencée se met à réfléchir
comme un lac d'ombre spirituelle
Le vent me semble une grande fleur transparente
qui passerait dans le courant d'un bleu tranquille
Je laisse tourner ce qui tourne
en moi comme une roue à aubes
Du blé doré des jours je mouds un bonheur blanc
La pluie descend sur la campagne
comme une promesse tissée
entre la terre et les nuages
Il me semble que la clarté
de la lune mouille mes doigts
et les manches de ma chemise
Devant moi des belles de nuit
d'un rose teint d'obscurité
près de moi des pierres luisantes
Le silence sur la montagne
pèse comme des yeux tranquilles
C'est une douce pluie d'eau pure
p.97
Je laisse la fenêtre ouverte sur le vent
et ses longues toisons de laine me caressent
comme des lèvres