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EAN : 9782368323748
244 pages
Nombre7 Editions (22/03/2018)
5/5   2 notes
Résumé :
Un tendre voyage dans les souvenirs...

Sortis de leur dormance,
Les souvenirs germent
Plongeant dans mon enfance leur précieuse radicule. »
Le bonheur est dans Longpré,
Un voyage mémoriel,
Un regard tendre, empreint d’une nostalgie discrète, sur une enfance
vécue dans un village paisible, qui lentement s’ouvrait dans les années
50 aux promesses d’abondance des fameuses « 30 glorieuses ».

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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique

Longpré , où se trouve donc ce village où Gérard Coste a passé une enfance heureuse ?
Sis dans l'Aube. Longpré qu'il fait rimer avec « insouciance et ignorance ».


Le livre débute par une réflexion sur l'écriture, c'est donc un défi que l'auteur s'est lancé. Puis il s'adresse directement à ce village natal, qui lui a offert une vie loin du tumulte.
Et en plus a fait germer sa vocation d'enseignant. Avec le recul, il réalise combien il fut chanceux de vivre dans cette « nature paisible » et n'hésite pas à qualifier cet endroit de paradis.

Les souvenirs photographiques qui ponctuent le récit autobiographique sont en black and white, à commencer par la carte d'identité datant de 1962, quand l'auteur est âgé de 10 ans. Celui-ci nous ouvre son album familial.

Tel un biographe, le narrateur brosse un portrait intime de lui-même et dépeint en même temps cette douceur de vivre dans ce village champenois. Il débute en 52, l'année de sa naissance, également celle des Jeux Olympiques d'été à Helsinski, rappelle-t-il. C'est en traction Citroën que la jeune future mère ( tout juste 17 ans) est conduite à la maternité de Bar sur Aube. Une mère peu expérimentée (placée à 14 ans comme bonne dans la ferme voisine) qui sera secondée par une des soeurs du Patron.

Cinq ans plus tard, débarque la petite soeur, Francine, surnommée La Puce. Avec humour il évoque sa surprise, n'ayant pas été préparé à cette venue, lui qui croyait que les filles naissaient dans les roses. Perplexe devant « cet être de chair et dos », il fantasme sur leur futur ensemble : leurs jeux à venir.

L'auteur brosse un portrait des campagnes avec ses traditions : « la fête du blé », des objets marquent l'époque comme : la toile cirée, les verres en pyrex, le réveil jaz.
On roule en 4CV, en Dauphine, on utilise le vieux tube Citroën.
Il décline une visite détaillée du corps de ferme. Dans la maison , on note l'existence d'un grenier où le narrateur aimait à s'isoler pour évacuer un chagrin, le couloir géant, au carrelage glacé, qui servait de « galerie des glisses », mais alimentait les peurs à cause de la porte du cachot. Très tôt, il s'intéresse à la flore du pré, des bois, véritable,« océan de verdure » où l'herbe qui ondule ressemble à des vagues. Les odeurs de foin coupé traversent le récit.
Parmi les dépendances, la grange à fourrage, dont la porte colossale, suspendue à son rail, impressionne. A côté le puits. En enfilade la bergerie et l'écurie où les chevaux ont des prénoms.

Chez les Lutrat, on labourait encore avec les chevaux, « l'unique force tractive », alors qu'au village le tracteur est installé. Perché sur le siège métallique de la râteleuse, le jeune Gérard se prenait pour John Wayne, fier de maîtriser la jument de trait.
Cette famille fait penser au père Crayssac, personnage du dernier roman de Serge Joncour, qui lui refuse le progrès. (1) Toutefois, un pas vers la modernité est souligné avec cette stabulation libre pour répondre dans l'urgence à un cas sanitaire.

Il se remémore sa scolarité, débutée à 5 ans avec une jeune institutrice dont « la blouse à carreaux inspire le respect ». Ses années porte-plume, pupitres en bois avec les encriers mythiques et odeur de cire, les ardoises pour le calcul mental, le Bled, le stress avant les compos, la caisse en bois du bibliobus toilettes à la turque, le préau, « témoin de ses difficultés à la corde », le « no man's land ». Et la morale du jour en haut du tableau noir. Les sorties nature qui ont dû déclencher chez le jeune écolier le goût de l'observation lors de la constitution de planches d'herbier.Epoque où on distribuait des bons points et des Prix au 14 juillet ! L'excitation est à son comble quand la fête foraine s'installe avec sa rotonde pour le bal du soir. Les vacances d'été sont occupées à garder les vaches, aux moissons ou à partager un temps la vraie vie des scouts : la veillée,le feu de camp, le jeu de piste. Clin d'oeil à Rimbaud avec «  les dormeurs du Val » Roblot.

Le garçonnet nous dépeint la maison-dortoir, sans âme », qui n'avait pas l'eau courante. le broc, le seau d'aisance étaient utilisés. le jeudi est un jour favori avec le passage du facteur et la livraison du Fripounet. Les ados lisent Salut les copains. La radio, les jeux (nain jaune) occupent les soirées.
Il ne manque pas d'humour pour décrire l'arrivée de la machine à laver et son cadeau en bonus ( « un vulgaire volatile »)!
Les dimanches, regarder la télé chez les voisins, était l'ultime récompense.

Dès 9 ans, il lui arrive ( au printemps) d'accompagner ses parents pour une journée d'affouage, le vocabulaire relatif au travail du bois n'a plus de secret (« rins, chevalet, bique, ces auxiliaires du bûcheron »). Il se souvient de déjeuners champêtres troublés par un pigeon ramier.
Il nous fait redécouvrir les métiers d'antan, comme le maréchal-ferrant dans sa forge, utilisant «  tricoise, dégorgeoir, mailloche... ». Quel «  spectacle féerique » d'assister à tous ces gestes pour ferrer leur canasson dans l'atelier où résonne «  une symphonie ferrique » et où somnolent des outils obsolètes. Autre profession évoquée : « le puisatier sourcier » et sa baguette de noisetier.
En relatant le destin de Coco, la corneille apprivoisée, le narrateur souligne l'intelligence de ces corvidés et dénonce les chasseurs en pastichant La Fontaine !
Côté distraction, il y avait les spectacles de la troupe d'amateurs, à l'initiative d'un instituteur,Michel Moyne, caricaturiste reconnu qui avait comme objectif de fédérer les jeunes.

L'entrée en sixième, ce saut dans l'inconnu lui sera source d'angoisse. La visite du nouveau collège en fin d'année de primaire n'était pas encore instituée. Une première journée qui se solde par la disparition de son cartable, le bus raté, le retour à vélo et qu'il veut « enkyster » !

Il retrace aussi son parcours religieux depuis son baptême, les cours de catéchisme, la retraite jusqu'à sa profession de foi avec ce moment solennel, tous en aube et le traditionnel cadeau.
Le presbytère leur réservait des surprises quand il devenait « le salon télé ».

Dans son hymne à Longpré, il relate la métamorphose du village, avec l'arrivée de l'eau sur les éviers calcaires, la construction d'une nouvelle école, d'une nouvelle mairie. Bayel est encore «  un pays de verriers », La cristallerie a encore des beaux jours.

Les précisions météorologiques sont intéressantes à l'heure du dérèglement climatique, comme ce septembre 52, avec des vents violents et 5 degrés.


« Nul ne guérit de son enfance », ainsi s'achève le premier tome qui couvre les quatorze premières années de Gérard Coste. Des souvenirs empreints de nostalgie, teintés de poésie, ponctués de références littéraires ainsi que le portrait de quelques familles paysannes. L'humour s'invite pour le bonheur du lecteur ! Comme Mario Rigoni Stern l'affirme : « L'endroit où l'on a passé une période sereine demeure dans la mémoire et dans le coeur toute la vie ». Les adieux sont difficiles, mais le narrateur y reviendra souvent et pourra recueillir les témoignages du passé.
Qu'en a-t-il été pour la suite, une fois ado ? La réponse est dans le deuxième volet qui a vu le jour cet été 2021, intitulé : « Le village au coeur rouge ».

(1) NATURE HUMAINE de Serge Joncour, Flammarion
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Le bonheur est dans Longpré.

Un récit entre témoignage historique, ethnographie, tableaux poétiques, recueil de
saynètes… Au début, on ne sait pas. On avance pas à pas. L'auteur est timide. Il n'ose
pas encore imposer son style. Il joue avec les jeux de mots, les références littéraires,
les adages populaires, emprunte aux autres poètes. On le regrette un peu, parce que
c'est trop modeste, trop en retrait, trop convenu (peut-être trop facile)… Et puis, il
y a ces photos qui imposent un style : celui de l'ethnographie. L'auteur se cache
encore : « Ce que je vous dis est vrai, la preuve, regardez la photo. » Il plaque le vrai
sur son réel à lui, comme s'il voulait se maintenir à distance, nous maintenir à
distance.
Pourtant ! Pourtant !
Pourtant, il ne va pas y parvenir. Ou plutôt, il va parfaitement parvenir à nous
toucher, nous prendre par la main, nous émouvoir. Plus il progresse dans son récit,
plus il nous fait oublier les photos et les jeux de mots trop convenus. Non. Tel un
perce-neige, il jaillit de dessous la neige. C'est un jaillissement poétique, un rythme,
une peinture. le trait du pinceau est de plus en plus sûr. Par touches, il nous touche
au plus profond. Il creuse dans la terre riche de son souvenir, pour révéler l'humanité
universelle. C'est là, c'est puissant, vibrant, du vivant charnel, de l'émotion
magnifique.
Enfin, on est pris dans la danse, on tourne les pages avec un appétit qui ne se dément
plus. On aime ce gosse. On aime ces gens. Ces personnages à la Maupassant. Ce pays,
ces duretés et ses drôleries. Sa poésie infinie. On aime surtout ce gosse sincère,
curieux, si merveilleusement observateur, sensible, poète déjà. Et quand on connait
par avance le métier qu'il se choisira, on comprend tout son amour pour la vie et la
terre, pour ces petits miracles de la vie de la plante, de l'animal, et même de la pierre
et son récit de vie. Par les yeux et tous les sens, l'enfant a capté le monde : le geste
ancestral, les odeurs du monde depuis toujours, la lumière et la nuit, le froid et le
chaud de la nuit des temps. Il est dans le monde, en son centre. Longpré-le-Sec est
au centre du monde : théâtre des rapports humains, mi-comédie, mi-tragédie ; lieu
des transformations qu'apporte le progrès technique, lieu de l'évolution des
mentalités ; lieu de l'enfance en souffrance, en espoirs, en émerveillements, en
promesse d'amour et de liberté ; lieu de vie, creuset de la vie.
Alors on tourne la page, vite, pour ne pas perdre le fil de l'écriture, pour ne rien
perdre de l'émotion, du battement de coeur que procure à la fois la poésie du style,
de plus en plus assuré, et l'humanité mise à nue. On zappe les photos. Surtout qu'elles
ne viennent plus perturber l'imaginaire, le récit du conteur ! (Peut-être aurait-il été
préférable de toutes les regrouper au centre ou à la fin du livre, afin de nous laisser
le choix d'aller les voir ou non, au moment où nous l'aurions voulu, pour laisser le
texte, tous ces petits chapitres à la fois théâtraux et poétiques, intactes et pleinement
assumés comme oeuvres littéraires.)
Ce récit d'enfance est une parfaite réussite. C'est-à-dire qu'il laisse des traces,
imprègne son lecteur qui poursuit, bien après avoir refermé le livre, le chemin doux-
amer, tendre et émerveillé, bercé encore par la poésie d'un enfant que l'adulte a su
retrouver et transcender.
On n'espère qu'une chose : qu'il poursuive son oeuvre, sans plus de retenue ou de
réserve, en toute confiance dans l'éveil d'un style, dans la beauté d'une plume, dans
la naissance d'un auteur. On veut encore fréquenter cette âme sensible, cet être en
devenir qui vient de déployer devant nous ses premières branches aux feuilles
tendres, fragiles encore, que le vent agite cruellement ou doucement. On a senti déjà
combien la sève donnera de force à cet arbre-là.
La suite, s'il vous plait, monsieur Coste ! Les notes sont belles, d'autres mélodies
encore, je vous prie !

21 juillet 2018,

Sandrine le Mével Hussenet
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Petit village,perché à mi côte d'une colline,là où commencent les près et les chènevières et finissent les vergers et les terres,où chaque saison y laisse ses empreintes de couleurs, d'odeurs et de sons.
Quand je retourne là bas et que j'aperçois du plus loin son fin clocher d'ardoises grises, son coq et sa croix,tant de musiques me grisent ...............
Merci cher Gérard pour votre livre et tout ce qui s'y cache.
Je vous reconnais quelque part pour frère d'armes.

G.G.B
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Le champ , espace de liberté, une grande cour sans barrières où l'esprit vagabonde en donnant libre cours à la douce rêverie et à l'imaginaire. Le champ territoire partagé, où les mulots champêtres n'en finissent toujours pas de creuser des galeries, et les grandes sauterelles vertes, en sauteuses accomplies, de battre des records.
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