J'avais beaucoup aimé ce livre que j'ai lu étant étudiant. C'était rafraîchissant.
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J'ai la bouche fendue jusqu'aux oreilles. Pas même un sourire de la part de Garneau. Ça plutôt l'air de l'embarrasser. Il se fait aller nerveusement les pieds en dessous de son bureau. J'ai soudainement l'impression de lui faire perdre son temps. D'un signe de tête, je demande à Batman et Robin de sortir.
"Ensuite?" qu'il me demande sur un ton d'impatience.
"Bon, ensuite il y a un numéro musical."
"Vous avez la partition?" qu'il me crie presque.
"Mieux que ça, j'ai la pièce sur cassette. Vous avez qu'à utiliser mon walkman." Il fronce les sourcils, complètement dépassé. Je lui passe l'appareil. Maladroitement, il se met les écouteurs sur la tête. "Vous avez qu'à appuyer sur le contact."
Même sans rien entendre, je sais que la pièce vient de commencer. Pas cinq secondes qu'il se met à grimacer, à cocher la tête. Je sais pourquoi: pas de violon ni de flûte ni de clarinette, mais un synthétiseur, une guitare, de la basse et une batterie avec Batman qui gueules derrière.
Au bout de vingt secondes, il enlève le casque d'écoute. Il pousse un long soupir.
"Qu'est-ce que c'est que ça? Vous savez bien que je peux pas vous laisser faire ça dans cette école." Il lève les bras en l'air. "Ça sort bien trop des cadres."
"Écoutez, monsieur Garneau, vous vous attendez pas à ce que j'en fasse un opéra XIXe siècle. C'est Batman!"
Il hoche la tête.
"Pourquoi faut-il que chaque année vous m'arriviez avec des projets sans queue ni tête?"
"Sans queue ni tête?"
"Vous savez de quoi je parle."
Il fait allusion à ce quatuor d'égoïnes que j'ai placé dans un concert. Ça l'avait complètement exaspéré. Sans queue ni tête ça s'appelait. Garneau qualifiait cela de "terrorisme musical".
"Je trouve pas ça sérieux", qu'il dit.
"C'est tout ce qu'il y a de plus sérieux."
"Nom, c'est du Pop et je peux pas vous laisser faire ça. J'ai des comptes à rendre moi, dans cette école."
"Qu'est-ce que vous avez tous contre le Pop?"
"On n'est pas ici pour former des musiciens pop."
"Pourquoi pas?"
"C'est pas de notre compétence."
"Quelle est votre compétence?"
"De former des musiciens."
"Bollocks!" que je ne peix pas m'empêcher de dire.
"Quoi?"
"No luck", que je dis en reprenant. Pour un instant, j'ai oublié qu'il a fait une partie de ces études à Londres.
"C'est dommage mais je n'approuve pas votre projet."
"Donc plus d'heures de studio?"
"Y'a des projets plus importants qui requièrent l'utilisation du studio."
"Gros épais!"
Je ramasse mon sac et sors en faisant craquer la porte. "Terroriste!" qu'il me crie de l'intérieur.