Dans un premier temps, je montrerai que la science, bien que factuellement plurielle, peine à se penser et à se vivre comme le lieu d'expression d'un véritable pluralisme. Je proposerai une façon d'identifier, de reconnaître et de penser le pluralisme. Je proposerai une façon d'identifier, de reconnaître et de penser le pluralisme dans les sciences, et je donnerai quelques exemples de la difficulté actuelle à faire vivre ce pluralisme. Ma contribution s'inscrit dans le cadre d'une recherche sur les caractérisations épistémologiques du pluralisme dans les sciences, notamment pour dépasser l'impasse liée à l'aporie des critères de leurs démarcations et les pièges du relativisme épistémologique.
Dans un second temps, j'évaluerai une conséquence directe de cette reconnaissance du pluralisme dans les sciences. Puisque nous avons des pluralités, puis la science se compose dans sa diversité, alors les scientifiques et la communauté scientifique opèrent - à chaque étape du processus de production et de transmission des connaissances - des choix selon des critères, des valeurs, des intentions. Ces critères, valeurs et intentions structurent ainsi le pluralités scientifiques. A partir de ce constat, je m'attacherai à discerner trois concepts que l'on mobilise souvent de façon indifférenciée à propos des sciences: les concepts de neutralité, d'autonomie et d'impartialité. A cet effet, je souhaite démontrer que la pertinence du savoir scientifique, terme qui sera alors préféré à celui de robustesse, est compatible avec l'abandon de l'idéal de science unifiée, neutre et autonome, et que cette pertinence n'est pas seulement épistémique mais aussi autant sociale qu'éthique.
Dans un troisième temps, je proposerai une perspective issue de ces deux premiers développements et dont la portée est éthique. Cette perspective, c'est l'émergence d'un nouveau type de responsabilité à propos des savoirs: la responsabilité épistémique. Je proposerai quatre caractéristiques de cette notion en essayant de montrer en quoi elle est adaptée à ce qui fait le commun à toutes les sciences contemporaines: leur nécessaire implication. Penser la responsabilité d'une science plurielle, c'est finalement construire une épistémologie pour des sciences impliquées.
Pour résumer, tout mon propos tient en trois questions: comment penser la science au pluriel? Que faire de l'idéal de la science neutre et autonome? Ce qui équivaut à se poser la question de la place et du rôle des valeurs dans les sciences. Devant quel type de responsabilité sommes-nous dans ce nouveau paysage?
Les connaissances scientifiques ne sont pas neutres, elles sont porteuses d'un certain nombre de déterminations, qui peuvent devenir des normes pour l'action. C'est de notre responsabilité collective de les expliciter.