Dans le manoir du vague à l’âme, y a plus de date, y a plus de jour, on nage dans du gris, dans du morne, aussi la pensée de filer un petit coup de saveur sur l’extérieur me comblait d’aise !
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Je n’en connaissais pas long sur sa pomme, mais je savais déjà qu’il était plutôt laconique. Il parlait pour dire des choses essentielles, à part ça il réservait ses pensées pour son usage personnel, et du côté gamberge, ça devait pas chômer sous son cuir !
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Ce qui me surprenait le plus, c’était l’espèce d’aisance avec laquelle j’étais devenu un tueur. Avant cette affaire, je me cantonnais dans les demi-sels, capable de peu... Et maintenant j’avais une assurance terrible. Je semais la mort à pleine paluche, sans sourciller, avec sang-froid.
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— Tu as donc vu ce que je suis devenu ? Ah ! tu m’as collé une sale habitude, Emma... Maintenant je tue comme je respire, sans plus réfléchir à mon acte que lorsque je recrache du gaz carbonique, tu comprends ?
— Il y a une chose que je comprends, m’a-t-elle dit, c’est que tu étais un tueur. Et cela, nous l’avions compris tout de suite...
— Qui nous ?
— Nous... Je n’ai pas insisté. Elle a repris.
— On naît tueur, Kaput... C’était ton cas. Tu ne t’en doutais pas. C’est peut-être moi qui te l’ai fait comprendre, mais mon rôle est peu de chose... Tu l’aurais compris tôt ou tard
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C’était pas un compliqué. Il aimait la vie et, par conséquent, l’imprévu.
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Un moment j’ai eu envie de retourner draguer dans Bologne pour remettre la pogne sur la fille. C’était la réaction normale. Elle l’aurait senti passer, cette espèce de sale bidoche de talus ! J’allais lui aérer un peu les tripes ! Mais à seconde vue – et c’est toujours la meilleure – j’ai abandonné le projet parce qu’il était duraille à réaliser.
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C’était comme si tout recommençait... J’étais un nouvel homme, surgi des limbes sanglants de mon passé. Maintenant ça allait changer, sans devenir honnête – à l’impossible nul n’est tenu – je saurais bien m’organiser pour gagner mon steak quotidien avec mon cerveau et non pas avec un pétard, car les pétards font trop de bruit.
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Je ne me sentais pas la passion du jeu. Ça ne m’excitait pas plus qu’une simple belote dans un quelconque café du Commerce. Le jeu c’est l’aventure des petites gens, leur dispensateur d’émotions fortes. Il n’avait pas de prise sur moi. Un morphinomane n’est pas accessible à l’aspirine.
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Les truands de mon espèce sont seuls, depuis toujours et pour toujours... Comme tous les hommes seuls, ils ont froid, ils ont peur. Alors ils cherchent à faire payer ces désagréments aux paumés qui les entourent...
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— Sa seule imprudence, c’est moi. Il y a toujours un moment où le sexe domine la raison.
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On bouillave avec une donzelle et, de ce fait, on croit qu’elle vous appartient ! Rien n’est plus illusoire. Rien n’est plus faux. Une femme n’appartient qu’à elle-même, qu’à ses caprices... C’est souvent au moment où elle cède qu’elle est le plus loin de vous
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Je lui ai porté un coup terrifie sur la glotte. C’est radical et je vous le recommande. Ne perdez jamais votre temps à chercher d’autres points vulnérables. Rien de tel que ce parpaing dans le diapason pour rendre quelqu’un fabuleusement docile.
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Quand la direction change, on renouvelle aussi les cadres.
Mon nouveau meurtre ne m’impressionnait que par son côté destin. Autrement ça allait pour le chapitre conscience. Ma parole, je commençais à prendre l’habitude.
Y a des mecs qu’ont du fion et d’autres qui n’en ont pas. En général c’est tout l’un ou tout l’autre.
Appelle-moi Kaput, si tu tiens tellement à me coller un blaze…
*RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE* :
San-Antonio, _Réflexions définitives sur l'au-delà,_ morceaux choisis recueillis par Thierry Gautier, Paris, Fleuve noir, 1999, 120 p.
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