Mussolini demeurait extrêmement réservé. Bien entendu, il avait chaudement félicité son ami. Bien entendu, il avait manifesté sa réprobation de l'attentat. La politesse l'exigeait. Mais je compris bien, en le voyant vider d'un trait un verre de cognac, que toutes ces paroles et le calme inquiétant de son hôte, le mettaient mal à l'aise. Il voulait s'en aller. Discrètement il parla de départ.
Manifestement il connaissait son ami Hitler mieux que nous tous, car ce fut l'étincelle dans le tonneau de poudre. Le grand monologue commença. Jusque-là, Hitler, légèrement voûté avait écouté sans rien dire. Soudain il se dressa.
Ce fut le seul éclat terrible auquel j'ai jamais assisté. Il se comporta comme un dément, criant vengeance contre ses adversaires et leurs familles, réclamant du sang, exigeant l'extermination.
En revanche, Himmler était absolument sans pitié, non pas au sens d'un tortionnaire qui se vautre dans le sang de ses victimes ; il n'agissait pas personnellement, laissant ce soin à ses séides.
Il était profondément imbu de sa droiture personnelle, de l'exemplarité de son mode de vie, de l'inébranlabilité de ses principes et de ses conceptions. C'était ce qui le rendait si dangereux.