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EAN : 9782072627231
528 pages
Gallimard (23/08/2018)
3.69/5   39 notes
Résumé :

La Roumanie vient tout juste de se libérer de son dictateur. Les portraits du camarade général ont été brûlés dans la cour de l'internat où Emma, treize ans, arrivée après la mort tragique de ses parents, cherche encore à s'orienter.

Quand une inconnue se présente comme étant sa grand-mère, elle n'a d'autre choix que de la suivre dans sa ville natale. Cette femme étrange partage sa maison avec l'esprit de son mari défunt et pratique la sorcel... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
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C'est un livre à l'image des peuples de l'Europe de l'Est. du moins à l'idée que je m'en fais car leur culture m'est étrangère.

Aux antipodes des épanchements larmoyants de la littérature francophone, la distance et la pudeur dans l'expression des sentiments font de ce roman une expérience de lecture étrange. Je n'en mesure probablement pas toute la portée littéraire.

Par contre, je suis certaine d'une chose ... ce livre m'a touchée.
C'est beau, c'est émouvant. C'est l'histoire d'une grand-mère et de sa petite-fille Emma qui s'apprivoisent, la première n'ayant appris l'existence de la seconde qu'après la récente mort tragique des parents.
Et dans la Roumanie post Ceausescu, cette adolescente doit apprendre à se reconstruire dans un environnement qu'elle ne connaît pas. Elle doit se faire une place parmi les pestes de sa nouvelle école, passer le cap des premiers amours et faire face à la hargne incompréhensible des habitants du village envers son grand-père décédé et sa grand-mère un peu sorcière.

C'est un livre où il ne se passe rien de fracassant avant les 50 dernières pages. On a l'impression que ce sont des tranches de vie juxtaposées. Les gestes ancestraux se transmettent à nouveau à travers la tarte aux prunes et les beignets au paprika. Les anicroches quotidiennes sont l'occasion de parler des blessures, des joies et des peines, de tous ces moments qu'une famille est censée partager quand les liens ne sont pas rompus. .

L'écriture est sans fioriture, factuelle. Moi j'ai choisi d'y voir l'expression d'une mentalité , d'une culture, d'une manière d'exprimer les sentiments complètement différente de la nôtre.
Il y a dans le style de l'auteur (et de la traductrice) la retenue d'un peuple pour qui trop parler était synonyme de danger.
Sans doute, nous qui vivons dans un pays où la parole est libre, ne mesurons pas à quel point ce roman doit faire écho aux personnes qui ont vécu sous une dictature, à la merci permanente de la police secrète.
Ce livre m'a permis d'approcher ce que fut l'après-dictature de Ceausescu. Et ce n'est ni plus facile ni plus propre que ce que fut l'après-guerre chez nous. Les rancoeurs, les questions restées sans réponse, la difficile acquisition de la liberté sont malheureusement internationales.
L'auteur m'a emmenée au coeur de son peuple, là où les blessures de l'histoire saignent toujours avec l'espoir d'un avenir meilleur dans une société plus égalitaire.

Si vous arrivez à dépasser le dénuement apparent de l'écriture, si vous vous laissez porter par l'histoire lovée entre rêve, imagination et réalité, alors vous apprécierez.

Pour ma part, la dernière page refermée, je sais que je viens de terminer un livre particulier, situé hors de ma zone de confort littéraire, mais je sais aussi que je viens de refermer un grand livre.
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Dans le contexte historique très particulier de l'immédiate après-révolution roumaine de 1989, une adolescente prénommée Emma raconte sa vie presque ordinaire auprès de son étrange grand-mère. Dans son village on dit que la vieille femme est folle. Elle pratique en effet de curieux rituels qu'elle enseigne avec bienveillance à sa petite fille. Toutes deux sont endeuillées et hantées par un passé (récent pour l'une et beaucoup plus ancien pour l'autre) qu'elles n'arrivent pas à balayer. Au contact l'une de l'autre, la parole va se libérer pour les aider à surmonter la douleur.
Derrière le portrait d'Emma, se profile celui d'une société marquée par les violences d'un régime totalitaire. Les séquelles sont profondes mais la mutation est en cours. Pour la jeune fille et son aïeule, tout comme pour le pays, il est temps de se reconstruire sur les cendres du passé.

J'ai trouvé ce roman aussi singulier que captivant. Singulier par la façon dont Emma s'exprime; simple et directe, presque plate, convenant parfaitement à son jeune âge mais qui devient riche et très précise quand son imagination l'emporte au-delà du visible. Et captivant par l'introduction de la magie, encore très vivace en Roumanie, le seul pays d'Europe à reconnaître officiellement la profession de sorcière.

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Étrange, oui, c'est l'adjectif qui me vient quand je tente de définir ce long et lent roman de György Dragomán, grand écrivain hongrois encore peu connu en France. Oui, étrange et beau. Envoûtant même, si l'on accepte de s'y plonger, de prendre son temps, de s'habituer à cette prose toute simple et à cette quasi-absence d'événements, à ces mille petits gestes racontés avec beaucoup de précision et au présent.
Les drames ont eu lieu et l'on arrive après : le camarade-général Ceaucescu (devine-t-on, car son nom n'est jamais cité) vient de mourir et l'on brûle rapidement ce qui appartient à ce temps maudit, les yeux résolument tournés vers l'avenir.
Mais il faut se relever du communisme, panser les plaies de la dictature, se reconstruire après des années de totalitarisme, réapprendre à vivre dans un pays avide de liberté, d'ouverture. On met le feu aux portraits des généraux et l'on tente de construire du nouveau sur des cendres encore chaudes et de terribles souvenirs qui hantent encore les esprits. Il est impossible d'oublier, et le passé resurgit constamment à travers les voix des vivants, des témoins, des familles meurtries à jamais.
Emma, jeune narratrice âgée de treize ans, vit en pension depuis que ses parents sont morts dans un accident de voiture. Un jour, une vieille femme se présente : elle dit qu'elle est sa grand-mère et souhaite que sa petite-fille reparte avec elle. Emma suivra cette inconnue, une femme étrange qui s'adonne à des rituels mystérieux et semble avoir quelques pouvoirs magiques dont elle se sert régulièrement pour mettre à mal les importuns. Qui est cette femme ? Une sorcière, une déséquilibrée ? Ou bien une grand-mère folle d'amour pour le seul être qui lui reste au monde : sa petite-fille ?
Comment la jeune fille va-t-elle réussir à partager sa vie avec une sorcière et un grand-père fantôme ?
Nous découvrons le monde avec les yeux d'Emma, étrangère à tout ce qu'elle voit et entend, essayant comme elle peut de comprendre qui est cette grand-mère, pourquoi elle s'est fâchée avec sa fille, la mère d'Emma, au point de ne jamais la revoir.
La jeune fille tente de deviner ce que cette aïeule a vécu, ce qu'elle a fait pendant le régime de terreur et pourquoi son mari, le grand-père d'Emma, est mort. A-t-il été un mouchard comme certains le disent, s'est-il suicidé ? A-t-il vraiment connu les camps de travail, de rééducation, l'a-t-on obligé à balayer les rues et à oublier son métier de chirurgien ?A-t-il été tué par la police secrète comme certains le disent  ? Qui ment ? Qui dit la vérité ? Et d'ailleurs existe-t-il une vérité et si oui, qui la détient ?
Emma tentera de comprendre, de déchiffrer ce monde opaque, terni par des années de dictature, mais sa grand-mère parle peu. Il faudra à la jeune fille beaucoup de patience pour amener cette vieille femme à se libérer d'un poids trop lourd pour elle. Il faudra à Emma beaucoup de temps, de gestes, de silences pour que se dégèlent les mots de sa grand-mère et qu'ils sortent enfin...
Le bûcher est un roman d'initiation, d'apprentissage : Emma, en observant les gestes de sa grand-mère, va acquérir certains pouvoirs qui vont l'aider à modifier le réel s'il lui déplaît, à moins que cette magie dont elle use ne soit que le fruit de sa volonté, une volonté farouche, inébranlable, un désir puissant de vivre et de profiter de la vie.
Folie, poésie, sensualité se taillent la part belle dans ce roman, que ce soit quand Emma regarde sa grand-mère dessiner des cercles, des spirales dans de la farine ou bien lorsqu'elle assiste à la confection d'un strudel. Souvent, le merveilleux s'introduit dans le réel : les objets semblent avoir une vie propre… En effet, une cuillère en bois peut remuer toute seule une marmite de confiture de prunes ! L'évocation d'un fait sans importance de la vie quotidienne peut soudain basculer dans la fantaisie, le fantastique, le surnaturel et déboucher sur un univers onirique et halluciné. On a parfois l'impression d'être dans un conte : chaque chapitre nous raconte un petit moment de la vie des deux femmes autour d'un motif précis. Dans ce petit village loin de tout et où l'atmosphère est extrêmement pesante, on sent que chacun s'épie, se soupçonne du pire ou, au contraire, regarde l'autre avec bienveillance et amour.
Le bûcher est aussi et surtout l'histoire d'une renaissance : celle d'un pays, symbolisé ici par une jeune fille, Emma, qui va, grâce à sa grand-mère, grandir, mûrir, prendre de l'assurance, devenir une femme forte et volontaire, porteuse d'avenir. La façon dont l'une va éduquer l'autre (et réciproquement!), la complicité qui naîtra entre les deux femmes et l'amour qui les liera à jamais donneront à chacune d'elles une telle force qu'elles en sortiront l'une et l'autre grandies, plus libres et susceptibles d'être heureuses, enfin.
Emma devra tout apprendre. le pays où elle vit aussi. de tâtonnement en tâtonnement, de douleur en douleur, Emma deviendra une femme et pansera ses plaies tandis que le pays s'ouvrira sur une ère nouvelle. Il faut du temps. Chaque geste compte, chaque parole aussi. C'est précisément ce que le livre nous montre : que tout se fait dans la douleur, la peur, le doute mais aussi l'amour, la complicité et la confiance.
Tout repousse, les cendres sont un très bon engrais, les jardiniers le savent. La grand-mère d'Emma le savait certainement, elle aussi.
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Une adolescente de 13 ans vient vivre chez sa grand-mère après le décès de ses parents.

La Roumanie vient de se débarrasser de son triste dictateur et l'heure est aux cruels souvenirs des exactions et des disparus du communisme. Comme après toute libération, on stigmatise les individus, les vengeances et rancoeurs macèrent et la petite orpheline devra comprendre, guérir, grandir et se dégager de cet héritage nauséabond.

Si le parcours d'Emma est assez touchant, l'écriture a été pour ma part un vrai chemin de croix: des phrases méticuleusement descriptives dans leur banalité, un excès de pronoms personnels pour une narration au présent (je fais ci, je fais ça, il fait, il fait ça, ...). La lecture en est très alourdie.
Est-ce une manière de se mettre à hauteur d'enfant pour raconter? Pour appuyer le sentiment d'une ambiance lourde où la mort est souvent présente?

Un roman d'apprentissage adolescent et de résilience. Un roman à clés qui désarçonne par ses interprétations d'une réalité historique à peine suggérée.

La magie participe à cette étrangeté, y apportant la seule note de fantaisie, mais je suis hermétique (aussi ;-) à cette thématique.
Je reconnais être complètement passée au large...
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La vieille dame dit qu'elle est sa grand-mère et qu'elle est venue la chercher. Pour elle, Emma est un cadeau du destin, elle n'a plus personne, elle n'a plus que sa petite fille. Emma a perdu ses parents dans un accident de voiture, c'est pour cela qu'elle se trouve dans un orphelinat. Son grand-père s'est pendu, il n'était qu'un sale mouchard, une pourriture, un lâche jusque dans sa façon de mourir. Tout le monde sait que sa grand-mère a passé des années dans un asile de fous. le camarade général Ceausescu est mort d'une balle dans la tête, mais la violence peut éclater à tout moment, car le passé inachevé est toujours très vivant. Pour Emma la seule chose qui compte c'est de savoir la vérité. Petit à petit, sa grand-mère va la lui raconter.

Un récit conçut comme un journal intime, un roman qui est à la fois une histoire de famille et un tableau historique des années de dictature, la police politique, les dénonciations, les fusillades et les corps qui disparaissent. L'auteur fait aussi référence à la Seconde Guerre mondiale et à l'Holocauste. L'auteur utilise une écriture dense, mais simple, tout est vu à travers les yeux d'une orpheline solitaire. Une jeune fille et sa grand-mère un peu sorcière nous raconte la Roumanie d'après Ceausescu et la difficulté d'oublier cette période noire. Un récit fait de courtes phrases avec des descriptions détaillées comme dans un scénario cinématographique.

Je dois reconnaître que je me suis parfois perdu un peu dans ce récit où la réalité se mélange aux rêves et à la magie, où passé et présent s'entremêlent.

« On ne peut raconter les choses douloureuses que si celui qui écoute a l'impression d'avoir lui aussi vécu la même chose, la même histoire. »
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critiques presse (3)
LeDevoir
12 novembre 2018
Roman d’apprentissage puissamment évocateur, campé dans un monde qui bascule et où règne le gris, mais dans lequel persistent le mensonge et la dissimulation, Le bûcher nous fait avancer à tâtons au fil d’une narration immersive et monologuée, où semblent s’incarner de manière crédible les premières heures complexes de liberté roumaine.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
LaCroix
26 octobre 2018
Le désastre roumain éclate à travers le récit fantastique et réaliste d’une jeune fille au sortir du communisme. Un grand roman juste, puissant, envoûtant.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LeMonde
31 août 2018
Mais ce ne serait pas rendre justice à cet ample projet littéraire que de le réduire au cryptogramme d’une situation politico-historique. Non seulement le roman tire sa force de lui-même et pas de ses références, mais il envoûte par le mélange de beauté sensuelle des objets éminemment animés.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
«  Je revois le verre se briser et la prof cracher sur le portrait du camarade général et le tirer de son cadre tout en criant : c’est fini, c’est terminé , plus jamais ça , à cet instant nous nous sommes toutes levées , et nous avons repoussé les chaises sur lesquelles nous étions assises, à l’origine pour regarder ensemble le camarade général prononcer son discours de vœux du Nouvel An , mais là, on s’est mises à courir en se bousculant pour s’approcher de la télé , et on a hurlé : c’est fini, c’est fini à jamais , et on a arraché des murs les drapeaux et les panneaux d’inscriptions en lettres rouges , et puis le visage du camarade général est apparu à l’écran , le teint cireux couvert de sang, il gisait dans la neige boueuse » .
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On ne peut raconter les choses douloureuses que si celui qui écoute a l'impression d'avoir lui aussi vécu la même chose, la même histoire.
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La douleur nous aide à nous souvenir, non seulement des choses douloureuses, mais de tout, car il faut se souvenir de tout, ce dont nous nous souvenons existe, mais ce que nous oublions n’existe plus, disparaît du passé, disparaît du monde.
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les filles disent que je suis une petite pimbêche, que je suis ridicule, la façon dont je n'arrête pas de me tortiller les cheveux montre que je me crois belle, alors que je suis moche comme un pou, et que je vais devenir de plus en plus moche, il n'a qu'à regarder ma grand-mère, celle-là elle est tellement moche que rien que d'y penser on a envie de gerber.
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J’essaie de ne pas ma dire que tout ça n’a aucun intérêt, mais je sais très bien que cette foutue algèbre ne m’apportera jamais rien dans la vie, à part des migraines.
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