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sur 1053 notes
4, c'est bien sûr 1914 et les trois années qui suivent. Jean Echenoz a bien fait d'aborder le sujet en pleine période de centenaire de la Première guerre mondiale. Il le fait à sa manière, en s'attachant aux pas de jeunes hommes mobilisés, rassemblés avec toute la population par le tocsin : « Tout le monde avait l'air très content de la mobilisation : débats fiévreux, rires sans mesure, hymnes et fanfares, exclamations patriotiques, striées de hennissements. »
Ils sont partis. Charles (27 ans), Anthime (23 ans), Padioleau, Bossis, Arcenel, chacun son matricule. Marche, défilé, le train et Blanche, comme les autres femmes, les enfants, les vieux, est restée, attendant ce retour qui ne devait pas tarder...
Le moral baisse au fil des kilomètres, puis le capitaine Vayssière rassure : « Vous reviendrez tous à la maison… Si quelques hommes meurent à la guerre, c'est faute d'hygiène. Car ce ne sont pas les balles qui tuent, c'est la malpropreté qui est fatale et qu'il vous faut d'abord combattre. » Jean Echenoz, toujours de son style simple et efficace, très agréable à lire, suit ces hommes jusqu'à ce qu'ils entendent le bruit du canon.
Sur un ton presque enjoué, badin, en une description anodine, comme au cours d'une conversation, l'auteur décrit une des premières batailles aériennes, montrant au passage l'impréparation de nos avions et de leurs pilotes malgré leur grand courage.
Il n'oublie pas de revenir au pays pour nous montrer la vie qui se poursuit avec Blanche, l'usine de chaussures qui a du travail pour équiper l'armée. Cette armée, justement, où les hommes tombent, doit évoluer, remplacer le pantalon rouge trop criard, fournir une cervelière, sorte de calotte en acier, pour arriver enfin au casque en septembre 1915. Rien n'épargne les soldats, comme « les gaz aveuglants, vésicants, asphyxiants, sternutatoires ou lacrymogènes que diffusait très libéralement l'ennemi à l'aide de bonbonnes ou d'obus spéciaux, par nappes successives et dans le sens du vent. »
Terrible est la séquence où Arcenel s'en va seul, est arrêté par les gendarmes, traduit en conseil de guerre et fusillé le lendemain, pour l'exemple ! Enfin, il y a le retour d'Anthime dont il ne faut rien dire pour laisser découvrir une histoire qui se termine par une pirouette dont Jean Echenoz a le secret.


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"C'est l'affaire de 15 jours" affirme Charles, le dédaigneux sous-directeur de l'usine de chaussures Borne-Sèze, à propos de la guerre de 14 (d'où le titre) qui durera plus que prévu. "Toujours au courant de tout", ce "fringuant" photographe amateur laissera la vie dans une soit-disant planque, un avion de repérage mitraillé à mort.
Son frère Anthime, comptable dans la même entreprise de Vendée, plus lucide avec ses "ça on verra bien" y laissera un bras, dans cette chienne de guerre, mais y gagnera Blanche la promise de Charles (dont elle attend un enfant illégitime) et une médaille de guerre.
Jean Echenoz, romancier aux titres laconiques (Lac, Un an, Je m'en vais, Courir..) ne fait pas dans la dentelle dans ses récits non plus. C'est détaillé, mais clair, précis,aseptisé. Tout affect est mis à distance ce qui rend fort bien le côté inhumain de la guerre qui mobilise, embrigade,enfièvre, trompe, harasse,affame,assoiffe,frigorifie, ordonne,couvre de poux,censure,gaze,bombarde,tue,estropie,ampute,évacue,arrête,juge,exécute,désoeuvre,invalide... L'humour est cynique et Anthime "qui s'adapte toujours" va "s'accorder à lui-même que d'un côté" presque heureux d'être évacué sans plus de perte qu'un seul bras.
C'est l'absurdité de la guerre que Jean Echenoz nous décrit ici aussi car il n'y a pas d'échappatoire puisque les déserteurs sont fusillés. La crédulité et la joie sont palpables (ex: "Blanche est habillée comme pour un jour de fête", "c'était plutôt gai ce défilé") et l'auteur les oppose à l'enfer des tranchées.
Rien à voir avec Les champs d'honneur de Jean Rouaud où malgré le titre évocateur la guerre était à peine effleurée, mais plutôt avec (mais en moins sentimental) Mon papa en guerre: Lettres de poilus, mots d'enfants 1914-1918 de Jean-Pierre Guéno qui suit le quotidien de ces hommes souvent simples et non violents (14 s'attache également aux pas d'un bourrelier, un garçon boucher, un équarisseur) envoyés au front dans une guerre dont ils ne connaissaient ni les tenants ni les aboutissants.
Pourquoi les guerres? s'interroge-t-on après lecture!
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Jean Echenoz réussit l'exploit de nous raconter la Première Mondiale en seulement une centaine de pages. Nous suivons le quotidien de cinq soldats recrutés par l'armée française : Anthime, Charles, Arcenel, Padioleau et Bossis. L'auteur s'attarde sur les détails matériels et sur les mauvaises conditions d'hygiène pour nous faire vivre leur enfer. Il dénonce l'absurdité de ce conflit avec les sanglantes batailles qui permettent de gagner quelques mètres de terrain, pour les reperdre peu de temps après.
Un court récit mais un concentré d'émotions, on ressent la peur, l'ennui et l'effroi de ces cinq protagonistes. La qualité stylistique d'Echenoz donne à ce roman un pouvoir d'évocation supérieur à bien des copieux ouvrages sur la Grande Guerre.
Un roman instructif et bouleversant.
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Ce n'est pas un énième livre sur la Grande guerre – comme ceux qui fleurissent pour le centenaire.

D'abord il a été écrit en 2012. Ensuite, comme l'écrit lui-même l'auteur : « Tout cela ayant été décrit mille fois, peut-être n'est-il pas la peine de s'attarder encore sur cet opéra sordide et puant. »

C'est un livre presque intimiste qui a la guerre comme toile de fond, en toute sobriété.

N'hésitez pas à le lire. Cela ne vous prendra pas beaucoup de temps mais vous vous en souviendrez longtemps.
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Une centaine de pages noircies d'une écriture sublime et précise, suffisant pour nous éblouir et nous plonger au coeur, et surtout dans les corps, de la première année de la Grande Guerre. C'est bouleversant.

Une femme attend le retour de deux hommes partis à la guerre en laissant leur vie sur pause. le lecteur suit leur quotidien de poilu, un quotidien inconnu, plein de premières fois : personne ne sait comment la faire, la guerre.

Ce texte m'a beaucoup plu. Il arrive à mêler gravité et légèreté, l'un renforçant l'autre. J'ai bien aimé l'angle d'approche : partir des détails, parfois banals, du quotidien, une écriture presque en caméra épaule.




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Tout y est dans ce court texte de 125 petites pages : du tocsin de la mobilisation au retour des blessés à la vie civile.

Un condensé de guerre, comme le titre : "14", servi par de grandes phrases rythmées et essentielles.

100 ans après, ce livre respecte ce qu'ils ont vécu, de manière moderne.
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Avec ce langage un peu suranné qui s'accorde bien avec ce début du XXe siècle et avec une certaine pudeur, Jean Echenoz m'a captivée par cette brève histoire de jeunes hommes « motivés », enrôlés pour aller combattre, pour une courte période selon la croyance populaire, l'ennemi allemand. L'auteur nous décrit dans le détail le quotidien des soldats de l'infanterie, enlisés dans les boyaux des tranchées, avec pour seule perspective pour certains, des blessures abominables et pour d'autres, une mort certaine.
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Samedi 7 août 1914. Mobilisation générale. Bien sûr, on s'y attendait un peu mais pour Anthime, qui la veille roulait encore à vélo dans la campagne vendéenne, ce fut quand même soudain de se retrouver avec ses 4 camarades dans un train qui montait vers le nord. Et même si au départ, ils s'attendaient à ce que ça ne dure pas longtemps, il apparaît vite que la guerre va s'embourber, au propre comme au figuré.

Très petit par sa taille, 14 compense par la précision balistique de son vocabulaire. Saviez-vous que la cheviotte est la laine faite à partir de la tonte des moutons cheviot? Ou que la cervelière n'a été utilisée que quelques mois tant elle était impraticable? Moi non plus. Cette description si précise des petits détails de la grande guerre - avec nombres inventaires à la Prévert - permet de mettre une certaine distance entre les lecteur·rices et les atrocités vécues, aidée en cela par une légère touche d'humour et de fatalisme. Cela peut déplaire, ce manque de pathos mais pour moi, c'est ce qui fait la force de ce récit implacable. Une très belle trouvaille dans la boîte à livres!
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La première guerre mondiale en toute simplicité, vue en quelques pages, du côté de la lorgnette de ces simples soldats partis se battre en pensant qu'ils reviendraient bien vite à la maison. Et dans 14, Echenoz évoque les combats, les tranchées, les gaz asphyxiants, les membres mutilés, les désertions et les exécutions avec une telle nonchalance, une telle désinvolture, que tout cela semble tellement sans importance, comme si ce n'était qu'un mauvais moment à passer, et que ce qui compte au bout de toute l'horreur, c'est que la vie continue…
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Pour débuter ma découverte d'AudioLib, j'ai choisi ce court roman, qui dure quand même plus de 2h en format audio, lu par l'auteur lui-même. Les critiques étaient assez élogieuses et positives, je me suis donc lancé, en espérant ne pas être trop distraite pendant mon écoute...

Ce roman raconte les conditions de la Première Guerre Mondiale à travers plusieurs personnages, que l'on va suivre tout au long de leur périple. Il n'y a pas de personnage principal à proprement parler, car tous ont plus ou moins lur importance.

Jean Echenoz relate donc en détails toutes les horreurs que cette guerre a faite. Il explique les conditions de vie des Poilus dans les tranchées ; la saleté, l'alcool, l'oppression, les maladies, la censure des lettres, les obus qui tombent... en oubliant pas de rester un peu connecté avec le monde extérieur, avec l'arrière. Nous suivons donc des soldats envoyés au front, et les femmes et enfants (ainsi que tous les invalides et/ou hommes trop âgés) restés à l'arrière.
L'histoire est décrite avec vraisemblance, on a l'impression d'y être, de vivre dans ces tranchées, avec ces malheureux soldats.

J'ai lu le plaisir de découvrir ce livre via AudioLib, lu par l'auteur. Je trouve ce concept vraiment bien, car le fait d'écouter tout ces désastres au lieu de les lire, nous donne une sensation d'intimité. On a l'impression que quelqu'un raconte sa propre histoire, qu'un Poilus revenus de la guerre nous décrit tout ce qu'il a vécu.

Rempli d'émotions, ce livre de Jean Echenoz relate toutes les horreurs de la guerre, à travers les portraits de différents personnages, qui ont connus une fin tous différentes.
Lien : http://addictbooks.skyrock.c..
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