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3,81

sur 1056 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
14 de Jean Echenoz, c'est comme un petit caillou que l'on garde dans sa poche pour ne pas oublier, c'est un livre court qui parle intimement de la guerre. C'est tout l'art de dire avec une apparente distance et beaucoup d'élégance, l'indicible, l'horreur des tranchés. Un condensé de la nature humaine dans les situations les plus épouvantables, l'implacable mise à l'épreuve de soldats aux personnalités bien différentes. le courage et le hasard feront le reste… Jean Echenoz s'attache aux détails matériels, au poids des sacs, aux uniformes, aux rations, au climat, aux odeurs, aux poux à travers le simple récit de cinq jeunes hommes partis la fleur au fusil faire la guerre, tandis que Blanche attend le retour de deux d'entre eux.
« Reste à savoir s'ils vont revenir. Quand. Et dans quel état".
14 ans, c'est l'âge que j'avais lorsque mon grand-père est décédé à l'âge de 88 ans, sans jamais avoir rien raconté d'essentiel à propos des quatre longues années passées à se battre durant la première guerre mondiale. Je souffre de ne pas lui avoir posé beaucoup de questions et en lisant ce livre bouleversant, j'ai eu l'impression de reprendre le dialogue avec lui et les rares anecdotes édulcorées qu'il me racontait, comme dormir dans la neige.
Il faut dire que le style est magnifique, 14 est un coup de coeur.


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Jean Echenoz dans un style toujours aussi personnel, signe avec « 14 », un grand roman en allant à l'essentiel à travers le destin d'Anthime et de quatre camarades propulsé du jour au lendemain sur le front. Et puis, il y a Blanche, petite lumière au fond de la nuit.
Echenoz est épatant. En peu de pages, il réussit à décrire l'histoire d'un pays à travers ces personnages et l'incrédulité devant cette mobilisation générale.Il ne s'attarde pas sur l'horreur quotidien, il le dit d'ailleurs, d'autre l'ont déjà fait, non il nous raconte une histoire d'anonymes plongé dans une situation aussi absurde que terrifiante. Il mène son récit presque avec détachement avec ce talent incroyable de manier les mots. du travail d'orfèvre qui semble d'une simplicité enfantine. C'est ça la marque des grands.
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"Ca a débuté comme ça", comme l'écrivait Céline. Une cloche qui se met à sonner dans la campagne paisible, et voilà la mobilisation générale déclarée, en ce premier août 1914 dans un coin de Vendée comme partout en France. On va donc suivre Anthime et ses copains de pêche et de café, jeunes pioupious en partance (bien forcés) pour une guerre qui ne durera que quinze jours, et qui les enlisera dans les tranchées. Qui y restera, qui en reviendra, et dans quel état ?

Ce très court (et très dense) roman d'Echenoz est remarquable de causticité. L'auteur rajoute une pierre à la dénonciation de l'absurdité de ce premier conflit mondial. Sous son ton faussement détaché, on perçoit toute la fureur qu'il ressent à l'égard des états-majors irresponsables qui ont envoyé au carnage des centaines de milliers d'hommes, mais aussi son dédain envers les profiteurs de guerre industriels. La charge est très violente, et je l'ai trouvée jubilatoire et même précurseuse de celle de Pierre Lemaître dans "Au revoir là haut".
En outre, j'ai beaucoup apprécié l'aspect documentaire de ce récit. J'ai complété ma culture gé (découvrant par exemple que jusqu'en 1854, les chaussures ne distinguaient pas le pied gauche du pied droit), et j'ai surtout appris de nouveaux détails sur les avancées techniques en matière de destruction et les conditions de (sur-)vie hallucinantes des poilus. Echenoz raconte en effet la guerre à hauteur d'homme, employant souvent un "on" qui nous entraine dans la boue avec les soldats. C'est autre chose que Koh Lanta.

C'est donc un roman féroce et épatant, à l'ironie glaçante, plein de rage rentrée, et forcément impressionnant. Attachez bien votre barda et attendez-vous à être bousculés -mais au moins, vous en ressortirez vivants.
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14 c'est évidemment un roman sur la première guerre mondiale , que l'on avait appelée par après 'la der des der ' , le conflit qui devait durer 15 jours et puis bien sûr la suite nous la connaissons , l'enlisement du conflit , les innombrables morts , les blessés , mutilés , les premiers gazés .
L'auteur nous raconte la guerre de cinq hommes de la même région , ils viennent de Vendée et ce lien va lui unir , ils font un clan , enfin surtout quatre d'entre-eux .
Le cinquième Charles va être affecté à l'aviation sur les recommandations d'un ami , mais quand le destin s'en mêle , rien ne se passe comme prévu .
Nous assistons aux premiers pas de l'aviation militaire , aux premiers lancer de gaz , rien ne nous est épargné , la mort des animaux , les chevaux surtout , le chapitre sur le rôle des animaux pendant la guerre m'a paru très original , comme quoi un auteur talentueux peut encore nous surprendre .
Un texte assez court mais rien ne manque , pas une ligne inutile , pas de fioriture , une écriture dépouillée qui atteint son but nous faire revivre ces moments tragiques de l'humanité , pour ne pas oublier trop vite ces hommes qui ne sont pas nés à la bonne époque .
Une très bonne lecture et pour moi une découverte de l'auteur , grâce à Babélio
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“14” est un roman court mais dense. L'histoire est simple mais efficace pour qu'on s'y adonne d'emblée à fond.

Ce samedi 7 août, il faisait un temps merveilleux sur l'Ouest de la France. Une journée idéale pour une promenade à vélo, avec un bon gros roman sur le porte-bagages à savourer dans l'herbe en humant l'air de l'océan. Ainsi pensait Anthime. Mais nous étions en 1914, et ce jour-là, à quatre heures de l'après-midi, son destin bascula quand toutes les cloches du pays annoncèrent, sans le savoir, la fin d'un monde. Nous connaissons la suite : ils partirent "la fleur au fusil" sûrs d'être de retour au plus tard à la Noël. L'arrogant Charles et le doux Anthime, qui se partageaient le coeur de Blanche, le naïf et distrait Arcenel et les sympathiques Padioleau et Bossis étaient de ceux-là. Dans cet enfer, la Camarde choisira, pas souvent avec discernement...

Ainsi se résume le livre de Jean Echenoz qui dit lui-même que sur la guerre tout a été dit et qu'il n'est pas besoin de s'appesantir dessus. Son livre n'est donc pas une grande fresque sur la guerre mais plutôt la "petite histoire" des soldats eux-mêmes. Pour cela Jean Echenoz s'est inspiré des carnets d'un appelé qui consignait jours après jours les petits évènements du quotidien dans les tranchées. La pluie, le froid, la faim, les ordres stupides des supérieurs et surtout l'ennui. le tout décrit dans une langue parfaite, avec minutie non sans une pointe d'humour, dans un style clair et magistral. Jean Echenoz signe un de ses textes les plus graves et les plus beaux. Un bref roman très fort.
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Ils partirent pour l'Est "la fleur au fusil" début août 1914, persuadés d'être de retour deux semaines plus tard, grand maximum. La suite, nous la connaissons : beaucoup de morts, de blessés, des déserteurs exécutés, des traumatismes chez les rescapés et les proches, la vie qui a continué à l'arrière, tant bien que mal, pendant ces quatre années - deuil, répartition nouvelle du travail entre les hommes plus âgés, les femmes, les adolescents...

Je me suis demandé sur plusieurs dizaines de pages pourquoi je lisais ce livre, ce que j'y apprenais, quel était l'intérêt pour l'auteur et le lecteur d'un énième récit sur cette guerre… Et finalement, j'ai découvert ces années noires sous un éclairage différent, notamment l'arrivée progressive (dire "en douceur" serait exagérer) sur le front des tout premiers appelés. Beaucoup d'informations condensées dans cet ouvrage, des zooms sur différents aspects de l'horreur, parfaitement exprimés en quelques phrases. L'écriture est ciselée, parfois à la limite du désuet (je ne lis pas tous les jours des termes comme "semblablement", "mêmement"), mais chaque mot est à sa place, rien de superflu, la plume est parfaite. Auteur à découvrir, pour ma part.

Pour plus de détails, et surtout ne pas perdre de vue que les hommes étaient les mêmes des deux côtés, lire l'incontournable 'A l'ouest rien de nouveau' (Erich Maria Remarque). Pour les adolescents 'La marraine de guerre' (Catherine Cuenca) et 'Il s'appelait le soldat inconnu' (Arthur Ténor) sont brefs et sobres mais néanmoins explicites et très intéressants.
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Ce livre, un de plus sur la guerre 14-18, me donne l'occasion de découvrir Jean Echenoz. Premières impressions : petit livre, gros caractères. Je parle des caractères d'imprimerie, pas de la dimension psychologique des personnages (dont on souhaite en effet qu'ils puissent bénéficier d'un caractère fort et bien trempé pour pouvoir affronter l'hécatombe à venir). Petit livre, gros caractères… et chapitres courts, qui se lisent comme s'il s'agissait d'un résumé, d'une sorte de condensé tout droit sorti de la sélection du mois du Reader's Digest.
Bien sûr, Echenoz nous dépeint çà et là quelques scènes saisissantes, assorties de quelques images puissantes. Par exemple, il décrit le sort peu enviable des animaux sauvages et domestiques pendant la Grande Guerre (c'est curieusement cette image qui me reste, et non celle de la destinée, aussi peu enviable mais plus vite oubliée, des combattants décimés au front). Echenoz frappe fort également lorsqu'il raconte l'innocence des futurs poilus heureux de partir à la guerre pour en découdre, le sort du photographe de guerre, de l'estropié, du déserteur, et les scènes finale du retour à la normalité, parce que la vie doit reprendre son cours. Echenoz relate tout cela dans un style précis mais désincarné, sans émotion excessive, bridant toute envolée lyrique et effet de manches. Il ajoute toutefois quelques coquetteries de style qui confinent au cabotinage (par exemple : « En attendant que Blanche se lève, ces meubles patientent pour tenir leur rôle »).
Le résultat n'est ni décevant, ni détestable, mais on aurait aimé un peu plus de développements dans certains épisodes du récit, dans l'histoire des personnages, qui ne nous donnent pas le temps de nous attacher à eux et de les apprécier (sans doute un choix éditorial, car on est habitué à faire court, aux Éditions de Minuit, l'homme moderne est un homme pressé, il lui faut de la synthèse, du rapide). Épisodes et personnages sont donc trop vite lus, trop vite disparus, trop vite oubliés.
Post-scriptum : Je réalise que nous sommes aujourd'hui le 11 novembre et, par le plus grand des hasards, mes critiques de ce jour portent sur deux romans dont le sujet est justement la guerre de 14-18. Or, s'il fallait distribuer des étoiles sur le site et si celles-ci devaient désigner un gagnant pour cette mini-compétition littéraire, vous l'avez sans doute deviné, ma préférence irait au roman de Joseph Boyden, le Chemin des âmes.
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Aussi bref qu'intense, court roman relatant la grande guerre, sans fioriture juste l'essentiel, suffisant pour se remémorer cet épisode qu'on aurait voulu manquer.
Le style est fluide et nous porte agréablement le long du roman, c'est étrange d'ailleurs, cette opposition entre le sujet grave et cette lecture agréable.
Cinq soldats partent à la guerre, qui commence bizarrement à coup de beuverie et de désoeuvrement, on se dit, la belle affaire dans deux semaines retour au bercail, mais la mascarade durera quatre années. Pour certains, la blessure handicapante leur permettra de fuir le front et se pose la question que faire de toute cette jeunesse mutilées ? reconversion, dépression voire pire.
Rien n'est omis dans ce roman, la mobilisation, la marche vers le front, la vie au sein des tranchées, les absurdités de l'armée, les atrocités, les injustices, la perte de ses camarades, l'horreur tout simplement d'une guerre, puis le retour...
Pour quelqu'un notamment un collégien ou lycéen qui veut approfondir ses connaissances sur cette guerre, ce court roman est idéal, une belle vue d'ensemble sans trop juste l'essentiel avec en prime une belle plume.
2/2017
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Comment décrire une guerre (tant et tant de fois relatée) sans sentimentalisme déplacé et des perspectives plutôt surprenantes ? Voilà un pari réussi par Jean Echenoz. Il ne se concentre pas sur les personnages, mais sur ce qui les entoure. Un regard surprenant qui révèle plus qu'on imagine. Sobre et fin à la fois.
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"C'est l'affaire de 15 jours" affirme Charles, le dédaigneux sous-directeur de l'usine de chaussures Borne-Sèze, à propos de la guerre de 14 (d'où le titre) qui durera plus que prévu. "Toujours au courant de tout", ce "fringuant" photographe amateur laissera la vie dans une soit-disant planque, un avion de repérage mitraillé à mort.
Son frère Anthime, comptable dans la même entreprise de Vendée, plus lucide avec ses "ça on verra bien" y laissera un bras, dans cette chienne de guerre, mais y gagnera Blanche la promise de Charles (dont elle attend un enfant illégitime) et une médaille de guerre.
Jean Echenoz, romancier aux titres laconiques (Lac, Un an, Je m'en vais, Courir..) ne fait pas dans la dentelle dans ses récits non plus. C'est détaillé, mais clair, précis,aseptisé. Tout affect est mis à distance ce qui rend fort bien le côté inhumain de la guerre qui mobilise, embrigade,enfièvre, trompe, harasse,affame,assoiffe,frigorifie, ordonne,couvre de poux,censure,gaze,bombarde,tue,estropie,ampute,évacue,arrête,juge,exécute,désoeuvre,invalide... L'humour est cynique et Anthime "qui s'adapte toujours" va "s'accorder à lui-même que d'un côté" presque heureux d'être évacué sans plus de perte qu'un seul bras.
C'est l'absurdité de la guerre que Jean Echenoz nous décrit ici aussi car il n'y a pas d'échappatoire puisque les déserteurs sont fusillés. La crédulité et la joie sont palpables (ex: "Blanche est habillée comme pour un jour de fête", "c'était plutôt gai ce défilé") et l'auteur les oppose à l'enfer des tranchées.
Rien à voir avec Les champs d'honneur de Jean Rouaud où malgré le titre évocateur la guerre était à peine effleurée, mais plutôt avec (mais en moins sentimental) Mon papa en guerre: Lettres de poilus, mots d'enfants 1914-1918 de Jean-Pierre Guéno qui suit le quotidien de ces hommes souvent simples et non violents (14 s'attache également aux pas d'un bourrelier, un garçon boucher, un équarisseur) envoyés au front dans une guerre dont ils ne connaissaient ni les tenants ni les aboutissants.
Pourquoi les guerres? s'interroge-t-on après lecture!
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