Ce tome comprend 3 histoires distinctes et indépendantes.
The Tyger (illustrations de
John Severin, 2006) - Frank Castle est en planque sur un toit prêt à exécuter quelques criminels qui se sont donné rendez-vous dans un restaurant italien. le quartier fait remonter en lui des souvenirs de son enfance, lorsqu'il avait une dizaine d'années. Il se souvient d'un homme transformé en torche humaine sur le chantier où travaillait son père. Il se souvient de discussions entre son père et sa mère. Il se souvient d'un amour d'enfance (Lauren Buvoli) et il se souvient d'avoir étudié la poésie, en particulier le poème intitulé "The Tyger" de
William Blake. Il se trouve que dans le quartier où il a grandi le crime organisé avait déjà pignon sur rue.
Cette histoire est illustrée par
John Severin, un vétéran des comics né en 1921 (85 ans à la date de sortie de cette histoire). DC et Marvel l'avaient déjà fait retravailler sur des westerns dans les années précédentes, respectivement sur Bat Lash et Rawhide Kid. Il a un style un peu vieillot, détaillé, et précis. Mais il représente la réalité avec une forme de gentillesse et de naïveté qui affadit un peu ses dessins. Il ne glorifie pas la violence, mais il en gomme également l'horreur. Par contre, ses graphismes s'adaptent parfaitement pour décrire les enfants, ou ici de très jeunes adolescents. On peut dire que ses illustrations ont un coté gentillet qui ne porte pas du tout la violence et la brutalité du monde du Punisher.
Avec cette histoire,
Garth Ennis approfondit le point de vue développé dans Born, c'est à dire que Castle avait des prédispositions pour devenir le Punisher, bien avant le massacre de sa famille à Central Park. Il narre cette partie de la vie de Castle en flux de pensée. Mon souci avec ce récit réside dans la manière de décrire les enfants, et plus particulièrement leurs dialogues. Ennis leur attribue des niveaux de raisonnement qui ne sont pas de leur âge et qui sonnent faux. En ajoutant ça au fait que les moments Ennis sont vidés de leur substance par des illustrations gentilles, cette histoire ne m'a pas enthousiasmé. 2 étoiles.
The cell (dessins de
Lewis Larosa, encrage de Scot Koblish, 2005) - Frank Castle s'est livré à la police pour pouvoir être enfermé en prison. Ce n'est pas la première fois qu'un scénariste met Castle dans cette situation et il est difficile d'innover. Dans la première partie du récit, Castle encaisse et manipule les uns et les autres. le récit est haletant et Ennis oblige le lecteur à deviner ce qu'a manigancé Castle. Dans la deuxième partie, Castle a atteint ses cibles et il se lance dans un discours prêchi-prêcha qui détonne par rapport à la manière dont Ennis l'écrit. Les illustrations de Larosa (déjà dessinateur de In The Beginning) sont bien noires, avec un encrage assez âpre qui colle parfaitement à l'atmosphère glauque et poisseuse. Les moments Ennis provoquent un sentiment d'horreur devant la barbarie des uns et des autres. Ce récit est vraiment prenant avec une ambiance claustrophobe à souhait et des illustrations bien équilibrées entre ce qu'elles montrent et ce qu'elles suggèrent. Comme on pouvait s'y attendre, les rapports homosexuels (consentis ou non) constituent une part importante de la provocation, mais Ennis sait également innover. 4 étoiles (et non 5 à cause de la fin trop bavarde).
The end (illustrations de
Richard Corben, 2004) - La troisième guerre mondiale a eu lieu alors que Frank Castle était en prison. Par un heureux coup du sort, il a survécu à l'apocalypse nucléaire. Après 1 an passé dans un abri antiatomique, il sort pour accomplir une dernière mission de punition.
Dans les années 2000, Marvel a décidé d'offrir la possibilité à plusieurs créateurs d'écrire la dernière histoire de différents héros sous le titre générique de "The end" : Hulk par
Peter David, X-Men par
Chris Claremont, Marvel Universe par
Jim Starlin par exemple. Ici Ennis respecte à la lettre le principe pour un voyage dans des États-Unis radioactifs. le résultat m'a laissé sur ma fin parce qu'Ennis se contente d'aligner les scènes attendues de désolation et des effets de radiations intenses, sans beaucoup d'inventivité par rapport à d'autres récits de même nature. Et il finit à nouveau sur un long dialogue explicatif qui fait baisser l'intensité du récit.
Cotés illustrations, je me faisais une joie de retrouver
Richard Corben (dessinateur underground de Den), étant revenu aux dessins pour la branche MAX de Marvel (Starr the Slayer & Haunt of Horror) ou pour
Mike Mignola (Hellboy 10). C'est toujours un grand plaisir pour moi de retrouver ses dessins mélangeant des touches de photoréalismes, avec des visages plus cartoons et un don pour l'horreur et le grotesque. Malgré mon grand respect pour Corben, je dois reconnaître qu'il était en dessous de ses capacités. Il y a des cases magnifiques : l'ombre mangeant le visage de Castle la nuit dans un bus remplis de cadavres de personnes s'étant suicidées. Il transcrit à merveille le craquèlement de la peau sous l'effet des radiations, et le sang qui coule des crevasses au visage. Mais les visions du monde post apocalyptique restent assez communes et son style ironique dessert le caractère monolithique et premier degré de Castle. 4 étoiles.
Au final, il y a à boire et à manger dans ce tome dont les histoires n'atteignent pas l'intensité de la série Punisher MAX.