Philippe Erlanger le précise dans une des dernières pages : « L'histoire, retenant surtout ses bizarreries, a dédaigné ce rêveur mélancolique ainsi que lui-même dédaignait les choses de la terre et singulièrement la politique. Hors de son pays son souvenir s'est effacé au point qu'à l'exception des spécialistes, un Français, un Anglais, un Italien ignore généralement son existence. »
Cette remarque s'adressait également à moi ; hormis son portrait par
Giuseppe Arcimboldo, je ne connaissais rien de lui alors que ses ancêtres et contemporains me sont relativement familiers :
Charles-Quint, son grand-père, Philippe II d'Espagne, son oncle, et même son frère Albert, pourtant simple Archiduc…
C'est donc avec beaucoup d'intérêt et de plaisir que j'ai lu cette biographie qui dresse le portrait d'un homme qui ne se sentait ni la force ni même le désir d'être un grand empereur, la politique ne l'intéressait que peu, les affrontements religieux de l'époque lui faisaient horreur, il hésitait longuement devant toute décision à prendre au point de ne pas se prononcer…
Par contre, il fut un collectionneur d'art, un mécène qui sut attirer à lui et meubler son cabinet des arts et des merveilles d'oeuvres du Titien, de Cranach, Brueghel de Velours, Dürer. À ces oeuvres, s'ajoutent des objets de tout genre, la baguette de Moïse, des clous de l'arche de
Noé, des bézouards…
Tout le passionne, la philosophie, la botanique, la zoologie, la mécanique, l'orfèvrerie, l'alchimie et surtout l'astrologie et l'astronomie, étroitement imbriqués l'une à l'autre à l'époque.
L'auteur souligne son rôle crucial pour la science moderne : il fit venir à Prague deux des plus grands astronomes de son temps :le Danois
Tycho Brahe et surtout
Johannes Kepler.
J 'ai aimé le portrait de cet homme, sous son règne Prague connut un âge d'or, son indécision à trancher permit d'éviter bien des guerres.
J'ai aimé son attitude devant les luttes que se livraient l'église réformée et la contre-réforme, sa religion était loin de tout fanatisme, il alla jusqu'à mourir sans s'être confessé, abomination à l'époque.
Sa vie fut triste, il se vit lentement dépouillé de tout pouvoir, il fut sujet à des crises de dépression, à la limite parfois de la folie.
Peu après sa mort, l'Europe sera déchirée par la guerre de Trente ans, il sût éviter qu'elle ne se déclenche plus tôt.
Ce livre m'a passionné, les quelques phrases écrites ci-dessus ne suffisent hélas pas à contenir tout ce qu'il m'appris.