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sur 723 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Valentine, Mathilde, Gabrielle, Clotilde et la petite dernière, la timide arrière-petite-fille de Valentine, qui se rapproche à petits pas de notre époque… Tout le vingtième siècle à travers le regard de ces cinq femmes… Tout change, tout bouge, les technologies, les paysages, les bruits, les moeurs, mais une chose demeure immuable : ce désir inébranlable, opiniâtre de donner la vie, de transmettre avant de tirer sa révérence.
« L'élégance des veuves » est un « livre de filles » qui parle de la magie vitale des enfants, de ce lien charnel, de ce fil invisible qui unit les mères à leurs enfants et qui parfois rend les pères jaloux ; un livre qui parle de ces hommes et de ces maris si forts, si résolus, si énergiques, qu'elles observent amusées, aimantes, vaguement désabusées… « Que les hommes peuvent être bêtes, parfois ! […] les femmes n'ont pas cette inconscience stupide, ou cet égoïsme. Elles savent que l'on a besoin d'elles ». D'ailleurs, les histoires d'hommes sont rarement évoquées. La guerre, par exemple, qui éloigne et tue les enfants, apparaît au détour d'un évènement.
En ce début du vingtième siècle, les gens bien nés (ceux qui le sont moins aussi d'ailleurs), ne se mariaient pas par amour, mais par devoir. le fameux coup de foudre n'était pas de mise… Valentine, Mathilde, Gabrielle et leurs maris apprirent à se connaître, à s'apprivoiser chaque jour un peu plus. On était alors marié « jusqu'à ce que la mort nous sépare ». L'omniprésent Dieu accompagnait le foyer dans la joie ou dans l'affliction.
Les femmes avaient cette triste habitude de finir leurs vies seules : le mari parti trop tôt, les enfants morts ou ceux qui ont pris un chemin qu'elles ne parviendront jamais à comprendre... Toutes chargées de chagrin et de regrets, mais avec encore tant d'amour à donner, elles continuaient malgré tout, vaille que vaille, leur route. Avec élégance. Beaucoup d'élégance.
Un livre sensuel, plein de respect et de pudeur pour nos aïeules dont les photos couleur sépia traînent encore dans nos tiroirs ou sur nos coins d'étagères.
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Petit par la taille, grand par le talent…

Dans la collection « Un endroit où aller » aux éditions Actes Sud, le roman d'Alice Ferney tutoie effectivement les sommets de la littérature. Comme on le devine en lisant le titre « L'élégance des veuves », certains personnages masculins du roman empruntent une voie trop directe menant tout là-haut vers le repos éternel, laissant sur le bord du chemin des femmes sans repère seules avec leurs enfants.

Ne connaissant pas cette auteure, je dois avouer que durant la première partie du roman, j'ai été plus subjugué par l'élégance de l'écriture d'Alice Ferney que par le récit de la vie de cette élégante femme nommée Valentine. Autant l'écriture travaillée et subtile me fascinait, autant l'histoire de cette femme qui perd son mari et d'autres êtres chers m'a laissée de marbre. Un marbre vraiment très froid, glacial…

Et puis, comme par miracle, la magie a opéré … non, non, le mari n'a pas ressuscité ! Non, je parle d'un effet sur ma personne. Dès que l'on a abordé le destin des nombreux enfants de Valentine et surtout de son fils Henri avec la belle Mathilde, j'ai savouré chaque phrase, chaque mot du récit jusqu'à la toute fin du roman. Un véritable bonheur de lecture malgré la dureté des propos et des vies endurées.

Loin de mes lectures habituelles, j'ai retrouvé l'émotion suscitée par ces sagas familiales bouleversantes comme le splendide « Soleil des Scorta» de Laurent Gaudé ou dans une moindre mesure le poétique «Contre l'art » de Tomas Espedal.

Pour terminer, au-delà de l'histoire émouvante de cette famille, ce roman m'a fait imaginer, comme par procuration d'une certaine manière, la vie incroyable qu'a pu endurer ma grand-mère qui a enfanté douze fois en une vie, douze combats pour donner la vie, perdant malheureusement son mari par la suite, tout cela avec des revenus beaucoup moins confortables que pour la famille bourgeoise du roman.

Rien que pour ce voyage (personnel) émouvant dans le passé, je dis merci à Alice Ferney pour ce court mais sublime roman. A découvrir absolument…


PS : Un petit coucou à ma grand-mère qui me lit peut-être là haut, qui sait !
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"Les pensées les plus délicates ne trouvent pas facilement la configuration de mots pour se dire avec délicatesse"...
Et pourtant, Alice Ferney a tout à fait réussi, elle, à décrire ce monde féminin du début du 20e siècle, ce monde où les femmes enfantent, aiment et assistent impuissantes à la mort de ceux qu'elles aiment, mari ou enfants, pour ensuite mourir dans la douleur des couches innombrables ou dans la solitude de la vieillesse.
Quelle humanité chez cette auteure ! Quelle symbiose avec cette vie dévouée entièrement aux autres qu'ont connue les mères de cette époque !
Moi-même suis incapable de trouver cette configuration de mots pour dire la délicatesse inscrite à chaque page; je ne peux que balbutier mon admiration, ma compassion, mon bouleversement face à cette chronique de femmes courageuses qui m'ont profondément marquée. Les trop nombreux enfants qu'elles mettaient au monde, les maris et les fils qui partaient à la guerre (les 2 guerres), les filles qui allaient s'enterrer au Carmel...Quel courage ont-elle dû avoir pour subir toutes ces épreuves !
Et je pense à mes ancêtres, à nos ancêtres féminines qui ont porté sur leur épaule, qui ont tenu dans le creux de leur coeur notre monde.
Pour cette écriture ciselée, pour cet écrin de douceur niché dans la Vie, je remercie Alice Ferney qui me donne la fierté d'être une femme.
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L'élégance des veuves est ce mouvement de la vie sans relâche, qu'on pourrait presque considérer comme sans faille, ce mouvement de femmes, de mères, ce mouvement qui donne la vie, l'insuffle, la partage, la répète follement dans un désir presque sans fin malgré les trébuchements, les blessures et les deuils.
Et puis continuer d'enfanter, sans relâche...
C'est un court roman d'Alice Ferney, un peu plus d'une centaine de pages pour traverser une centaine d'années ou presque, elles suffisent à dire quelques vies, celles de Valentine, Mathilde, Gabrielle, Clotilde et les autres... Ces femmes d'une autre époque qui viennent vers nous, certaines au fil des générations qui finissent par ressembler aux femmes que j'ai aimées...
La vie est là, scintillante, parfois solaire, parfois tâtonnante aussi... Et puis la mort vient et transforme des femmes éprises d'amour et de désir en veuves inconsolables ou presque. Parfois c'est comme un trou au ventre. Parfois c'est un vide qu'on arrivera à combler sans peine.
Ce roman intime dit la mort qui vient, qui frappe sans prévenir, c'est le froid et le noir. Elle frappe souvent les femmes ici, des mères, c'est un destin qui se propage à travers les générations...
L'enchantement de la vie n'est jamais loin, avant et après...
Ce sont des gestes qui chassent les cauchemars au bord du sommeil, des gestes de mères...
Parfois tout est confus dans une existence, la vie que l'on donne, l'amour que l'on prend, la peur, l'effroi qui surprend, les joies, l'attente, les blessures...
La fatigue, la douceur extrême, l'abnégation...
À force, le malheur devient comme un goût qu'on finit par apprendre.
Se sentir trop vulnérable pour affronter le monde.
La mort d'un être aimé transforme à jamais celle qui reste, mais rester où ? Au bord de la berge comme une passante silencieuse ? Continuer d'avancer contre les vents parfois contraires ? Continuer de parler seule désormais, ou seule avec les enfants à élever...? Il faut rester pour les enfants qui continuent eux d'être gais comme des pinsons, ils ne comprendraient pas qu'on les abandonnent encore un peu, une fois encore...
Ce roman dit la promesse de vies aux trajectoires presque parfaites au début. C'est plus tard, après, que les routes finissent par ne plus ressembler à des droites très rectilignes.
Oublier que le sort de la vie peut parfois être injuste. Parfois la résignation ne suffit plus...
Et puis, parfois il faut crier comme une louve qui protège ses enfants, crier encore plus fort, dévastée par la douleur lorsque la mort en prend un, voir mourir un de ses enfants contre l'ordre des choses est tragédie insupportable. Car les veuves dans cette histoire perdent aussi des enfants...
Traverser les tourments. Questionner le sort. Pourquoi ?
Puis, il faut revenir du côté de la vie, des siens, et un jour se mettre de nouveau à pleurer, et cette fois, de bonheur... Car il y a des bonheurs dans ces histoires.
Accepter d'être déçu aussi par celles et ceux qui survivent. Se dire qu'on a peut-être raté quelque chose et que ce n'est pas grave.
Questionner la vie, nos vies, nos vies parfois froissées comme du papier ; pour tout cela les livres sont indispensables pour raconter ces vies qui nous hantent, nous regarder ou regarder celles et ceux qu'on aime au travers du miroir des pages, aider à trouver sa place dans ce dédale.
Le chemin de l'écriture,- et plus tard celui de la lecture, aide, est fraternel.
C'est à cela qu'on reconnaît le mystère profond des livres.
Les secrets de famille, les guerres, le poids de la religion, hormis le caractère bourgeois de cette famille, il me semble reconnaître le paysage de ce livre à chacune de ses pages, comme si je l'avais côtoyé...
Je me suis retrouvé dans ce récit qui est une invitation.
On pourrait se dire que ce roman est triste, évoque le chagrin, mais il est incroyablement façonné de joies aussi, de rires, de désirs... C'est un hymne à la vie...
Ainsi ce livre m'a rappelé une autre histoire, celle de ma famille, des veuves de ma famille, ma grand-mère tout d'abord veuve à trente-six ans. Mon grand-père mourut à la suite d'un accident de travail en 1926 en participant à la construction d'un pont en face de la rade de Brest. Il fit une chute a priori sans trop de gravité, son chef d'équipe lui dit de rentrer chez lui. Il prit son vélo, il lui restait quinze kilomètres à faire jusqu'au domicile devant lequel il s'écroula en entrant dans un coma irréversible durant huit jours. Il fut emmené à l'hôpital. Ma grand-mère entendit de nouveau frapper une semaine plus tard à la porte, cette fois c'était la nuit, elle ouvrit, il n'y avait personne ; le lendemain matin, en se rendant à l'hôpital on lui apprit que son époux était mort au milieu de la nuit à l'heure où elle entendit frapper à la porte... Ma grand-mère était enceinte de ma mère lorsque ce décès arriva. Ma mère à son tour devint veuve une première fois à l'âge de dix-huit ans si l'on considère que le jeune homme du même âge qu'elle, qui l'aimait et qu'elle aimait, qui lui avait fait un enfant, était le premier homme de sa vie, peut-être qui sait le seul, l'unique amour de sa vie... Elle s'était réfugiée chez une tante de Normandie pour fuir ce que l'on considérait alors comme une forme de déshonneur, devenir une fille-mère, elle était enceinte de ma soeur qui naquit trois jours après que le père de l'enfant fut fusillé par la Gestapo en 1944... Chose surprenante, ma mère devenait veuve tout comme sa mère, en portant un enfant... Et c'est en lisant ce livre, en écrivant ces lignes que je m'aperçois brusquement que personne n'avait jusqu'à présent dans ma famille clairement fait ce parallèle, mais peut-être est-ce une simple coïncidence...
L'élégance des veuves, c'est le silence, les non-dits, c'est se taire, terrer cette douleur dans le ventre, serrer les dents tandis que les enfants pleurent là-bas dans la chambre, ou peut-être rient, le bruit est parfois tellement confus dans les battements d'un seul coeur...
Dans un livre empli d'humanité, Alice Ferney dit ces histoires de femmes, de mères, de filles, dans une écriture très belle et très forte, avec grâce, sensibilité, justesse, comme si elle avait vécu tout cela, comme si Valentine, Mathilde, Gabrielle, Clotilde et les autres appartenaient à sa famille, comme si nous étions là parmi les femmes de cette famille...
Presque notre famille...
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Ils vivent encore en nous, nos ancêtres trépassés.
Parfois au détour d'un miroir,
je crois percevoir la lumière de leurs regards.
Mais c'est souvent sur le papier,
que jaillit cette autre écriture faite de tendresse et de nervosité.
Pour beaucoup d'entre nous ce sont des tics ou des manies,
qui nous raccrochent à notre lignée,
dans notre famille, ce sont des doigts de pieds
en forme de champignons de Paris.

Il fut un temps pas si lointain,
un temps à l'avenir incertain,
ou quelquefois l'amour se découvrait,
bien longtemps après les baisers.
De parfaits inconnus se retrouvaient mariés
mis en avant par des familles aisées.
Alors mille gosses, une tribu infernale,
prenait forme dans le corps des Femmes.
Propulsée comme mère, elles épuisaient leur Féminité.

Elles n'ont de cesse que de materner, de cajoler,
brandissant pour étendard, le dévouement et la sollicitude,
pour faire oublier aux hommes leur haine et leur habitude
de pourrir la vie à tout de qui peux les entourer.
Il va s'en dire que les Femmes sont,
le plus bel aboutissement de la création.
Sans cet amour inconditionnel, cet agapè,
l'humanité toute entière ne serait
qu'un chaos, une monstruosité.

Alice Ferney l'a bien compris,
son livre est un hymne à la Féminité,
qui de mères en filles se transmettent,
les bases solides de notre société.
Au travers de quelques personnages,
elle nous en dresse un tableau plein de poésie et d'humilité.
Un livre bien court, mais c'est un concentré,
qui sera vite lu mais en aucun cas oublié.
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Mais qu'Alice Ferney écrit bien !
Dans ce roman, particulièrement.
Son écriture est à la fois ferme et douce. Toujours précise, poétique parfois. Simple et belle.
Alice Ferney est déterminée : avec ses phrases, elle vous emmène exactement là où elle veut.
C'est le genre d'auteur entre les mains de qui je m'abandonne totalement. J'ai confiance et je suis le chemin qu'elle a tracé.
Alice Ferney décrit une partie du vingtième siècle à travers les femmes. Des générations qui s'enchaînent avec leurs ressemblances et leurs différences. Avec une constante : leur grande force morale, leur dignité et leur élégance immuable.
Et pourtant, elles en vivent des drames !
Les guerres font des ravages et réclament leur tribut de pères, de maris et de fils. Les femmes portent bien souvent le noir.
À peine mariées, elles se transforment en mères. De famille très nombreuses. Les naissances se suivent, apportant leur lot de joies et de peines (la mortalité infantile est encore forte) mais aussi de fatigues quotidiennes.
Les femmes vivent pour leur mari et leurs enfants, jamais pour elles-mêmes.
La voie à suivre est toute tracée, elles n'ont pas le choix. Une phrase le résume parfaitement :
"En une année, celle de ses vingt ans, elle fut fiancée officiellement, mariée religieusement, installée bourgeoisement, ardemment fécondée et douloureusement accouchée : la vie de Valentine commençait à être ce qu'elle devait être."
Alice Ferney nous parle d'une époque révolue, mais dont nous avons tous entendu parler par une grand-mère ou une grande-tante. Je suis certaine que nous sommes nombreux à avoir de vieilles photos de famille montrant un couple entouré de ses multiples enfants.
Ce livre est une fiction, et pourtant en le lisant, j'ai constamment pensé à l'une de mes grands-mères. Née à la fin du dix-neuvième siècle, elle a eu dix enfants, dont huit ont survécu : je l'ai vue dans ce livre, j'y ai lu sa vie. C'était très beau.
Un roman émouvant qui fait la part belle aux femmes et qui nous offre de très belles pages sur l'amour maternel.
Un roman résolument féministe qui prouve que le sexe dit "faible" ne l'est pas tant que ça.
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Des femmes-rivière où coule le cycle de la vie.
De l'eau, du sang, du miel, des cendres et de la poussière d'étoiles .

"En elle quelque chose de lisse et de soyeux donnait l'impression d'une propreté de perle, comme si son corps avait une pureté minérale."

Un éternel recommencement, une boucle retour, encore et toujours, où la douceur de la soie charme les murmures et les secrets.
Étranges petites fées qui chantent les naissances et taisent les souffrances.
Endeuillées et déchirées, elles promettent l'obédience, elles nuancent pour donner sens aux convenances.

"Tout était dangereux, tout était éternel recommencement par lequel ils seraient balayés, et les joies qu'ils avaient ensemble n'étaient que les enchantements éphémères de pauvres diables qui fermaient les yeux sur l'avenir."

Fécondes, elles sont la genèse et le centre. de génération en génération, elles communient la patience et la bienveillance. Sirènes aux mille teintes, c'est avec pétillance et grâce qu'elles élèvent les lutins et font de leur destin une lumière.

"Elle devina que l'enfant était sa richesse et sa faille."

Charmantes déesses aux robes chantantes, elles épousent le souvenir des heures inoubliées, celles où leur regard perce l'enfance et réchauffe les coeurs gelés et effrayés.

"Mathilde n'était que promesses et projets, contre le grand courant qui faisait du monde un désert. Elle peuplait la terre à elle seule."

Ce livre m'a cueillie comme la tige d'un rosier carmin en fleurs. Les épines ont brillé, délicates, riches d'une sève bouillonnante. Brillamment plumée par le talent d'Alice Ferney, je me suis souvenue.
J'ai revu ma grand-mère paternelle qui me sourit. L'élégance et la flamboyance.
Marie-Louise je pense si souvent à toi. Toi qui as donné la vie à douze enfants, toi qui les as vu grandir, le dernier nourrisson dans tes bras aimants et chauds. Les plus petits collés à tes jambes. Les plus grands s'affairant pour apporter leur aide. Mon père travaillant sur les marchés à douze ans pour grossir la marmite.
Toi qui as souffert deux deuils, deux petits souffles emportés trop tôt sans avoir le temps de courir dans tes jupons et d'apprendre de ta force. Toi qui n'as jamais manqué d'énergie et de patience. Vive, drôle et courageuse tu me manques.
Je te revois à l'ombre de ton départ pour l'eau là-bas, tu te sentais fatiguée et malade et tu as baissé doucement les bras pour enfin te reposer.
Ma grand-mère qui veille sur nous.
Je me déplume et laisse voler le soyeux duvet jusqu'à toi. Notre Éternelle.

"Enveloppée dans un peignoir léger, Mathilde penchait le visage sur celui de l'enfant endormi, et elle semblait, avec ses traits nets et sa peau pâle, une madone de pierre : éternelle."

Chères familles, n'ayez plus peur, elles sont là, croustillent vos joies et rassurent vos peines.

"Elle irait dans leurs chambres, elle aurait des robes de soie qui chantent autour des jambes, de fines lèvres caressantes, elle saurait reborder un drap et endormir les fantômes."

La pureté des magiciennes, l'élégance des veuves.

Marie-Louise, cette critique te fait tienne.

Lu en janvier - février 2020
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Il est bien difficile, aujourd'hui, d'imaginer qu'il fut un temps où les femmes n'étaient qu'épouses et mères et, surtout, qu'elles soient parvenues à s'épanouir dans ces rôles réducteurs.
Était-ce toujours leur choix de se consacrer entièrement à leur famille ou étaient-elles l'instrument silencieux d'ambitions masculines ?
Quoi qu'il en soit, je ne peux m'empêcher de penser qu'elles étaient femmes jusqu'au bout des ongles et mères jusqu'au plus profond de leur ventre.

Ce magnifique roman d'Alice Ferney nous en dresse un portrait criant de dignité, de courage, d'abnégation, auquel on ne peut rester insensible.
La condition de la femme a bien changé depuis lors , lui ouvrant les portes de la réalisation personnelle.
Mais peut-on affirmer pour la cause que ces dames de l'ombre se crucifiaient en se sacrifiant ?
Il devait sans aucun doute y avoir une certaine fierté à être le pilier du foyer,le coeur battant du cercle familial.
Une fierté dénuée d'arrogance, pudique, élégante, essentiellement nourrie par l'amour.
Présence immuable, rassurante..
Qu'elles aient connu des grossesses multiples ou n'aient été mères que quelques fois, elles ont été trop souvent confrontées à la perte terrible, déchirante, d'un enfant.
À une époque où le soutien psychologique n'existait pas, elles ont fait face, courageusement, silencieusement, noyant leurs larmes dans l'eau bénite de la foi ou du travail, se consacrant doublement à leurs autres enfants.
Ma propre grand'mère a vu mourir sa fillette de dix-huit mois d'une malformation à l'estomac qui, de nos jours, on aurait été opérée sans problème.
Qu'est-ce que cette épreuve a fait d'elle ?
Elle n'en a jamais parlé mais sa nature trahissait une fêlure trop hâtivement colmatée.

La plume d'Alice Ferney est pour moi une superbe découverte !
Élégante, délicate, d'une finesse incomparable, elle sait trouver les mots justes pour faire de ce récit grave et bouleversant, un hymne à la vie dans ce qu'elle a de plus simple et de plus élémentaire.
L'envie de cette perle de la littérature a des parfums de rince-cochon et de merveileux partagés avec deux vrais amis, et je les en remercie !

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J'ai un souvenir un peu flou du livre d'Alice Ferney, lu dès sa publication en 1995.
Ne me reste en mémoire que l'élégance de l'écriture et cette langueur du temps qui passe inexorablement, les joies et les drames d'une famille nombreuse où, de générations en générations, les femmes sont au foyer pour élever les enfants, dans l'amour partagé avec un père, choisi ou désiré.

J'avais déjà beaucoup aimé le livre et je ressors éblouie de l'adaptation cinématographique que Tran Anh Hung en a fait en 2016 sous le titre Éternité. Toute la quintessence du livre s'y retrouve: l'amour de la famille, le bonheur de la maternité, le passage de témoin par l'éducation, l'entraide entre femmes et mères, la notion du devoir.
Un moment visuel magique où l'image, toujours sublime de beauté, est simplement portée par une voix "off" qui lit des passages du roman. Une oeuvre singulière par le peu de dialogues utilisés, en harmonie avec l'écrit original par son aspect contemplatif et lyrique.

Magnifique!
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Je ne suis pas le coeur de cible de ce roman qui nous raconte le parcours de femmes, mais la petite musique d'Alice Ferney enchante ces récits.

L'élégance, c'est en effet aussi celle de l'écriture qui enlumine des histoires au temps suspendu, dépouillées de matérialité et pourtant si réelles.
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