À juste titre, les folkloristes furent souvent définis comme des chroniqueurs partiels d'un monde rural confiné dans les solides vertus de la famille, de la propriété et de l'effort. Ils en recueillaient les cérémonies et les curiosités... Mais le paysan n'est pas sorti des livres de George Sand ni ses croyances des prêches de Mgr Dupanloup. Le 19e siècle tenta de s'annexer le mythe de l'immobilité, l'Angélus et Millet firent croire à la pérennité des valeurs, cachant combien ce monde restait perméable aux mutations, aux changements, dans ces coutumes et croyances mêmes.
On peut expliquer l'intérêt soudain que suscitent le folklore et les traditions populaires par un désir accru de mieux connaître les liens existant entre les aspirations à un nouvel équilibre de l'homme, de son milieu et les fondements sociaux, économiques et culturels de la société dans laquelle s'accomplissent ces changements. Mais ceux-ci s'accompagnent d'un malaise que provoque notre univers éclaté. Il renvoie à ces représentations premières du monde rural : « la solidarité sociale et le sentiment collectif ». Une cohésion s'affirmant dans le tissu familial et relationnel qui n'était pas toutefois aussi idyllique et dénué de tensions, comme une certaine littérature tente de nous le faire accroire.
Le folkloriste n'est plus un antiquaire ; c'est un état présent qu'il doit regarder.