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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
ATTENTION ! CHEFS-D'OEUVRE ! Voici les deux plus somptueuses nouvelles du recueil "Nouvelles de Pétersbourg".
Ma préférence va probablement à celle intitulée "Le manteau". Dans cette nouvelle, Nicolas Gogol nous accoquine au quotidien d'un modeste copiste, fonctionnaire mal payé d'un ministère, qui arbore un manteau si élimé qu'il laisse presque voir le jour, ce qui n'est pas sans conséquence quand on connait le climat de cette ville (surtout à l'époque, le réchauffement n'était pas encore passé par là!).
Le grand événement de sa petite vie va donc être l'acquisition d'un nouveau manteau, qui représente une fortune pour sa maigre bourse.
Je ne vous en dit pas plus, je vous laisse simplement savourer deux minuscules extraits :

"De retour à la maison, il se mettait aussitôt à table, mangeait rapidement sa soupe aux choux et un morceau de viande aux oignons, sans en remarquer le goût, en avalant aussi les mouches et tout ce dont Dieu, selon l'époque assaisonnait ses mets."

"La porte était ouverte, car la femme de Pétrovitch, rôtissant je ne sais quel poisson, avait laissé s'échapper tant de fumée qu'on n'y voyait même plus assez pour distinguer les cafards."

"Le nez", plus corrosive, est vraiment comparable à du Kafka (en plus drôle et plus caustique), où l'absurde tient une place prépondérante. On pourrait hasarder beaucoup d'interprétations à propos de cette nouvelle à la signification ambiguë. J'y vois pour ma part une dénonciation de la société des apparences et de la superficialité, on dirait aujourd'hui "le monde bling-bling".
Néanmoins (je sais, c'est facile le coup du nez en moins!), bien malin celui qui pourrait se vanter de déceler toute l'ampleur que l'on peut faire porter à un tel texte où si peu de notions sont explicitement assumées et où tant sont suggérées.
L'auteur sait à merveille mêler le fantastique au réaliste dans une écriture limpide et délectable, qui m'apparaît très en avance sur son temps (peut-être que la traduction a redonné un "coup de jeune" au texte original, je ne saurais vous le dire car je ne l'ai pas lu en V. O.).
En tout cas, vous ne risquez pas grand-chose à lire ces deux petites nouvelles et vous pouvez passer un très bon moment. Pour une fois, j'assume pleinement mon manque de subjectivité !
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Gogol nous raconte, à travers deux nouvelles, la vie des fonctionnaires, leurs actes répétitifs, souvent dépourvus d'intérêt, mais aussi leurs aspirations et ce qu'il peut arriver quand un imprévu vient se mettre dans les rouages d'une machine bien huilée.

J'ai beaucoup aimé Arkadi, son zèle, son application dans la calligraphie, mais aussi sa solitude car tout le monde l'ignore ou se moque de lui notamment de son manteau usé. Comment faire pour pouvoir en acheter un neuf, aller affronter le couturier, discuter le prix. Gogol nous montre ainsi que, contrairement à l'adage, l'habit fait le moine.

Il nous décrit bien cette société bureaucratique et hiérarchisée de l'époque, car il la connaît de l'intérieur puisqu'il a été lui-même fonctionnaire, mais est-ce que cela a beaucoup changé ? « C'est la marche ordinaire des affaires dans notre sainte Russie. le désir de faire comme les hauts fonctionnaires fait que chacun singe les manières de son supérieur.

Dans « le nez », on est dans un tout autre registre : le domaine de l'absurde avec ce nez qui voyage dans un pain, puis est incarné dans un conseiller d'état. Gogol nous fait toucher du doigt, l'apparence, ce qui fait qu'un homme est important ou non dans la société, comment faire pour retrouver son identité (son « entièreté » plutôt) avec des épisodes hilarants comme la rédaction d'une annonce dans un journal pour retrouver le nez. Que vont penser les autres ? On ne peut décemment pas se montrer sans son appareil.

L'auteur nous propose une très belle critique de la société, « Mais la Russie est une terre si bizarre, qu'il suffit de dire un mot sur un assesseur quelconque, pour que tous les assesseurs, depuis Riga jusqu'au Kamtchatka, y voient une allusion à eux-mêmes. Ceci s'applique du reste à tous les grades, à tous les rangs. » en usant d'artifices sinon il se serait mis en danger à l'époque. Son écriture est belle, j'aime le rythme de l'écriture, les dialogues, Saint-Pétersbourg et les rues sombres le soir…

C'est le premier livre de Gogol que j'ouvre ; je viens à peine de le terminer et il me manque déjà. J'ai donc décidé de lire d'autres nouvelles, avant d'entamer « les âmes mortes » ou « le Revizor »…

Bref, un coup de foudre pour cette oeuvre magistrale ; ce n'est un secret pour personne, je suis passionnée par les auteurs du XIXe et la liseuse, c'est quand même bien pratique pour les oeuvres libres de droits.

Note : 9,5/10
Challenge XIXe
Lien : http://eveyeshe.canalblog.co..
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« Gogol est sans contredit réaliste. Chez qui trouver plus de vérité dans la peinture ? Tout en riant et en faisant rire, il pleurait en secret ; c'est pourquoi ses satires renferment toute la Russie sous son aspect négatif, avec toute sa chair, son sang et son souffle. "

-Ivan Gontcharov, Oeuvres, Saint-Pétersbourg, 1896, tome VIII, p. 257-


« le manteau » et « le nez » sont deux des cinq récits qui font partie des
« Nouvelles de Pétersbourg », publiées en 1843, qui n'ont été regroupées qu'après-coup lorsque Gogol s'est aperçu du point commun qui les liait : la moderne capitale de l'Empire russe.
Pétersbourg, construite sur des marais par Pierre le Grand, était alors en train de devenir un véritable mythe. Mais cette magnifique construction surgie du néant, représente plutôt pour Gogol un espace de privation et d'aliénation …

« le manteau », c'est une histoire à la fois simple et tragique, celle d'un petit fonctionnaire copiste, du nom d'Akaky Akakiévitch, qui porte un manteau rapiécé, usé jusqu'à la trame, et qui après un long temps de privations s'achète enfin une pelisse, mais pas n'importe laquelle, la pelisse dont il rêve…
Le problème, c'est qu'il se la fait voler le soir même de son achat ! Et c'est absolument burlesque !
Mais il y a aussi un aspect fantastique dans cette nouvelle.
Le fantôme d'Akaky Akakiévitch va tourmenter son supérieur hiérarchique dans son sommeil !
« le manteau » n'est donc pas seulement le récit réaliste d'une vie faite d'humiliations et de privations ! Cet Akaky, il est grotesque, mais il est touchant, et finalement si on rit de lui, on le plaint aussi. Akakiévitch est un être prisonnier de Saint-Pétersbourg. Son aventure est entièrement déterminée par sa pauvreté. Il trouve refuge dans le rêve d'un manteau chaud, solide, presque élégant, un rêve qui exprime bien l'ingratitude de son sort !

Avec « le nez », on plonge littéralement dans le fantastique.
C'est comme si un des morceaux du corps, le nez, avait pris soudain toute son indépendance !
« Espérons que je me suis trompé. Il est impossible que mon nez ait fait la bêtise de disparaître (..)
Un phénomène inexplicable venait d'avoir lieu sous ses yeux. Un carrosse s'était arrêté devant l'entrée, la portière s'était ouverte ; se pliant en deux, un monsieur en uniforme avait sauté dehors et avait gravi le perron en courant. Quelle fut l'horreur et en même temps la stupéfaction de Kovalev quand il constata que c'était là son propre nez ! (..) le pauvre Kovalev faillit devenir fou. Il ne savait que penser d'un événement aussi étrange. Comment était-il possible, en vérité, qu'un nez qui, hier encore figurait sur son visage, ne pouvant ni marcher ni rouler carrosse, se retrouvât en uniforme ? »

Le major Kovalev est un homme qui aspire à s'élever dans la hiérarchie. Son histoire pourrait se résumer comme un drame de l'ambition. le désir de parvenir à un poste plus élevé aurait-il provoqué cette scission de sa personne ? Son nez, sitôt doué d'une existence indépendante, ne trahit-il pas les désirs secrets de son propriétaire ?
Chacun pourra interpréter à sa façon et se faire sa propre opinion…

Gogol tisse une toile de fond réaliste sur laquelle il brode, imagine, rêve, et inonde ces récits pétersbourgeois de fantastique et de caricatures. C'est très plaisant et intéressant.
Pour revenir au réalisme de Gogol qu'évoque Gontcharov dans la citation du début de mon billet, s'il n'y a pas plus réel qu'Akaki Akakiévitch, cependant ce personnage semble vivre dans un système, dans un monde qui lui est propre, différent du monde réaliste du commun des mortels.
Le « manteau » est pour lui l'âme du monde qui le réchauffe. Il l'appelle
« compagne de ma vie ».
Au milieu de la perspective Nevski, il a l'impression de marcher le long d'une ligne qu'il a tracée sur une feuille de papier. C'est un personnage dont l'état de conscience est fantastique.
Dans les personnages du « manteau » et du « nez », il y a une certaine folie diabolique, une folie qui est déterminée par le milieu moderne et citadin dans lequel ils évoluent.

Ce livre me paraît être une très bonne porte d'entrée pour qui n'a pas encore fait connaissance avec l'oeuvre de Nikolaï Gogol en général. Je ne peux que le conseiller vivement !
5/5 !
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Le Nez est une nouvelle humoristique et absurde mais qui dépeint parfaitement l'importance de l'apparence et par là celle du jugement des autres ! le Nez est vu dans un petit pain, sur la figure d'un autre, même une annonce ne le fait pas réapparaitre et le propriétaire du dit-nez ne peut se montrer en société sous peine de perdre toute crédibilité.

Le Manteau en est une beaucoup plus sombre mais qui montre aussi l'importance qui est donnée à cette apparence quelle que soit la classe sociale. Arkadi est copiste et s'applique jusqu'à la calligraphie dans cette tâche subalterne où il est aussi invisible que le verre ! Pour tenir son rang, aussi petit soit-il, il voudrait se faire tailler un manteau, le sien est usé à la trame et source de moquerie et de mépris. Un parcours difficile qui finira dans la douleur et sans reconnaissance !

Ces deux nouvelles dans des registres différents n'ont pourtant qu'un sujet commun : l'apparence et sa nécessité pour être reconnu et si possible respecté. Les écrits de Gogol sont une analyse critique de la société russe dans son ensemble mais tellement subtils qu'ils peuvent s'apparenter à des fables.

J'ai toujours énormément et autant de plaisir à lire sa prose !

Challenge Riquiqui 2022
Challenge XIXème siècle 2022
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La simplicité de l'intrigue

Bon, il s'agit ici d'une oeuvre majeure, qu'il faut lire avant Les Ames mortes et Tarass Boulba, voire le Révizor dont Pouchkine son ami lui avait confié le soin d'exploiter le thème vu ses prouesses satiriques. le Manteau donne un avant-goût de ce peut être l'esprit de l'auteur, ainsi que son style, et si cette nouvelle plaît, alors ses oeuvres plus importantes plairont.

Attention, d'une simple évocation carrément pathétique, tragique, Gogol monte en gamme, sinon ce ne serait pas Gogol, et là, qui aurait pu l'atteindre dans ces eaux lumineuses, supérieures ? Il fait figure de pionnier, en Russie du moins, on ne va pas remonter à Shakespeare.. Il y a sur le chemin de l'artiste de la dérision et de l'absurde qu'il entend encore transcender pour aboutir à de vraies interrogations sur le sens de la société, de l'administration impériale, non pas en lui coupant la tête, mais en se saisissant des choses positives pour en faire un monde meilleur. Nous sommes là dans la prospective, dans le surmoi. le nom de Dostoïevski vient tout de suite à l'esprit. Celui-ci dira d'ailleurs que nous sommes tous issus du "Manteau" et lui sera infiniment reconnaissant lors de sa mort, par des mots magnifiques, édifiants en guise d'hommage et d'héritage culturel.

Gogol se révélera intraitable vis-à-vis de l'administration tsariste, il écrit cette nouvelle fantastique à une époque où Nicolas 1er engage la réaction vis-à-vis de tout perturbateur. Gogol se jouera de ces caprices arbitraires, connaîtra pas mal d'ennuis, les fuira pour un temps excédé par les tracasseries de l'administration en s'exilant en Europe.

Akaki Akakiévitch est pris tel quel avec cette pauvreté ordinaire et son allure "minable", ai-je lu, dans cette oeuvre où humour, causticité, poésie pointent à chaque page. Pour avoir voulu un jour rompre le cours de son lot : se métamorphoser, il le paiera au prix fort. Et le magicien Gogol n'abandonne pas pour autant son héros qui va régler ses comptes dans la peau d'un fantôme, et la boucle de la révolte, de la justice humaine sous forme allégorique sera bouclée.
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Alors je découvre, avec ces deux magnifiques nouvelles, l'écriture de Nicolai Gogol.
Les deux nouvelles sont parfaites mais ma préférence va vers le nez. Je trouve qu'il y manie l'absurde et le surréalisme, avant l'heure, d'une très bonne manière. Cet homme cherchant son nez, qui n'hésite pas à se déguiser pour s'échapper et le barbier qui croit avoir réaliser une forfanterie sont à mourir de rire. le récit m'a beaucoup plus dans son thème et dans sa construction.
Avec le manteau, je me suis un peu plus ennuyé. Pas vraiment ennuyer, mais je trouvais cela un peu plus plat. Heureusement les petits brins d'humour viennent adoucir un récit qui pourrait être assez dur dans le thème. Ce qui m'a fait aimer cette nouvelle, c'est la fin, avoisinant plus facilement le style fantastique plutôt que classique.
Deux très bonnes nouvelles, que je conseille à tous. Une lecture rapide, intense et drôle.
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Comme beaucoup de lecteurs, j'ai particulièrement apprécié le manteau; mélange entre le comique, le drame et l'ironie, en considérant le style très "moderne" de Gogol pour son temps et unique, c'est véritablement un chef d'oeuvre ...qui ne prend même pas un jour à lire!
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Le manteau et le nez 2 nouvelles fantastiques situées à Saint-Pétersbourg.Dans le manteau, un fonctionnaire perd son manteau doté d' une identité propre, une satire de la fonction publique russe.Saint-Pétersbourg sous la neige est très mystérieux.Dans le nez, c' est le nez d' un jeune Russe qui se détache et se pavane dans la ville en uniforme au grand dam du jeune Russe, une description très savoureuse de la société russe de l' époque.Humour typiquement russe.On visite la grande ville.Gogol a bien fait de s' éloigner du folklore ukraïnien de Tarass Boulba
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Que l'on m'apporte mon ..........?............. Les soirées sont fraîches à Saint Petersbourg, et voyez- vous... d’ailleurs... selon moi... je le crois encore bon... sauf un peu de poussière... Eh ! sans doute il a l’air un peu vieux... mais il est encore tout neuf... seulement un peu de frottement... là dans le dos...

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