Susannah Atkins et Stanley Fillmore sont en couple depuis une douzaine d'années et chez eux c'est plutôt madame qui porte la culotte. Elle est architecte, très investie dans son travail, trop sans doute, au point d'en oublier l'écrivain raté qui lui sert de mari, réduit au rôle de simple faire valoir. Lui déplore cette évolution et rêve de retrouver les emballements des débuts.
Le soir de la Saint Valentin, il lui prépare un dîner en amoureux : repas fin, chandelles, musiques douces et suggestives, prévoit même une petite pilule magique pour que la soirée se termine au mieux. Bien qu'il réussisse à raviver la flamme et obtienne cette nuit de sexe qui lui manquait tant, Stan a une autre idée en tête pour finir la soirée. Simulant une attaque cardiaque en plein « effort », il attire sa femme à l'extérieur et la pousse sous les roues d'un gros 4x4…
Stan avait tout planifié au quart de poil, comme de refaire sa vie avec sa nouvelle copine, mais le sort s'acharne sur lui : sa femme n'est « que » dans le coma ; son complice lui réclame une rallonge compte tenu du risque d'être reconnu ; et sa maîtresse, qui n'était pas au courant de ses projets, est tout éplorée par l'accident et lui annonce qu'elle est enceinte…
Avec un humour pince-sans-rire,
Kenan Görgün dresse le portrait sarcastique d'un homme perdu au pays des femmes puissantes. Un loser du sentiment amoureux. Stan en veut énormément à sa femme d'avoir voulu le modeler, d'avoir fait, selon lui, semblant de croire à son talent alors que lui-même ne parvenait pas se convaincre de son existence.
Face à Susannah, Stan se sent inférieur, voire rabaissé par son autorité, son assurance.
Oublie que je t'ai Tuée se présente comme une longue séance d'auto flagellation, une série de complaintes nombrilistes. Stan ne s'aime pas, n'a pas confiance en lui, Stan est lâche, n'a jamais rien réussi, tout le monde fait mieux que lui…
À travers ce personnage, c'est une bonne part de la gent masculine qui en prend pour son grade. le mâle lambda en ressort dans un état guère reluisant à force de s'apitoyer sur son sort sans jamais vraiment se regarder en face (ou seulement, bien sûr, lorsqu'il est trop tard), cherchant toujours une excuse minable à ses défaites, ses renoncements, ses exagérations.
C'est parfois bavard, comme
Woody Allen sait si bien l'être, truffé de références musicales et cinématographiques, ponctué de portraits acides, mais j'ai eu quelques difficultés à me laisser embarquer par le « pauvre » Stan dans ses déboires amoureux, tellement obnubilé par sa propre personne qu'il en oublie de se transformer en « exemple ». Il m'a manqué une forme de perche tendue afin de faciliter un attachement au personnage. Trop de distance, malgré l'humour de l'auteur et ses sarcasmes.
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