Préambule:
La méthode employée par l'auteur peut être vue comme s'inscrivant dans la tradition des poèmes monastiques moscovites. Ici, les mythes grecs et chrétiens, qui, précisons-le, ne sont pas considérés comme des fictions, servent à théâtraliser l'interprétation, d'une façon plus fine que le B-A-BA de l'intrication, Bob et Alice. Donc, le lecteur est ainsi convié à se placer au plus haut niveau de la réflexion. Une illustration de la méthode est fournie par Ivan (Jean) KARAMAZOV, dans le conte philosophique, le Grand Inquisiteur, du roman de
Fiodor DOSTOIEVSKI intitulé
Les Frères Karamazov, qui traite de la nature humaine, de la liberté et de la manipulation. Ce préambule est utile afin de ne pas considérer une spécificité de la culture de l'auteur comme une originalité absolue, mais comme une application habile et pertinente de cette approche pédagogique traditionnelle à la physique quantique.
Pour les décideurs:
Cet ouvrage pourrait aider à convaincre une élite de décideurs ayant un bon niveau de culture générale. En effet, si les mathématiques sont le langage de la nature, elles ne sont pas celui des décideurs qui, dans bien des cas, possèdent un corpus de connaissance littéraire.
L'approche d'
Alexei GRINBAUM , qui se réfère résolument aux mythes de notre culture européenne, présente au moins les avantages suivants :
- elle rompt le cloisonnement entre scientifiques et décideurs quant aux enjeux cruciaux de notre temps;
- elle rompt le cloisonnement, l'emprisonnement dans l'instant présent, dans l'éphémère, et replace les enjeux durables dans une véritable perspective à long terme ;
- elle nous émancipe de l'air du temps et nous évite de prendre pour des nouveautés ce que nos anciens ont déjà pensé;
- elle nous convie à l'utilisation composée des mythes grecs (littéraire) et des mathématiques afin de dépasser les mythes scientifiques (positivisme, cerveau droit ou gauche);
- elle nous montre que , comme l'énonce
François CHENG, la beauté guide pour partie notre approche du réel qui ne pourrait se penser qu'en composant rationnel et irrationnel à l'instar des nombre éponymes ;
- elle nous replace dans un savoir collectif, humble, modeste, un humanisme qui contrecarre l'ultra- individualisme de notre temps et nous conduit à nous asseoir de nouveau sur les épaules des géants, ce qui nous offre de nouveaux horizons.
Donc, enfin un ouvrage qui peut faire en sorte que l'Europe puisse prendre les décisions politiques pertinentes, en connaissance de cause et continuer à innover voire à renouer avec la notion de progrès et un temps de redevenu constructeur.
Pour tout un chacun:
Force est de constater que l'engagement de Jacqueline de
ROMILLY en faveur de l'étude des humanités, du renouveau des valeurs civiques et de l'enseignement du grec ancien et du latin n'a pas encore produit les fruits escomptés. Or nous observons le bien-fondé d'une connaissance de l'histoire de notre pensée pour comprendre les avancées d'aujourd'hui.
Alors quelle approche pédagogique adoptée, en évitant de réinventer l'eau chaude à cause de notre ignorance?
Une première piste serait d'adopter la maïeutique d'
Albert EINSTEIN qui consistait à s'adresser à nous, à nous impliquer dans un sujet par des questions d'enfants puis, pas à pas, à nous faire gravir des sommets, en guidant notre capacité à penser une réalité, en stimulant notre intelligence. Donc, avec cette approche, les prérequis de connaissance, le ticket d'entrée culturel, semblaient très limités pour prendre le départ de l'excursion (atteindre le sommet au rythme imposé est une autre paire de manches)
Une seconde piste serait d'utiliser une approche renouvelée, mise à jour, de la série de M. TOMPKINS, de
Georges GAMOW. En ce sens, une utilisation de la réalité augmentée, des jeux virtuels de toutes sortes pourraient nous y aider. Une synthèse serait de créer, avec des mythes grecs, des jeux qui susciteraient le même engouement que ceux à base de Mangas japonais.
Enfin quoi qu'il en soit, la tradition française de formation d'ingénieur généraliste doté d'une bonne culture générale avec ces aspects techniques, dans la philosophie de
Gilbert SIMONDON, devrait s'en trouver renforcée.
En conclusion, un livre qu'il faut avoir lu parce qu'il contient quelques clés pour l'avenir, non seulement pour ses explications scientifiques, mais aussi pour ses enjeux philosophiques implicites comme celui, au XXI ème siècle, d'atteindre l'objectif d'un travail* réellement humain, fixé par l'organisation mondiale du travail, dès 1919, où connaître l'histoire de nos pensées devient crucial. Ainsi, l'un des enjeux, l'une des gageures, serait de "sortir de l'age du calculatoire", "sortir de l'age de pierre industriel" afin de conquérir de nouveaux horizons.
*ici, travail n'est pas synonyme d'emploi, mais d'un effort, d'une action pour fixer matériellement et moralement une pensée, un imaginaire.
Bonne lecture