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"Vie et destin" est un grand roman russe. Par "grand roman russe", entendons, sur le modèle de Guerre et Paix de Tolstoï, un récit en prose assez long, des personnages évolutifs, des intrigues, mais surtout la rencontre de tous ces éléments avec la grande Histoire, figure du destin, du collectif et de la Nécessité. Chez Tolstoï, il s'agit des guerres napoléoniennes, chez Grossman, de la bataille de Stalingrad. "Guerre et Paix" se place au point précis où l'entreprise impériale française trouve sa limite et sa fin, "Vie et Destin" est situé à un moment comparable, pour ce qui concerne l'empire allemand de Hitler. La grandeur de ces romans, que seuls les Russes, semble-t-il, savent écrire (mais on peut lire aussi "Migrations" du Serbe Milos Tsernianski), c'est la rencontre de la vie individuelle des personnages romanesques, et du destin collectif des peuples, de la politique et de la guerre.

Le roman de Grossman est si vaste que, pour une simple chronique, on ne saurait tout dire. Pour résumer, on avancera qu'il s'agit ici, d'abord et avant tout, d'un roman, à savoir d'une fiction qui fait appel à l'imagination, invente des personnages et des situations, promène le lecteur en des lieux interdits : on assiste à de longues discussions entre internés dans des camps de concentration russes ou allemands, on voit Eichmann trinquer pour inaugurer la chambre à gaz flambant neuve que ses ingénieurs viennent de construire, Staline est au téléphone avec un physicien juif mal vu de ses supérieurs, on meurt avec un personnage gazé, on erre dans l'Ukraine affamée avec un soldat russe perdu, etc ... L'imagination romanesque construit l'histoire au niveau de chaque personnage, jusqu'à ce qu'une conversation entre un détenu et le commandant allemand de son camp révèle le sens profond de ces promenades imaginaires et littéraires d'un camp à l'autre : nazisme ou stalinisme sont deux faces de la même réalité tyrannique et sanguinaire, sont deux forces équivalentes en nature et en valeur, qui luttent l'une contre l'autre pour la suprématie. ('Liss [commandant du camp allemand] approcha son visage de Mostovskoï : "Vous me comprenez ? Je ne parle pas parfaitement russe, mais je voudrais tant que vous me compreniez ... Nous sommes vos ennemis mortels, oui, bien sûr. Mais notre victoire est en même temps la vôtre. Vous comprenez ? Si c'est vous qui gagnez, nous périrons, mais nous continuerons à vivre dans votre victoire. C'est un paradoxe : si nous perdons la guerre, nous la gagnerons, nous continuerons à nous développer sous une autre forme mais en conservant notre essence." p. 469) Qu'on se réfère au roman communiste de Malraux, "L'espoir" : l'auteur disait qu'en aucun cas, il n'aurait pu camper, mettre en scène, faire interagir et dialoguer des Franquistes. Les Franquistes, dans son roman, ne sont présents que sous la forme de lointains avions, de forces mécaniques et impersonnelles, l'humanité étant incarnée, elle, par les Républicains de gauche. Grossman procède tout autrement, et c'est justement ce triomphe du roman qui rend son livre tellement scandaleux, au plan politique, puisqu'il n'y a plus ni bons, ni méchants. On pourrait dire avec Philippe Muray, que Grossman, en échappant aux engagements idéologiques obligatoires et au manichéisme politique, "désobéit au XX°s", et le roman avec lui.

Que représentent les deux abstractions accolées, "Vie" et "Destin" ? On saisit (et c'est explicité dans les dernières pages du livre) que le destin est la guerre, à savoir la politique, l'oppression que subissent les hommes pris entre deux régimes totalitaires féroces ("La vie était horrible. Et ils surent qu'une fois la guerre terminée, la force qui les avait jetés au fond de ce trou, leur avait enfoncé la gueule dans la boue, cette force opprimerait les vainqueurs aussi bien que les vaincus." p. 514) . La vie, de son côté, s'épanouit en mille formes variées : l'herbe, les saisons, les amours, les angoisses, tout ce que les êtres humains éprouvent sur la terre. ("Pourquoi je pleure ? Comment te dire ? Je pleure parce que je vis, je pleure de chagrin parce que Slava n'est plus et que je vis... je pleure à cause de la lumière du matin : tout est si beau autour et le malheur est si grand. Pour tous, et pour moi aussi..." p. 508) Peu de lyrisme cependant (au moins dans la traduction française) : Grossman semble un écrivain marqué par sa formation de romancier réaliste socialiste, à qui tout sens de la transcendance a été ôté. En revanche, on trouve de nombreux passages pédagogiques, explicatifs, explicitant ce qu'il faut penser de ceci ou de cela, ce qui range l'auteur dans l'école des auteurs de gauche publiant pour l'édification des masses.

Voilà peu de mots, qui, je le crains, ne disent pas l'essentiel de ce roman foisonnant. J'espère au moins qu'ils inciteront certains à se lancer dans la lecture de cet ouvrage qui compte parmi les plus importants du XX°s.
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« Pour s'implanter, le totalitarisme a besoin d'individus isolés et déculturés, déracinés des rapports sociaux organiques, atomisés socialement et poussés à un égoïsme extrême. » Hannah Arendt

Vie et destin : deux mots qui se juxtaposent dans un titre qui invite à l'universalité.
Vie et destin est un roman autour de la célèbre bataille de Stalingrad entre 1942 et 1943. Pourtant, dans cette fresque monumentale, ce n'est pas à un roman de guerre que nous convie Vassili Grossman.
Ce fut un moment crucial dans l'histoire soviétique voire mondiale, en effet la bataille de Stalingrad fut tout d'abord une sévère défaite de l'Armée rouge puis dans un second temps la victoire déterminante russe prenant à revers les forces allemandes et qui fut décisive pour le cours de l'histoire, le destin du monde et de l'humanité.
La fin de la guerre, la défaite du nazisme, la paix retrouvée, un renouveau possible, tout ceci fonda un immense espoir pour le devenir démocratique de l'URSS. Stalingrad, c'est le mythe de la grande guerre patriotique, fondatrice, qui survit encore aujourd'hui dans le désir de Poutine de réunifier la grande Russie.
Comment décrypter l'envers sombre du décor sans contester immédiatement les espoirs de justice et de démocratie puisque nous allions vers des lendemains qui chantent, même si plus tard ces lendemains déchantèrent très vite ? Dans l'histoire de la Russie, les souffrances et des humiliations d'un peuple furent effacées au profit de la gloire russe.
Écrit sous Staline, publié sous Khrouchtchev, saisi par le KGB, ouvrage séquestré, mutilé par la censure durant plusieurs années, ce livre a aussi une histoire, appartient à l'histoire. Il est vrai que Vassili Grossman n'y va pas par quatre chemins.
Ce n'est pas qu'un roman de guerre, cela ressemblerait plus à un roman à thèse, le récit de deux totalitarismes qui se sont affronté en face à face, sous deux formes de destruction de l'humanité.
Entre le nazisme d'Hitler et le bolchévisme de Staline, il y a bien une différence nous dit Vassili Grossman : d'un côté un fanatisme de race, de l'autre un fanatisme de classe. de quel espoir peut-on parler si deux régimes finissent par se ressembler tels des miroirs, se renvoyant une image effroyablement identique ? de quelle délivrance peut-on parler si à l'instant même où l'un des adversaires écrase l'autre, on s'aperçoit brusquement qu'ils sont jumeaux.
C'est cette polarité qui vient donner tout le sens du roman : cette question d'un totalitarisme partagé qui enjambe la tragédie d'un siècle de feu et de sang. Comment le XXème siècle a-t-il pu engendrer deux formes si différentes et si semblables, de totalitarisme exterminateur ? Et comment ce totalitarisme a-t-il pu se poursuivre jusqu'au XXIème siècle, jusqu'aux porte de l'Europe ? Qui en porte la responsabilité ?
Ce parallèle entre le dessein du nazisme dans son objectif d'extermination du peuple juif et le totalitarisme soviétique peut paraître hasardeux, il apparaît dès le début du texte et va porter l'ensemble du récit dans un roman choral où différentes voix parfois d'une même famille russe s'entremêlent, mais qui nous fait entendre aussi celles de soldats allemands.
C'est un très long roman qui dresse un panorama édifiant du fonctionnement de la société soviétique en nous plongeant dans l'intimité d'une multitude de personnages, tous complexes, dont les parcours entrecroisés se heurtent à l'histoire dans une période marquée par les deux grands crimes produits par le totalitarisme du XXème siècle, Auschwitz d'un côté et le Goulag de l'autre.
Le livre se déroule sur plusieurs niveaux de réalité. Au centre de l'histoire, on y trouve la famille Chapochnikov, on fait ainsi connaissance avec les deux soeurs Evguenia et Lioudmila à travers leurs destins si dissemblables, mais aussi celui du personnage de Victor Strum, physicien atomiste, théoricien de talent qui voit s'abattre sur lui le fléau d'un antisémitisme que jamais il n'aurait imaginé, tant cela paraît si absurde dans une société dite « socialiste », donc vouée au bien de toutes ses populations. J'ai aimé venir à la rencontre de ce personnage presque insaisissable, traversant le livre, traversant la guerre, se révélant à lui-même, à son destin, à l'amour de Maria Ivanovna. D'autres histoires d'amour s'entremêlent dans le désastre du monde, comme celle d'Evguenia Chapochnikov et du colonel Novikov.
Sur cette scène tragique de l'histoire mondiale, Vassili Grossman fait entendre le peuple, à travers le point de vue de quelques personnages essentiels, en nous faisant déambuler parmi chacun d'eux, capter un regard, une attitude, un geste, corps après corps, tout ceci donne le sentiment du monde, la sensation qu'on rencontre ici le monde, qu'on rencontre un peuple.
Le lecteur doit prendre son courage à deux mains et accepter de se plonger dans un océan de près de mille deux cents pages où il sera emporté comme dans un fleuve, où il se perdra, où il entrera dans des maisons, des laboratoires de physique nucléaire, des usines, dans des camps de concentration, au seuil des chambres à gaz, où il abordera le front de Stalingrad, l'emprisonnement de l'étau allemand, le huis-clos d'une maison acculée et qui résiste dans des conditions totalement ubuesques, où il sera invité à converser avec toute une myriade de personnages dont il oubliera les noms à peine la lecture achevée.
C'est une diversité des voix qui composent Vie et destin, que l'on peut voir aussi comme un roman psychologique, éclairant les ressorts de l'âme de ses protagonistes, leurs contradictions, leurs interrogations et leurs évolutions, avec beaucoup de finesse. À la question obsédante de savoir comment survivre, certains expriment le courage, d'autres l'angoisse, d'autres la lâcheté, d'autres enfin la tendresse ou l'amour… Dans un désir d'honnêteté intellectuelle qu'on peut saluer, Vassili Grossman nous livre une peinture sans concession de l'âme humaine face à la violence de l'État qui broie l'intime des vies individuelles, transformant ces vies en êtres méprisants, il va très loin dans la manière de visiter l'être humain dans ses turpitudes, mais il ne juge jamais, se contentant de dire jusqu'où celui-ci peut aller lorsqu'il est acculé, dos au mur face à la barbarie.
Montrer l'individu au milieu de la foule m'a rappelé une certaine tradition tolstoïenne de l'épopée. Même si l'histoire est centrée sur une famille en particulier, les Chapochnikov, j'ai trouvé que la difficulté du roman tenait à la profusion des personnages dont aucun n'émerge en définitive, insuffisamment creusés, j'ai déploré que les histoires d'amour ne soient pas suffisamment incandescentes pour me transporter, l'écrivain s'intéressant davantage au propos idéologique qu'il développe tout au long du livre. Des personnages entrent en scène chapitre après chapitre, leurs destins se croisent dans le fracas de la guerre et le malheur du monde : l'incompréhension, le désir de liberté, la résistance, les trahisons, les lâchetés, la prison politique, la torture, l'humiliation des procès, l'exil en camp de concentration, l'enfermement dans un ghetto, la mort. Les amours clandestines suscitées par les méandres de la guerre deviennent des citadelles fragiles. Vassili Grossman n'a pas le génie littéraire de Léon Tolstoï, malgré le désir de poser un souffle romanesque et Vie et destin n'atteint pas, selon moi, la grandeur inégalable de Guerre et Paix. La qualité littéraire du propos de Vassili Grossman manque au rendez-vous de cette immense fresque.
J'ai pourtant rencontré des passages bouleversants qui disent le sens et la dignité du roman, la lettre émouvante d'une mère à son fils blessé sur le front… Plus loin, cette femme qui mourra dans un véritable sentiment maternel, serrant tout contre elle un enfant qui n'est pas le sien mais le devient dans ce mouvement brownien qui mène une foule à la chambre à gaz… Puis tout à la fin du récit, ces deux amants qui doivent renoncer à leur liaison après la guerre, sans que le sentiment d'amour ne s'efface pour autant…
Le nazisme, c'est le mal absolu dans la quintessence de l'horreur, cela ne peut être contesté. Dire que le communisme est semblable est une démarche audacieuse. Dans cette analogie, Vassili Grossman va très loin. Dans sa genèse, le communisme était une belle idée, tout comme le christianisme : aider son prochain, mais dans une vision absolument collective. Même si à l'origine c'est une idée au service du bien, c'est le mal qui advint. de même, l'idéologie du nazisme convoquait Dieu pour justifier une forme de bien pour l'humanité. Beaucoup de personnes ne peuvent pas encore recevoir cela.
Tout ce mal qu'on fait pour tenter le bien… le combat au nom d'un bien universel fait du mal car il sacrifie l'humain, c'est le propos du livre. Mais en contrepoint de cette volonté d'un bien qui produit du mal, Vassili Grossman nous parle aussi à plusieurs reprises de bonté. À chaque fois, la bonté prend le visage d'une femme, d'une vielle femme d'ailleurs ? Faut-il y voir un signe, un message ?
Il y a encore des fulgurances de bonté possibles, malgré tout. Des endroits existent, dans les pages de ce livre, où se terre une foi dans l'humanité, malgré le mal, dans le visage de ces femmes notamment… Cette bonté privée d'un individu à l'égard d'un autre individu, parfois à l'égard d'un ennemi blessé qu'une vieille femme va nourrir, va soigner alors que la guerre a fauché ceux qu'elle aimait, une bonté sans témoins, une petite bonté sans idéologie, cette humanité qui ne fait pas de bruit. On pourrait la qualifier de bonté sans pensée. La bonté des hommes hors du bien religieux ou social, intimé, ordonné, absolu, qui se termine parfois dans le sang… J'ai aimé me laisser séduire par ce propos.
On dit que ce roman a changé une certaine vision du monde.

« L'État fasciste soutient le médiocre contre celui qui pense, l'incapable contre le talentueux. » Jeliou Mitev Jelev, le Fascisme

Je remercie une fois encore ma fidèle complice Anna (@AnnaCan) qui m'a accompagné dans cette lecture d'une oeuvre magistrale et qui ne fut pas toujours un long fleuve tranquille.
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« Vassili Grossman traduit les réalités du nazisme par des équivalents soviétiques familiers au lecteur (…) Il s'est passé chez eux la même chose que chez nous.»
Luba Jurgenson

« Il s'est passé chez eux, dans l'Allemagne nazie, la même chose que chez nous, dans l'Union soviétique ». Rien que pour cela, rien que pour cette analogie profondément iconoclaste et dérangeante encore aujourd'hui, sans parler de sa puissance disruptive dans l'URSS du début des années soixante où une telle parole était rigoureusement interdite et durement sanctionnée, rien que pour cela, donc, ce livre profus, fourmillant d'une myriade de personnages que le lecteur peine à relier entre eux ou à l'intrigue, dont la construction narrative saccadée, faisant se succéder à un rythme d'enfer la puissance de feu de la bataille de Stalingrad à la mort par asphyxie dans une chambre à gaz, l'attente d'une offensive improbable dans la poussière des steppes kalmoukes à la peur insidieuse, honteuse des moscovites traqués par la tchéka, ce livre épique, ample fresque historique, philosophique, sociologique, psychologique parfois difficile à suivre, vaut véritablement la peine d'être lu.
Rien que pour cela. Pour le démontage patient, rigoureux, scientifique des mécanismes des systèmes totalitaires auquel se livre l'auteur afin d'en exhiber l'implacable logique. Établissant un parallèle entre les ravages de la collectivisation dans les années trente avec sa litanie de famines, de déportations, ses millions de morts et l'extermination massive des Juifs d'Europe, entre les grandes purges staliniennes de 1937 et la Nuit des longs couteaux, ou encore entre les camps de concentration nazis et le Goulag, Grossman n'en finit pas de confronter l'un à l'autre régime dans un vertigineux jeu de miroirs particulièrement sinistre.
Il pousse très loin l'analogie, allant jusqu'à renvoyer dos à dos le « Bien » poursuivi par les nazis, assis sur la distinction de race, et le « Bien » poursuivi par les soviétiques, assis sur la distinction de classe. le propos de Grossman, qui, inexorablement ramené à sa judéité à mesure que la haine et l'antisémitisme submergeaient l'Est de l'Europe, exterminant les siens, en premier lieu sa mère restée en Ukraine, n'est certainement pas d'établir une stricte équivalence entre les « idéaux » (du point de vue de leurs promoteurs) poursuivis par les deux régimes. Ce qu'il pointe en revanche, et ce sans la moindre ambiguïté me semble-t-il, c'est que vouloir soumettre l'homme à une Idée, quelle qu'elle soit — autrement dit, dans son cas à lui, Grossman, que cette Idée lui parût noble et vertueuse (l'idéal communiste) ou parfaitement monstrueuse (l'idéal nazi) — conduit invariablement au même résultat : des millions de morts.
Car dès lors qu'on « sacrifie l'homme concret à une conception abstraite de l'homme », on verse inévitablement dans le fanatisme et la terreur :
« J'ai pu voir en action la force implacable de l'idée de bien social qui est née dans notre pays. Je l'ai vue au cours de la collectivisation totale; je l'ai vue encore une fois en 1937. J'ai vu qu'au nom d'une idée du bien, aussi belle et humaine que celle du christianisme, on exterminait les gens. »

Rien que pour cela, donc. Et même si ce livre foisonnant aurait gagné, à mes yeux, à être mieux équilibré entre la part dévolue au récit épique, aux réflexions stratégiques, militaires, philosophiques, scientifiques et la part ressortissant aux personnages, à leur ressenti, à leurs émotions, à leurs interactions, suivant en cela le modèle du genre, Guerre et paix dont Grossman disait s'être inspiré, je ne regrette pas le voyage.
D'autant que je n'étais pas seule, accompagnée dans ce périple au long cours par mon complice indéfectible, Bernard (@Berni_29). Rien que pour cela…
Cela dit, Vie et destin est bien plus qu'un roman à idées (aussi approfondies et originales soient-elles), bien plus qu'une fresque historique (aussi ambitieuse soit-elle), bien plus qu'un récit de guerre avec pour épicentre la bataille de Stalingrad. Il est également un roman d'introspection. Non parce que l'auteur s'y livrerait à une confession. Mais parce que, puisant dans sa biographie des éléments propres à nourrir sa réflexion, il fouille, explore l'âme humaine jusque dans ses tréfonds, mettant au jour ses contradictions, ses faiblesses, ses hontes, ses peurs et parfois aussi, sa grandeur. Non pour juger, mais pour comprendre. Qu'il évoque l'insondable douleur d'une mère face à la perte de son fils unique, les tiraillements d'une femme passionnée écartelée entre le devoir et l'amour, le décillement d'un communiste de la première heure confronté à l'arbitraire d'un régime absurde, ou les compromissions honteuses d'un physicien juif de renom, cela sonne toujours juste.

Grossman sait, pour l'avoir vécu dans sa chair et dans son âme, que les ressources de la tyrannie sont infinies et que la liberté humaine est fragile.
« La tristesse, le dégoût, le pressentiment de sa docilité l'envahirent. Il sentait sur lui le souffle tendre du grand État et il n'avait pas la force de se jeter dans les ténèbres glacées… Il n'avait plus de force du tout. Ce n'était pas la peur qui le paralysait, c'était autre chose, un sentiment terrifiant de soumission. »
Il sait, pour avoir assisté, impuissant depuis Moscou, à l'assassinat de sa mère, exterminée avec tous les Juifs de Berditchev en septembre 1941, que ce qui domine chez l'homme, ce n'est pas la révolte et la résistance, mais la résignation et la soumission. Chez les bourreaux comme chez les victimes.
« Bien sûr, il y eut la résistance, il y eut le courage et la ténacité des condamnés, il y eut des soulèvements, il y eut des sacrifices, quand, pour sauver un inconnu, des hommes risquaient leur vie et celle de leurs proches. Mais, malgré tout, la soumission massive reste un fait incontestable. »
Sans doute avait-il compris que la soumission, davantage que la haine ou les bas instincts, est l'auxiliaire zélée du mal, comme l'a magistralement montré Hannah Arendt lors du procès d'Eichmann à Jérusalem, que c'est elle, l'écoeurante soumission, la meilleure alliée de la tyrannie. Que les régimes totalitaires, s'il leur arrive de s'appuyer ça et là sur une poignée de psychopathes, peuvent avant tout compter sur la résignation du plus grand nombre et le zèle de petits hommes médiocres et opportunistes agissant comme des automates :
« Eichmann n'était ni un Iago ni un Macbeth, rien n'était plus éloigné de son esprit qu'une décision, comme chez Richard III, de faire le mal par principe. Mis à part un zèle extraordinaire à s'occuper de son avancement personnel, il n'avait aucun mobile. Et un tel zèle en soi n'était nullement criminel, il n'aurait certainement jamais assassiné son supérieur pour prendre son poste. Simplement, il ne s'est jamais rendu compte de ce qu'il faisait. »

Pour autant, la lucidité de Vassili Grossman — une lucidité qu'il paya au prix fort puisque tous ses manuscrits, tous ses brouillons furent confisqués par le KGB et qu'il mourut sans savoir ce qu'il était advenu de son oeuvre maîtresse — jamais ne verse dans l'amertume.

Jusqu'au bout, il conserve sa foi en l'homme.

« J'ai trempé ma foi dans l'enfer. Ma foi est sortie du feu des fours crématoires, elle a franchi le béton des chambres à gaz. J'ai vu que ce n'était pas l'homme qui était impuissant dans sa lutte contre le mal, j'ai vu que c'était le mal qui était impuissant dans sa lutte contre l'homme. le secret de l'immortalité de la bonté est dans son impuissance. Elle est invincible. »

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Un très grand livre, qui décrit de façon exceptionnelle la seconde guerre mondiale vue du côté russe, notamment lors de la fameuse bataille de Stalingrad.
Il y a aussi quelques passages qui décrivent la guerre vue du côté allemand.
Vassili Grossman, correspondant de guerre de l'armée rouge, était au premier plan pour voir et observer ce tournant décisif de la Seconde Guerre mondiale, et ensuite l'avancée de l'armée rouge pour repousser les nazis jusqu'en Ukraine.
Il y a les comparaisons entre les camps soviétiques (Goulag)et les camps d'extermination nazis. Il y a le culte de la personnalité des dictateurs Staline et Hiltler, le poids de l'État qui peut broyer les personnalités les plus fortes, et surtout il y a ceux qui croient sincèrement à des idéaux et qui sont anéantis par le système alors qu'ils en étaient les plus ardents défenseurs. C'est souvent terrible. Mais il y a aussi le thème de l'espoir qui apparaît parfois sous les figures de l'amour, et de la bonté.
Ce livre magistral est pour moi une démonstration de philosophie politique implacable des totalitarismes du XXème siècle, et des faiblesses de la nature humaine qui les ont rendus possible.
Un très grand livre.
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Après avoir adoré "La Fabrique des salauds" de Chris Kraus, je cherchais une oeuvre de la même ampleur mais sur un autre aspect du XXe siècle, plus spécifiquement sur l'URSS. La fantastique équipe de la librairie Millepages (Vincennes) m'a alors conseillé "Vie et destin" de Vassili Grossman dont les manuscrits avaient été confisqués par le KGB en 1962 mais qui est pourtant parvenu jusqu'à nous. La première chose qui m'a frappée, c'est l'écriture sublime et imagée de l'auteur ; on aurait envie de citer au moins une phrase par page !

La seconde, c'est le caractère profondément cinématographique d'une Europe à feu et à sang qu'il nous raconte à travers les voix de Mostovskoï, un prisonnier dans un camp de concentration, Krymov et Tchouïkov, des militaires pris dans le siège de Stalingrad, la famille bourgeoise de Lioudmila Nikolaïevna et son mari Strum, un scientifique renommé, Sofia Ossipovna, une doctoresse juive envoyée dans les camps d'extermination nazis, Guetmanov, un cadre du parti en Ukraine… Ramenée à hauteur d'hommes, les concepts parfois abstraits de la grande Histoire prennent une toute autre dimension comme la planification économique dite ennemie de l'innovation, la propagande et la désinformation, les procès politiques et la torture.

J'ai été particulièrement marquée par le face à face glaçant entre le détenu Mostovskoï et le SS Liss qui met en lumière toutes les similitudes entre fascisme et communisme et l'inspiration commune qui a lié Staline et Hitler (p. 526 à 541). Ces deux systèmes ont donné énormément de pouvoir à des hommes minables qui ont profité de leur position pour exercer leur vengeance contre le monde entier et broyer celles et ceux qui les entouraient. Ce livre est celui de ce grand moment de la Seconde Guerre mondiale où "la crainte mystique de l'armée allemande a pris fin en décembre 1941" avec la victoire de Moscou alors que celle de Stalingrad a permis de "créer une nouvelle conscience de soi dans l'armée et dans la population" soviétiques (p. 896). En conclusion, "cette guerre permit à Staline de proclamer ouvertement l'idéologie du nationalisme étatique" (p. 899).
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J'ai passé mon été, sous le ciel gris bleuté de Bretagne, en compagnie de «  Vie et destin » de Vassili Grossman.
Un chef-d'oeuvre de 1200 pages, dans l'enfer de Stalingrad.
l'auteur analyse, avec talent, clairvoyance et d'un trait de plume affûtée, la similitude entre la cruauté nazie et la brutalité du stalinisme. Il souligne la connivence terrifiante entre les camps d'extermination
et le goulag, entre trahison et suspicion.
Au fil des pages, le long des mots, l'écrivain dessine des personnages attachants, épris de vérité, luttant pour la liberté et débordants de tendresse. ce sont des individus , au coeur simple, transfigurés
par le souffle poétique du romancier. Ils portent en eux, l'amour du vivant et sauvent l'humanité.
cette fresque époustouflante, épique et magnifique a illuminé mes soirées estivales.
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Né dans une famille juive, en 1905, sur une terre ukrainienne appartenant alors à l'Empire russe, l'écrivain soviétique Vassili Grossman a peu à peu pris conscience de la complexité de son identité et de l'impossibilité pour un citoyen de construire librement son destin dans un régime soumis aux dogmes totalitaires du Parti Communiste. Il est mort en 1964, à Moscou. Considéré aujourd'hui comme son chef d'oeuvre, son roman Vie et Destin, achevé en 1962, avait été aussitôt saisi par les autorités soviétiques. Il ne sera publié qu'à partir des années quatre-vingt.

Vie et Destin raconte la bataille de Stalingrad, engagée à l'été 1942 entre les forces armées du Troisième Reich et celles de l'URSS. Les combats s'achèvent par l'encerclement des troupes allemandes et leur reddition pendant l'hiver. Une victoire salutaire de l'armée soviétique ! Son retentissement inversa le cours de la Seconde Guerre mondiale. Elle reste la page la plus glorieuse de l'histoire de la Russie.

Pendant que la bataille fait rage dans le centre et les quartiers industriels de la ville, l'auteur se penche sur le quotidien des membres d'une famille soviétique et de leurs proches. Des personnages incarnant des stéréotypes de leur société, dispersés sur un territoire vaste, exposés à des destins changeants ou contrariés, et qui s'emploient à survivre.

Les profils sont bigarrés : des officiers supérieurs, au combat sous le feu allemand et marqués à la culotte par des commissaires politiques veillant au strict respect de la ligne du Parti ; un spécialiste de physique nucléaire, fin observateur de l'âme humaine, y compris de la sienne ; un vieil ouvrier aux convictions bolcheviques inaltérables, prisonnier dans un camp allemand ; une femme médecin militaire, juive, déportée en camp d'extermination et menée jusqu'à la chambre à gaz, une scène horrifiante ; d'autres femmes, plus ou moins éloignées de leur compagnon, s'efforçant de subsister en ville, en dépit des pénuries et des bombardements ; des communistes déchus de leur aura et échoués au Goulag. A noter aussi quelques apparitions d'officiers allemands, nazis zélés ou soldats fatigués.

Au travers de ces personnages fictifs et de figures historiques réelles, l'auteur trace les contours d'une comédie humaine, dans laquelle chacun s'adapte et se comporte comme en temps de paix et de prospérité (relative). Emotions sentimentales, vanités ridicules, jalousies irrépressibles, lâchetés déniées, compromissions minables : personne ne manque à ses petits travers humains courants.

Grossman avait assisté de bout en bout, comme journaliste, à la bataille de Stalingrad. Il avait ensuite suivi l'armée soviétique jusqu'à Berlin et était entré dans les camps d'extermination nazis (Treblinka). Il n'hésite pas à renvoyer dos à dos les régimes totalitaires hitlérien et soviétique, qui confisquent les libertés individuelles au profit d'une collectivité fantasmée. Il avait aussi noté les failles de leur commandement militaire : pour nourrir l'hystérie du chef suprême, on sacrifie des hommes dans des assauts sans espoir, pour en saluer ensuite l'héroïsme. Grossman avait aussi perçu les limites de ce que les communistes appellent le centralisme bureaucratique, qui implique de se conformer aux décisions venues d'en-haut, même si le bon sens et la conscience conduisent à d'autres options.

Dans le roman, le Parti reproche au spécialiste de physique nucléaire de se consacrer à des théories contraires aux principes matérialistes de Lénine et d'être imprégné d'« abstractions talmudiques ». Un relent d'antisémitisme qui n'est pas un détail de l'histoire. Dès les purges de 1937, Staline s'en prend aux Juifs, qu'il accusera plus tard de « cosmopolitisme sans racine ». le rejet des Juifs prendra de l'ampleur au début des années cinquante, lors du prétendu complot des blouses blanches. En 1953, la mort de Staline aura peut-être évité une seconde Shoah.

A l'instar de Guerre et Paix de Tolstoï, dont Grossman s'était inspiré, la lecture de Vie et Destin manque de fluidité, en raison de la diversité des sites, du découpage des scènes et du nombre de personnages. Une complexité amplifiée par la tradition russe de désigner ceux-ci tantôt par leur prénom et patronyme, tantôt par leur nom, tantôt encore par leur surnom. Une lecture très longue, mais passionnante, qui apporte un certain éclairage aux événements actuels de Russie et d'Ukraine.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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Un roman fleuve qui retrace à travers la destinée des membres et proches de la famille Chapochnikov les heures où le système stalinien a failli basculer.
Intéressant à plus d'un titre :
- L'analyse politique est implacable totalitarisme en mettant sur le même plan l'emprise des systèmes fasciste et communiste sur la vie quotidienne des hommes. le poids immense du système soviétique basé sur la terreur et la délation régit tous les rapports humains et vient s'immiscer au sein même des familles.
- L'enfer des camps nazis y est particulièrement décrit de façon saisissante : il est difficile de retenir ses émotions lors de la scène emmenant Sofia et David à la chambre à gaz. Il est aussi incroyable qu'un système parallèle puisse prendre place à l'intérieur des camps, jusqu'à pouvoir penser organiser matériellement un soulèvement.
- La bataille de Stalingrad est un des temps forts du roman : elle est vécue au niveau des hommes du front, côté allemand et côté russe. L'épisode du bastion de la maison 6bis est prenant ?
Cependant, la lecture du roman outre ses longueurs est plus que difficile : il m'a fallu plus de 300 pages (et l'aide de Wikipedia) pour m'y retrouver dans la kyrielle de personnages et de pouvoir tisser les liens qui les reliaient.
Après des moments de doute et beaucoup de persévérance, il reste tout de même un roman puissant dénonçant les systèmes totalitaires pour leur absurdité et leur caractère humainement destructeur.
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Je viens de terminer ce gros livre, dans la nouvelle traduction de Berelowitch et Coldelfy-Faucard. Je dois de suite dire mes limites de lecteur : j'ai du mal avec les noms russes, qui font qu'un personnage peut être appelé de 3 ou 4 façons différentes, alors qu'on suit plus ou moins plus de 30 personnages. J'ai lu des livres d'histoire sur Stalingrad et sa bataille, sur les camps, sur la shoa par balles, sur la Grande terreur de 1937… Donc, pas de surprises, ou des remarques d'approximations ou d'inexactitudes. Enfin, c'est le premier livre de Grossman que je lis, et je n'ai donc pas lu Pour une juste cause, roman où la majorité des personnages de Vie et destin commencent leur histoire.
Tout ceci fait que cette critique est partielle : il y a une partie du texte que je n'ai pas suivi avec attention, perdu dans les personnages soit par leur nom, soit par le début de leur histoire raconté dans Pour une juste cause. Et je n'ai pas eu, comme d'autres, de révélation sur le côté historique de ce qui est raconté.
Alors, que reste-t-il de ma lecture ? Une vision largement étendue de cette période de l'histoire russe. La bataille, encore qu'elle soit plutôt racontée par ce qui se passe en arrière du front, est décrite par toute une série de petites scènes, faisant comprendre l'état d'esprit et les conditions de vie de ces acteurs, petits ou grands, de la guerre. Et, constamment, le poids de la peur d'être dénoncé comme opposant au régime par un commissaire politique, par un proche, un collègue, un rival, par n'importe qui. La guerre se fait à coup de ténacité héroïque, et de bureaucratie envahissante, de rapports d'amitié et de suspicion. Et rien ne compte autant que d'être bien vu par le haut du système, par Staline lui-même : que l'on soit un héros militaire, un communiste dévoué et de la 1ère heure, ou le découvreur d'une nouvelle théorie atomique, rien ne vaut si l'on est suspecté de n'être pas dans la ligne du parti.
Des parties parfois simples, presque plates. Des parties sur les émois amoureux des personnages que je n'ai pas aimées, un peu théâtrales, est-ce l'esprit russe ? Une partie sur l'interrogatoire d'un ancien dénonciateur, qui se retrouve de l'autre côté assez poignante, mais pas autant que le Zéro et l'Infini, d'Arthur KOESTLER, une merveille.
Pourtant, je conseille ce livre, parce qu'il fonctionne grâce à son ampleur, 1000 pages. On en ressort imprégné par une société bien particulière, où aucun geste quotidien ne se fait comme nous en avons l'habitude, parler entre amis, faire ses courses, obéir ou adapter un ordre, les rapports hiérarchiques, les sournoiseries… On finit par vivre d'assez près un moment de l'histoire russe, dans toutes ses composantes. Les parties plus rares consacrées au côté allemand sont nettement moins convaincantes, sauf à arriver à les lire comme un témoignage de la façon dont les russes voyaient les allemands en 1942.
Et puis, certains paragraphes (le livre est une succession de courts chapitres) sont de toute beauté, qui surgit d'un coup, après des pages plus descriptives, où les personnages vivent leur vie comme ils le peuvent, sans que l'on s'ennuie mais sans passion. Des perles magnifiques, à rechercher dans le torrent de ces jours dévalant les 1000 pages.
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Grande fresque dans la lignée de Tolstoï, mêlant un foisonnement d'intrigues romanesques et des considérations philosophiques sur les systèmes totalitaires. Malgré quelques passages un peu longs, la lecture est à la fois passionnante et pédagogique.

Principaux personnages : deux soeurs, Evguénia et Lioudmila Chapochnikov. Evguenia quitte son mari Krimov, un vieux bolchevik (qui sera arbitrairement arrêté), pour le colonel Novikov (qui maîtrisera de main de maître sa division de char, notamment en retardant de 8 mn leur intervention dans l'offensive) ; Strum, le mari de Lioudmila, physicien de génie, qui passera de la crainte de l'arrestation à la gloire après un appel téléphonique de Staline. Il est à la pointe de l'intelligence et du génie humain mais il est simultanément accaparé par des problèmes personnels (son amour pour la femme de son collègue), des remords dans des attitudes quotidiennes ou des questions bassement alimentaires ou matérielles.

Strum est le personnage le plus creusé. Ses questions sont celles de VG.

P 1134 : « Tous étaient faibles, les justes comme les pêcheurs. La seule différence était qu'un misérable qui accomplissait une bonne action se pavanait ensuite toute sa vie, tandis qu'un juste qui en faisait tous les jours ne les remarquait pas, mais était obsédé, des années durant par un seul péché » ;

Ce livre est un chef d'oeuvre. A relire dans 10 ans

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