Voyageur attentif, brestois conquis, lecteur dubitatif, ce livre t'est adressé. A toi ensuite de choisir ton camp, chemin faisant, du Pont de Recouvrance, à la Place Guérin ; dans cette Brest de nuances de couleurs et de gouailles à toute heure.
Hervé Hamon aime Brest, c'est rien de le dire... Et cela ne lui suffit pas, qu'il doive encore l'écrire, le scander, le marteler.
Et ce qu'il aime dans Brest, c'est la fierté brestoise, experte en "brestoiseries" ; c'est le folklore qui se dépare de cette hauteur des grands hommes et des grands monuments, pour chanter avec sa langue particulière le banal et l'ordinaire ; la chaleur retrouvée dans la tempête, les bistrots déglingués à l'entrée du quartier ; les hommes de la mer, façonnés par la mer ; et les histoires de l'Arsenal, les mythes fondateurs de la ville.
Il nous livre, en quelques pages et portraits bien sentis, une ôde à la ville successivement blanche, sous les rayons epars, qui viennent percer les nuages ; rouge, de vin, de luttes et de colère ; sombre, dans la pénombre du soir qui tombe sur un morceau de comptoir ; et lumineuse, dans les yeux des hommes qui la chantent.
Et puis quelques moments magnifiques : celui - surtout - ou la grammaire brestoise commence à résonner dans l'oreille de celui qui débarque ; quand, naturellement, "ça gaze", "à dreuze", et "Brest même" prennent possession de celui qui hier encore n'imaginait pas une telle débauche de vocables.
Faut-il encore rappeler ici la raison de ma présence en Bretagne ? Faut-il redire cette incroyable impression en quelques heures d'être arrivée "à la maison" en débarquant, un jour de soleil et de vent, dans la cité extrême devenue la mienne ? Un amour de Brest, et comment ! ; un amour que je partage avec
Hervé Hamon, qui n'est pas d'ici, mais des Côtes d'Armor, autant dire un étranger au même titre que moi. Faut-il préciser que ce livre a résonner en moi, qu'il m'a émue, qu'il m'a fait rire ? Faut-il dire qu'il m'a été offert par une autre amoureuse de Brest, brestoise de naissance celle-ci, et qui a amplement contribué à cet amour débordant pour notre ville ?
Hervé Hamon a parfaitement raison quand, à la fin de son essai, il dit : "Non contents d'aimer leur ville telle qu'elle est, les Brestois sont étreints par un sentiment plus extravagant : ça commence à les démanger de la faire aimer, de reconnaître publiquement, urbi et orbi, qu'elle est aimable."