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3,11

sur 71 notes
Ce que j'ai ressenti:…Un malaise sous-jacent, dans les profondeurs de Paris…

« J'ai fait un cauchemar. » Telle est la première phrase de ce thriller inédit de Léo Henry. Et ce cauchemar, il nous le livre en près de 290 pages…



Quand La Panse est à la Défense, je pense à Paris…Qu'elle est improbable cette visite de la capitale, improbable et …mystérieuse. Je serai curieuse maintenant de visiter ses lieux après l'immense traversée nébuleuse de ce quartier dans les yeux de ce Léo Henry…Tantôt dangereuse, tantôt élitiste, la Panse se révèle une secte au pouvoir insoupçonné… Cette invitation à découvrir d'un autre oeil , cet amas d'architectures parisien, nous entraîne dans les tripes, de ses légendes urbaines…

« Nous voilà sur le seuil, dit-il encore. Nous sommes devant la porte. Suivez-moi, je vous mène au-delà. »

Je me suis laissée prendre aux jeux des rêves troubles et des réalités floues pour suivre Bastien, héros sans prétention, qui se lance à la recherche de sa soeur. Petit à petit, une nouvelle perspective s'ouvre, et nous plongeons avec lui, vers des souterrains de conscience obscure, et bien dissimulés. Il y a une espèce d'ambiance sourde, presque d'inaction latente, qui vous tombe dessus, et j'ai trouvé cet effet saisissant. Léo Henry a une plume hypnotisante. Plus que la vérité sur cette étrange disparition, c'est bien toute cette opaque chape de noirceur qui m'a vraiment chamboulée. Lentement, sûrement, les méandres de cette société secrète s'insinue dans la vie de cet personnage un peu paumé, lui enlève presque sournoisement, ses capacités d'actions et de pensées, tout en l'emmenant vers les vertiges du savoir…Double effet, qui est d'autant plus effrayant, que cette menace est presque invisible…

« le labyrinthe comme le cercle sont des formes d'architecture qui gaspille de l'espace. Ce sont des figures irrationnelles et inefficaces, donc inattendues. Elles déroutent les énergies et piègent les flux. Elles ont le pouvoir de dissimuler et de rendre invisible. »

La Panse est une lecture immersive et dérangeante. Si vous empruntez ses tunnels, faites bien attention à avoir l'estomac bien accroché, car il semblerait que les pires horreurs sont à digérer dans ses souterrains vacillants. La poudre dorée n'est assurément pas de la poussière de fée, même si elle semble ouvrir sur d'autres mondes: je vous conseille donc cette étrange virée dans ce Paris revisité à la sauce imaginaire…

Personne ne revient de cet endroit où tu t'es rendu. Personne ne s'échappe jamais de la Panse.

Ma note Plaisir de Lecture 8/10

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La Panse, un roman noir se déroulant dans le quartier de la Défense à Paris, la Dalle, son Arche, ses buildings, son métro, son centre commercial, ses travailleurs arrivant en masse tel des automates à cravates et tailleurs, attaché-case et rythme soutenu, arriver dans les temps, repartant le soir de la même manière comme une ronde perpétuelle, mais surtout ses sous-sol, son vaste monde souterrain. La Panse c'est cela, avec des lieux étranges, des gens étranges et des activités étranges se déroulant en dessous de table, masqueé par le peuple travailleur. Société secrète ou Secte, la limite n'est pas palpable. C'est dans cet environnement que Bastien notre personnage principal va tout faire pour retrouver sa soeur jumelle disparue.

Les personnages sont très bien, entre les allumés, les gens normaux, les dépressifs ou les paumés, chaque acteur de l'histoire est intéressant.
Côté histoire ça tient la route, angoisses et noirceur au premier plan, une once de fantastique mais vraiment très peu, au point de ne pas trouver la limite entre réel et imaginaire.

L'écriture est fluide, je ne connaissais pas la plume de Léo Henry, c'est poignant, nerveux, tranchant. Les pages défilent vite, très vite dans des chapitres fluides et courts, une fois le livre en main il est difficile de le lâcher malgré quelques passages à vide.

Pour conclure je dirais que H.P. Lovecraft ou Edgar Allan Poe auraient certainement aimé ce roman d'une noirceur profonde.

Voir la chronique sur mon blog :
Lien : http://unbouquinsinonrien.bl..
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J’ai beaucoup de sympathie pour Léo Henry surtout que le garçon s’est engagé à écrire une nouvelle par mois pendant 10 ans !!! Un pari un peu fou… Inscrivez-vous sur son site…
" Rouge gueule de bois " m’avait bien plu, histoire drôle et foutraque à souhait mais surtout un style vif et inventif… Par contre " Le casse du continuum " ne me laisse pas un grand plaisir de lecture.
C’est avec une envie certaine de revanche que j’ai attaqué " La panse "… et je reste sur ma faim. Je n’ai pas retrouvé la qualité d’écriture que j’aime tant chez l’auteur : ses juxtapositions de mots improbables, sa fantaisie… je note son goût immodéré pour la description des troquets mais ce n’est pas suffisant pour me séduire.
La référence à Lovecraft en quatrième de couverture est un argument marketing immérité. Soyez tranquille vous ne frissonnerez pas d’épouvante sous vos couvertures…
Je suis déçu par ce livre et pourtant je suis persuadé que Léo Henry est à la veille de nous écrire une œuvre majeure si tant est qu’il prenne le temps de se montrer ambitieux.
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Léo Henry est un auteur prolifique et très "diversifié" (et rien que pour ça, il mérite d'être connu).

De lui, j'ai adoré "Le casse du Continuum". Où il y a un style d'écriture résolument moderne, avec peu de descriptions, des phrases courtes, et beaucoup d'action, ce qui me convient parfaitement (mais ne convient pas à tout le monde).

Ici, on est dans un tout autre registre. Fantastique léger, le roman table avant tout sur une ambiance à la Lovecraft, basé sur une idée assez délirante, lol, (et peut-être pas assez convaincante, au final). Changement de style complet pour cet auteur-caméléon. Beaucoup de descriptions, notamment du quartier de la Défense (personnage principal), de ses sous-sols, de "La Panse".
C'est bien écrit, et on se demande tout du long ce qu'il se passe réellement, et si c'est "vrai" ou si Bastien est en plein "délire" sectaire.

La plongée en eaux troubles est plutôt bien décrite, avec la phase d'euphorie, puis ensuite la redescente terrible et les problèmes de santé, et l'attirance et la fascination exercée par les gens, l'endroit, le mystère.

C'est plutôt bien fait. Cependant, par moments, j'ai peiné à me replonger dedans, de par la construction du roman, il ne se passe pas grand chose, et ça me manque, même si j'étais très intriguée par ce que Bastien découvrait, ça manquait d'action. C'est donc effectivement très lovecraftien, de ce côté là c'est très réussi, tout en étant bien plus moderne.

Mais perso, j'ai un peu de mal avec ce genre de bouquin (comme avec Lovecraft dont je ne suis pas une grande fan, même si j'apprécie certains de ses bouquins).

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Il y a quelques temps, mon libraire a commencé à me parler d'un auteur que je ne connaissais absolument pas : Léo Henry. Ce dernier ayant sorti dernièrement un pavé intitulé Hildegarde allait bientôt être invité pour parler de ce livre dans ma librairie favorite.
Histoire de connaitre un peu mieux cet auteur, j'ai voulu commencer par une autre oeuvre que Hildegarde et c'est ainsi que je me suis trouvée en possession de la Panse.
Ici, c'est une invitation au voyage en plein coeur du quartier de la Défense à laquelle nous convie l'auteur.
Le personnage central de cette histoire, xx, un peu paumé (divorcé, sans emploi fixe) est à la recherche de sa soeur jumelle qui a disparu. Peu à peu ses recherches vont l'emmener au coeur, je dirais même au plus profond de ce quartier emblématique de Paris qu'est La Défense.
J'ai déjà visité ce quartier que je trouve particulièrement minéral et froid. Ce n'est certes pas la lecture de se livre qui va me faire changer d'avis à ce sujet car même les profondeurs de cet endroit vont se révéler bien plus glauques que prévues.
J'avoue avoir beaucoup aimé le début de cette histoire, où j'avais vraiment envie d'en savoir plus sur les résultats de la quête de xxx. L'ambiance est bien restituée et je me demandais vraiment vers où on allait. Mais petit à petit, mon intérêt pour cette histoire s'est un peu émoussé. J'ai essayé de comprendre comment petit à petit j'en suis arrivée la. Difficile à analyser et à trouver une veritable réponse je trouve. Quelques descriptions un peu trop longues et techniques, l'impression que tout à coup l'histoire n'avançait plus vraiment…
Une lecture en demi-teinte donc, je dois le reconnaitre, même si le talent de l'auteur est indéniable. Et ses qualités d'écritures sont vraiment formidablement mises en avant dans Hildegarde que je suis en train de lire (et qui me plait bien plus que cette histoire ci, il faut le dire)
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Dissection comparée de la panse de vache et de la panse de la Défense.
De quoi connaître l'envers du décor de ce quartier d'affaires.

Bastien est artiste à ses heures, du moins entre le bistrot et les fêtes entre amis. Il n'est pas très famille, mais sa soeur jumelle semble avoir disparu. Ses premières recherches vont vite l'intriguer et le mener vers La Défense. Il y trouvera un travail de technicien de surface. Mais il va surtout se confronter à ce qui se cache sous la surface de ce quartier d'affaires.

Roman fantastique d'ambiance, cette dernière est très bien rendue par le choix de la saison hivernale collant parfaitement à l'ambiance col blanc de la dalle. Deux mondes coexistent mais ne se parlent pas, ceux qui portent les costumes, et ceux qui vivent dans les interstices, classe laborieuse, SDF et autres marginaux.

Cependant, j'ai eu l'impression que l'auteur ne faisait qu'aborder les thématiques du roman : histoire d'un quartier, classe sociale, travail, drogue, société secrète et légendes urbaines, on reste un peu sur sa fin une fois la dernière page tournée. En outre, le personnage principale se laissant porter par la vie et les événements, difficile d'accrocher à son vécu.

Ce livre se lit très rapidement, et même si l'action y est absente, les enjeux assez minces, l'atmosphère générale le rend très addictif. On se perd dans les méandres des sous sols des buildings, on apprend l'histoire de ce quartier, avant l'édification de ces géants de verre et d'acier, on fait la connaissance d'une faune hétéroclite. Un divertissement intelligent, et c'est déjà pas mal.
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Le quartier d'affaires de la Défense en point nodal de forces lovecraftiennes : la mise en évidence charnelle de la possible pente sectaire de l'entreprise économique.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2024/02/28/note-de-lecture-la-panse-leo-henry/

Jeune homme un peu (peut-être même beaucoup) paumé, mais ayant gardé, on s'en apercevra le moment venu, de solides et utiles amitiés de jeunesse, Bastien cherche sa soeur jumelle, Ariane, qui semble bien avoir disparu corps et biens de la brigade parisienne de sapeurs-pompiers où elle exerçait à Nanterre. Ayant réalisé que quelque chose clochait lorsqu'un message de bonne année lui revient brutalement sans avoir pu être distribué, il démarre sa quête plutôt mollement, mais s'inquiète davantage lorsque les indices surprenants, voire suspects, s'accumulent. de Nanterre et du souvenir de son immense bidonville de l'époque de la guerre d'Algérie, son attention glisse bientôt à la cité administrative qui fut jadis flambant neuve, et à sa voisine géographique, la rutilante cité des affaires de la Défense, phare des ambitions business de l'Ouest parisien et de la France entière, au moment de sa conception et de son développement. Détectant des embryons de piste du côté d'un genre de club ultra-sélectif dont il se voit naturellement barrer l'accès, en tant qu'homme de peu voire de rien, Bastien ne se décourage pas, et parvient à se faire embaucher par l'une des nombreuses sociétés de « petites mains » (d'aucuns diraient de « travailleurs de première ligne » dans un autre contexte) qui s'affairent 24 h sur 24 ou presque derrière le décor pour cadres cravatés et décideurs en goguette. Il n'est sans doute alors pas au bout de ses surprises – et nous non plus.

Publié en 2017 chez Folio SF, « La Panse », après « le casse du continuum » (2014), pour la heist science fiction et avant « Thecel » (2020), pour la fantasy « classique », illustre à la perfection la manière dont Léo Henry sait convoquer un imaginaire réputé codifié (en l'occurrence, comme le trahit avec un peu trop d'avance sans doute la quatrième de couverture, le fantastique à résonances lovecraftiennes), le déshabille jusqu'au squelette puis le revêt de tout autre chose, qui garde l'empreinte et le souvenir du code initial, mais qui expose un imaginaire profondément original, le plus souvent très personnel. En explorant ainsi à La Défense (« parce que dans l'imaginaire parisien ce n'est pas le lieu le plus évident en termes de charge fantastique, ce n'est pas Le Louvre, ce n'est pas les Catacombes, en revanche c'est un lieu qui concentre les rêves des Trente Glorieuses, y compris dans leurs aspects cauchemardesques », confiait-il dans un entretien) non pas tant les couloirs du temps que les corridors du capital, en y inscrivant ses noeuds anciens et telluriques d'énergie mystique – là où Gilberto Villaroel, à la charnière napoléonienne, avait opté pour la Charente-Maritime de Fort Boyard -, Léo Henry a surtout su saisir une fabuleuse occasion de nous entraîner vers certaines faces plus ou moins discrètes du management contemporain (comme le faisait récemment Johann Chapoutot sur certains de ces aspects bien différents) et du « nouvel esprit du capitalisme », comme le nommaient Luc Boltanski et Eve Chiapello en 1999.

Remarquable pendant fictionnel du « Q comme Qomplot – Comment les fantasmes de complot défendent le système » de Wu Ming 1, cousin rusé et à contre-emploi du « CLEER – Une fantaisie corporate » de L.L. Kloetzer, complément tout naturel du « Contre le développement personnel » de Thierry Jobard, « La panse », avec tout le redoutable savoir-faire de l'auteur de « Hildegarde », de « L'autre côté », de « Héctor » et de tant d'autres merveilles, met en évidence charnelle la pente sectaire – au propre comme au figuré – vers laquelle tend si souvent l'entreprise économique capitaliste.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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3/5
Je remercie Babelio pour m'avoir permis de découvrir cet auteur dans le cadre de Masse Critique.
Je viens de tourner la dernière page et je me pose encore mille questions.
Le résumé est assez prometteur, et l'on plonge rapidement dans une aventure addictive en suivant Bastien dans l'univers du quartier La Défense à la recherche de sa soeur Diane.
Le contexte est contemporain et réaliste, tristement réaliste, chômage, boulot routinier et ennuyeux.
Le style est simple, visuel, la plume de l'auteur genre zoom télé, lieux et descriptions qui nous projettent dans des scènes froides et inquiétantes. Un sentiment de malaise persistant nous prend aux tripes. Très réussi.
Donc nous voilà avec un personnage fragile, perdu paumé, qui brusquement se met en quête de sa soeur, j'avoue qu'en fin de lecture je n'ai pas toujours bien compris le déclic et un temps j'ai eu meme le sentiment que Diane n'avait aucun intérêt dans cette histoire complexe.
J'ai pensé en lisant cette histoire, au parallèle avec un roman de Zola le ventre de Paris, Leo Henry, nous plongeant dans celui de l' Arche. J'attendais donc tout et rien. Enfin si beaucoup d'une histoire que je pensais basée sur une société secrète ancienne et.......
Et pour toute une plus grande partie du roman , je suis l' histoire d' un type embauché dans une entreprise de nettoyage qui partage son quotidien avec ses collègues de travail entre journées éreintantes et séances de méditation, sorte de technique managériale contemporaine, utilisée à bon escient pour les bienfaits de l'entreprise.
Et au fur et à mesure que j'avance, je me perds complètement dans une intrigue de plus en plus complexe. Mais ce n'est pas le pire. le pire c'est que je n'ai pas du tout compris où voulait en venir l'auteur et en suis à me demander, de quoi ça parle ? Esoterisme, vie robotique d'une population manipulée, trafic en tous genres, secte ?
Je pense plutôt à quelque chose de bien plus symbolique en lien avec l'humanité , mastiquée, mâchouillée, digérée, rejetée, prête à l'emploi décidé pour chacun par les grands de ce monde. L'allusion au monde des affaires et le lieu choisi, ce quartier de la Défense, ce lieu de pouvoir, revient fréquemment.
Un style et une écriture addictive pour un roman qui me laisse perplexe, avec trop de questions sans réponses et le sentiment d'être passée à coté de quelque chose, un genre litteraire fantastico-mystico-esotero-scientifique pas vraiment pour moi.

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Lu il y a quelques semaines, et j'ai attendu un peu avant de faire une critique parce que je voulais voir ce qu'il en resterait au final.
Et finalement, bien peu...

Je m'explique.
J'ai lu ce livre parce que je travaille à La Défense, j'habite à quelques km de là (dans une des villes que l'on voit apparaître dans le roman), et en plus je m'intéresse à cette Défense "cachée" qui est peu connue.
J'ai ainsi pu visiter le Monstre de Moretti par exemple, pour ceux qui connaissent (et sinon renseignez vous, c'est quand même quelque chose... :-) ).
Et j'ai vu assez de vidéos d'urbex du reste pour me sentir à l'aise sur ce sujet.
Donc le lieu m'intéressait fortement, surtout avec une 4ème de couv aussi attirante.
D'ailleurs il est clair pour moi que le principal personnage même du roman c'est cette Défense, magnifiée dans un contexte plus fantastique, et ses recoins et activités/personnes cachées.
J'ai vraiment eu l'impression que l'auteur a d'abord voulu mettre en avant ce lieu et que ce n'est qu'ensuite qu'il a calqué dessus une histoire, qui elle m'a beaucoup moins convaincu.
Le livre n'est pas un gros pavé, moins de 300 pages, mais je l'ai déjà trouvé trop long.
Il y a des moments où je me suis vraiment ennuyé, d'autant qu'il est un peu difficile pour moi d'avoir de l'empathie pour un héros très apathique qui dit trop peu sur ses pensées profondes dans un roman écrit à la première personne...
Et pourtant il y a des parties qui se lisent très vite, comme un bon thriller.
On n'aurait gardé que cela sur 200 pages (peut être même moins), ça aurait été bien mieux.

Donc j'ai trouvé l'intrigue de base plutôt triste, pas super cohérente et la fin très moyenne, voire bâclée.
Mais j'ai aussi bien aimé cette Défense altérée, et je ne regrette donc pas ma lecture.
C'est ce qu'il me reste au final comme souvenir, et presque rien sur les personnages ou l'intrigue principale.
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UNE OeUVRE ET DES GENRES



L'excellent Léo Henry (un ami, si je puis le préciser, car je le dois peut-être, question d'honnêteté) est un auteur aux multiples facettes, même s'il parvient à conserver une certaine forme de cohérence, unissant miraculeusement des oeuvres très diverses dans le fond comme dans la forme – autant dire qu'il sait faire le grand écart, ce qui n'est pas donné à tout le monde.



Il y a a priori un monde entre, disons, les volumes consacrés à Yirminadingrad, en collaboration avec le regretté Jacques Mucchielli, quelque part entre Ballard et Volodine, ou les expérimentations sauvages du Naurne avec luvan et Laure Afchain, d'une part, et d'autre part un registre plus populaire tel que celui qui nous intéresse aujourd'hui : La Panse, chose rare de nos jours, est un roman directement publié en poche, chez Folio-SF – à l'instar, il y a de cela quelque temps, du Casse du Continuum (que je n'ai hélas toujours pas lu, c'est mal…) ; à la science-fiction de ce dernier succède donc le présent « thriller lovecraftien », nous dit-on, l'essai fantastique de l'auteur – en attendant semble-t-il un roman de fantasy, histoire de balayer les genres de l'imaginaire ?



De part et d'autre, l'impact en termes de distribution n'est sans doute pas le même. Pour autant, est-ce vraiment pertinent d'opposer sur cette seule base romans et nouvelles qui émanent bien d'un même auteur ? Je suppose qu'il n'y aurait rien d'excessif à supposer que la Défense de la Panse a bel et bien en elle quelque chose du Naurne, et peut-être même de certaines variations, au moins, sur Yirminadingrad, ses faubourgs, ou tant d'autres villes de par le monde où les exilés de Tadjélé ruminent leur patrie en proie au pire… le caractère plus « direct » du présent roman – dans sa dimension policière ou thriller – participe de sa singularité, mais peut-être faut-il en dernier recours le relativiser quelque peu ?



Quoi qu'il en soit, dans ces divers registres, j'ai bien l'impression d'une oeuvre qui se dessine – cohérente dans sa diversité, expérimentant les genres sans succomber à la gratuité de l'exercice de style, et touchant juste, en définitive, du fait d'une sincérité de tous les instants, garante de l'authenticité de chaque ajout, quel qu'il soit, à une architecture globale complexe.



D'autant que, d'une certaine manière, La Panse, avec ses atours pop – ou en tout cas plus pop que Yirminadingrad –, n'en est pas moins un récit baignant dans l'architecture et l'urbanisme avant l'ésotérisme, et par ailleurs vecteur d'une dimension sociale marquée, questionnant notamment le travail jusque dans ses impacts les plus délétères… Alors, « Demain la Défense » comme on dirait « Demain l'usine » ?



FAUX SEMBLANTS



Bastien Regnault – un paumé, disons-le ; confit dans une existence médiocre, en dépit de ses timides tentatives pour y trouver du sens… Sauf que l'art n'y est pas parvenu : il est un intermittent avant que d'être un artiste, et au mieux de quatorzième zone (à peu près). La famille pas davantage : mariage foireux, fille qu'il n'a aucune envie de voir… Honnêtement, avec ses parents, ça ne va pas beaucoup mieux. Et avec Diane, alors ? Sa soeur jumelle – il partage forcément beaucoup de choses avec elle ? Eh bien, pas tant que ça : depuis longtemps, les liens se sont distendus – contre la malédiction génétique qu'on aurait été tenté d'envisager d'emblée, les jumeaux ont emprunté des voies toutes différentes, et leurs contacts se limitent à un ou deux coups de fil par an.



Un jour, pourtant, quand Bastien se livre à cette corvée, il est surpris d'apprendre que le numéro de téléphone de sa soeur n'est plus attribué. Et, pour le coup, ça l'inquiète… Où Diane est-elle donc passée ? Est-elle seulement encore en vie ? Personne ne semble le savoir – personne. Alors Bastien désoeuvré se lance sur sa piste – mais probablement autant en quête de soi qu'en quête de sa soeur.



LA DÉFENSE – ET SA PANSE



Puis des bizarreries surgissent, qui laissent à peine entrevoir un sort que Bastien ne peut s'empêcher de trouver inquiétant… La piste s'arrête à la Défense – cette folie en lisière de Paris, excroissance monstrueuse des Trente Glorieuses les plus mégalomanes, un délire utopique et futuriste, où les tours d'acier et de verre du quartier d'affaires produisent un contraste saisissant avec un lourd passif social, héritage des bidonvilles qu'il fallait faire disparaître comme autant de souillures d'un temps jadis à effacer des mémoires ; quitte à fermer les yeux sur les SDF s'abritant du monde dans la dalle, ce labyrinthe souterrain aux plans inconcevables. La Défense… Un monstre – mais un monstre où des gens travaillent, et où des gens vivent, très différents.



Ce dont Bastien va faire l'expérience : à peine son enquête a-t-elle commencé, livrant un aperçu vaguement inquiétant, vaguement comique dans son absurdité, d'une société secrète de richards n'ayant rien à envier, donc, à la Society de Brian Yuzna, ou au partouzards masqués d'Eyes Wide Shut, à peine cette enquête a-t-elle donc commencé que Bastien se voit refouler… et pourtant offrir ce qui, à ses yeux, constitue sans doute un moyen d'accès alternatif : le travail. Nettoyage, surveillance, logistique… Autant d'aperçus d'un abîme social où végètent des travailleurs comme de juste aliénés, presque déshumanisés – et le prochain qui me vante la valeur émancipatrice du travail, j'y colle mon poing dans la gueule.



Mais pas Bastien : lui se met à la tâche, sans vraiment comprendre pourquoi – d'autant que la tâche, ou plutôt les tâches, sont épuisantes et vaines… Mais c'est pourtant ainsi qu'il approche enfin véritablement de la Panse : une société secrète, oui, mais autrement inquiétante que les guignolades pseudo-vénitiennes de Kubrick – une secte, en fait, qui capture et lobotomise via le travail, et ses à-côtés « psychothérapeutiques », à base de « développement personnel », et de méditation savamment orchestrée par d'importuns gourous et docteurs (s'il y a une différence) ; une secte qui, sur cette base, produit une hiérarchie fonctionnant sur un modèle initiatique ; autant d'échelons que Bastien grandit bien rapidement – comme « l'élu » qu'il pourrait bien être, ou du moins le lui laisse-t-on entendre.



La Panse… Société secrète, secte initiatique… Organe interne dont la fonction est de dissoudre.



« THRILLER D'INFILTRATION lovecraftIEN »



« Thriller d'infiltration lovecraftien » : c'est ainsi que la quatrième de couverture nous vend – et nous vend bien, ou me vend bien, en tout cas – ce nouveau roman. Figurez-vous que c'est à bon droit, et que, dans ce registre, La Panse est très certainement une réussite.



Ce qui implique peut-être quelques précisions ? Sans surprise, nulle mention ici de Cthulhu ou Yog-Sothoth, d'Abdul Alhazred ou des Unaussprechlichen Kulten ; et la Défense remplace utilement Arkham. Pourtant, la dimension lovecraftienne du roman n'a rien d'une imposture.



Et ce alors même que La Panse ne joue pas forcément tant que ça des principes de « l'horreur cosmique » ? Ou seulement tardivement ? À maints égards, le roman est bien plus terre à terre – jusqu'à s'étendre sur des situations très prosaïques que le gentleman de Providence aurait sans doute trouvé sordidement « réalistes », et probablement ennuyeuses. Pour autant, deux traits rapprochent bel et bien les deux oeuvres : d'une part, justement, ce souci du « réalisme », aussi paradoxal puisse-t-il paraître – on connaît la phrase de Lovecraft, extraite d'une lettre à Clark Ashton Smith : « No weird story can truly produce terror unless it is devised with all the care and verisimilitude of an actual hoax. » Une idée, je crois, que Léo Henry a ici fait sienne. D'autre part, La Panse est à mes yeux avant tout une réussite dans le registre de l'ambiance – minutieusement composée, subtilement inquiétante, et ce de plus en plus, jusqu'à ce qu'enfin les effets d'échelle transcendent le récit jusqu'à plonger personnage et lecteur dans les abîmes terribles et fascinants de la folie pure…



Le jeu sur l'architecture est à cet égard d'une importance cruciale – et la Défense, sous la plume de Léo Henry, dans sa démesure et presque son absurdité, se pare sans soucis des atours cyclopéens d'une R'lyeh sur Seine, tandis que la dalle sur laquelle elle est bâtie implique nécessairement sa part d'utopie chtonienne, entre la K'n-yan du « Tertre », la cité des Montagnes Hallucinées ou encore celle de la Grand-Race de Yith, « Dans l'abîme du temps » ; forcément, des choses y rôdent dans l'ombre perpétuelle, des choses qui ne doivent pas voir la lumière du jour… Ainsi de cette statue paraît-il bien réelle, baptisée le Monstre, et qui se tapirait, inamovible, dans le dédale souterrain de la Défense – manière de confirmer que la Défense elle-même est un monstre. Michel Houellebecq, dans sa lecture de Lovecraft, avait très justement appuyé sur la dimension architecturale des récits du gentleman de Providence, et La Panse me paraît en constituer une très bonne illustration.



À cet égard, La Panse n'est pas forcément un cas à part – ou pas tant que ça. À la lecture du roman, je n'ai pas manqué d'avoir diverses « références » en tête (qui n'en sont pas forcément au sens le plus strict, disons « d'inspirations » pour l'auteur) ; quelques titres ? Peut-être Notre-Dame des Ténèbres de Fritz Leiber – ou dans un tout autre registre, donc, le film Society de Brian Yuzna… Autant de « réactualisations » d'un fantastique lovecraftien riche en sectes perverses – et en aperçus d'une réalité insupportable… jusque dans la dimension sociale, donc ; noter ici que la psychologie morbide institutionnalisée dans La Panse peut éventuellement évoquer le CLEER des camarades L.L. Kloetzer ?



À LA SUEUR DE TON FRONT



Le travail, ou plus largement la dimension sociale, est tout aussi capital. Mais cela fonctionne d'autant mieux que La Panse évite sans doute de verser dans la caricature qu'un cadre pareil aurait pu rendre tout particulièrement tentante.



La Défense, en effet, n'est ici pas unilatérale – bien au contraire, aussi monstrueuse soit-elle à vue de nez et tout au fond, elle exprime entre les deux toute sa complexité, sa dichotomie qui n'en est peut-être pas tout à fait une, et qui fait d'elle tant un quartier d'affaires moderniste au point d'avoir quelque chose de science-fictif, que la réalité autrement concrète et palpable d'un lieu où des gens vivent – tiens, peut-être un autre rappel de Yirminadingrad ? La Défense n'est pas que cadres oppressés se précipitant dans les couloirs le mobile collé à l'oreille – ou l'oreillette, plus brutalement. Elle a ses bistros, ses épiceries, ses boulangeries. Les bidonvilles antérieurs n'ont pas seulement été effacés, il s'agissait aussi, dans la perspective mégalomane du projet d'urbanisme, de réfléchir à la question du logement social. Mais, là aussi, une hiérarchie insidieuse opère – vivent sur place aussi bien des fortunes, dans les tours le cas échéant, que des SDF condamnés aux couloirs de la dalle ; entre les deux, une ribambelle de travailleurs très divers, hiérarchie dans la hiérarchie – des cadres qui s'en tirent le mieux (financièrement et socialement, je ne garantis rien pour le reste) aux précaires à la façon de Bastien, entassés dans des appartements collectifs qui ne sont guère plus que des dortoirs : tous restent sur place « parce que c'est plus pratique », parce que « ça va plus vite », sous-entendu – pour aller au travail ; autant dire que le travail devient toute leur vie, et doit en décider de bout en bout.



BIPOLAIRE



À cet égard, la Défense a quelque chose de… bipolaire, disons ; qualificatif qui s'applique sans doute en même temps au roman dans son ensemble, ou à son héros. Surtout à ce dernier, peut-être.



Car Bastien, s'il est pour une bonne part un personnage en creux, vecteur du récit davantage que personnage « vivant », n'en a pas moins une psychologie torturée : tel qu'il est introduit dans le roman, nous sommes tentés d'y voir un personnage foncièrement dépressif – un raté atone et apathique, sans rien qui le rattache vraiment à un monde dont on il n'a que faire. Sans doute est-ce d'ailleurs pour cela qu'il se réfugie autant dans le travail – aussi éprouvant soit-il ; car il est peut-être avant tout aliénant, et, consciemment ou pas, c'est quelque chose qui va très bien à Bastien : la brutalité de ce monde professionnel a quelque chose de rassurant, en fournissant une « raison de vivre » clef en main, dont, après tout, s'accommodent semble-t-il beaucoup de gens. Nul besoin de pousser outre-mesure la métaphore : le travail peut très bien fonctionner comme une secte, et use des mêmes méthodes de déshumanisation.



Mais c'en est au point où Bastien se prend au jeu, lui, « l'élu », qui croit dès lors trouver dans cette activité de tous les instants un moyen d'avancer, voire de se transcender. D'où ce rapport finalement plus bipolaire que dépressif à une vie qu'il ne saurait envisager en bloc – et où l'hyperactivité peut fournir un contrepoint, quand bien même navrant, à l'apathie mélancolique. Au point, bien sûr, où la quête de Diane peut passer au second plan ? Où elle se trouvait sans doute dès le départ…



Mais ne pas s'y tromper : cette ascension est un leurre – et le travail ne permet certes pas l'émancipation. Reste, au fond des choses, ce constat impitoyable : « élu » de la Panse ou pas, Bastien ne comprend guère ce qu'il vit – il n'est même pas censé le faire… Car la Panse, après tout, s'en tient en définitive à sa dimension première : elle est là pour dissoudre.



EFFICACE – ET DAVANTAGE



On ne fera certes pas de la Panse la plus grande réussite de Léo Henry. J'avoue, comme d'habitude, le préférer en nouvelliste plutôt qu'en romancier – j'avoue aussi, me contredisant au passage, que je suis instinctivement davantage attiré par ses oeuvres les plus « ambitieuses » (ou les moins « populaires », si vous voulez, mais je me rends bien compte de ce que ces qualificatifs impliquent d'un peu navrant me concernant).



Mais La Panse fonctionne très bien : le roman remplit son office, et bien plus encore, en déployant une complexité de fond qui n'a rien de m'as-tu-vu, mais au contraire avec le plus grand naturel, assurant l'authenticité de l'oeuvre. Rythmé avec habileté, jusque dans ses brusques accélérations et décélérations, il emporte sans peine le lecteur dans un monde impitoyable et cauchemardesque, mais tout aussi fascinant et déroutant. Il est aussi la preuve d'une chose dont j'avoue douter le plus souvent : on peut faire un thriller intelligent et dépassant la formule. Ce n'est pas la moindre réussite de la Panse, roman assurément plus que recommandable.
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