Ultime volume de cette superbe fresque qui m'aura tant fait réfléchir au concept d'humanité et de vie au sens large. Ce n'est pas sans émotion que je la quitte, par contre c'est sans regret car l'auteur a tout dit en allant au bout de son propos. C'est assez rare pour le souligner.
Souvent quand on termine une série, on se sent un peu orphelin notamment parce qu'on a le sentiment que tout n'a pas été raconté et que ça aurait pu continuer un peu. Ce n'est pas le cas ici.
Le début de ce tome m'avait pourtant fait craindre le pire. Malgré la superbe orchestration du duel Miggy/Shinichi contre Goto, celui-ci s'était terminé de façon magnifique pour les deux comparses partageant le même corps, mais un peu trop abruptement. J'avais alors le sentiment que tout n'avait pas été dit et j'étais déjà triste à l'idée de suivre plusieurs chapitres sur le monde d'après pour Shinichi. C'était bien mal connaître l'auteur, qui nous réservait heureusement une surprise de taille.
En effet,
Hitoshi Iwaaki est vraiment un excellent conteur. J'ai cru jusqu'au bout que la séparation était effective et définitive et que Shinichi allait désormais devoir vivre sans Miggy et sans son bras droit, et que c'était ce que nous allions suivre. J'ai été ravie d'être détrompée et de voir l'histoire repartir de plus belle. La parenthèse entre ces deux moments fut tout de même extrêmement bien pensée, avec la rencontre avec cette mamie au caractère bien campé. Elle a su être là quand il le fallait, proposant une aide discrète mais nécessaire sans en faire trop. C'était un superbe chapitre, très émouvant.
Mais dans l'univers de Parasite, il était impossible de voir l'histoire s'arrêter là, sans une confrontation plus poussée entre les deux antagonistes qui n'adoptaient pas du tout de la même façon de vivre. Ainsi au delà de la mise en scène de ce combat que j'ai adoré, parce que Shinichi et Miggy, d'un côté, étaient ultra ingénieux et en symbiose, et de l'autre parce que la force brute de Goto ainsi que ses transformations étaient assez impressionnantes pour nous glacer le sang ; au-delà de ça, c'est vraiment tout le message sur notre rapport à l'autre, à celui qui est différent et qu'on perçoit comme une menace, mais aussi à l'autre qu'on voudrait soumettre, qui m'a intéressée.
En effet, la dimension philosophique du titre a toujours été forte et cela ne se dément pas dans ce dernier tome et ce jusqu'aux tous derniers moments. Shinichi et Miggy proposent chacun un modèle de vivre ensemble, avec l'autre, mais aussi avec la nature autour d'eux, et Goto propose encore une troisième voie. Chacun a ses raisons et sa vision de la chose, et ce que j'ai apprécié chez l'auteur, c'est qu'au final il n'en dénigre aucune. Il présente les multiples dimensions de chacune sans vraiment apporter de jugement définitif, nous laissant libre de nous faire notre opinion. C'est magnifique.
Ainsi les ultimes pages entre Shinichi et Goto d'un côté, puis entre Shinichi et Miggy de l'autre, sont des modèles du genre, qui laisse un peu pantois devant la virtuosité de la chose, mais aussi devant l'émotion qui nous saisit alors, et les pensées qu'on ne peut s'empêcher d'avoir sur tout ça. le discours de l'auteur est très puissant et lorsqu'il écrit : "Parce qu'il représente une menace pour nous, cela lui retire-t-il le droit de vivre ?", il laisse songeur tant il frappe juste.
Il n'y a peut-être que le dernier chapitre à tout ça que j'ai trouvé superflu dans l'ensemble. le personnage qui intervient et amène un dernier soubresaut d'action n'était pas nécessaire pour moi. On avait déjà une très belle conclusion auparavant. Il n'y a que la dimension du futur de Shinichi qui était importante ici et la façon d'y parvenir était un peu trop tape à l'oeil pour moi, même si c'est cohérent avec le reste du manga.
Ce dernier tome est donc pour moi un nouveau petit bijou. Il s'ouvre de manière brutale et surprenante, avant de proposer un calme trompeur mais plein de réflexions, pour aboutir à un conclusion osée, où l'auteur a pu et su aller au bout de son propos. Je me rappellerai longtemps de sa science de la mise en scène. Je me rappellerai longtemps de ses réflexions sur la nature humaine et le rapport de l'homme aux autres et à son environnement. Je me rappellerai longtemps de la relation Shinichi-Miggy
Lien :
https://lesblablasdetachan.w..