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EAN : 9782366242065
124 pages
Cambourakis (11/05/2016)
4/5   4 notes
Résumé :
« Ayez confiance dans l’expérience d’un écrivain : les plus beaux textes sont ceux que l’on n’aura jamais écrits ; c’est valable aussi pour une lettre. »

Les lettres que Karel Capek adresse à Vera – une jeune étudiante dont il s’est épris – sont cependant d’une grande beauté et mêlent mélancolie, humour fin et érotisme subtil.

Ces textes pudiques, où l’amour crie en silence, sont également un témoignage passionnant sur la destinée d’un ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Après avoir lu « L'année du jardinier » et « La guerre des salamandres », j'ai voulu connaître de manière plus intime qui était véritablement l'homme, l'auteur de ses ouvrages, passionné de jardinage et un des derniers écrivains à avoir vu plus loin que la science de son temps, Karel Čapek.

Dans ce livre, « Lettres à Věra », on découvre un Karel Čapek fasciné par une jeune fille, qu'il appelle « mon amazone ». Il s'agit de Věra Hrůzová (1901-1979).
Avant d'écrire son roman « La guerre des salamandres », Čapek (1890-1938) était déjà un homme de lettres célèbre, alors que Věra faisait sa dernière année d'école de commerce.
Ils vont faire connaissance dans le salon littéraire privé d'une écrivaine en 1920 à Prague…
« Je dois vous voir. Si vous ne venez pas, ce sera terrible, je ne saurai quoi faire ».
Les lettres adressées par un des plus grands écrivains tchèques à cette jeune fille qui lui a fait tourner la tête, sont recueillies dans ce livre qui témoigne d'une passion aussi violente que compliquée… Pendant longtemps, non seulement les lecteurs ordinaires, mais aussi les spécialistes de Karel Čapek n'avaient pas la moindre idée de l'existence de cet amour secret de l'écrivain.
C'est Věra Hrůzová en personne, qui vers la fin de sa vie, a sorti du tiroir les lettres que Karel Čapek lui avait adressées. Au fur et à mesure de la lecture de ces courriers, datés du 27 décembre 1920 au 24 février 1931, c'est toute la personnalité et la destinée de Čapek que l'on découvre.

Dans les premières années de leur relation, ses lettres commencent tour à tour ainsi : « Ma Věra très estimée »,
« Ma Věra unique », ou plus simplement « Chère Věra » et se terminent par : « Votre dévoué », « Votre serviteur »,
« Avec tous mes respects » « Bien à vous », « Bises », « Je vous embrasse, ma chère Věra », « Avec un grand amour ».
Ces premières lettres sont belles, pleines de passion et de désir, mais on remarque que les mots choisis sont tout en retenue, en délicatesse. Karel Čapek est pudique.

On sent que Karel est vraiment tombé amoureux de cette jolie jeune fille aux yeux clairs et à la mèche rebelle, qui pratique l'équitation et joue très bien au tennis. Malheureusement, il dispose de peu de temps à consacrer à Věra pour des RDV, et lui demande de le pardonner.
On le suit dans ses activités. Il est très occupé avec les répétitions de sa pièce « R.U.R. » (Rossum's Universal Robots), sur les robots, au Théâtre national de Prague.
« Je suis pourchassé par le temps ; ce n'est même plus tenable ». Il exprime à Věra sa tristesse, mais en même temps, il a peur de mettre en péril sa vie créative en s'attachant trop à elle !

On découvre un écrivain très travailleur, qui a peu de temps pour lui-même, mais qui, en même temps n'aime pas qu'on le plaigne. « Dois-je continuer de gâcher ma jeune vie pour la simple raison que j'ai eu la chance de rencontrer le soi-disant « succès » ? »
En parallèle de ses créations littéraires, K. Č. écrivait aussi des articles pour « Lidove noviny », le quotidien de la ville de Brno en Moravie, tribune de l'intelligentsia tchèque, dont il était l'un des principaux porte-paroles.
Parfois, on rencontre, avec étonnement, des mots et des expressions en français dans le texte de ses lettres :
« Passons dessus », « une sensation un peu gênante »,
« compris ? », … Il faut dire que Karel Čapek avait été étudiant à l'université à Paris, qu'il est un traducteur brillant et l'auteur d'une anthologie de la poésie française qu'il présenta aux lecteurs tchèques dès 1920 !

A la lecture de ces lettres, on comprend que Čapek était aussi doué de beaucoup d'imagination.
Bien souvent, il lui fallait compulser des ouvrages scientifiques de façon à éviter de commettre des erreurs ou d'écrire des approximations. Dès 1922, il avait déjà prévu, dans son roman « Krakatit », le danger que représente pour le monde l'abus de l'énergie nucléaire.
En écrivant le livre, Karel Čapek devait déjà connaître de nouvelles théories scientifiques, parmi lesquelles les transformations de Lorentz et la théorie de la relativité d'Einstein.

De son métier d'écrivain, Čapek dit qu'il est plutôt sérieux : « On doit se démener fort tous les jours, comme un tailleur très prisé, et même le dimanche ! ».
En plus de ses travaux d'écriture, et de répétitions de pièces de théâtre, Karel Čapek est obligé de satisfaire souvent à des déplacements professionnels, y compris à l'étranger.
Mais toute cette charge de travail et ce rythme effréné vont affecter gravement sa santé.
Au début mars 1923, il écrit à Věra qu'il est malade et qu'il a choisi d'aller se reposer en Italie.
Il se sent très mal psychiquement. Il se reproche de n'avoir pas vécu à un rythme plus lent.
En juin 1923, il est de retour à Prague… Pendant sa
« retraite » italienne, il a écrit des « feuilles d'Italie », et dans sa lettre, il demande à Věra si elle pense qu'il doit les publier, comme l'y invitent certaines personnes de son entourage. Une grande majorité de ces lettres a été écrite entre 1921 et 1923, soit la période durant laquelle la relation entre Karel et Věra était la plus intensive.

Mais au début juillet de 1923, il répond à un courrier de Věra, qui lui annonçait qu'elle comptait se marier ! Il avait ainsi appris brutalement qu'il n'était pas son seul prétendant ! Il y a probablement eu une incompatibilité d'humeur entre un écrivain qui passait son temps à écrire et une jeune fille qui ne demandait qu'à vivre et à profiter de la vie !

En septembre 1923, Karel Čapek, furieux, lui écrit une lettre dans laquelle il insère un passage en français, réagissant au fait que Věra prépare sa lingerie de mariage : « … votre linge endiablé, le voile impudique qu'une nuit un autre déchirera, ah, c'est trop pour moi ; et vous, insensée, vous me parlez de ce qui n'est plus pour moi qu'un rêve furieux et impossible, je vous hais. » Il était donc très déçu et malheureux de savoir qu'elle avait un autre homme dans sa vie, et pendant un certain temps, il manifestera d'ailleurs une certaine réserve vis-à-vis de Věra. Sa douleur avait éclaté et il a donc écrit ce passage en français, à l'issue duquel il a encore ajouté un petit paragraphe dans lequel il explique : « Voilà, je vous écris ça en français parce qu'en tchèque je l'aurais écrit beaucoup plus vulgairement. »

Et dans ce courrier, en même temps, il lui exprime ses difficultés à terminer « Krakatik », où par moments, il se moque de nobles sentiments humains comme l'amour.
Il faut dire que l'héroïne de ce roman, Wille, pratique l'équitation et joue très bien au tennis, tout comme Věra ! C'est bien d'elle dont il s'est inspiré pour créer ce personnage !

En octobre 1923, alors que Věra va se marier, il lui écrit qu'il lui souhaite sincèrement le meilleur.
A compter de ce moment, il lui écrira encore, mais de façon plus espacée, et ses lettres commenceront par « Madame Věra » ou « Madame », tout simplement. Mais il restera toujours attentif et respectueux envers elle. En fait, Karel Čapek est romantique. Pour preuve, il offre à Věra, par sa lettre de Noël 1923, « un petit bouquet de gentianes et d'amarantes qui ne fanent pas. »
Věra, elle-même, bien que mariée, continue de lui répondre et lui enverra même une splendide photo-portrait.

J'ai trouvé intense le contenu de ces lettres. Elles sont écrites dans un style souvent assez décontracté, tantôt intimiste, tantôt jovial, empreint d'un certain humour, aussi. Même si ce n'est pas une oeuvre littéraire, ce livre qui rassemble ces nombreuses lettres, reste de la littérature. C'est un beau texte, qui nous apprend beaucoup sur la vie professionnelle de l'auteur, sur les questions qu'il se posait, sur son caractère et ses sentiments.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Il n’est point de félicité égale à celle de deux époux qui ont les mêmes goûts et les mêmes pensées ; ils font le désespoir de leurs ennemis et la joie de ceux qui les aiment…
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