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EAN : 9791093019116
103 pages
Rougier Editions (01/03/2015)
5/5   1 notes
Résumé :
Suite de poèmes en vers courts faisant état d’un monde chaotique, Dernières nouvelles d’Ulysse se pare des multiples facettes du héros (rusé, opportuniste, guerrier et bien d’autre) et des résonnances de sa voix littéraire dans l’ensemble de la culture occidentale. Par ce système d’échos plein d’ironie, le poème forme un voyage rétrospectif et traduit toute l’ambigüité d’une figure fondatrice de notre culture occidentale.
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"On ne revient / jamais d'une guerre". Mais d'où revient Ulysse, sinon de la guerre de Troie ? Derrière le paradoxe, on devine le fond du problème : entré dans la logique de la guerre, Ulysse ne pourra plus en sortir. Il ne revient que pour tuer les prétendants. ll ne revient que pour d'autres types de guerre, car tout est guerre, ici bas, la finance, la religion, la société de consommation, l'intoxication nucléaire de la planète. "L'odyssée" / Dure autant que vivre // La guerre / Autant que le pouvoir." Voilà pourquoi on attendra toujours de "dernières nouvelles" d'Ulysse : tout ce qui est guerre le concerne, et il n'est pas près de rentrer de Troie. "La bombe d'Hiroshima / Tombe toujours."
Alors, devant le désastre éternel, inéluctable, la tentation est grande du silence. Adorno (ou l'interprétation qui en fut faite) avait annoncé la mort de la poésie après Auschwitz, "et ceux / Qui revenaient / Des camps longtemps // Se turent / Certains que personne / Ne les croirait." Ulysse est celui qui écouta les sirènes : mais jamais il n'a révélé leur chant. Qui nous dit qu'il était suave, cet appel à la mort suppliciante ? Témoin privilégié d'un monde inaudible, il écoute.
On l'aura compris, Ulysse n'est pas que le roi d'Ithaque, il est chacun de nous en retour d'une guerre éternelle, celle de la vie, en Odyssée perpétuelle, celle de la vie. Il est le compagnon sur le Tour, il est le fils qui prolonge le père, il est le fondateur qui cherche à rebâtir au sortir des destructions, il est l'artiste qui transmue en poème le silence de la stupéfaction. Car s'il y a deux silences, celui, écrasé d'absurdité, des rescapés de l'indicible, et celui, lourd de sens, du Christ devant la femme adultère, il y a deux discours, celui qui ne fait qu'habiller le silence et prolonger la destruction du sens, et celui qui le restitue, qui donne sens à l'insensé, la parole de la poésie. Se taire ? Oui, car on ne peut plus parler au retour de l'enfer. Mais comme Ulysse à l'écoute des sirènes, on peut entendre le chant sans commencement ni fin, qui ne rompt pas le silence, que seul révèle le silence. le recueil commence sur un signe de ponctuation, presque le seul sur cent pages, sinon dans toute l'oeuvre de Werner Lambersy : trois points de suspension. Bien entendu, il n'y a pas de point final. Il faut les écouter, ces trois points, que j'appellerais initiateurs par référence aux "trois points terminateurs" qui terrifiaient Lautréamont et qui m'ont toujours évoqué quelque secte apocalyptique. Écoutez-les, car ils placent le poème dans son essence profonde : la prolongation d'un chant éternel, préexistant et subsistant.
"...Ici commence
le chant qui jamais
N'a cessé"
Ce chant "sans origine / Sans bornes ni bords", ce chant "ensemencé de paroles" qu'il ne délivre pas, mais qui germeront en nous, ce chant sans fin, "Qu'aucune apocalypse / Ne désarme", est la seule réponse à la vieille condamnation attribuée à Adorno : si le poète doit se taire, c'est pour écouter le poème. "Ici commence le chant" est le leitmotiv de ce recueil. "Ici commence le chant / Qui durera / Autant que les hommes" en est la conclusion. Voilà pourquoi ce livre est optimiste dans ce grand vomissement de massacre et de barbarie, et profondément religieux dans son athéisme apaisé. Il célèbre la disparition de l'homme, non pour que tout s'anéantisse, mais pour qu'autre chose naisse de sa disparition, comme, dans la tradition juive, la disparition de Dieu dans le zimzoum initial a laissé place au monde.
"Aujourd'hui
L'heure est peut-être
Venue pour nous
de mourir

Mais pas
Sans avoir donné
Autre chose où
Nous serons
Comme d'autres sont
Bréviaires du banal"

Voilà pourquoi le poème, qui traverse ce recueil comme le vent traverse le désert, est à la fois la Genèse, l'Odyssée, l'histoire du monde, la vie de l'homme, l'acte d'écrire et celui d'aimer. Tout cela doit se lire dans un même flux, qui mélange les genres, les thèmes, les époques. Grand fourre-tout chaotique, diront les lecteurs pressés. Non pas. Mais un livre univers, un livre éternité, où L Histoire comme le Monde seraient une immense feuille de papier froissée et roulée en boule, où tout se côtoie en désordre, où les lointains se rejoignent, une feuille qu'il faudrait lire transversalement, comme si l'on y enfonçait une aiguille, sans chercher à la défroisser, car ses plis et ses circonvolutions lui donnent un sens que le texte reconstitué ne contient pas. Voilà comment le "bréviaire du banal" des atrocités humaines sans cesse recommencées devient la mer des histoires où Ulysse, ballotté par les flots, couvert d'écume et de varech, trouve son chemin.
Lien : http://jean-claude-bologne.c..
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Vidéo de Werner Lambersy
Avec Arthur H, Rim Battal, Zéno Bianu, Kent, Abdellatif Laâbi, Mélanie Leblanc, Hervé le Tellier, Marie Modiano, Jean Rouaud, Mylène Tournier, Hélène Arntzen (saxophone) & Sébastien Volco (claviers)
Cette anthologie du Printemps des Poètes rassemble plus de cent poètes francophones contemporains autour du thème de l'éphémère. Là où dansent les éphémères se veut un témoin du foisonnement de la création poétique actuelle. Ici, aucun courant poétique ni aucune doctrine littéraire ne font la loi. L'anthologie est constituée essentiellement d'inédits.
Le livre est dédié aux poètes disparus en 2021 : Philippe Jaccottet, Bernard Noël, Werner Lambersy, Joseph Ponthus et Matthieu Messagier.
À lire – Là où dansent les éphémères – 108 poètes d'aujourd'hui, Anthologie réunie par Jean-Yves Reuzeau, le Castor Astral, 2021.
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