Camille Laurens m'a révoltée...contre des pères qui se permettent une déception à la naissance d'une
fille, contre une famille, qui ne lave son linge sale qu'en son sein, et foule au pied la douleur d'un abus, contre la société, qui freine des quatre fers devant l'émancipation de la femme...
On suit la vie de Laurence Barraqué, qui en naissant "
fille" dans les années 60, va prendre la mesure de ce qui la détermine en tant que telle. On suit au travers de ses réflexions, l'évolution de la place de la femme dans notre société. C'est très juste, la plume de l'auteure, à la fois tendre et caustique m'a plus d'une fois fait sourire, mais beaucoup réfléchir aussi. J'en ai d'ailleurs lu plusieurs passages à ma propre
fille adolescente, tant les réflexions nous amènent à vouloir, sans aucun féminisme revanchard, nous imposer par rapport à notre personne, et non en tant que sexe. Ce roman est un indispensable selon moi, il n'est pas revendicateur mais fait juste un triste constat: être une
fille, c'est être moins ou devoir être plus...
Le procédé narratif évolue en même temps que grandis la
Fille. Après le "Tu" du début, qui annonce sa naissance, sa découverte du monde et son contexte familial,
Camille Laurens lui cède la parole dès 3 ans, pour qu'elle nous raconte son enfance. Mais à neuf ans, après un événement dramatique, la narratrice doit se dissocier d'elle-même pour éloigner la souffrance, et décrira sa vie à la troisième personne, comme si elle n'était plus actrice de sa vie, juste spectatrice.
Quand, à l'adolescence, ses désirs s'éveillent, elle retrouve enfin sa voix dans le récit, redevient maîtresse de son corps.
La deuxième partie nous la présente en passe de devenir mère. Ses propos sont plus affirmés( qu'est ce que j'ai ri à l'allusion aux quarante voleurs!), la
justesse et l'évidence de ses idées m'ont séduite.
Ensuite, on assiste à sa construction en tant que mère, mère d'une
fille qui l'éduquera à sa propre féminité, enfant-miroir qui lui montre la multiplicité du genre féminin,
fille libératrice, qui bien de son époque, affirme et revendique son genre: "Être une
fille, c'est merveilleux !".
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