Pour les espions de tout poil la Guerre Froide n'est toujours pas terminée.En tout cas c'est ce que
John le Carré nous laisse penser à la lecture de son dernier roman.
l nous immerge, pendant plus de 300 pages, dans les arcanes de l'espionnage anglais que tout fan de James Bond aura reconnu comme être le MI-6 .
On y fait connaissance avec Nat , un vétéran du contre - espionnage, qui après un passé très actif au Service de Sa Majesté en Russie puis dans les pays de l'Europe de l'Est , est actuellement en « Stand By » à Londres , en attente d'une éventuelle prochaine affectation . En attendant il occupe son temps à "l'Athleticus Club" , un centre sportif dans lequel il enchaine les sets de badminton et les bières au bar du club .
Malgré ses talents , son expérience et sa pratique courante de plusieurs langues , Nat est en quelque sorte « au placard ». En attendant il se débat comme il peut pour profiter de la vie avec sa femme Prue , avocate militante et sa fille , Steff , qui n'est pas la dernière pour challenger son père sur ses idées patriotiques et mettre en évidence les contradictions de la politique anglaise vis-à-vis de l'Europe .
Il y en a un autre qui a une dent contre le gouvernement anglais et les digressions journalières du Président Trump , c'est le nouveau partenaire de badminton de Nat , un certain Ed qu'il affronte tous les lundis quand il est libre .
Heureusement pour Nat , les affaires reprennent et avec elle un poste qui se libère dans un coin perdu de Londres surnommé « le Refuge » où il a pour mission de superviser une petite équipe dont la brillante Florence fait partie . Une jeune fille intelligente, ambitieuse et très active qui a pour objectif de monter une mission afin de mettre en lumière les agissements illicites d' un milliardaire de la nomenklatura russe basé à Londres . Une affaire qui va mettre en ébullition la cellule dirigée par Nat comme le Board du « Bureau ».
Mais l'espionnage est un métier complexe , qui se joue à plusieurs bandes , avec des surprises qu'il est préférable , voire conseillé de toujours anticiper à moins que l'on ne se fasse enfumer par plus fort que soi ou par un jeu de dupes organisé par « ses chers collègues ».
Il y avait longtemps que je n'avais pas mis le nez dans un roman d'espionnage. Même s'il s'agit ici d'un des maitres du genre , je dois dire que le début a été un peu compliqué pour moi , puis je me suis laissé prendre par le scénario habilement construit et par la truculence de l'humour « So british » .
J'ai aimé l'auto-dérision dont il fait preuve à chaque instant. Et je peux vous dire que le Carré n'est pas tendre, ni avec son gouvernement qu'il reproche d'avoir accouché du Brexit ni avec les membres des Services de Renseignement qui souffrent , semble-t-il de justesse d'esprit dans leurs recrutements voire d'une mentalité des plus malveillante envers certains de leurs « chers collègues » . Les coups dans le dos sont permis mais cela doit rester entre « gentlemen » . Attention car au jeu de la roublardise certains risquent de tomber de haut et notre ami Nat n'est pas le dernier !
On finit donc par se laisser emporter par les nombreux soubresauts de l'histoire qui , même si la mise en place peut sembler fastidieuse , nous offre un savoureux échantillon du style le Carré , qui utilise le prétexte de ce roman pour nous offrir une sévère diatribe contre l'ordre actuel , les manoeuvres géopolitiques hasardeuses de son gouvernement , manifestement foncièrement europhobe .