AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,62

sur 387 notes
Fidèle spectateur de la série "Le Bureau des légendes ", j'ai lors d'un des ses interview entendu son auteur Eric Rochant exprimer la place prépondérante de John le Carré dans son inspiration .
Cette déclaration m'a poussé à franchir le pas et décidé à lire John le Carré.
Ne trouvant pas chez mon libraire "déconfiné" depuis peu "l'espion qui venait du froid" , j'ai opté pour "Retour de service".
Et j'avoue avoir été très agréablement surpris .
D'abord et en effet , l'inspiration est évidente , et on retrouve dans ce livre nombres des éléments qui font le succès de la série; une description subtile et dynamique du métier d'espion , des agents sous couverture, sous légende, l'intrigue alambiquée et complexe qui tient en haleine lecteur et spectateur. Une occasion rare de constater comment deux artistes peuvent voir leur oeuvre partagée et enrichie sur deux supports différents, roman et série.
Mais plus interessant j'ai éprouvé beaucoup de plaisir à découvrir ce récit.
Son style , précis et agréable , mêle des descriptions détaillées mais fluides des atmosphères, des lieux, et plus encore de ce qui est dans la tête des personnages, leur mécanique intime qui les poussent à trahir ou servir , ou les deux.
J'ai très envie de me mettre au badmington, et de fréquenter le club londonien où joue le héros ainsi que le bar ou les deux protagonistes échangent bières et confidences.
La dimension politique du récit , la position de l'auteur sur le Brexit ou Trump auraient pu être caricaturales et finalement apporter peu à l'intrigue, mais c'est fait avec talent , humour et un certain réalisme. le récit est somme toute assez pro européen mais sans naïveté , et cela me convient tout à fait.
Enfin - comme dans la série - c'est dans la psychologie des personnages , et ils sont nombreux et variés , que réside le principal intérêt de ce roman.
Etre dans la tête de Nat, principal personnage et narrateur est quelque fois complexe et mystérieux, dérangeant même, mais toujours passionnant. J'ai éprouvé d'ailleurs beaucoup d'empathie pour cet espion vieillissant mais brillant , confronté à une administration quelque fois kafkaïenne et désuète.
Et que dire de Ed et sa détestation des Politiques britanniques et américains ?
La construction du livre est intelligente , et l'on entre dans ce récit d'espionnage progressivement , découvrant les ficelles du métier, et le cynisme de ce milieu paranoïaque et tortueux .
Un régal et un plaisir que je renouvellerai très prochainement en progressant dans la découverte de l'oeuvre de ce grand auteur.

Commenter  J’apprécie          30
J'ai découvert L'Espion qui venait du Froid en 1968, et, depuis lors, je goûte avec autant de plaisir les romans de John le Carré. Quand la Guerre Froide a pris fin je me suis demandée comment l'espionnage vers quelles cibles se tourneraient les espions. le Tailleur de Panama ou La Constance du jardinier, sur d'autres problématiques montrent que le Carré a su se renouveler.

Retour de Service revient sur l'espionnage entre services britanniques et russes. Nat, le héros a parcouru la Russie et l'Est de l'Europe, de Prague à Talinn en passant par Berlin. Proche de la cinquantaine, de retour à Londres après des missions lointaines, Nat  est un joueur de badminton de haut niveau et ce sport joue un rôle non négligeable dans sa carrière. Comme dans ses romans précédents le Carré s'intéresse au contexte géopolitique britannique avec le Brexit comme aux équilibres internationaux dominés par les personnalités de Trump et de Poutine. A la fin de chaque partie de Badminton Nat et Ed boivent des bières et Ed se lance dans des analyses politiques très critiques....



Impossible d'en dire plus sans spoiler...je ne vous raconterai pas l'intrigue. Je vous dirai seulement que tout se passe en finesse, en psychologie, sans violence inutile, sans gadgets d'espion à la James Bond mais avec beaucoup de bureaucratie. Et que vous passerez un temps agréable.
Lien : https://netsdevoyages.car.blog
Commenter  J’apprécie          50
L'intrigue débute en 2018, juste avant le référendum sur le Brexit et la visite de Trump, sous un gouvernement conservateur, dont le ministre des Affaires étrangères (Boris Johnson) est, selon Nat, aussi ignorant qu'un âne. Nat et Ed, après chaque match de badminton, discutent politique, enfin, c'est surtout Ed qui parle en ardent défenseur de l'Europe. Il donne libre cours, à sa haine de Trump, de Poutine, et « des profiteurs bourrés de fric se faisant passer pour des hommes du peuple qui mènent le pays vers le précipice« . Ils, veulent saboter l'Union européenne, tandis que la Grande-Bretagne, s'est définitivement résolue à n'être plus que le « toutou » d'un président américain fasciste, lié aux fondamentalistes religieux. Voilà, on est rapidement dans le bain et dans la tonalité de cette lecture.

Je connaissais John le Carré de réputation, et j'étais donc très heureuse de pouvoir découvrir son 25ème livre. Il a une carrière prolifique et sa renommée n'est plus à faire dans le domaine du roman d'espionnage. À l'heure de la consommation « fast-food » et de la digestion rapide, lire un John le Carré, conduit nécessairement à prendre son temps ! Ce n'est pas une lecture qu'on ingurgite à la va-vite. Non pas par l'intrigue, première couche qui ne dévoile pas grand-chose, mais bien par la construction et la profondeur du propos.

John le Carré, sait de quoi il parle, il prend le temps de poser les jalons avant de divulguer ses cartes. Comme il a certainement dû le faire du temps de la guerre froide, puisqu'il a lui-même été espion au service de sa majesté. À l'image des espions du bureau des légendes, John le Carré, dresse un portrait, bien réel de l'espionnage, loin des scènes explosives, que l'on peut retrouver dans certaines lectures.

Ici point de surenchère, il prend le temps de poser les bases, mais surtout de les coller à la réalité. Ce qui pourrait être un handicap pour le lecteur actuel, plus habitué à l'action, a été pour moi une plongée dans ce flegme tout britannique, qui prend le temps d'analyser les situations, d'observer avant d'agir.

Sous couvert de roman d'espionnage, John le Carré nous plonge en plein Brexit, avec des ramifications géopolitiques insoupçonnables, à l'actualité déroutante des relations internationales biaisées par la « folie » de Trump et la paranoïa de Poutine.

Europhile convaincu, il ne prend pas de pincettes, à travers son personnage principal, pour dire ce qu'il pense du Brexit et de ces hommes politiques qui dirigent le monde, notamment à travers des dialogues d'une grande vivacité et à l'humour qui m'a vraiment séduite.

John le Carré tire habilement les ficelles pour diriger le lecteur dans un imbroglio d'intrigues, l'obligeant ainsi à ne pas baisser la garde, notamment grâce aux pistes trompeuses, et aux personnages obscurs. C'est du bon polar d'espionnage, c'est jouissif et jubilatoire.
Lien : https://julitlesmots.com/202..
Commenter  J’apprécie          290
Cela faisait bien longtemps que je ne m'étais plongée dans les labyrinthes du Renseignement britannique dont John le Carré est sans aucun doute le meilleur guide. Mais, faute de nouvel épisode de James Bond terrassé comme tout le monde par le virus, ce Retour de service m'a semblé particulièrement approprié pour terminer en beauté le mois anglais. Et je ne me suis pas trompée. Comme d'habitude, c'est subtil et addictif avec une réelle portée politique et sociétale, ce que j'aime chez le Carré ; j'ai encore en mémoire les dénonciations des abus des laboratoires pharmaceutiques dans La constance du jardinier. Ici, l'auteur interroge avec brio la notion de patriotisme, sur fond de Brexit, de Trumpisme et de réorganisation politique en Europe. le point de vue qu'il nous offre sur le monde, par l'intermédiaire d'un vétéran des services secrets qui le contemple comme il le ferait d'un jeu d'échecs est à la fois instructif et glaçant. Heureusement, l'ironie, si chère aux esprits anglais est là pour nous rappeler que nous pouvons encore peut-être garder le contrôle.

C'est Nat qui a la parole. A quarante-sept ans, le voici de retour à Londres après de multiples postes sous couverture et sur le terrain ; alors qu'il s'attend à être mis sur la touche, on lui confie la direction du Refuge, une sorte de dépendance du département Russie, pas très reluisant. Ce qui lui laisse du temps pour s'adonner à son passe-temps favori, le badminton (ce qui n'est pas anodin : "Le badminton, c'est de la subtilité, de la patience, de la vitesse, des remontées impensables. (...) Les badistes sont généralement des solitaires qui ne cultivent guère la convivialité. Pour les autres sportifs, nous sommes un peu bizarres et sans amis"). C'est d'ailleurs à son club qu'il est un soir abordé par Ed, un jeune homme qui tient absolument à jouer avec lui. Après quelques parties, une relation se noue, Ed, très remonté contre son époque déverse ses sarcasmes anti-trump, anti-brexit, Nat l'écoute d'une oreille amusée tout en s'investissant dans une opération initiée par l'un de ses agents, Florence qui semble avoir levé un lièvre au cours de la surveillance d'un agent dormant. de manière inexplicable, les trois vont se trouver pris dans un enchaînement d'événements dont ils étaient loin d'avoir perçu les véritables enjeux ; et il faudra tout le savoir-faire de Nat et l'ingéniosité de sa femme, Prue pour s'extraire de la nasse.

Tiens, Prue. Je crois que c'est mon personnage préféré. Elle est étonnante, avocate spécialisée dans les actions contre les laboratoires pharmaceutiques (décidément...) elle a d'abord séjourné avec Nat lors de ses premières missions avant de préférer s'installer à Londres. Très aguerrie aux méthodes des services de renseignements, peut-être plus espionne qu'une vraie, intelligente, pleine d'humour (rien que cette répartie lorsque Nat lui propose d'inviter Ed à la maison pour lui présenter : "J'ai comme l'impression que vous vous faites beaucoup de bien l'un à l'autre, mon chéri. Garde-le donc pour toi et laisse-moi en dehors de tout ça"), elle forme avec Nat un couple équilibré comme on aimerait en voir plus souvent. Un vrai bonheur. Au-delà des personnages et de l'intrigue, tout est dans le ton qui oscille entre la chronique d'un monde devenu fou et la satire alors qu'une pointe d'humour et de flegme irrigue chaque page. le maître-mot de ce texte est le patriotisme, un mot que le Carré semble placer sur le volant de son jeu de badminton, un mot qui sort de ce livre complètement essoré par les coups de raquettes. Quant au lecteur, il termine plutôt essoufflé par la tension qui va crescendo jusqu'aux dernières lignes. Et un peu inquiet aussi, de la façon dont on lui a montré le monde.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
Commenter  J’apprécie          142
J'ai toujours beaucoup aimé John le Carré et je suis prêt à lui vouer allégeance jusqu'au bout d'une vie et d'une oeuvre déjà longue, mais voici que son dernier opus force mon admiration au-delà de cette fidélité. Quel tour de force ! Grâce à un scénario rusé qui pourrait faire pendant, côté espionnage à Agatha Christie, côté policier, en remettant habilement en scène l'ennemi le plus efficace en matière d'espionnage, à savoir les Russes, qui même post-URSS, conservent, qui en douterait, un fort potentiel de nuisance, John le Carré réussit le tour de force d'adapter tout ce qui fait sa marque de fabrique – une action lente, mais dont chaque segment a été mûrement mis en place en vue du résultat final ¬– à l'environnement géopolitique moderne, Brexit en tête. On admirera la mise à jour aux normes modernes du contrôle d'une scène entièrement pipée par les services de sécurité, en l'occurrence un jardin public avec remplacement du personnel de la cafétéria par celui du Service, où l'on peut suivre tout ce qu'il se passe depuis deux écrans de la salle de contrôle. Pour autant, des techniques classiques, dignes du protocole de Moscou, perdurent, comme la copie de documents "à la vapeur" pour éviter l'électronique laissant trop de trace. John le Carré reprend l'idée de la prise de contact par le sport – le tennis dans « Un traître à notre goût », ici le badminton dont les adaptes sont appelés « badistes » ai-je utilement appris ! Il en profite pour en remettre une couche contre les grandes sociétés pharmaceutiques, même si ce n'est pas le coeur de l'intrigue, comme dans « la Constance du jardinier », l'épouse du personnage principal étant une avocate très engagée à gauche et notamment contre ce genre de multinationales. le narrateur déroule l'histoire, en décrivant des faits apparemment banals mais qui sous sa plume et au vu de ce qui a suivi sont porteurs d'énormes conséquences, moyen efficace pour entretenir le suspense : on croit avoir un temps d'avance mais au final, on n'en sait pas beaucoup plus si ce n'est qu'un évènement majeur s'est produit ! le couple que forment Nat et Prue est solide, mais après avoir partagé le monde de l'espionnage du temps de leur jeunesse, Nat reste le seul espion et Prue reprend sa carrière d'avocate. Steph, leur fille, en adolescente hyperactive et hyperconsciente des enjeux de l'époque fait tanguer l'équilibre précaire qui résulte de la nécessité du mensonge. D'où des dialogues assez rigolos où Nat s'apprêtant à révéler une partie de la vérité concernant sa profession à Steph se voit répondre : « Tu vas me dire que je suis une enfant illégitime ? » S'ensuit un interrogatoire impitoyable portant sur la valeur éthique du travail de retournement des agents doubles. Au final, le réalisme n'est pas tant dans les situations, que dans le choix final qui s'impose à Nat qui vaut comme une profession de foi. On retrouve finalement cet espace de liberté qu'avaient essayé de créer les deux personnages de « Un pur espion » - oasis précaire - au milieu de la guerre froide. Ici, dans le chaos et la déliquescence générale, John le Carré fait de même en resserrant les boulons autour de la dimension humaine, qui prend corps dans l'amitié, l'amour, la famille – en opposition à la raison d'état, quel qu'il soit et à plus forte raison dans les mains de personnages veules et incapables. Et l'on sent à le lire que ce sont des valeurs dont il a lui-même eu le temps de priser la valeur.
Commenter  J’apprécie          80
« Retour de service » est un peu aux thrillers modernes ce que « le bureau des légendes » est aux séries télévisées actuelles. C'est un roman qui traite de l'espionnage avec un grand classicisme. L'auteur ne cherche pas nous impressionner mais se concentre plutôt à coller au maximum à la véracité des faits. Alors bien sûr, le rythme est lent, on ne croise pas de course poursuite, d'échanges de tir, de rebondissements mais seulement la réalité d'un métier de l'ombre.

De par son ancien métier d'espion, John le Carré possède toutes les connaissances nécessaires pour nous plonger au coeur du quotidien du renseignement britannique. Malgré son âge avancé, l'écrivain a su gardé son humour anglais avec lequel il lance certaines attaques. Derrière cette histoire d'agents doubles, il s'en prend à la politique d'aujourd'hui et à ses représentants. Il n'a pas sa langue dans sa poche lorsqu'il faut critiquer le Brexit ou Donald Trump. A travers ses personnages, il donne sa vision de notre monde.

Il en profite aussi pour parler du côté personnel de ces serviteurs de l'état. Il veut nous montrer la face cachée de ces missions souvent fantasmées par la littérature et le cinéma. On découvre alors le un agent qui doit constamment jongler entre son devoir et sa famille. Une vie de mensonges est parfois lourde à porter.

A l'heure de la surenchère artistique, je conçois que ce roman puisse déplaire à certain.e.s lecteur.rice.s. J'ai pour ma part pris un grand plaisir avec le réalisme des situations et du scénario. L'écriture de haut niveau de John le Carré et sa maîtrise de la narration font de ce livre une lecture exigeante et fascinante à la fois. J'ai eu l'impression de lire une histoire intelligente, vraie, en dehors des standards actuels, avec pour seul objectif : la littérature.
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
Commenter  J’apprécie          200
John le Carré, à son âge avancé, n'a rien perdu de son talent ni de sa verve. Son écriture, teintée d'humour anglais, est toujours aussi plaisante.
Il est certes un peu amer ,voire désespéré. Ce n'est plus seulement ce qui vient de l'Est qui l'effraie(les temps ont changé!), Trump et Boris Johnson sont ,autant que Poutine, les objets de sa rancoeur, de son mépris et de son inquiétude quant à l'avenir de l'Occident.
Mais tout ceci s'exprime à travers une intrigue captivante ,bien ficelée, comme J. le Carré en a l'habitude, et avec une légèreté et un humour britanniques caractéristiques de cet auteur.
Si vous n'aimez que les polars et romans d'espionnage hyper-violents et pleins d'une action frénétique, écrits à la va-vite en phrases courtes et quasiment orales, ce roman ne vous plaira peut-être pas car c'est une oeuvre littéraire.
Commenter  J’apprécie          30
Je dirais volontiers à un éventuel lecteur « ne faites pas comme moi, ne commencez pas la lecture de l'oeuvre de John le Carré par celui-ci. »
Bien entendu, j'ai entendu parler ou vu des films tirés de ses oeuvres comme L'espion qui venait du froid, la Taupe, La maison Russie, le Directeur de nuit, le tailleur de Panama, La constance du jardinier, Un traitre à notre goût, Une vérité si délicate … mais jusqu'ici, rien lu de lui « dans le texte ». C'est une lacune que je vais m'efforcer de combler cet été car nombre de ses précédents ouvrages dorment dans ma bibliothèque de campagne.
Dans cet épisode qui traite majoritairement des manigances entre services secrets – et celles des différents services du même pays ne sont pas les moindres – nous nageons en pleine actualité.
Il ne s'agit plus de Guerre Froide – on la regrette un peu, c'était si manichéen ! – mais des relations internationales aussi multilatérales que foutraques d'un Donald Trump, de la paranoïa de Vladimir Poutine, des errances du Brexit vues par les britanniques europhiles, de la vulnérabilité de l'Union Européenne.
Nat, le narrateur, est un agent sur le retour qui se voit confier en fin de carrière actuve à l'étranger un dernier poste à la tête d'un bureau qu'il doit vraisemblablement (administrativement) liquider.
Sa passion, à près de 50 ans, est athlétique : il joue régulièrement au badminton, un sport qui lui a permis jadis, dans ses affectations dans les pays de l'Est, de recruter ou de retourner différents agents. Il a pour épouse la délicieuse Prue, avocate de causes perdues mais femme d'agent secret parfaite.
Est-ce un effet de l'âge ou du désir de se rendre utile, Nat est approché par une grand jeune homme naïf et bavrd qui le défie au badminton. Dès le départ, on perçoit qu'il y a entourloupe sous roche. Nat s'en rend-il compte ? La rencontre va s'avérer explosive et la chute sera à la fois abrupte, invraisemblable et pour ma part, décevante.
John le Carré nous explique avec clarté les techniques classiques de surveillance et de contre-espionnage, les leviers des manipulations psychologiques, les rivalités entre équipes, les turpitudes des uns et des autres … et surtout la guerre souterraine qui mène le monde multipolaire dans lequel nous vivons.
Les portraits de personnages sont minutieux, on y retrouve des constantes comme le sort de gens sincères broyés par un système sans pitié. C'est bien écrit, bien traduit, mais je me suis tout de même pas mal ennuyée …
Commenter  J’apprécie          92
Pourtant amateur de lecture, je n'avais encore jamais lu un livre de John le Carré. J'ai profité de sa dernière parution, "Retour de service", pour réparer cette anomalie et perdre cette forme de virginité. Et ce fut bien agréable. le titre joue sur les mots en faisant allusion à la fois au retour au pays du narrateur, un agent britannique au service de la Couronne d'Angleterre, mais aussi à un coup de renvoi au badminton dont le narrateur est un champion. L'écriture est élégante, drôle et pleine de charme, l'intrigue très actuelle est complexe et subtile à la fois, tout en nuances. J'ai apprécié l'humour de l'auteur, la finesse avec laquelle il nous parle de l'art de l'espionnage, sa justesse pour décrire la nature humaine, ses valeurs ou sa grandeur, ses bassesses ou sa fragilité. Les personnages sont denses et bien réels, plantés en quelques lignes. Et puis il y a des scènes incroyables comme celle sur le tire-fesses où le narrateur doit annoncer à sa fille qu'il est un espion. Un régal. J'ai été aussi agréablement surpris par le ton politique de John le Carré qui n'hésite pas à exprimer ses propres opinions dans son roman. Quelle charge contre le Brexit, contre Trump et Poutine ! L'auteur exprime clairement son indignation et son amertume contre son propre pays, mais cela ne doit pas décourager ceux qui ne les partagent pas. Car la fiction politique est racontée à hauteur d'hommes et de femmes, au niveau de l'intime et du personnel ce qui rend les personnages encore plus attachants. La langue est impeccable, directe et précise, avec de grands moments de narration où jamais un mot n'est placé au mauvais endroit. Un livre agréable et assez imprévisible écrit par un grand maitre des histoires d'espionnage et fin observateur des relations humaines. Je n'ai pas été déçu par mon premier John le Carré.
Commenter  J’apprécie          62
Les espions, cela n'existe plus. On n'en voit plus, on n'en parle plus, sauf James Bond, inoxydable. D'ailleurs, la période de la guerre froide est derrière nous, et des oeuvres comme La maison Russie d'un certain John le Carré ne pourrait plus être écrite de nos jours.
Est-ce si simple ? Bien sûr que non. Prenons Nat, espion quasiment à la retraite, et qui n'a pas vraiment envie de se retrouver au placard, dans un obscure service. Il a encore moins envie de devenir formateur. Rien n'aurait dû se passer, à moins de constituer le cercle des espions disparus, tout en gardant un oeil sur une source possible – enfin, ce n'est pas tant Nat qui le fait, que Florence, une stagiaire pleine de vie et de volonté, qui ne demande qu'à être utile à son service et à son pays.
Seulement, les temps ont changé – oui, je me répète – et il n'est pas question de froisser qui que ce soit, ou de se lancer dans une opération trop onéreuse. Après tout, tout va bien, non ? Non, bien sûr : l'Angleterre est en plein Brexit, et doit trouver sa place en dehors de l'union européenne, tout en maintenant des liens avec elle. Il faut faire aussi avec Trump d'un côté, Poutine de l'autre, et les remarques sur l'un et sur l'autre sont assez caustiques, et lucides.
Mais qui les fait ? Nat ? Non, même pour un agent en semi-retraite, ce n'est pas vraiment son rôle. Celui qui les fait, c'est Ed, son partenaire au badminton, lui qui est venu exprès pour se mesurer à lui, en un singulier combat. Les deux hommes pourraient presque nouer des liens d'amitié, n'était… la différence d'âge ? le fait que Ed, mis à part sa germanophilie et sa haine de Trump ne se livre pas tant que cela ?
L'écriture est rétrospective et c'est après que tout aura échoué (ou réussi, selon les points de vue) que nous découvrirons l'histoire. Glamour ? Non. Aventureuse ? Oui. L'espionnage n'est pas simple, et repose avant tout sur l'habilité à cacher ce que l'on est vraiment, et à faire croire à l'autre que l'on est…. Qui au juste ? Pas facile à déterminer. L'espionnage est un travail d'équipe, l'espionnage nécessite d'être toujours sur le qui-vive, de ne faire confiance à presque personne, d'avoir une excellente mémoire, et d'être attentif à ce que les apparences peuvent cacher. Vaste programme qui nous est ici montré. Nat a eu la chance de pouvoir toujours compter sur Prue, sa femme, avocate des causes pas gagnées d'avance, parfaite épouse d'espion dans le sens où elle s'est tenue à l'écart des jeux d'espion – tout en sachant parfaitement en quoi il consistait et en épaulant son mari.
Un excellent livre d'espionnage so british – qui peut faire mieux que John le Carré dans ce domaine ?
Lien : https://deslivresetsharon.wo..
Commenter  J’apprécie          173




Lecteurs (852) Voir plus



Quiz Voir plus

L'espion qui venait du froid

"L'espion qui venait du froid" est un roman d'espionnage signé...

Frederick Forsyth
Jack Higgins
Graham Greene
John le Carré

10 questions
79 lecteurs ont répondu
Thème : L'espion qui venait du froid de John Le CarréCréer un quiz sur ce livre

{* *}