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sur 265 notes
La toute première surprise tient au style de l'écriture complètement loufdingue, qui emprunte indifféremment à l'anglais, au vieux français, à l'argot un peu désuet, ainsi que des mots fabriqués de toutes pièces. le plus surprenant, c'est d'après une phase d'adaptation, voire d'irritation, on se rend compte qu'on "entrave" très bien cette nouvelle langue si imaginative. C'est même un régal. Quelle prouesse! Je me dis qu'en livre audio ce doit être fol amusement!
De nombreux clins d'oeil parsèment ce livre. Quand il s'interroge, "les englishes sont-ils pires que d'autres ? oui évidemment ce sont des monstres sans délicatesse et malpeignés..." Comment ne pas voir apparaitre un certain premier ministre! Parfois c'est une référence sérieuse : sire Pastoureau, érudit en couleur et en heraldique. La découverte de la porte sacrée avec les murs qui s'etrecissaient me rappelle un conte d'Edgard Poe.
le "Jehanne project" est présenté à la quinzaine de "childrens" recrutées à la façon d'un kholanta. Yolande d'Aragon, dite Yo, GO pour l'occasion, organise l'éducation de gamines dont une seule sera appelée à une grande destinée : sauver la France et permettre au roi Charles VII de retrouver son trône en boutant les anglais hors de France. Cette mystique de Jeanne d'Arc connue comme ayant contribué à la fin de la guerre de cent ans et aux ambitions des Armagnacs et Bourguignons, avec le sacrifice ultime de Jeanne, abandonnée à son triste sort à Rouen le 30 mai 1431, prend une drôle de tournure sous la plume de Guillaume Lebrun.
Le Diable est de la partie et donne ses ordres (p91). Je ris encore de cette incantation, salmigondis totalement indéchiffrable, d'où émerge le non de... Rachida D.

Au-delà de la pochade, ce livre interroge sur la création d'un mythe : Il associe éléments historiques et réels à des superstitions, le tout pour servir un intérêt.

Pour corser cette geste, qui de temps à d'autre verse dans le fantasmagorique, l'auteur empreinte à la mythologie grecque et peut-être même un certaines oeuvres de science-fiction. Il y a certaines longueurs dans cette épopée qui devient de plus en plus confuse. Mais il faut reconnaître que l'auteur a fait des recherches, établi des ponts entre divers éléments culturels pour créer une forme de surnaturel. de ce fait, c'est presque un jeu de chercher en lisant son texte les indices, trouvailles ou pointes d'humour qui émaillent son récit.
Ainsi, je découvre qu'une blague, dans le roman de science-fiction le Guide du voyageur galactique, paru en 1978, de Douglas Adams, mentionne dans la partie finale de cette oeuvre que la réponse à la grande question sur la vie, l'univers et tout le reste est 42. C'est le résultat du moulinage d'un ordinateur pendant de nombreuses années... il ne restait plus qu'à dire qu'elle était question ! le nombre 42 est devenu un élément central de la culture geek...
Le livre fait la part belle aux héroïnes : les femmes sont les personnages principaux et montrent de nombreuses aptitudes, y compris à guerroyer ou élaborer une stratégie pour la reconquête du pouvoir. Les hommes sont de simples figurants.
La fin du livre nous donne à découvrir le destin de 9 femmes puissantes, ayant réellement existé ( bien avant celles de Léa S) et dont les exploits nous sont relatés sans exagération.
Artémis 1ere, reine d'Halicarnasse (5eme s.av. JC),
Ching Shih, piratesse de l'empire de Chine (1775/1844),
Dihya, guerrière berbère et reine de l'Aurès (8eme s ap.J.C),
Hangaku Gozen, guerrière samouraï au Japon (13 eme s. ap. JC),
Seh-Dong-Hong-Beh, célèbre amazone du Dahomey (1851 ...)
Timoclée, Thèbes (4eme siecle) combattante contre Alexandre le Grand.
Tome Gozen, samouraï (1157...)
Veleda, prophétesse germanique,
Zénobie, (3eme s.) Reine de Palmyre dont elle fit un foyer culturel et défia Rome en étendant son royaume à l'Égypte.
Je connaissais les amazones du Dahomey mais ignorais les autres et tant d'autres! C'est une partie documentée fort intéressante.
Un livre qui a beaucoup de mérites.


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Vous laisserez-vous  « mythographier » et emporter par cette épopée bien peu catholique ?

Vous connaissez Jeanne d'Arc ? Mais pas Jehanne la 12e, future guérillère de choc, dodue, saphique et un tantinet cannibale ! Vous connaissez Yolande d'Aragon ? Mais pas « Yo », autrice d'un petit 𝑇𝑟𝑎𝑖𝑡𝑒́ 𝑑𝑒𝑠 𝑓𝑒𝑚𝑚𝑒𝑠 𝑝𝑢𝑖𝑠𝑠𝑎𝑛𝑡𝑒𝑠 et affligée d'appartenir au « camp des big loosers ». C'est d'ailleurs ce qui la conduira à se dévouer corps et âme « au façonnement d'une jeune Guérillère » apte à « bouter sans faillir les Englishes et leurs sales faces pustuleuses hors du royaume » conformément à la « Grande Prophétie (qui) annonce que le royaume sera sauvé par une bielle et vaillante et vierge Guérillère ». Pour cela, « Yo » recrute quinze jeunes filles, toutes rebaptisées Jehanne (de 1 à 15) et leur prépare un programme d'études aux petits oignons pour sauver le royaume en péril. Vous l'avez compris, Guillaume Lebrun revisite, dans son premier roman, l'histoire de France du début du XVe siècle dans une « langue… parfaitement accessible à la comprenette si on prend la peine de tendre l'oreille. »

L'auteur s'amuse avec l'Histoire de France et avec la langue et il crée par là-même une uchronie singulière en son genre. Il fait alterner les voix de Yolande et Jehanne qui usent toutes deux d'une langue assez similaire truffée de mots d'argot, de vieux français, d'expressions anglaises plus modernes et de néologismes souvent pittoresques.

L'excentricité et l'insolence ne m'ont pas gênée. Je me suis vite laissée emporter par le côté décalé. En revanche, mon intérêt s'est quelque peu émoussé vers la fin. Certains passages m'ont paru longuets, notamment le combat épique final, trop sanguinolent et visqueux à mon goût. Ma lecture a perdu de son intérêt en basculant de l'Histoire vers la SF. Je comprends que les spécialistes de Tolkien, Lovecraft & Cie aient apprécié mais n'étant pas adepte du genre, le récit a fini par perdre, pour moi, de sa saveur. Les chansons de Marie-Claudette Charlemagne dans lesquelles on reconnaît évidemment la voix de Céline Dion (dont je ne suis pas vraiment fan non plus) ne m'ont pas davantage convaincue. Mon impression générale est donc quelque peu mitigée. Je reconnais la plume inventive et talentueuse mais je suis plus réservée sur le côté un peu fourre-tout du contenu.
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❝Jeannette se tortille dans les jupes de sa mère, qui la retient par le col de sa petite robe rouge.
— Cette gamine va me rendre chèvre. Dès qu'elle est en plein air, c'est la même musique. Pas moyen qu'elle reste en place. Comme devant l'église. Si on l'écoutait, on y rentrerait dix fois par jour !
Jacques, qui s'est arrêté une minute pour boire au pichet, ne peut contredire son épouse :
— Je le sentais, ça va être un sacré numéro.❞
Mon enfance tout feu tout flamme, Michel Douard

❝Note à l'attention des moines copistes
Vous tenez entre les mains la véritable geste Jehannesque, telle que recueillie auprès de Yolande d'Aragon et de Jehanne la douzième, apostillée ci et là lorsque cela s'avérait nécessaire. Aucune protestation de votre part concernant la véracité de ce récit ne sera prise en compte,
Deus autem ille aut defendat et custodiat te,
Abdul al-Haz
Eugène IV, pape
SYMPATHY FOR THE DEVIL
1
Laisse-moi me présenter comme il se doit :
my name is Yolande,
and I am from Aragon,
née sur les terres du royaume de France quatorze siècles après Jésus-en-Christ, répandue au sortir du ventre par des hurlements de joie, déjà bien esbardaillée des choses du monde, instruite en diableries, quatre fois reine, deux fois comtesse, dame de Guise, duchesse et maîtresse incontestée de mes sujets hérités de mienne épopée angevine, mariée à Louis, dit Loulou, belle-mère et liée par le sang au Grand Bastard de France, je me montre si douce avec lui qu'il me nomme tantine.❞


❝— Je le sentais, ça va être un sacré numéro.❞ Il semblerait que pour son premier roman, Guillaume Lebrun n'ait pas voulu faire mentir Michel Douard. Fantaisies guérillères s'amuse à revisiter l'histoire de France au temps de Jeanne d'Arc. Cette période, nous la connaissons tous. Encore que… L'auteur n'est pas le premier à s'y intéresser, pas plus qu'il n'est le premier à accorder quelque crédit à l'hypothèse émise par plusieurs historiens qui tiennent que Jeanne la pucelle serait le bras armé d'un complot fomenté par la duchesse d'Anjou.
Au vrai, en ce XVe siècle, c'est le chaos en notre beau royaume. le pays est au bord de la guerre entre la maison des Armagnacs et celle des Bourguignons. Venant ajouter à la pagaille intérieure, les Anglais s'incrustent depuis tant d'années qu'ils ne semblent jamais vouloir s'en retourner chez eux.

Afin d'avoir quelque raison de ne pas désespérer, Yolande d'Aragon dite Yo, une Armagnac de par son mariage à Louis II d'Anjou dit Loulou, fait un rêve. Elle rêve que lui est envoyée une jeune fille providentielle, une espèce de prophétesse guerrière ou guerrière prophétesse — à vous de choisir —, qui en deux temps trois mouvements renverrait les ❝Englishes❞ à leur Perfide Albion, mettrait fin à la guerre de Cent Ans et, foin du Traité de Troyes !, adouberait le dauphin Charles à la place de ce petit roi anglais d'Henri VI.

❝une Grande Prophétie annonce que le royaume sera sauvé par une bielle et vaillante et vierge Guérillère❞

Sitôt rêvé, sitôt fait. Avec les deux fils aînés du roi envoyés ad patres et un mari empoisonné, on sait déjà que la belle-mère du futur Charles VII n'est pas du genre à procrastiner. Cette fine stratège d'une rare clairvoyance devance les événements. Voilà qu'elle envoie des chevaliers mettre sens dessous les fermes de nos campagnes les plus reculées pour y dénicher quelques jeunes pucelles dont elle souhaite faire l'éducation. Ce serait bien le diable qu'une fois mise au fait des ❝bielles-lesttres❞, de l'❝esgorgement❞ et autres arts de la guerre, il ne s'en trouve aucune pour sauver le royaume de France. Et il s'en trouve une, en effet. de la quinzaine de jeunes paysannes qui lui sont présentées, il en est une à sortir du lot. Une grassouillette à la langue bien pendue : Jehanne la douzième. L'enfant, ❝plus souillée que le trône de France, le cheveu fol et l'oeil louche❞, n'aurait certainement pas été le premier choix de Yo, mais que voulez-vous il faut faire avec ce que l'on a et cette Jehanne-là, qui s'avèrera ❝Au-dessus du lot genré, toujours Hautement Irrécupérable, Heureuse, Vivante❞, va vite vouer à Yo une passion sans faille, passion qui lui inspire des poèmes enflammés qui rappelleront à certains d'entre nous les hits du siècle dernier (tempus fugit !)

❝J'inventerai moultes langues
Pour que t'en sois exsangue
Et dans tiennes malles ici
d'éternelles vignonneries.
Tous les rites hérétiques
issus des mages d'Afrique
J'les dirai au grand jour
pour retenir l'amour.❞

Vous l'avez ?

Fantaisies guérillères est désopilant, truculent, bourré de clins d'oeil. Écrit depuis un point de vue uniquement féminin, certaines trouvailles lexicales se passent d'explication, n'est-ce pas ?

❝ils me pénispliquaient à qui mieux mieux❞

L'écriture inventive est repue d'anglicismes et d'archaïsmes,

❝Sweetheart, nous ne sommes ready nenni❞

d'argot et d'érudition. La langue est familière jusque dans son étrangeté. Quel tour de force ! le tout est porté par un style bien déjanté, moyenâgeusement avant-gardiste ou contemporainement anachronique.

❝Pour ma part, j'en disais pis que pendre à chaque occasion qui m'était donnée, mais toujours de façon dissimulée, esbourdouillée de précautions diverses telles qu'il paraît, j'ai entendu dire, oh ! vous savez pas. Je prenais la température du peuple et tout le monde était d'accord avec moi :

1. Isabeau avait fréquenté hors chrétienté la moitié de la Cour et autant de serviteurs aux compétences douteuses ;

2. elle était à peu près aussi esparpillée que son royal husband sur le plan cervellique ; mais chez elle, point d'hallucinations ni délires, plutôt grandes hurlances, obsessions sans pourquoi et colères increvables ;

3. elle était intégriste hardcore-mon-coco genre anti-Englishe puissance mille, d'où sa hargne redoublée à mes dires de tantôt.❞

On baigne dans l'ambiance pop rock des seventies, eighties et nineties qui se nimbe des vapeurs d'un brouillard hallucinatoire le temps d'un combat épique digne des plus dispendieuses superproductions hollywoodiennes,

❝Au fur et à mesure de leur approche, les silhouettes des Phonoi se dévoilèrent à nos mires. Au creux de leurs grands capuchons noirs étaient faces de peau sans yeux ni bouche, verdâtres de putrescence. Ils étaient d'une taille de cinq ou six hommes, vêtus de lèdres de ténèbres qui s'effilochaient dans la course effrénée qu'ils menaient pour nous atteindre. Leurs bras étaient tout autant chair en décomposition, laissant paraître des os polis par le temps et couverts de signes gravés en lettres dorées dans la langue du Maître. Ils faisaient tournoyer des labrys, luisant de la haine immense contenue dans leur double lame.❞

avant que ❝L'Histoire [ne] se [remette] gentiment en branle❞ alors que se referme ce roman, parenthèse rocambolesque, dans lequel Guillaume Lebrun s'est autorisé à pratiquer quelques accrocs dans la trame de la version officielle.

L'oxymore du titre prophétise toute l'impertinence loufoque de ce premier roman politique et féministe qui évoque, sous couvert d'Histoire, des enjeux bien de notre époque. Audacieux et culotté, Fantaisies guérillères est un vertige tel que l'on est en droit de se demander si tout cela ne serait pas qu'un exercice de style (la réponse est non) et si l'auteur saurait tenir sans nous/s'essouffler la distance des 320 pages de cette histoire bien secouée en comparaison de celle que nous avons apprise dans nos livres d'histoire (la réponse est oui).

Chaque rentrée littéraire offre un livre à part qui invite ses lecteurs à lâcher prise. Guillaume Lebrun a signé celui de l'été 2022 et aiguisé ma curiosité. Qu'écrit-on après ça ?
À lire avec les Rolling Stones dans les oreilles !
Lien : https://www.calliope-petrich..
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Tout le monde connaît Jeanne D'Arc, mais qui connaît « Yo from Aragon Fuck yeah » ?! Guillaume Lebrun en l'an de grâce de 2022, nous offre l'ebourriffante geste Jehanesque.

Yolande d'Aragon, fatiguée d'attendre l'élue de la prophétie qui viendra résoudre la Guerre civile à la Game of throne, monte un élevage de petites « Jehanne » et façonne la future héroïne que nous connaissons dans les livres d'histoire comme Jeanne d'Arc, la pucelle d'Orléan.

Point de « Fais ce que voudras » à la Gargantua, mais néanmoins une sorte d'Abbaye de Thélème calée sur la fréquence féministe. Un vrai programme d'humanités avec un « e »  s'il-vous-plaît ! Et attention les Nouvelles vies parallèles non de Plutarque mais de Yo d'Aragon pourraient vous étonner de vérité féminine derrière la fable Artémise, Timoclée, Zenobie...

Le récit mêle de façon sorcellique la tradition de la vie de saint, et de la chanson de geste. Celle de Jehanne la Douzième donc, sera servie à la sauce pop-culture. de Lovecraft à Céline Dion, il n'y a qu'à se baisser pour ramasser les easter-eggs.

Toujours dans une grande maîtrise du jeu langagier, quand vous croyiez que tout est mis en place pour l'apothéose Jehanesque, alors tout part en vrille dans un délire digne de Borges ou de Lovecraft à l'arrière goût ésotérico- apocryphe avec une petite touche technicolor à la chevalier du zodiaque version amazone.

Je suis admirative du travail de la langue qui mêle ancien français, moderne, anglicisme, germanisme, à l'heure européenne. Derrière l'apparente fantaisie de ce récit, il y a selon moi une belle maîtrise du sujet & de la langue à la fois neuve, ancestrale et espiègle. A quand le tome II des Nouvelles vies parallèles de Yo d'Aragon fuck yeah ?
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Je dois être honnête envers les futurs lecteurs de ce livre : attention, il peut faire peur au départ, très peur. Mais pas de panique, la bête s'apprivoise avec un peu de patience. La langue est complexe et étrange, mêlant vieux français, anglais et expressions ultramodernes. Personnellement, j'adore ce genre de découverte où il y a ce qu'il faut de bizarrerie dans la plume et un texte qui propose un défi de lecture.

Commençons par le contexte : France, XVe siècle. Rien ne va plus : le roi d'Angleterre impose sa présence dans le nord du pays et profite d'une querelle sans fin entre Bourguignons et Armagnacs. Yolande d'Aragon, mariée à Louis II d'Anjou (dit Loulou), cousine de Charles VI (dit le Fol) et belle-mère du futur roi Charles VII, n'en peut plus de cette situation qui s'éternise et passe à l'action.

Yolande a un plan pour chasser les Anglais de France : elle enlève une quinzaine de jeunes filles à des paysans pauvres, se charge de leur apprentissage et en fait des guerrières. Et elle les appelle toutes Jehanne, de 1 à 15. L'une d'entre elles, Jehanne la douzième, deviendra la véritable Jeanne d'Arc, à l'aide d'une biographie plus ou moins imaginée par Yolande. La jeune fille devra prouver sa légitimité devant la cour et le peuple , mais pas de panique, elle pourra toujours compter sur Yo, qui la guidera jusqu'à affronter l'ennemi suprême, créature tentaculaire digne de l'univers de H. P. Lovecraft.

Un premier roman déjanté ou on peut trouver du merveilleux, du gore, du sexuel et du mystique et qui, sous son image sulfureuse cache des thématiques très actuelles : le féminisme, la réécriture de l'Histoire, l'éducation, le complotisme.
Le style ne plaira peut-être pas à tout le monde, certains y seront même allergiques, mais une fois que l'on s'est plongé dans le roman, il se déguste avec plaisir et amusement, comme si l'on mangeait un énorme plat aux ingrédients peu communs, excessivement gras, mais très savoureux.
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Pour arracher deux femmes puissantes s'il en est à la gangue du roman national plus ou moins moisi, une recréation savoureuse et enlevée, joueuse et diabolique, queer et rusée, des figures historiques de Yolande d'Aragon et de Jeanne d'Arc.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2023/01/30/note-de-lecture-fantaisies-guerilleres-guillaume-lebrun/

Yolande d'Aragon n'est pas toujours le personnage historique qui vient immédiatement en tête lorsque l'on se penche sur la guerre de Cent Ans (1337-1453) entre la France des Capétiens et l'Angleterre des Plantagenêt. Pourtant, les historiens de métier s'accordent à voir en elle l'une des plus habiles forces politiques et têtes pensantes de l'époque, ainsi qu'une redoutable manoeuvrière mondaine et matrimoniale, d'abord dans l'ombre relative de son époux Louis II d'Anjou, puis, grâce au mariage de sa fille aînée Marie avec le troisième fils de Charles VI, comme belle-mère du roi Charles VII, après la mort successive des deux premiers dauphins. Dans ce troisième texte et premier roman assumé de Guillaume Lebrun, publié en août 2022 chez Christian Bourgois, son personnage prend une dimension beaucoup plus épique et pleinement savoureuse, en devenant plus grand encore que sa propre légende, créant de toutes pièces une figure historique beaucoup plus connue qu'elle par le truchement d'une véritable école clandestine de futures cheffes de guerre légendaires, école dont la lauréate deviendra Jeanne d'Arc – et assumera la narration du roman à ses côtés.

« Fantaisies guérillères » est un roman profondément enthousiasmant, dans son double maniement d'un anachronisme enjoué de tonalité et d'atmosphère (pour lequel on songerait naturellement aux tours de force des Wu Ming / Luther Blissett de « Q / L'Oeil de Carafa », à la Marie-France Albecker de « Et j'abattrai l'arrogance des tyrans », voire, à l'écran, au Brian Helgeland de « A Knight's Tale ») et d'une inventivité langagière que l'on n'avait plus connue en matière médiévisante depuis la superbe Céline Minard de « Bastard Battle » (2008). Si l'on y ajoute cette désinvolture joueuse vis-à-vis de l'Histoire avec un grand H (dont chaque interstice et chaque rumeur peuvent être si joliment mis à profit ici), liberté de parole que ne renierait sans doute pas la Catherine Dufour de « L'histoire de France pour ceux qui n'aiment pas ça », et une ruse scénaristique, sous contrainte des chroniques pourtant établies, qui force l'admiration, on obtient in fine une bien belle réussite, où l'humour et la faconde s'allient à une cruauté et un sens du queer utile, proprement enchanteresses.

On peut aussi se régaler (plutôt a posteriori, car cette Histoire-là se prête aux spoilers) avec ce qu'en disent par exemple Zoé Courtois (dans le Monde des Livres, ici), Dominique Goy-Blanquet (dans En attendant Nadeau, ici) ou Ellen Ichters (sur RTS, ici).

Lien : https://charybde2.wordpress...
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Un roman haut en couleurs qui imagine une vie de Jeanne d'Arc plus attrayante que celle apprise dans nos livres d'histoire de l'école primaire ! A l'instigation de Yolande d'Aragon, il est fait main basse sur une quinzaine de jeunes filles qui sont formées et éduquées pour n'en sélectionner qu'une, la meilleure « Jehanne », la prophétesse attendue pour bouter les englishes hors de France. La lecture nécessite une petite adaptation au style et au vocabulaire, mais on se régale ensuite du délire total de l'histoire qui mêle du vieux français, réel ou inventé, un peu d'english et de teuton avec maestria et humour.
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I am Laurence from Vivegnis, mais appelez moi Lo. Ou Madame.
Je suis dans l'espérance que vous n'estes point dur de la comprenette ou à demi cervelé car nous avons à bargouiner d'un sujet de grande importance.
En compagnie de Yolande from Aragon, nous revisitons le mythe de Jehanne la Pucelle qui va bouter hors du Royaume de France ces clampins d'Englishs et leurs bullshiteries.
This bouquin is a Tuerie, une big claque dans la teste tant il est inventif, drôle et intelligent.
Je vais cesser de plagier le style inimitable de l'auteur mais vous avez ainsi un petit aperçu de ce livre qui mêle vieux français, franglish et anglais. C'est unique, c'est un premier roman, c'est une pépite et j'ai adoré.
Si vous ne devez prendre qu'une seule résolution cette année, c'est de lire cet opus.

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Le mystère de Jeanne d'Arc enfin dévoilé

Dans ce roman iconoclaste au style déjanté, Guillaume Lebrun imagine que Yolande d'Aragon crée une école de jeunes filles et entend confier à la meilleure de ses élèves le soin de sauver la France. Jehanne la douzième va sortir du lot.

Yo est la première à prendre la parole dans ce roman iconoclaste. Il s'agit en l'occurrence de Yolande d'Aragon (1381-1442) qui ne supporte plus la bande de dégénérés qui se bat maintenant depuis des décennies dans des combats aussi vains que ruineux. Aussi décide-t-elle de réagir. le plan qu'elle fourbit doit permettre de ramener enfin le calme dans le royaume: former plusieurs guérillères afin de confier à la plus brave et aguerrie de cette troupe le soin de mener l'ultime bataille et bouter les englishes hors de France.
Aussitôt dit, aussitôt fait : voilà ses émissaires parcourant le royaume à la recherche des perles rares qu'elles arrachent à leur famille moyennant une petite fortune. Ils en rassembleront finalement une quinzaine dans le château de cette «Star Academy» d'un nouveau style. Dirigée par YO, le petit nom de la Duchesse d'Anjou, cette académie n'a rien d'une sinécure. Les candidates au poste de sauveuse de la France doivent acquérir le savoir-faire des militaires les plus aguerris, de l'art de manier les armes à la tactique. À cette base vient s'ajouter une solide pratique sportive composée notamment d'arts martiaux mais aussi des cours d'histoire de la religion ainsi que de belles-lettres sans oublier les ripailles qui clôturent la semaine. Bien vite, une hiérarchie va se dégager, notamment en fonction de circonstances extérieures. La maladie va emporter une jeune fille, le froid hivernal aura raison de trois autres postulantes avant que les envoyés de l'Inquisition réussissent à en occire une poignée d'autres. C'est le moment pour Jehanne la douzième de monter son savoir-faire. Elle part venger ses camarades. Après avoir enfilé son armure, elle extermine à tour de bras jusque et y compris le prêtre inquisiteur prestement découpé en morceaux.
Ça y est, YO a trouvé la perle rare, celle qui va jusqu'à dépasser ses attentes et pourra concrétiser son projet un peu fou.
Guillaume Lebrun, à l'image de son héroïne, n'a peur de rien. Son style mélange allègrement l'anglais et la langue médiévale – dont on peut légitimement croire qu'elle est plus inventée que véridique – ainsi que des expressions bien d'aujourd'hui. Un doux mélange très audacieux, mais qui donne au récit un allant allègre et un côté joyeusement déjanté. Au pays des iconoclastes, Guillaume Lebrun est roi ! Avec Michel Douard et son «histoire ébouriffante de Jeanne d'Arc» voici deux manières de réécrire l'Histoire de la Pucelle qui nous sont proposées en cette rentrée littéraire. On attend déjà la prochaine victime avec impatience !

Lien : https://collectiondelivres.w..
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Quel livre rare et quelle drôlerie !

Pour qui a le goût du vieux français (remanié en franglais, rêvé plus que reproduit), pour qui a le dégoût des Englishes "et leur sales faces pustuleuses", pour qui veut lire autre chose que l'arrachement à sa condition sociale miséreuse par les livres (Annie Ernaux, Constance Debré, etc.), pour qui enfin aime la rareté et le pas de côté, alors voilà un foutrement bien déluré bouquin !
On lit d'abord l'histoire de Jeanne d'Arc, puis une sorte de délire situé quelque part entre "Le seigneur des anneaux" et "Les visiteurs" tout cela entrecoupé de scènes lesbiennes plus comiques qu'invitantes, et l'on se dit que ce Guillaume Brun est bien libre et bien joyeux. On se dit même qu'il aura un peu manqué l'occasion d'écrire autre chose qu'un canular et un pastiche et qu'il aurait pu donner à son livre un tour plus subtil. Nul doute qu'il en avait les capacités.
On aurait mis 5 étoiles s'il ne s'était pas un peu perdu dans le dernier quart, et s'il avait pris son talent un peu plus au sérieux.

Mais enfin, quelle rigolade !
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