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EAN : 9782738110039
212 pages
Odile Jacob (30/11/-1)
4/5   1 notes
Résumé :
Nous sommes tous « accro » à quelque chose. Est-ce un vice ? Un défaut ? Une faiblesse ? Ou bien l’expression d’un besoin profond, une exigence de transcendance, une envie de sortir de soi ? Certains se droguent au travail ; d’autres au sexe ou à l’écriture. C’est moins dangereux que l’héroïne ou la cocaïne, mais c’est une dépendance. Face à cela, la médecine mais aussi la psychanalyse semblent impuissantes. La dépendance est à penser comme primordiale. Tout ce qu’o... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Livre fort bien écrit, limite trop bien, impression que l'auteur se fait vraiment grand plaisir. Bon, moi ça ne me déplaît pas (que du contraire) mais il risque de perdre en route quelques lecteurs...
Une vraie vision, un vrai regard, de vraies idées politiques, sociétales, philosophiques et éthiques.
Le postulat de base est que l'homme est fondamentalement dépendant, en recherche d'ivresse en tous genres, la toxicomanie n'étant jamais qu'une des formes définies comme illégales et donc rejetées, bêtement, sottement, sans intelligence et sans aucun résultat acceptable.
L'auteur plaide pour un regard non pénalisant, et au contraire attentif, écoutant. Ecoutant la personne du toxicomane qui oblige, force, plie les codes, tant de la société que de la thérapie. le toxicomane ne pliera pas sans un substitut suffisamment jouissif, plaisant, intéressant, passionnant. Et encore il faut encore qu'il soit dans une logique d'acceptation d'une substitution. Si la société ne comprend pas les messages que véhicule le toxicomane, elle passera à côté de ses propres dérivations inquiétantes actuelles : pharmacodépendance, gamers addicts, et au-delà de ça un discours et des terminologies tox qui pénètrent la sphère « normale », les limites sont de plus en plus floues... Dès lors la pénalisation paraît outre peu productive, d'autant plus injuste.
Avec des exemples, une expérience clinique solides, Lembeye nous débite une analyse sans concession, un peu brutale mais, je pense, réaliste de cette problématique ontologique de la – des dépendances. Et même si on n'est pas entièrement, voire pas du tout, en accord avec ses thèses, il est sûr et certain que c'est une base intéressante à la discussion.
L'être humain a besoin de transcendance, d'un au-delà de lui-même, il ne cesse de chercher cela, l'aider lui et la société, nos sociétés à comprendre cette idée et y trouver ensemble les moyens de découvrir des pistes praticables, non ou moins mortifères, voilà un vrai défi.Un défi collectif et un défi individuel, personnel.
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Citations et extraits (37) Voir plus Ajouter une citation
La dynamique psychothérapeutique proprement dite substitue primordialement un changement de climat, une confiance qui permet des reformulations d'usages, d'images et de discours. Elle se doit d'associer dynamiquement aux « matterns » des « patterns » tout en respectant les hiérarchies. Il s'agit d'un détournement de puissance par des inductions les plus souvent indirectes, en réduisant la cohérence habituelle du patient pour atteindre le site où les coutumes se défont pour se reformuler.
Le toxicomane n'est pas dans un lieu d'indifférenciation vie-mort.C'est un vivant qui n'est pas sourd. C'est pour cela que les usagers de drogues ont adopté des comportements réduisant les risques alors que certains responsables affirmaient haut et fort que les toxicomanes ne changeraient pas leurs habitudes. Stupeur. Les toxicomanes écoutent, parlent et même lorsqu'on peur parle, modifient leurs usages. L'échange n'est pas à sens unique : si les toxicomanes doivent changer dans la mesure de leurs possibilités, les thérapeutes, les pénalistes, les politiques doivent modifier leur accueil des toxicomanes. Il faut accepter qu'un toxicomane dise la vérité. Il dit la vérité quand il dit qu'il peut faire douze fois le tour de Paris pour de la came et pas cinq mètres pour une seringue. Il émet alors l'idée que les dealers devraient proposer à leurs clients une dose et une seringue. Si les dealers ne le font pas, ce devrait être le rôle des thérapeutes. Cela n'a rien d'incitatif. Un toxicomane me disait qu'un mort par le sida ou par overdose, c'est une mémoire. C'est aussi pour nous une mémoire. Cela devrait être pour tous la mémoire. Cela devrait l'être pour ceux qui sont tentés par l'oubli.
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Globalement, les fumeurs de haschich ne sont pas des toxicomanes. Cependant, les produits dosés à partir de 15% de THC (tétrahydrocannabinol) sont addictifs.
[...]
La quasi-totalité des fumeurs de cannabis ne passe pas aux drogues dures. Il faut même dire que, dans la plupart des cas, l'usage de drogues dures n'induit pas de toxicomanie. Il suffit, pour s'en rendre compte, de chercher des informations de première main, c'est-à-dire d'interroger les toxicomanes eux-mêmes. Ou d'écouter les scientifiques compétents, par exemple le neuro-pharmacologue Jean-Pol Tassin : « Le traitement de la douleur par des prises chroniques de dérivés morphiniques ne déclenche chez l'homme une conduite toxicomaniaque que dans 4 cas sur 10000.
[...]
J'ai pu, en outre, découvrir que certaines personnalités dites borderline sont équilibrées par l'usage de cannabis et se dispensent d'un traitement neuroleptique. Il s'avère aussi que le cannabis est pour d'anciens héroïnomanes et anciens alcooliques un produit de substitution beaucoup plus efficace que les benzodiazépines. Les résultats sont là. Je n'ai fait que constater l'usage. C'est aussi un excellent désinhibiteur sur le plan sexuel.
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L'artiste Daniel Spoerri a donné corps à sa propre modification [de la coutume de l'usage de l'alcool], et a témoigné à sa façon de ce passage : « Je crois que l'éphémère est éternel. Il s'agit d'une même chose. On peut faire des choses qui ne durent pas et faire des choses de façon qu'elles durent éternellement, parce que rien ne dure éternellement, et donc c'est exactement pareil. J'avaisenvie depuis longtemps de faire des bronzes, et je me souviens très bien des raisons qui m'ont incité à faire le premier bronze.
« C'était une sorte d'acte magique. J'étais dans une phase d'alcoolisme aigu et j'avais le sentiment de ne pas pouvoir m'en sortir... Je me trouvais enraciné dans une situation où je ne voyais pas d'issue possible. J'avais fabriqué une chaise de paille tressée sur laquelle il y avait une tête de boeuf, avec une bouche, des yeux, et une chaussure fixée à un pied de la chaise. Le titre de cet objet qui existe aujourd'hui en bronze est Santo Grappa. En fait, c'était parce que j'étais moi-même assis sur cette espèce de monstre sous la domination duquel je me trouvais. Je me suis dit un jour qu'en le représentant en bronze, je pouvais le fixer, le bloquer, l'immobiliser dans l'histoire et m'arrêter ainsi de boire. Et c'est ce que j'ai fait. Cette action m'a obligé à cesser de boire.Voilà l'histoire de ma première sculpture en bronze. »
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Rien n'est affirmé vis-à-vis de ceux qui sont en avant de la nef : les toxicomanes. Peu de gens veulent les écouter comme des messagers dérangeants, mais des messagers tout de même. Ceux-ci affirment que nous sommes des êtres dépendants, que nous avons besoin d'ivresse, d'enthousiasme bien avant d'exiger des prévisions rationnelles. Keynes écrivait que la prévision rationnelle se devait d'être secondée et soutenue par l'enthousiasme. Il n'y était pas encore.Les hommes ont besoin de sciences étayées par l'enthousiasme, ce que Hölderlin appelait la tendresse. Ce qui fond reste fondateur. Nous avons besoin de démesure, d'héroïsme, de superflu. C'est cela que nous annoncent les toxicomanes. Nous devons les écouter là.
Malraux, grand toxicomane devant l'éternel, prophétisait le XXIe siècle comme religieux. Nous voyons venir ce siècle comme pharmacomaniaque, masquant le théologique qui continue à gouverner. Le toxicomane ne cherche pas à maîtriser, il cherche à être dépendant. Il dit qu'il n'est pas tout-puissant, que la toute-puissance ne lui appartient pas. Il a besoin de croire.
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... il est dit que la cocaïne est en Europe, une drogue prise par des catégories aisées de la population, un produit qui ne désocialise pas et qui ne pose pas les problèmes dramatiques de l'héroïne. Il est aussi dit que la dépendance à la cocaïne est psychique alors que l'on sait maintenant que la division psychique et physique ne tient pas la route, que la dépendance est globale, physiologique. Il est indispensable d'insister encore et encore sur l'aspect unitaire, physiologique de la dépendance.
[...]
En réalité, il n'y a pas de substitut de la cocaïne. C'est aussi par la cocaïne que l'on repère les limites et l'inintérêt de la vieille coupure psychosomatique, dépendance physique et dépendance psychique. Avec le crack, la dépendance est globale, physiologique, par blocage des sites cellulaires de recapture de la dopamine et de la noradrénaline. La cocaïne-base fumée et sublimée à 90° se résorbe instantanément et provoque une dépendance immédiate. Il ne faut pas plusieurs semaines comme pour la morphine et l'héroïne.
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