Dorothy Kilgallen : Une journaliste trop curieuse

Si Dorothy Kilgallen est malheureusement tombée dans l'oubli en Europe aujourd'hui, elle a marqué son temps Outre-Atlantique comme journaliste influente dans la période mouvementée du début des années 1960 pour les États-Unis avec la Crise de Cuba, la mort du président John Fitzgerald Kennedy et... sa propre mort.
Qu'elle a été particulièrement influente n'est pas une clause de style, mais aussi l'avis d'un certain correspondant de guerre, nommé Ernest Hemmingway, qui l'a considéré "the greatest woman writer in the world" !

Je suis content que Daniel Lesueur, spécialiste de la presse musicale, a consacré un ouvrage et un hommage à cette dame, d'autant plus que la plupart de monographies et bibliographies, parues après son décès en 1965, sont soit épuisées, soit hors prix.

Mais qui était donc cette Dorothy Kilgallen ?

Née le 3 juillet 1913 à Chicago dans une modeste famille d'origine irlandaise, comme les Kennedy par exemple, ses parents l'ont appelé Dorothy ou "cadeau de Dieu" (Doro-Thea, en ancien Grec). Enfant intelligente et douée, Dorothy voulait devenir journaliste comme son père, Jim. Si ses résultats scolaires étaient très moyens, la gamine était par contre déjà très curieuse et lisait énormément.

À 13 ans, elle a envoyé sa première lettre au journal local et, à 17 ans, son premier article sur un salon de beauté. C'est à 19 ans, en 1932, que sa carrière de journaliste était vraiment lancée, comme collaboratrice régulière du "New York Evening Journal" du magnat de la presse William Randolph Hearst, connu chez nous comme "Citizen (Citoyen) Kane" grâce au film célèbre de et avec Orson Welles de 1941.

Je n'entends ni résumer la carrière et vie de Dorothy Mae Kilgallen, ni l'ouvrage de Daniel Lesueur, je propose de me limiter à quelques événements cruciaux de l'existence à part de cette dame.

Comme journaliste d'investigation sa carrière a été fulgurante à partir de 1934 et ses 21 ans : chroniques écrites, suivies d'émissions à la radio (dès 1944) et à la télévision.
Parmi ses grands reportages, il y a entre autres celui du kidnapping du bébé de l'aviateur Charles Lindbergh en mars 1932.

C'est aussi elle qui a rendu publique, en 1959, la liaison de Marilyn Monroe avec JFK.

L'auteur a qualifié la vie sentimentale de Dorothy Kilgallen de borderline (chapitre 5). Il est vrai qu'elle s'est mariée en avril 1940 avec l'acteur Richard "Dick" Kollmar (1910-1971) qu'elle trompait, paraît-il, fréquemment et de qui elle a eu 2 enfants : Richard Junior en 1941 et Jill en 1943. Son fils, Kerry, né en 1954, est toutefois d'un autre père.

Dorothy Kilgallen n'a jamais cru en la version officielle de l'attentat de John Fitzgerald Kennedy à Dallas, le 22 novembre 1963, tel qu'il a été consigné dans le fameux Rapport Warren, selon lequel il a été question d'un seul tireur, Lee Harvey Oswald.
Elle est strictement l'unique personne, en dehors des officiels bien sûr, à avoir interrogé Jack Ruby, l'assassin d'Oswald, le 24 novembre 1963.

À vous de découvrir si sa position sur cet attentat tragique a fini par exaspérer la mafia américaine ou au contraire la police fédérale, le FBI du fameux John Edgar Hoover (1895-1972) ?

Et si réside là l'explication de la mort suspecte de Dorothy Kilgallen, qui avait décidé de résoudre ce mystère, à Manhattan le 8 novembre 1965, à l'âge de seulement 52 ans ?

L'ouvrage de Daniel Lesueur se lit comme un thriller captivant, tout en étant très instructif, car bien documenté et agréablement illustré par des photos et coupures de presse d'antan.