Allons ! puisque me voilà bien réveillé, à présent, essayons d’aller à cette messe. Un médecin sans doute ne conseillerait pas précisément, en pleine évolution de fièvre, cette promenade à la fraîcheur nocturne, jusque vers deux heures du matin ; mais tant pis !
Quand je suis debout, la tête me tourne. Quand je mets un béret, mes cheveux, devenus de petites choses extrasensibles, me font l’effet de se redresser tous, à ce contact qui les blesse. Tant pis ! allons-nous-en !
Mes deux bateliers avaient raison : il fait une nuit incomparable. La lune éclaire tout bleu, — la lune que les Basques appellent Il-argia (la Lumière-morte), — et c’est, dehors, un grand resplendissement pâle sur les eaux et les montagnes.
(Nuit de fièvre)
J’ai déjà vu de bien belles nuits de Noël dans ce pays basque, mais jamais comme celle-ci : aucune sensation de froid, ni d’humidité hivernale, et pas même de rosée sur la terre.
Au pied du jardin, la barque d’Ignacio nous attend, et nous commençons une traversée d’un quart d’heure, un glissement plutôt, pourrait-on dire, sur une sorte de miroir à étoiles, où notre sillage dessine de longues moirures en lumière de lune, en “lumière morte”.
De la rive espagnole, bleuâtre en avant de nous, viennent des chants lointains, avec les sons confus d’une guitare. Un bien-être momentané, que je paierai peut-être au retour, a succédé aux lourdeurs de la fièvre […].
(Nuit de fièvre)
Ils sont six, de même taille et pouvant avoir une dizaine d’années ; l’un, qui est le chef, marche en tête avec une lanterne ; quatre autres soutiennent à l’épaule une civière faite de branches d’arbre, et sur laquelle est posée la crèche : une maisonnette en feuillage de laurier. Le sixième, enfin, qui joue le Bonhomme Noël, est assis à la manière d’un petit bouddha dans cette niche de verdure ; un Père Noël devant toujours être barbu, on lui a dessiné au charbon, sur le minois, de longues moustaches, et, avec ses bonnes joues barbouillées, il trône, immobile dans son palanquin vert, roulant ses yeux vifs.
(Nuit de fièvre)
Des cloches tout à coup, mais de vraies cloches : les cloches de Noël ! Et les contrebandiers se taisent. C’est Fontarabie qui, dans le lointain, sonne à toute volée, et soudainement l’air de la nuit est comme rempli de claires vibrations d’argent. Oh ! le beau son de ces cloches !
(Nuit de fièvre)
Mais voici de nouveau les cloches de Fontarabie, empressées, joyeuses, argentines, charmantes à cette heure d’habituel silence, et il semble que l’air et l’eau en soient tout vibrants…
Oh ! les nuits de Noël ! Oh ! les cloches de Noël ! leur sortilège infiniment doux et presque ineffable, que les années n’arrivent pas à détruire, n’est-il fait que de nos souvenirs d’enfance, ou bien est-ce que, derrière tout cela, demeure autre chose d’occulte et d’éternel ?
(Nuit de fièvre)
En partenariat avec l'Opéra National de Bordeaux, rencontre avec Alain Quella-Villéger autour de l'oeuvre de Pierre Loti. Entretien avec Christophe Lucet.
Retrouvez les livres : https://www.mollat.com/Recherche/Auteur/0-1303180/quella-villeger-alain
Note de musique : © mollat
Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
Visitez le site : http://www.mollat.com/
Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux :
Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/
Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts
Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat
Linkedin : https://www.linkedin.com/in/votre-libraire-mollat/
Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat
Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/
Vimeo : https://vimeo.com/mollat
+ Lire la suite