Quand
Raymond Macherot quitte le journal TINTIN pour SPIROU, c'est avec l'envie de changer de style. Il est un peu las de Chlorophylle.
Il réalise alors Chaminou et le khrompire, sa meilleure oeuvre, selon lui. Voici un extrait de l'entretien que
Numa Sadoul a retranscrit dans le journal de fanzines, "Les cahiers de la bande dessinée" n°21 (2ème trimestre 1973) :
"Là-dedans, j'avais tout mis. Je venais de quitter TINTIN et je voulais du nouveau. Je l'aime beaucoup parce que c'était un peu sadique, et je ne déteste pas la cruauté, ça donne de la vie à une histoire : on croit davantage à celle-ci quand le méchant est vraiment méchant, et pas un tout petit peu méchant, comme c'est le cas maintenant. Aujourd'hui, je ne peins plus des méchants, je peins des êtres qui ont un sale caractère, et c'est tout... Chaminou m'avait bien amusé, je m'y étais donné à fond jusqu'à la trentième planche à peu près. A la trentième planche, j'ai compris que les copains et l'éditeur n'étaient pas emballés. J'ai été extêmement déçu. Ils voulaient du Chlorophylle, c'est évident. Et Chaminou a dérouté pas mal de monde."
Il crée alors le personnage de Sibylline, qui va satisfaire son entourage.
Et pourtant ! On trouve dans Chaminou toute une galerie de personnages bien loin du consensuel, dans le royaume de Zoolande, où les animaux, pour vivre en bonne intelligence, doivent se nourrir exclusivement de pâtes, de légumes et de fruits. Certains ne se font pas à ce régime alimentaire, notamment le gouverneur corrompu (un loup), qui fait évader de la prison de Durmur un khrompire emprisonné (comprenez un cannibale), pour le faire accuser à sa place des disparitions d'animaux, destinés à être dégustés...
J'ai découvert cette BD à sa sortie, en feuilleton de 2 pages, bien sûr, et ai réussi à me procurer l'album original quand j'étais ado. Je le relis régulièrement. Une excellente BD, bien éloignée des ouvrages remplis de bons sentiments de l'époque !