A la mort du peintre, la collection Caillebotte comptait sept Degas, quatre Manet, cinq Cezanne, seize Monet, neuf Renoir, neuf Sisley, dix-huit Pizzarro, deux Millet.
Caillebotte rédige son testament à 28 ans, prévoyant déjà un don à l'Etat, assorti d'une période d'attente de vingt ans avant accrochage, pour permettre au public de s'habituer à cette peinture, la comprendre et l'admettre. Ce même Etat qui a fait la fine bouche en recevant ce legs!
Caillebotte,le peintre réaliste et impressionniste, le peintre de la modernité, du Paris de Haussman et de la vie bourgeoise.
Caillebotte, c'est aussi l'homme aisé, le mécène, le collectionneur, l'ami qui entretient et assiste ses copains artistes vivant à la cloche de bois en leur achetant leurs tableaux.
Un ABCdaire pour comprendre, apprendre, s'instruire sur un artiste et un homme longtemps considéré comme dilettante.
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Très bon abcdaire sur Caillebotte. Ce petit livre est très intéressant avec une première partie particulièrement bien écrite. On apprend beaucoup sur l'homme, le peintre et le collectionneur. Surtout connu pour les raboteurs de parquet j'ai découvert grâce à ce livre un échantillon beaucoup plus large de son oeuvre qui mérite d'être mise en lumière. L'homme était très talentueux et avait un goût très sur. Mais vous découvrirez tout cela en parcourant le livre.
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Les fenêtres dans les scènes d'intérieur de Caillebotte ne constituent pas seulement des foyers de lumière. Il semble s'être inspiré, tout en inversant le point de vue, du "Balcon" de Manet, lequel présente l'embrasure de la porte-fenêtre comme le seuil entre l'espace privé et le monde extérieur où l'on paraît en public. Caillebotte nous fait pénétrer dans l'intérieur bourgeois, et le motif de la fenêtre apparaît chaque fois pour marquer la frontière fragile entre l'intimité domestique et l'univers de la rue. (p. 62)
Plus qu'un paysagiste, Caillebotte est un peintre d'histoire, même s'il a situé l'action de ses tableaux sur les nouveaux boulevards ou aux abords encore campagnards de la capitale. De sa courte formation académique, où la maîtrise de l'anatomie et l'harmonie idéalisée du corps sont paroles d'évangile, il n'a jamais renié l'importance de la figure dans l'expressivité du tableau. Mais les hommes et les femmes qu'il peint n'ont rien d'idéal et ses nus-en particulier féminins-sont parmi les plus audacieux de la peinture française, avec ceux de Courbet et de Manet. contrairement aux corps glabres, nets de tout plis et de tout poil, ces femmes sont bien de chair, imparfaitement belles et d'autant plus séduisantes.
Urbains ou nautiques, les tableaux de caillebotte expriment souvent la solitude d'hommes et de femmes qui s'ignorent malgré leur proximité.
De peintres d'histoire ils deviennent historiens de leur temps, s'attachant à retenir l'aspect particulier mais aussi selon le mot des Goncourt, à en capter l'âme. Avec eux, les sujets ordinaires s'élèvent à la poésie du genre; le monde quotidien, sans le moindre emphase mais avec une dignité nouvelle, renverse les héros anciens et leurs traits de vertu trop exemplaires. Plus rien, ni drame, ni pathos, ne vient sublimer la contingence des êtres et l'opacité de l'histoire en marche.
Pour Caillebotte, la figure humaine est aussi un habit, l'éloquence du vêtement ne se dissociant pas du statut social. Bourgeois et ouvriers, redingotes et blouses, crinolines et casquettes ; l'habit chez lui fait le moine.
Caillebotte va mettre sa science constructive de son dessin précis au service d'une inspiration pleinement moderne. Même après 1878 et l'adoption d'une technique picturale plus impressionniste, le peintre aura toujours recours à la mise au carreau pour ordonner, fragmenter et enfin transposer ses compositions.
Théophile GAUTIER - Le merle