Un livre construit d'une part sur une romance autobiographique, une liaison amoureuse d'une française et d'un activisme turc qui se termine et, d'autre part, sur un essai journalistique sur l'état Turc actuel avec l' islamisation de la société reposant sur la répression étatique du gouvernement islamo-conservateur.
Un monde difficile à cerner du fait de la grande diversités des minorités qui compose la Turquie: politiques, religieuses et ethniques avec inévitablement, en arrière-plan, le problème arménien.
Une diversité mal expliquée. On a une impression de grande confusion dans ce que dit Manteau. Il y a une volonté de dire trop de choses et d'être convaincante sur des évènements mineurs de rébellion : Manteau se cristallise sur le particulier, sur petit entre-soi d'activistes intellectuels éclairés franco/arméno/syro/turcs qui l'environne sans en expliquer la portée générale ou quand cela est fait c'est un bavardage pédant, convenu, bien pensant.
V. Manteau, brasse, convoque des faits notoires,
Charlie Hebdo, attentat de Nice, des personnages internationaux célèbres
Orhan Pamuk,
Asli Erdogan et d'autres locaux la confrérie Gülen et
Hrant Dink au nom imprononçable d'une prose tout à fait commune mais serrée et pesante.
De quoi parle-t-on? de la Turquie des turcs, des arméniens, de l'Europe
Est-ce un roman, un récit autobiographique, un essai sur la Turquie, de géopolitique, un traité de psychanalyse?
Tout est brassé, presque mouliné, on passe d'un journaliste turc ou arménien ou arménien turc nous dit-on en passant par
Sarkozy,
Césaire, Erdogan, l'écrivaine et l'autre, Camus, de Byzance à Constantinople à Istanbul, des syriens, à la narratrice psy quelque chose passée au yoga qui dégoise sec sur son couple en manque d'inspiration. Et ce sur un ton de lamentado lancinant de pleureuses orientales.
On vit dans une sorte de torpeur douloureuse. L'héroïne en femme féministe que rien n'effraie boit beaucoup et se ballade en jupette pendant le ramadan, demande au flics avec effronterie ou se trouve la tombe d'un activisme arménien, déplore que les turcs ne puissent pas lire des poèmes à cause de la langue arménienne, arménienne ancienne ou turque ancienne (ou je ne sais plus on s'embrouille)... Comme si en ces temps troublés c'était la préoccupation essentielle de 99. % la population turque
qui ne lit que le coran
Bref elle ose tout!
Un peu convenu ce personnage d'intello libertaire, politiquement correct, qui a tout compris et va faire sa révolution démocratico-féministe chez les ploucs d'Asie. Enfin Asie, peut-être pas, car Istanbul c'est, ça a toujours été, une ville européenne il suffit de passer le pont du Bosphore pour s'en convaincre. C'est marrant cette façon de se voir ainsi et c'est un tantinet présomptueux surtout qu'au moment de quitter la Turquie car ça commence à chauffer sérieusement, V. Manteau nous laisse croire avec un terrible suspens qu'elle va être inquiétée à la frontière!
le problème, mais V. Manteau ne l'a pas admis, c'est que la Turquie, même coté européen, ce n'est pas la France: c'est un peu plus rugueux voir viril bien qu'il y ait des femmes turques et de tête.
Prix Renaudot du roman! Quelle idée! Remporté au 6e tour par six voix alors qu‘il avait été précédemment écarté avec exactement le même nombre de voix! Vraiment il faut toujours que le jury Renaudot se distingue. L'année suivante il a fait la même chose pour S.Tesson avec son chat des neiges. Sont-ce (Hum! Hum!) là les «bonheurs d'expression» de la littérature actuelle loués par
Frédéric Beigbeder ou alors est-ce un cadeau, en ce qui concerne «
le sillon» pour les éditions du Tripode, son premier trophée?
On constate, d'autre part, que cette année là, le jury avait la mélancolie en écharpe. Primer «
le sillon» et «Avec toutes mes sympathies» en catégorie essais et «Le Lambeau» Renaudot poche prix spécial, l'heure n'était pas à la rigolade.
Et si on regarde du coté du Goncourt «Leurs enfants après eux» était élu
alors que, à l'avis général il n'était pas le favori et qu'il a fallut que
Bernard Pivot fasse pencher la balance là où il le fallait...
Des surprises donc et pas des bonnes !
Bref ce livre n'est pas vraiment «une gourmandise d'écriture » On a suivi un peu, V. Manteau, mais sans joie aucune.