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EAN : 9782070720279
256 pages
Gallimard (04/06/1991)
4/5   3 notes
Résumé :
Milan habite à Bratislava, en Tchécoslovaquie. Le pouvoir communiste l'empêche de poursuivre ses études. Pour ne pas être accusé de parasitisme, il doit à tout prix, trouver un emploi. Entre deux démissions, il travaille une année comme aide-soignant dans un hôpital. Il voulait comprendre la souffrance humaine, en fait il ne connaît guère que la misère et l'impuissance de l'homme face à la mort. La seconde année, marquée par le séjour en prison du père dissident, n'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
« L'année du chien – L'année des grenouilles » est un roman autobiographique de Martin M. Šimečka, né en Tchécoslovaquie en 1957. Il a commencé à publier dans l'édition clandestine en Tchécoslovaquie. Ce livre est le seul roman de Martin M. Šimečka qui ait été traduit en français. Il a été publié aux Editions Gallimard en 1991.
Martin M. Šimečka est le fils du dissident slovaque, Milan Šimečka, docteur ès philosophie, né en 1930, qui a écrit « le rétablissement de l'ordre », un livre qui se trouve répertorié sur Babelio.

Le jeune protagoniste de « L'année du chien – L'année des grenouilles », Milan, depuis sa naissance, n'a pas connu dans son pays d'autre régime que le régime communiste. Il nous offre une critique instinctive, simplement humaine, sans a priori politiques, de cette société en ruine, dans laquelle il doit vivre…
Il passe un examen d'entrée à l'université, mais il reçoit une lettre lui signifiant que l'université ne veut pas de lui ! Il se sent « comme une souris qui ne peut plus s'enfuir, hypnotisée par le python », ce régime communiste au pouvoir : « Ce monstre qui finira par nous dévorer tous. »
On ne l'a pas autorisé à suivre ses études parce que son père est dissident.
De fait, il est contraint de trouver un travail, sinon, il sera considéré comme parasite par le régime communiste !
On sent Milan angoissé. Il a envie d'un autre monde, d'une autre vie, mais en même temps, il ne veut pas quitter son pays. Ce n'est pas en s'expatriant à l'étranger que Milan trouve sa liberté. C'est en restant à Bratislava qu'il la trouve en étant utile à l'hôpital, où il a décidé de travailler comme aide-soignant : « N'est-ce pas une expression de la liberté que d'aider à sauver une vie ? »

Milan est bon, Il aime le contact humain. Il éprouve beaucoup d'empathie envers les personnes qu'il voit souffrir. Mais dans cette première partie du livre, « L'année de chien », Milan se sent impuissant face à la mort qui emporte de nombreuses personnes hospitalisées. Les émotions le submergent, il trouve injuste que dame Nature s'acharne sur de jeunes personnes, ne leur accordant pas de vivre longtemps : « Seulement la douce poitrine prenait une couleur de marbre, les petites veines bleues avaient disparu parce que le sang s'en était écoulé, et je regardais les petites taches marrons au centre de ses seins en me demandant si Ema avait connu les caresses d'un garçon sur son corps.
Anka prit un pinceau, l'encre et écrivit sur sa cuisse : Ema Holanova, 1961.
« Pourquoi cette fille est-elle morte ? lui demandais-je. »

Milan médite beaucoup. Il réfléchit sur le sens de la vie, du bonheur et de la mort.
« le bonheur c'est de pouvoir déguster la vie. »
Qu'était-il venu chercher dans ce travail d'aide-soignant ? Qu'y découvrait-il ? le malheur humain… L'impuissance… Il acceptait difficilement de participer à envoyer les gens dans l'autre monde !
Ce travail va le marquer profondément et le faire grandir.

Dans ce régime communiste, les soins de santé à l'hôpital sont gratuits, mais si un patient veut être bien soigné, bien opéré, il doit mettre la main au portefeuille ! Les pots-de-vin étaient monnaie courante dans tous les domaines à cette époque dans les pays du bloc soviétique !

Dans la deuxième partie, « L'année des grenouilles », Milan, après son expérience d'aide-soignant, devient vendeur dans un magasin de quincaillerie. Il s'y ennuie. C'est tout sauf réjouissant pour lui, car il se rend vite compte que tout ce qu'il peut vendre aux clients, c'est malheureusement de la camelote !
Heureusement en cette deuxième année, il rencontre une jolie fille blonde, Tania, intelligente, dont il s'éprend. « Sa beauté était faite d'une sensualité voilée par l'innocence, d'une sensualité qui me surprenait chaque fois que je la voyais en maillot de bain. Et ce balancement des hanches au lieu de sa démarche enfantine, où l'avait-elle pris, me demandais-je non sans trouble. »
L'image de Tania ne le quitte pas et il voudrait avoir un enfant avec elle. Leur amour est solide et sincère, mais est-il bien raisonnable de donner la vie à un enfant dans un tel régime ?
Heureusement que Milan, à certains moments, arrive à goûter un peu à une paix intérieure.
« Sur l'île nous nous retrouvions comme dans un monde meilleur et plus intéressant, un monde où les choses exprimées prenaient un visage sympathique. »
Ces moments-là, il les savoure, ils lui font du bien.
Pourtant il ne peut s'empêcher de penser souvent à son père qui est emprisonné en raison de la parution à l'étranger d'extraits de son livre « le rétablissement de l'ordre », livre qualifié de « délit contre la République » par la Sécurité d'Etat.
« Je le voyais assis dans une petite cellule, plus esseulé que moi, frémissant d'horreur parce que dans un tel espace on ressent mieux l'essence réelle du temps. Il faisait face à une montagne de jours et déjà il les sentait tous, l'un après l'autre, parce que tous allaient être pareils. Comme si on vous ensevelissait sous un monceau de terre dont vous sentiriez, gramme après gramme, le poids sur votre corps. »

Et Milan souffre aussi en voyant l'état de santé de sa mère, diabétique, qui se laisse aller, qui se demande comment va son mari et quand il rentrera à la maison : « Tout cela n'a aucun sens. Je n'ai pas envie de vivre, c'est tout. A quoi bon ? Je ne vois aucun plaisir dans la vie. Souffrir ? Dans quel but ? Pourquoi ils ont mis ton père en prison ? Dis-moi ! Où chercher le sens de tout cela ?
Il n'y en a pas, lui répondis-je. Mais tu devrais être contente qu'il soit en vie, que toi aussi tu sois en vie, même si tu souffres. de quel droit dis-tu que tu ne veux plus vivre ? Tout est mieux que la mort. N'importe quoi est mieux que rien. »

Dans ce roman autobiographique, écrit avec une grande sensibilité, Milan dénonce le régime qui l'a brimé, mais il ne renonce jamais et veut croire à un avenir meilleur vers lequel il court avec obstination (lui qui est passionné par la course à pied) et méthode pour ne pas perdre son souffle, améliorer sa forme et être prêt le jour venu.

« L'année du chien – L'année des grenouilles » a été écrit en 1985, et annonçait la « Révolution de velours » qui allait se produire en fin 1989, ce large mouvement pacifiste aboutissant à la chute du régime communiste et à la création de la République socialiste tchécoslovaque.

« Les mouettes criaient sans arrêt, de joie probablement. le Danube continuait à charrier ses eaux et me faisait penser à l'Europe. Que nous en fassions partie me paraissait quand même magnifique. C'était pourtant un sentiment étrange dans ce foutu pays où je devais me réjouir parce qu'ils avaient enfin laissé sortir quelqu'un de prison.
Tania me prit par la main et je pensai à mon père ; j'aurais voulu qu'il soit là, qu'il sente la joie paisible qui émanait de ces mouettes s'ébrouant sur le Danube et de l'amitié que je partageais avec les gens autour de la table. »

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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
En rentrant chez moi, au lieu de trouver mon père, j’ai vu un petit chat au museau rose et à la frimousse débile qui avait compissé mes pantoufles ; alors j’ai dû prendre celles de mon père pour sortir dans la cour boire le café avec Peter et Maman. Les yeux de ma mère avaient eu le temps de devenir rouges et sa bouche laissait quelquefois échapper des jurons qui, heureusement, n’étaient pas liés aux livres de mon père, son crime. Une certaine apathie s’emparait de moi, je sentais que je me réconciliais avec tout à une vitesse vertigineuse, mais il faut dire que nous nous y attendions tous, et c’est à ce moment précis que je me suis rendu compte que ce qui était resté inaccompli était simplement en train de s’accomplir. Au-dessus de nos têtes un lilas répandait son parfum et je tournais voluptueusement mon visage vers le soleil de mai, fermant mes yeux fatigués par l’insomnie.
« Je n’ai eu le temps de lui donner que sa brosse à dents et son peigne, disait Maman, il n’a rien emporté, il n’a pas d’argent, pas même une couronne.
Ca ne doit pas te tracasser pour le moment, lui ai-je répondu, nous devrions plutôt nous préparer… à ne pas le voir… trois, quatre ans. »
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