Trente pages à lire dans les volutes de cigarette, celles des Bastos que fumait Camus séjournant dans la « Cité de la Peste et du Minotaure » pour raconter les heures douloureuses, tragiques, d'hommes, de femmes, de toutes ces familles qui aimaient leur ville et leur pays.
Des mots pudiques, cadencés – trois courts, deux longs - qui cachent si mal la souffrance, des mots comme des sanglots, des mots- larmes que l'on ne peut pas taire, et cette résilience, si longue à venir.
Oser le raconter, oser l'écrire, oser le publier, parce que cette histoire, fait aussi partie de l'Histoire, et qu'il ne faut pas, plus la nier.
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Algérie, 1962. La rage qui suit l'abandon, et son souvenir toujours brûlant.
Sur mon blog : https://charybde2.wordpress.com/2016/09/27/note-de-lecture-lombre-des-annees-sereines-olivier-martinelli/
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– Tu as déjà entendu battre le cœur d’une ville, fils ?
Gabriel n’a pas répondu. Il a seulement fait non de la tête.
– Si tu avais entendu ça… De toutes les fenêtres, des balcons, des terrasses… Ce chœur énorme qui montait des entrailles de la ville… Ce signe de ralliement… Ces coups frappés fort… Ça finissait par te rentrer dans le corps. Et ta poitrine, elle se mettait à battre au même rythme. Tous les habitants y participaient à l’heure du couvre-feu.
Mes souvenirs étaient là, vacillants, qui s’agitaient derrière mes yeux comme des lucioles. Ils faisaient briller les pupilles de mon fils. Du pouce et de l’index, il a pincé ses paupières. Il préférait les fermer devant ces images qui affluaient… Les images d’un passé, d’une ville qu’il n’avait pas connus. Il a expulsé un bref hoquet. J’ai repris :
– Les gens tapaient sur ce qu’ils trouvaient, des casseroles, des poêles, les rebords des fenêtres. La transe durait de longues minutes. Et dans ces moments-là, on sentait que tout était encore possible, que la ville nous appartenait, que rien ne pourrait nous en chasser. Les militaires, ça les rendait fous. Quelquefois, depuis leur caserne, ils tiraient en direction des immeubles.
Son visage s’est crispé soudain. Un tremblement interne a fait tressaillir son corps. J’ai compris qu’il émergeait brutalement, qu’il revenait de ce rêve éveillé.
– Les attentats ont commencé quand dans la cité ? À quelle époque l’armée vous a lâchés ? Vous vous êtes organisés comment ?
Je me suis remis en marche. Les rues étaient écrasées par la canicule. À certains endroits, des petits mirages faisaient scintiller le bitume. Une odeur épaisse et écœurante montait du sol. J’ai tourné mon visage vers le soleil. J’avais besoin de ressentir sa chaleur, qu’elle me caresse comme une gifle, une dernière fois.
Des coups de feu m’ont réveillé. Je venais d’atteindre le mur de la grande bâtisse. À l’arrière, par les fenêtres du deuxième étage, des rebelles tiraient sur nos quartiers au fusil à lunette. Ils avaient assassiné sept personnes depuis la veille. En plein jour, ils tuaient des vieillards souvent, les plus lents pour se mettre à couvert. Le soir, ils visaient les fenêtres au hasard.
Un moment, il avait été question de les allumer à distance, au bazooka. Mais les chefs voulaient frapper fort. Ils comptaient sur l’impact psychologique d’une attaque au plastic. Nos ennemis ne se sentiraient à l’abri nulle part, même au cœur de leurs quartiers. Ça refroidirait leur ardeur, peut-être, pour un temps.
Je suis rentré tard dans la nuit. À cause du couvre-feu, je longeais les murs pour ne pas me faire repérer. Je sautais d’une ombre à l’autre, avec précaution, tous mes sens en alerte, scrutant l’obscurité devant moi. C’était étrange. Je connaissais ces rues, ces boulevards, ces bâtiments. Pourtant, je les découvrais pour la première fois. je devenais un étranger dans ma propre ville. Ce n’était pas une impression désagréable. J’étais seul dans la cité déserte. Et elle m’appartenait.
Au fond de geôles lugubres, ils interrogent les suspects à coups de crosses et les font disparaître parfois, si le traitement a été trop lourd, trop brutal, trop définitif. Beaucoup de mes amis n’y survivront pas.
Autopsie Tome 01 de Maniscalco Kerri aux ditions Milan Jeunesse
https://www.lagriffenoire.com/67459-poches-autopsie-t1-white-chapel.html
Remade de Alex Scarrow aux éditions Casterman
https://www.lagriffenoire.com/94236-romans-remade-vol1.html
L'enfant Mouche de Philippe Pollet-Villard aux éditions Flammarion
https://www.lagriffenoire.com/89027-divers-litterature-l-enfant-mouche.html
Les huit montagnes de Paolo Cognetti aux éditions Stock
https://www.lagriffenoire.com/89137-divers-litterature-les-huit-montagnes.html
L'embaumeur de Isabelle Duquesnoy aux éditions De La Martinière
https://www.lagriffenoire.com/88347-divers-litterature-l-embaumeur-ou-l-odieuse-confession-de-victor-renard.html
L'homme de miel de Olivier Martinelli aux éditions Christophe Lucquin
https://www.lagriffenoire.com/90405-article_recherche-l-homme-de-miel.html
Pas un mot de Brad Parks aux éditions L'Harmattan
https://www.lagriffenoire.com/95446-divers-polar-pas-un-mot.html
Kong de Michel le Bris aux éditions Grasset
https://www.lagriffenoire.com/88322-divers-litterature-kong.html
Desproges par Desproges de de Pierre Desproges aux éditions du Couroux
https://www.lagriffenoire.com/95803-divers-litterature-desproges-par-desproges.html
Mon autopsie de Jean-Louis Fournier aux éditions Stock
https://www.lagriffenoire.com/90020-divers-litterature-mon-autopsie.html
Tu ne perds rien pour attendre de Janis Otsiemi aux éditions Plon
https://www.lagriffenoire.com/73759-divers-polar-tu-ne-perds-rien-pour-attendre.html
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