Trente grammes

L'écriture de Gabrielle Massat vous saisit d'entrée pour vous faire voyager dans l'univers de la peinture: Rothko, Bacon, Modigliani.

La structure du roman est particulière car ce que l'on croyait savoir à propos des 30 grammes de paracétamol, que Yannick a ingurgité de force, est battu en brèche au fur et à mesure que l'on avance dans les pages de ce récit.

Nous suivons l'itinéraire de Yannick qui a failli mourir à cause de ces 30 grammes et qui veut sauver son amour pour Phoenix.
Ce livre m'a laissé longtemps perplexe ne sachant pas où l'auteure m'emmenait.
C'est un polar nous dit la quatrième de couverture mais sans enquête. Il nous parle d'art, de faussaires, de sexe, de drogue, de greffe du foie.
Nous sommes dans une histoire emballée dans un roman noir à moins que ce ne soit dans une histoire d'amour mais qui manque peut-être un peu de rythme.

Vous qui lirez ce roman, laissez-vous porter sans chercher son genre.
Laissez-vous aller à l'écriture et au cheminement d'une aventure dans la ville de Toulouse aux briques chauffées et rougeoyantes.

Après le goût du rouge à lèvres de ma mère, j'ai ingurgité comme le héros ces trente grammes de roman noir, pulsatif et tonitruant auprès de voyous sans scrupule. Et malgré ces profils peu engageants, on s'attache, au héros principal, malfrat aguerri dans l'arnaque dans l'art et doté, comme tout le monde, d'une humanité, particulière certes mais bien réelle qui lui donne une épaisseur intéressante, tantôt dénuée de sentiments, tantôt émouvante et l'on aurait presque pitié. Gabrielle Massat, à l'instar de Douglas Kennedy qui sait se mettre dans la tête d'une femme, nous décrit avec brio les personnalités de plusieurs hommes durs en apparence et qui cachent au fond d'eux une part de féminité. Un livre addictif et brillant.

L'idée de départ est la plus originale que j'ai lu jusqu'à présent : tuer quelqu'un en lui faisant avaler une dose fatale de paracétamol.
Sauf que le héros Yannick en réchappe, mais perd son foie au passage. Et comme son amant vient de le quitter, il n'est pas raisonnable et mène une vie de débauche.
Sauf qu'il est sensé couvrir les placements artistiques d'un chef de la pègre toulousaine, et que cela ne se passe pas comme prévu.
Si j'ai bien accroché au départ, le peu de cas de sa greffe que fait Yannick a fini par m'énerver.
Et puis les rebondissements deviennent trop nombreux, une chatte y perdrait ses petits.
Trop de détails inutiles viennent alourdir ce roman déjà bien touffu, et j'ai terminé en avance rapide.

Avis mitigé. Certes, on est happé, emporté par le style acéré et vif de Gabrielle Massat (dont j'avais beaucoup aimé le goût du rouge à lèvres de ma mère), on s'attache à Yannick, le héros, un petit malfrat qui vit grâce à la vente de tableaux volés ou de faux que des experts authentifient, même s'il a souvent un comportement insupportable, capricieux, amoureux d'un truand qui semble ne pas faire grand cas de lui. Cependant pénétrer dans le monde du trafic d'art, c'est mettre le nez dans les affaires d'une pègre pas toujours raffinée! de la violence, de la pure, il y en a!
Cependant encore, la déliquescence progressive mais inéluctable du jeune homme autour de qui tourne toute cette histoire, nous entraîne, à sa suite, vers la mort. Dès les premières pages, on sait qu'il a été empoisonné : il a dû ingurgiter trente grammes de paracétamol. Une façon de tuer originale - pas efficace dans le cas présent, mais désastreuse pour le foie, d'autant plus que la greffe reçue est en train d'être rejetée.
Alors, avis mitigé parce que, d'un côté, malgré son obsession à se détruire par amour (à ce qu'il dit), je me suis attachée à cet homme incapable de rester seul quelques heures mais, d'un autre côté, cette longue agonie secouée par les crises du couple que Yannick forme avec Phoenix (un de ses différents noms) et par des actes d'une violence crue me laissent un goût presque pâteux dans la bouche... A moins que ce soit, justement, l'objectif de l'auteure, auquel cas, elle a parfaitement réussi!

Avec cette entrée en matière fracassante nous voilà directement dans le vif du sujet. Un roman noir, grinçant, sépulcral et redoutable. Vous êtes prévenus !

J'ai découvert l'autrice dans le cadre du Prix du Meilleur Polar Points l'année dernière avec « Le goût du rouge à lèvres de ma mère », un roman noir que j'ai particulièrement aimé et qui a remporté le prix ! C'est donc tout naturellement que j'ai eu envie de lire son nouveau livre.

On y retrouve ce qui fait la force de Gabrielle Massat. Tout d'abord, des personnages forts qui sortent des sentiers battus. Ils sont tout sauf classiques, tueur à gage, trafiquant, faussaires, et les interactions sont sanglantes. Mais également une maîtrise de l'ambiance qui règne dans ce roman, très noire et funèbre. L'odeur de la mort imprègne le personnage auquel on s'attache coûte que coûte. On se retrouve à suivre le récit avec une sorte de curiosité morbide, qui heureusement est truffé de dérision et d'intrigue !