T3 :
L'ombre du Manitou (Pocket 1995)
Burial (1992)
20 ans plus tard (après le tome 1
Manitou). Naomi et
Michael Greenberg, à NY, sont confrontés à des phénomènes paranormaux qui littéralement s'imposent chez eux comme un cambrioleur à l'heure du souper, inattendu et indésirable. Naomi est seule dans l'appartement, accaparée par les préparatifs festifs pour le jour du Shabbah. Son mari, quant à lui, est au cinéma avec des amis de longue date. Aucun d'eux ne se doute un seul instant que leur vie va tourner au drame d'une manière violente et irrévocable. Tout commence lorsque les meubles bougent et s'amoncèlent sur un pan de mur de leur modeste salon. Naomi aura beau essayer, mais il lui sera impossible de les remettre en place. Elle est seule et ne pourra rien faire. Une ombre l'observe et bouge.
Karen (la miraculée du T1), amie de ce couple désespéré, prend contact avec Harry Erskine afin de clarifier et peut-être régler la situation. Très vite il fera le lien et constatera qu'une fois de plus il sera dépassé par ces forces occultes qui le dépassent. L'expérience n'est pas le savoir absolu et encore moins une science inébranlable. C'est pourquoi il fera appel à une voyante confirmée, dont les capacités seront plus adaptées pour les phénomènes étranges, Amélia (apparue déjà dans le T1, avec Mc Arthur son mari, et toujours bien vivants tous les deux !).
Cette quête deviendra vite une mission de sauvetage du pays ! Des héros malgré eux.
Un démon indien abominable à l'esprit revanchard dont la rancune est nourrie depuis la colonisation sauvage de l'Amérique par les Hollandais – tout cela pour 24 $, le prix des terres indiennes que les colons ont payé au XVIIe siècle en débarquant à Manhattan — n'a qu'une envie, supprimer les blancs qui ont pris leur terre. Misquamacus a eu le temps de préparer sa revanche déjouée à deux reprises par Harry (tomes précédents). Ce mauvais esprit est plus en colère, d'une puissance inexplicable, mieux préparé, avec des possibilités qui rendraient jaloux les plus grands magiciens de ce monde.
« Si nous apprenions la véritable histoire de l'Amérique dans nos écoles, chaque salle de classe serait noyée sous les larmes, tous les jours. Ce qui est arrivé aux Indiens fait pâlir l'Holocauste. Vous prêchez les Droits de l'Homme aux Russes, et vous parlez de la place T'ien an Men ? Vous devriez songer à ce que vous avez fait aux Indiens. Cela a été le plus grand travail de blanchiment de toute l'histoire moderne… » (P363)
Des buildings s'écroulent partout, happés par le sol, tout disparait, tout est attiré vers un seul endroit. Un air d'apocalypse. Colorado, Arizona, NY, Chicago, des milliers et des milliers de morts.
Ce livre est pour moi, le meilleur de la trilogie. Complètement aboutis et réussi.
Un départ mieux engagé, plus intrigant, plus flippant, des répercussions à grandes échelles, réutilisation des effets « poltergeist (esprit joueur et pas sympa) », d'exorcisme (possession et tentative de conjurer les sorts), de violences brutales, d'émotions fortes, de regrets, etc. Nous ne pouvons nous empêcher d'avoir une pensée pour ces Indiens d'Amérique qui en ont bavé pour leur culture et leur terre, une civilisation quasiment effacée... L'effondrement des grattes-ciel, quelque part, rappelle, septembre 2001, ce tome serait une histoire prémonitoire en tirant un peu par les cheveux sans enlever de scalp (l'auteur l'a dit quelque part, peut-être dans l'intro…). La puissance de ces magies indiennes et vaudou – car elles interviennent dans l'histoire – est plus effrayante et dangereuse qu'on n'aurait pu imaginer. Il y a une fois de plus, le rappel de l'influence de Lovercraft et le Cthulu, la créature à laquelle Misquamacus s'associe pour tout détruire, et rappel aussi que je devrais un jour lire HP Lovercraft…
Dans ce tome, on découvre sa ligne directrice, un style bien campé dans des histoires où il prendra le temps d'embarquer les lecteurs pour les déstabiliser. J'ai retrouvé cette vitesse de croisière dans les autres livres comme «
Apparition », «
Démences » et «
le Démon des Morts » (je n'ai pas lu le reste !).
La perte d'un être proc
he, les familles unies ou décomposées, la solitude, le surnaturel, la sexualité racontée sans modestie (pour l'époque c'était audacieux) sont des thèmes récurrents chez
G. Masterton.
C'est une trilogie qu'il faut lire pour découvrir l'évolution de la patte de l'auteur où il trouve son juste milieu en troisième tome, ou on découvre son talent pour subtilement attirer l'attention et réveiller les craintes des lecteurs. Un auteur dont l'imagination est noire, pleine d'humour, chaude et qui donne des mélanges percutants et horribles.
Actuellement d'autres livres de
Graham Masterton sont édités chez Milady (Famille Bragelonne J).
Une belle intégrale (éditée par Bragelonne en 2007) est normalement encore disponible aussi bien en version papier qu'en version numérique. À vérifier !