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EAN : 9782344024027
120 pages
Glénat (11/10/2017)
4.03/5   17 notes
Résumé :
Il a peint l’horreur pour s’en défaire Peintre surréaliste de la première moitié du XXe siècle, Paul Nash a vécu l’atrocité des tranchées de la Première guerre mondiale. Les cicatrices de cette épreuve ont marqué son œuvre à tout jamais.
Auteur de bande dessinée, Dave McKean décide de lui rendre hommage à travers cette biographie fantasmée. Entre réalité et illusion, il explore la fièvre créatrice de l’artiste en se projetant dans ses rêves, hantés par l’ima... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Percevoir autrement…
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Ce tome contient une histoire complète indépendante de toute autre. L'histoire a été publié sans prépublication, la première édition datant de 2016. Cette bande dessinée est l'oeuvre de Dave McKean, auteur complet, illustrateur hors pair. Il s'inspire de la vie du peintre Paul Nash (1889-1946). Elle s'ouvre avec une introduction de Jenny Wadman, directrice du programme quinquennal 14-18 NOW, une autre de Julie Tait & Aileen McEvoy, directrices du festival international de bandes dessinées de Lakes.

Chapitre 1 : 1904, la maison de Wood Lane, à Iver Heath dans le Buckinghamshire. C'était son premier rêve, en tout cas le premier rêve dont il se souvienne. de toutes les histoires qui produisent des échos dans le passé de l'être humain, comme des bougies allumées s'accrochant à la vie contre le froid, l'humidité et le courant d'air, les rêves sont les plus insaisissables, se cachant dans les vallées et les plis de l'esprit, solitaires. S'affaissant dans les ombres des temps passé et présent, dans les tranchées. Paul avance dans son rêve, avec les pieds comme dans un labyrinthe, vers une ouverture lumineuse, mais avec des ombres géométriques menaçantes semblant fondre sur lui. Toujours dans la pénombre, il progresse, encore enfant vers la sortie qui a perdu en luminosité, mais il aperçoit un chien noir aux yeux rouges devant lui. le chien lui barre le chemin, et l'enfant n'ose pas l'approcher pour forcer le passage. le chien s'éloigne vers l'embrasure, et l'enfant le suit en courant. le chien sort dans la lumière, et l'enfant en fait autant, ébloui par tant de lumière. Il aperçoit devant lui un menhir avec un trou circulaire, une grosse Lune dans le ciel, et une femme assise au soleil sur une chaise au dossier très droit, en train de lire.

Paul enfant s'approche de la femme. le chien se trouve déjà devant elle, la regarde, lui lèche la main doucement. La femme écarte sa main en lâchant son livre et regarde le chien. La plume rouge au ruban de son chapeau semble s'écouler dans le ciel comme du sang qui forme bientôt un nuage recouvrant toute la zone. C'était le premier rêve du petit Paul, en considérant les détails maintenant, l'enfant qu'il était, le lieu, le chien, sa mère, l'inquiétude que tout cela exprimait, il a pensé à ce rêve à de nombreuses reprises. Il a essayé de l'interpréter et de lire entre les lignes. Il a même essayé de rendre ces émotions dans des dessins parfois. Mais comme le chien noir étrangement sensible à la maladie, se méfiant de la vaste tristesse dévorante de la mère, Paul semble percevoir le paysage à travers un sens élémentaire, sans faux-semblant. Quand il se réveille, il réalise un sketch rapide de ce qui subsiste dans son esprit, pendant que l'image plane encore, dans cet état hypnagogique derrière les yeux. de grands traits pour la composition, une touche d'ombre, un effort pour représenter les détails encore présents à l'esprit, pour fixer une ressemblance qui est déjà en train de s'estomper, de se brouiller, de mourir. Se ressouvenir d'un rêve est comme d'essayer de réaliser une esquisse à partir d'une esquisse.

La première page explicite l'intention de l'ouvrage : une plaque de rue indiquant que Paul Nash (1889-1946) a vécu à cet endroit. Au cas où cela ne suffit pas, les deux introductions permettent de se faire une idée de la portée de l'oeuvre de cet artiste britannique : un des plus influents et des plus importants de son époque, ayant fait la première guerre mondiale à l'âge de vingt-cinq ans. Il a peint cette première guerre mondiale en tant que soldat, puis il est devenu un peintre officiel de l'armée. Il s'est concentré sur la représentation des paysages plutôt que des individus, ses oeuvres s'inscrivant dans le surréalisme. Les responsables de 14-18 NOW ont alors passé commande à Dave McKean, d'une bande dessinée sur cet artiste, et il a accepté étant depuis longtemps fasciné par lui et son imagination. Un vrai défi : rendre hommage à l'oeuvre artistique d'un peintre, et évoquer sa vie et ses inspirations. S'il est familier des oeuvres de McKean, par exemple Cages, le lecteur sait qu'il va plonger dans une oeuvre graphique ambitieuse. Sinon, il en prend conscience dès la première page. Il y a des éléments figuratifs tout du long du récit : Paul Nash lui-même, le souvenir qu'il a de sa mère, de son ami Gordon, de son frère John croisé dans une tranchée, d'un professeur de mathématiques, son ami Claude Lovat Fraser, d'autres soldats et même du chien noir. Encore que pour ce dernier, sa représentation fluctue et le lecteur peut sentir qu'il s'agit parfois plus d'un concept ou d'une métaphore émotionnelle, que d'un animal de chair. L'illustration d'ouverture en pleine page, une scène d'un rêve récurrent de Nash, s'inscrit dans le registre surréaliste avec la représentation d'un rêve.

Le récit est découpé en 15 chapitres, chacun s'ouvrant avec une photographie, certaines sans retouche, d'autres reprises à l'infographie. Chaque chapitre a droit à un titre avec une année et un lieu u parfois deux : 1904 à Wood Lane House, 1905 à Hawk's Wood & 1913 au cimetière Highgate à Londres, 1914 à Silverdale & 1914 au café Royal à Londres, 1917 dans l'hôpital militaire de Gosport, 1906 à l'école préparatoire à Londres, 1917 à Southampton au bord de la Manche, 1917 au saillant d'Ypres, 1921 à l'hôpital Queen Square pour les maladies nerveuses, à Londres. Au fil des chapitres, le lecteur découvre des éléments biographiques de l'artiste : la maladie de sa mère, son mariage et le découpage du gâteau, sa relation avec son grand-père, sa blessure en 1917 et son séjour en hôpital militaire, ses mauvais résultats scolaires en particulier en mathématiques, la rencontre avec son frère au saillant d'Ypres, la mort d'un jeune soldat plein de projets d'avenir sous yeux, son deuxième séjour en hôpital pour syndrome de stress post traumatique, etc. Ces moments dans la réalité sont représentés avec la même liberté picturale que ceux relevant de la vie intérieure de l'artiste. McKean conçoit ses séquences en fonction de leur nature, pas en imposant une grille prédéfinie de cases alignées en bande. Il peut aussi bien organiser sa planche avec des cases bien alignées avec une bordure propre, que alignées mais sans bordure, ou dans une grille de 16 cases (4*4), ou seulement deux de la largeur de la page, ou des illustrations en pleine page, ou encore deux dessins entremêlés sur les cases d'un échiquier de 8 par 8, un personnage représenté plusieurs fois dans une illustration en double page pour montrer qu'il se déplace, une pellicule de film déroulée sur deux pages en vis-à-vis avec un dessin par image, etc. de la même manière, il ne se sent pas tenu par une technique de dessin particulier et utilise celui qui lui semble le plus adapté : de la photographie retouchée à l'infographie, à des dessins aux crayons de couleurs, en passant par de véritables tableaux, certains reprenant ceux de Paul Nash, ou encore de savantes compositions à base de plusieurs outils de nature différente.

Ainsi le lecteur découvre un récit qui rend compte de la liberté d'expression de l'artiste, aussi bien le peintre que le bédéiste. Il découvre une narration quelques fois en dialogue, souvent en flux de pensée, parfois sous forme de poésie en prose, à quelques reprises sous forme de poésie en vers. Mckean rend compte de la vie intérieure de Paul Nash, ou tout du moins reconstruit celle-ci à partir de la sensibilité du peintre et de ses écrits. Il est donc question de cette figure du chien noir, un élément récurrent de ses cauchemars, une incarnation de ses angoisses vives ou diffuses. Sur le canevas assez lâche de la biographie parcellaire de l'artiste avec quelques inversions chronologiques, l'auteur développe les thèmes récurrents du peintre, parfois par association d'idées quand il rapproche des événements de deux années différentes ou par association de visuels : la perte de la réalité dans la représentation picturale mais aussi la mise à jour d'un élément implicite, la beauté dans les paysages naturels, la marchandisation de l'art et sa futilité en temps de guerre, la relation de son père avec son grand-père en ce qu'elle peut augurer de sa propre relation à son père, les conditions de vie terrifiantes des soldats dans les tranchées, l'absurdité existentielle de certaines situations de vie, la vie apportée par les végétaux sur le champ de bataille, la symbolique d'oiseaux comme le corbeau, le rouge-gorge ou la crécerelle, la translucidité d'un oeuf opposée à un obusier de 140 tonnes tirant des obus d'une tonne, le dessin comme thérapie des traumatismes, l'espoir que tout cela ait un sens, etc. Au fil de cette introspection artistique et existentielle, le lecteur arrête parfois sa lecture pour savourer une sensation picturale extraordinaire : la chaleur humaine régnant dans un café, un zeppelin amalgamé à une forme de poisson au-dessus de Londres, la cruauté d'un professeur, la force de la couleur verte contrastée avec le gris brun des tranchées, la vague démesurée de la vie déferlante, s'opposant à la désolation du champ de bataille dévasté, le rappel de cette vague dans le geyser de terre soulevé par un obus, les couleurs atténuées mais vibrantes dans le visage et le corps de Claude Lovat Fraser, la verdure irrépressible d'un bois, etc.

C'est un pari insensé que de vouloir rendre compte de la vie intérieure d'un artiste pour mieux comprendre son oeuvre. Dave McKean se glisse dans la peau de Paul Nash et sait faire vivre cet artiste, au travers des événements de sa vie, de son expérience des champs de bataille de la première guerre mondiale, de ses relations avec ses parents, de ce qu'il souhaite retranscrire et exprimer avec son art. Il lui rend hommage en reprenant des éléments de ses tableaux, tout en utilisant comme bon lui semble les nombreuses techniques picturales qu'il maîtrise, et la construction de pages en fonction de ce qu'il souhaite exprimer. le tout forme une expérience de lecture à nulle autre pareille, d'une rare richesse, d'une rare diversité, tout en offrant une cohérence parfaite. le lecteur voit sa perception du monde changée, élargie, adaptée pour être en phase avec celle de Paul Nash, enfilant sa sensibilité pour voir le monde autrement, en partie par ses yeux, en partie par ceux de Dave McKean se glissant dans la peau du peintre. Extraordinaire.
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OVNI graphique signé le rare mais toujours Dave McKean.
En rendant hommage à Paul Nash, peintre surréaliste anglais qui fut "atrsite officiel" pour l'armée anglais lors de la Première Guerre Mondiale, il multiplie les expérimentations graphiques. Collages, phtos retouchées, influences marquées du surréalisme allemand, du cubisme... ce livre est un bijou pour les yeux. Une oeuvre d'une puissance graphique exceptionnelle. Elle reste malheureusement un peu trop loue dans sa narration. En une suite de chapitres qui traitent dans le désordre des épisodes de la vie de Paul Nash, parfois racontée de manière réaliste, parfois par le prisme du rêve ou d'un symbolisme parfois obscur, Dave McKean dresse un portrait kaléidoscopique pour illustrer le cheminement intérieur de Nash. de l'image d'un chien noir qui le poursuit dans ses rêves McKean montre comment Nash réussit finalement à trouver sa place d'artiste face à la guerre et comment il a trouvé une sens à son travail Ce Black Dog, qui obsédait effectivement Paul Nash, c'est sa peur, son angoisse, ses illusions perdues... c'est une part de lui-même qu'il doit accepter, embrasser pour mieux se dissocier de lui pour se libérer. McKean utilise d'ailleurs énormément le symbolisme des oiseaux pour marquer l'opposition avec ce chien noir qui hantre Nash.
Black Dog n'est pas un album évident. il risque de désarçonner plus d'un lecteur. Il mérite pourtant le détour, ne fut-ce que pour l'extraordinaire travail visuel réalisé par Dave McKean.
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Un grand livre magnifique à regarder, sorte d'hommage à Paul Nash, artiste de guerre.
Un texte assez poétique et songeur, évoquant les drames d'une vie, l'horreur de la guerre et de la mort. Des dessins torturés, illustrant magnifiquement ces grandes pages qu'on savoure lentement. le dessinateur a réussi grâce aux graphismes à nous transporter dans une sorte de rêve sombre.
C'est un petit bijou graphique, quelque chose à découvrir.
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Ce livre est une oeuvre graphique étonnante, alternant des styles artistiques très différents et maitrisés. Hommage à Paul NASH, elle traite de la guerre de 14 et du monde onirique avec notamment un rêve récurent où apparait un chien noir. Déconcertante au premier abord, on est vite happé par le dessin de Dave McKean.
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Un point de vue diffracté sur la Première Guerre mondiale à travers le regard du peintre John Nash. Très personnel, splendide, intelligent, jamais sentencieux.
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critiques presse (4)
ActuaBD
31 janvier 2018
Cet album constitue une bonne synthèse de la diversité de palette et de graphisme de ce dessinateur anglais, parmi les plus brillants de son époque.
Lire la critique sur le site : ActuaBD
BoDoi
24 janvier 2018
Le résultat graphique est superbe et on peut passer beaucoup de temps à détailler ces pages d’une grande richesse. Le texte, lui, est plus difficile à suivre, écrit tout petit dans un registre poétique parfois obscur et hermétique.
Lire la critique sur le site : BoDoi
Bedeo
27 octobre 2017
Dave McKean nous emporte dans un tourbillon pictural narrant la vie du peintre Paul Nash, entre réalité et folie : une expérience unique.
Lire la critique sur le site : Bedeo
Sceneario
03 octobre 2017
Une nouvelle fois, McKean s'impose comme un visionnaire extrêmement lucide sur les mille et une possibilités que propose la bande dessinée. Il explose les codes graphiques, propose des narrations différentes à chaque fois, change de style, explore la moindre pistes.
Lire la critique sur le site : Sceneario
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
In war, one lives in the desperate edge of now.
War reveals that essential, present-tense creature at the centre of oneself, and once it has been illuminated, even in the most failing of light, you can't unsee it.
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Eh bien cela me parait évident, le chien noir c'est toi.
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Les rêves sont des collisions de souvenirs.
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Videos de Dave McKean (8) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Dave McKean
Dave McKean, l'un des plus importants artistes du comics britannique, rejoint le catalogue de Futuropolis ! Véritable prouesse visuelle et narrative, Raptor vous entraînera dans deux mondes, celui de Sokól et celui d'Arthur. Deux mondes entre la vérité et le mensonge, la vie et la mort, la réalité et l'imaginaire.
Musique : Prélude en La mineur, Op. 28 No. 2 par Frédéric Chopin Narrateur : Olivier Mayer
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