Léna sait qu'il faut qu'elle parte. Chaque soir, elle attend avec angoisse le retour de son compagnon. Dès l'arrivée de celui-ci, elle sait, en écoutant son pas et sa manière de poser les clés dans la coupelle de l'entrée, qu'elle est son humeur. Elle pressent que le moindre faux pas, de sa part à elle, réveillera la fureur masculine : les coups pleuvront. Depuis sept ans, elle vit sous l'emprise d'un homme violent. « Mais j'étais comme ligotée par des chaînes invisibles, encagée par des sentiments contradictoires dont je ne parvenais pas à me défaire. » (p. 11)
Un jour, elle profite d'un déplacement professionnel de son tortionnaire pour quitter leur appartement d'Angers. Elle fait du stop et le hasard la conduit en Ariège. Elle passe sa première nuit de fuite, dans une grange. le lendemain, elle est accueillie par les propriétaires de la bâtisse. Sans lui poser de questions, ils lui offrent un refuge. Entourée de leur bienveillance, elle essaie de tenir le passé à distance. Mais son histoire est inscrite dans son corps et dans son esprit. Elle doit prendre une décision difficile, pourtant, évidente pour elle. de plus, malgré l'éloignement, la peur ne la quitte pas. Elle sait que son ancien compagnon est prêt à tout pour la retrouver. Elle sent qu'il se rapproche…
Léna alterne entre l'espoir d'une nouvelle vie et la crainte du danger. Ses frayeurs ne sont pas qu'une conséquence de son stress post-traumatique. Elles se fondent aussi sur sa connaissance du monstre qui la maintenait sous son emprise. Sa nouvelle vie alterne avec des moments d'inquiétude et des jours d'espérance. Auprès des villageois, elle se reconstruit. Elle est très courageuse et volontaire.
Claire Michaud-Destriau décrit, avec justesse et sensibilité, les conséquences de la mémoire traumatique, telles que l'hypervigilance, l'angoisse, les cauchemars, etc. Elle montre, aussi, que le danger, pour les femmes battues, perdure après la fuite. J'ai souvent pensé aux mots de
Sarah Barukh pour son association 125 et après : « Un départ, ça se prépare. » Léna l'avait préparé, mais elle n'a pas pensé à toutes les possibilités… L'auteure explique les difficultés pour se libérer de l'emprise, mais aussi celles pour démarrer une nouvelle existence. Des passages nous alertent : son ancien compagnon recherche celle qu'il considère comme sa propriété.
Malgré son anxiété omniprésente, Léna renoue avec le bonheur. Elle renaît au coeur des montagnes ariégeoises. Elle participe aux estives, noue de fortes amitiés et partage des moments de tendresse, émouvants, avec les habitants. Malgré sa thématique douloureuse, le récit est empreint de douceur et d'espoir. D'autres, avant Léna, ont fui leur passé et se sont réfugiés, comme elle, chez Léontine et Gégé. Ce couple retraité offre son soutien, sans jugement et sans rien attendre en retour. J'ai été très touchée par la solidarité des villageois.
J'ai été captivée par
La part des enfants. J'ai adoré.
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