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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Que dire ? C'est une lecture dont le lecteur sort lessivé ! Un récit labyrinthique, une chronique familiale qui s'étend de 1870 à 1960 environ. le mot chronique fait penser à quelque chose d'assez classique, ce qui est loin d'être le cas. le découpage du roman est déjà une parodie : cinq parties, de plus en plus courtes (environ 400 pages, puis 150 pages, et enfin 100, 50 et 30 pages). A moins que ce ne soit pour illustrer la perception du temps qui passe de plus en plus vite en vieillissant. Les deux sont possibles, et ne s'excluent pas. le point de vue narratif est complexe lui aussi, le narrateur est van qui raconte à la troisième parlant de lui, ce qui n'exclut pas quelques glissements à la première personne. Mais le roman est le texte après lecture par Ada, qui de temps en temps, l'annote et donne son point de vue. Il faut être très attentif à la lecture des premiers chapitres, d'abord parce que l'arbre généalogique qui est donné est inexact (c'est l'arbre officiel) et parce que c'est là qu'on comprend qu'Ada et van savent dès le début qu'ils sont frère et soeur. de quoi parle ce roman, au fait ?
C'est d'abord une superbe histoire d'amour un peu sulfureuse (bien moins que Lolita, Ada et van ont le même âge et en plus, censés être seulement cousins). Ada et van vont être séparés plusieurs fois, pendant de longues périodes, et finir par se retrouver vers 50 ans pour finir leurs vieux jours ensemble. Mais ce n'est pas que ça. Toute l'histoire se passe dans un univers parallèle, imaginaire, sur la planète Antiterra dont la géographie, la géopolitique et l'histoire ne coïncident pas tout à fait avec ce que l'on connaît. Sur Antiterra pas d'électricité, mais il y a des avions, Proust est un écrivain du XIX siècle, et c'est une femme qui a écrit les nouvelles qui pour nous sont De Maupassant. Pour les habitants de cet univers Terra est un mythe, et pour ceux qui y croient une sorte de Paradis, assez semblable à notre Terre en fait, ce qui en fait un drôle de Paradis ! Mais surtout, surtout, ce livre est d'une lecture terriblement difficile tant il foisonne d'allusions littéraires, botaniques ou autre, jonglant entre français, anglais, russe (plus parfois italien ou allemand) pour faire des jeux de mots, des anagrammes, des blagues. C'est d'une érudition incroyable, les notes de Vivian Darkbloom (anagramme de Vladimir Nabokov) m'ont particulièrement énervé, il faut dire que je comprends le russe et qu'elles ne me servaient pas à grand-chose. Par contre j'aurai aimé avoir des notes en bas de page pour ce que je ne comprenais pas en anglais ! Il y a bien plus que dans Lolita des digressions (les écrits de van sur … la texture du temps ! Un pastiche ?) et des références littéraires, mais là elles peuvent être fausses. Il y a des moments où le lecteur n'est pas loin de l'indigestion, malheureusement surtout quand van et Ada sont ensemble, car c'est un peu leur langage codé, mettant le lecteur à distance. Quand on comprend c'est superbe, inventif, jubilatoire, on se sent en connivence, mais quand on ne comprend pas, cela paraît suffisant, condescendant, limite imbuvable, mais … on continue à lire et on aime ça ! Je précise que van et Ada sont plutôt détestables, lui est assez fat et imbuvable et elle assez manipulatrice et perverse. Pourquoi ai-je été jusqu'au bout dans de telles conditions ? Parce que l'écriture est virtuose, qu'il y a des descriptions d'une puissance à couper le souffle, parce que l'auteur ne se prend pas au sérieux. Je ne conseillerais pas de commencer par ce livre-là sans avoir rien lu d'autre de Nabokov. Une lecture énervante, mais que j'ai quand même adoré. Et j'ai du mal à croire qu'Ulysse soit plus dur à lire !
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... Eeeeh bé. Voilà mon appréciation en deux mots, en ressortant, terrassé, du roman le plus compliqué que j'aie pu lire de ma vie. Pas par l'histoire, au fond très simple, ni parce qu'il contiendrait un contenu métaphysique et philosophique sophistiqué ou abscons. Non. Vous connaissez Nabokov avec Lolita ? Chef d'oeuvre absolument génial qui nous met dans la peau d'un protagoniste narrateur fou, dont l'existence est d'ailleurs souvent remise en question, qui nous explique ses amours pédophiles assumés, et qui est l'occasion pour Nabokov de déverser un style extraordinaire, surtravaillé, qui n'appartient qu'à lui, bourré de jeux de mots, d'allitérations, d'allusions, de références littéraires et artistiques (qui sont en fait les siennes, de culture américano-franco-russe). Dans Lolita, il se livrait à une parodie de roman, avec notamment l'usage de digressions et phrases à rallonge comme parodiées de Proust, qui finissaient souvent par un commentaire de son cru ajoutant que toute cette digression n'avait en fait aucune importance, etc. Ses personnages avaient aussi des noms totalement bidons, de son héros Humbert Humbert, à tous les secondaires, Miss West, East, etc.

Imaginez qu'on reprend le même écrivain, sauf qu'il surcharge encore plus son art de la digression dont on se fiche en fait totalement, la remplit encore plus de références littéraires et artistiques, sauf que cette fois, elles peuvent être fausses et/ou anachroniques, à la fois pour la blague et parce que son roman se passe sur une terre parallèle. Imaginez que son histoire est cette fois l'idylle passionnée à travers le temps de deux enfants, jusqu'à leur vieillesse, van et Ada, qui sont officiellement cousins, et en réalité, frère et soeur ! (et ils le savent depuis le début) le tout narré comme un roman à mi-chemin entre une parodie du Grand Meaulnes, de la saga de Proust et d'autres dont je n'ai pas forcément la référence, mais l'on comprend vite que la chronique familiale, le roman de ce type, est entièrement parodié. Ajoutez à cela que van et Ada, à respectivement 14 et 12 ans quand commence leur histoire, sont des clones érudits de Nabokov qui passent leur temps à citer des auteurs, à débattre mots, linguistique et traductions (Nabokov passe le roman à torpiller les traducteurs en les disant tous ineptes...), avec toutefois la variante que j'ai précisée (ils commentent et citent Proust - à leur âge ! - dans les années 1880 alors qu'il est encore enfant, déforment des titres de Tchekhov, prennent pour référence René de Châteaubriand car il y aurait dedans un sous-texte incestueux aussi...). Bref, si l'on est pas versé dans le délire, on ne comprend RIEN à certaines discussions et certains passages, qui sont toutefois accessoires. Lorsqu'on a la référence des vannes de Nabokov et de ses personnages, on apprécie. le gag récurrent d'une Mademoiselle Larivière ayant écrit La Parure de Maupassant à la place de ce dernier sur Antiterra (la planète où l'action du roman se déroule) est assez sympa. Mais dans moult dialogues, il y a parfois des traductions en russe de ce qui est dit, dont on se doute qu'il y a un gag derrière, qui nous échappe. Il y a aussi moult discussions sur les papillons, dont on savait Nabokov féru, où l'on devine des métaphores sexuelles, à défaut de servir à autre chose.

Bref, c'est un roman rendu extrêmement compliqué dans sa forme, pas dans son contenu, par un auteur qui va ici dans l'apothéose de tout ce qui l'amuse, mais qui est extrêmement éprouvant pour le lecteur. Ceci dit, je n'ai jamais eu envie d'abandonner, contrairement à, par exemple, un pavé de Dantec où sur 500 pages, il répète 30 fois les mêmes concepts et où l'on voit vraiment tout ce qui aurait pu être enlevé. le début d'Ada et l'Ardeur est très difficile, lorsque Nabokov présente toute la famille et que l'on se reporte à l'arbre généalogique (faux) qui introduit le roman en parallèle, avec force digressions et détails superflus, là encore pour le plaisir de la parodie. Cela se calme un peu durant l'enfance et l'adolescence de van et toute la partie au château d'Ardis, partie d'ailleurs très longue qui aurait pu être expurgée. Comme l'ont noté certains lecteurs ici, il est amusant que même le traditionnel découpage en parties du roman soit moqué par Nabokov : Elles seront en réalité de plus en plus courtes, jusqu'au ridicule.

Toute la partie à Ardis, en 1884, avec les débuts de l'histoire Van/Ada à respectivement 14 et 12 ans, alterne les passages réussis et les longueurs anecdotiques. On se rappellera de la soirée avec l'incendie dans la grange, de van dans son hamac, de certaines discussions sur Proust ou Châteaubriand, du pique-nique, de la parodie de dîner familial en présence de Marina et Démon (leurs parents biologiques qui n'osent avouer le véritable lien de parenté qui unit leurs enfants, impliquant adultère et mariages de convenances de chaque côté), entre autres choses. Nabokov nous transporte ensuite en 1888 où van a attendu quatre ans pour revenir enfin à Ardis et revoir Ada. Bien évidemment, on a le coup classique d'un passé idéalisé qui vient se heurter à une reprise dégradée dans le présent. Entrent en scène divers personnages loufoques, dont certains rivaux et des parodies d'Hollywood avant l'heure. Il y a une scène de duel monumentale ensuite dont je tairai les détails, mais l'on y retrouve le génie du Nabokov qu'on a adoré dans Lolita, où le héros de roman et le romanesque sont complètement ridiculisés et transformés en grotesque.

Il y aura plus tard une nouvelle étape, 1892, à Manhattan, écourtée par des événements que je tairai également. Depuis le début, un troisième personnage, Lucette, demi-soeur d'Ada, satellite autour du couple secret. Lucette est en réalité amoureuse folle de Van, et Nabokov en fera un personnage magnifique, jusqu'à nous tirer des larmes, lors de la croisière où van continuera à lui refuser ses charmes quand bien même ils lui permettraient de retrouver Ada derrière la façade de leur union officielle. le passage de la croisière avec Lucette est l'apothéose du livre, à mon sens. Cela redescend ensuite et se finit de façon un peu oubliable et anecdotique. Depuis le début, on sait que van nonagénaire écrit, qu'il est réuni avec Ada (qui annote entre parenthèses le récit, complication de lecture supplémentaire !), et le roman finit par nous amener jusqu'à ce point, sans qu'il n'y ait plus grand chose de notable. La fin est assez drôle et est un nouveau gag littéraire, mais le roman demeure un monstre formel, apocalyptique, où la volonté d'humour et de parodie de Nabokov s'est totalement emparée de lui, pour le meilleur et pour le pire. Je ne peux pas ne pas mentionner tous les passages sur la carrière universitaire de Van, tous très drôles aussi : Nabokov ayant été universitaire, il ridiculise ce milieu, comme il l'avait fait dans Lolita, et comme Humbert Humbert, van est un universitaire raté, rendu totalement grotesque. Son génie est là, ses capacités sont là, mais Nabokov le transforme en bouffon au sein d'un milieu qu'il se plaît à égratigner, pour notre plus grand plaisir je dois dire. Il y a une partie redoutable du roman (qui est une des plus éprouvantes, ça passe ou ça casse, je pense que pleins de lecteurs ici ont dû détester, personnellement, j'ai bien aimé) où van réfléchit sur le temps (énième parodie de Proust...) et il disserte sur des pages et des pages à propos du passé, du présent, mais sèche totalement sur le futur, qui pour lui est une inconnue totale, une chose sur laquelle le verbal ne peut que se heurter. Nabokov nous fera pleurer de rire lorsqu'on apprendra comment il échappe à une conférence qu'il doit donner sur le futur et comment il met fin à sa carrière universitaire...

La composante science-fiction du roman, puisqu'ayant lieu sur une terre parallèle, est aussi sympathique à étudier, et j'ai vu qu'elle avait donné lieu à des analyses. Non seulement elle permet des blagues anachroniques comme celles énoncées, mais il y a évidemment un mélange, sur Antiterra, de progrès et de régression technologiques, différents de notre propre Histoire. Certaines inventions sont là bien plus tôt que chez nous, d'autres manquent cruellement, aussi de par une sorte d'équivalent de la Révolution française, qui aurait engendré sur Antiterra un recul technique. L'existence de Terra (notre Terre) est également considérée comme le domaine des fous et des illuminés, une croyance mystique et marginale combattue par la doxa ! Terra est même perçue parfois comme un au-delà, façon de commenter peut-être l'enfer sur Terre et d'ériger pour Nabokov Antiterra comme modèle ? Il y a quelques commentaires intéressants et amusants du texte qui met en regard ce que les personnages savent de notre monde par rapport au leur, etc.

Bref, je crois que vous avez compris. L'histoire est très simple. C'est l'histoire d'amour interdite d'un frère et une soeur, de l'enfance jusqu'à la vieillesse, bouleversée régulièrement par des rebondissements parodiant le genre romanesque, mais fourrée (non, je ne fais pas de jeux de mots sexuels !) de complications formelles, de références humoristiques, érudites, parfois fausses, de digressions totalement superflues et voulues comme telles. L'on est passé au lave-linge sur 750 pages. C'est réellement le roman le plus compliqué que j'ai lu, de par la frénésie constante de Nabokov à l'amusement, complètement insomniaque, échevelé et verbeux jusqu'à la diarrhée. Après ça, un petit Ellroy qui nous raconte ses déboires d'obsédé sexuel à Los Angeles, c'est reposant et tranquille...

À très bientôt, ô très grand Vladimir. Merci d'avoir glissé une référence à Hugo au milieu De Châteaubriand, Proust, Maupassant, Pouchkine, Tolstoï et Tchekhov, merci pour l'objet littéraire inoubliable, avec des moments de grâce comme des choses qui nous laissent totalement circonspect. Lorsqu'on lit à répétition qu'il y a eu deux traducteurs qui ont oeuvré, puis que Nabokov est repassé derrière, et qu'il n'y a aucune autre traduction à ma connaissance... On comprend. Comme pour tout auteur ayant une telle identité, un tel style, autant dans le positif que dans le négatif, on va quand même faire une pause et lire plein d'autres choses avant de reprendre une de ses oeuvres...
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Ce roman extraordinaire, sous-titré " chronique familiale ", est précédé d'un arbre généalogique incompréhensible et faux. C'est l'histoire de van et Ada qui se croient cousins, de Lucette, la petite soeur d'Ada, de leur père Démon (" notre père qui est en enfer "), et d'une profusion à la russe de personnages secondaires. Cinq parties : la première a 400 pages et 42 chapitres, la seconde 150 pages, la troisième, la quatrième et la cinquième 100, 50 et 30 pages respectivement.

Le roman pourrait se limiter à la première partie, datée de 1884 à 1888 et située dans le domaine utopique d'Ardis, variante luxueuse et luxurieuse de l'abbaye de Thélème, où l'on aperçoit d'entrée " deux enfants nus, lui le teint mat et hâlé, elle blanche comme le lait ". van a 14 ans et Ada 12 ans. van est le visiteur et Ada la résidente. Les ressources d'Ardis semblent illimitées : château, bois, étangs, domesticité, festins (" Ada conduisit son timide invité dans la grande bibliothèque du second étage, orgueil d'Ardis et pâturage favori de la petite verbivore " p 68). Les enfants vont jouer à se connaître, puis s'aimer follement (" Ada l'attendait debout adossée à un tronc d'arbre comme une belle espionne qui vient de refuser qu'on lui bande les yeux " p 359), souvent sous le regard de Lucette. Quand il quitte Ardis, van est infidèle, Ada a des amants et la première partie s'achève par une scène drolatique de duel.

Dans la deuxième partie, van est poursuivi par sept lettres d'Ada écrites en 1888-92 et qu'il ne lira qu'en 1940. On y retrouve l'ardeur d'Ada qui reproche à van " d'avoir ouvert en moi, lorsque j'étais encore enfant, une source de frénésie, une fureur de la chair, une irritation insatiable… le feu que tu as allumé a laissé son empreinte sur le point le plus vulnérable, le plus pervers, le plus sensible de mon corps. Aujourd'hui il faut que j'expie l'excès de vigueur prématurée avec lequel tu as raclé la rouge écorchure, comme le bois calciné doit expier d'être passé par sa flamme " (p 437). Suivent des digressions érotiques autour de Floramor, un réseau de lupanars à tendance pédophile. van et Ada se retrouvent et sont surpris par Démon. van se confesse " Je l'ai séduite pendant l'été 1884. Sauf une fois, nous n'avons plus fait l'amour jusqu'en 1888. Puis, après une longue séparation, nous avons vécu ensemble tout un hiver. En tout, j'ai dû la posséder un millier de fois. Elle est toute ma vie " (p 572). Démon révèle à van qu'Ada est sa soeur, ce qui est clair pour le lecteur depuis les premières pages.

Dans la troisième partie, van voyage, écrit ses livres, est nommé à la chaire de philosophie de Kingston, poursuit sa carrière de libertin acharné, se refuse à Lucette qui se suicide (J'ai sauté des pages, idem pour la 4ème partie).

La dernière partie, la plus brève, récapitule la vie de van qui a maintenant 94 ans. Plaisanterie ultime, l'auteur nous y confie une autocritique satisfaite et lapidaire : " Il n'est rien dans la littérature mondiale, sauf peut-être les réminiscences du comte Tolstoï, qui puisse le disputer en allégresse pure, innocence arcadienne, avec le chapitre de ce livre qui traite d'Ardis " (p 755). Bien. Retour à la première partie.

Pour rendre justice au livre, il faut dire pourquoi il est extraordinaire. Par la sensualité édénique de la première partie : l'érotisme, l'insouciance, la nature ; pourrait-on actuellement écrire un tel livre ? Par sa verve intarissable : il faut 500 pages pour s'en lasser. Par la fantaisie et l'agilité de Nabokov. Ce démon nous désarçonne cent fois par ses jeux de mots, ses glissements sémantiques, ses anagrammes (" escient, ceintes, insecte, inceste " p 125), sa science botanique et entomologique, par ses allusions littéraires et sa fantaisie chronologique : En 1888 van a lu Proust, il prend un avion transatlantique, ses invités n'ont pas apporté de transistor, etc. Nabokov joue, il nous fait revenir en arrière pour vérifier ce qu'on a lu et jouir de sa complicité. Nabokov, qui a traduit en russe Alice in Wonderland, a dû épuiser ses deux traducteurs. Parfaitement francophone, il a revu leur traduction.

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"Ada ou l'ardeur" c'est une histoire d'amour interdite.
Celle de deux demi-frère et soeur qui, dès leur plus jeune âge, tombent amoureux l'un de l'autre. Sur Antiterra, une Terre parallèle, avec une géographie, des conquêtes et une histoire différente avec des cultures différentes ; des pays… rebaptisés.
C'est un roman écrit sur le temps long, celle de la vie des héros, jusqu'à leur vieillesse. Les rencontres passionnées, les complications dues aux conventions sociales, l'interdit donné par le père, tout cela crée, il est vrai, une atmosphère envoûtante.
Et la narration, enrichie d'allusions littéraires, de références culturelles, de jeux de mots, procure une véritable joie de l'esprit !
De l'avis des critiques, l'auteur Vladimir Nabokov a signé là une de ses plus grandes réalisations littéraires que je vous encourage à découvrir…si ce n'est pas déjà fait !
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Ada ou l'ardeur est une chronique familiale.
Elle est écrite à la troisième personne par le héros et protagoniste van Veen.
Il n'a pas loin de 90 ans au moment où il rédige cette chronique.
Van Veen, 14 ans, va rencontrer séjourner au château d'Ardis, près de Ladore, merveilleux domaine, véritable paradis de l'enfance. Là, il va faire la connaissance de ces cousines Ada et Lucette. Ada et van sont deux enfants précoces, doués d'une intelligence hors normes. Ils vont vivre une passion intense et charnelle durera leur vie entière.
Le style de Nabokov est très particulier. En effet, le roman de la troisième personne bascule souvent au je et Ada rajoute des commentaires en marge de la chronique.
L'action se situe dans un monde imaginaire "Antiterra" qui est un reflet déformé de la Terre, les noms de lieux et de personnes sont modifiés de façon assez humoristique.
La Terre,elle apparaît dans le roman sous le nom de Terra, un peu à l'image du Paradis, à l'existence de laquelle certaines sectes croient. Ce Paradis est quand à lui le reflet exact de la Terre. Ce qui, en fait de Paradis, en constitue au mieux un Purgatoire.
Van Veen va écrire un série de nouvelles sur ce thème, livre (le premier de sa carrière d'écrivain)qui ne connaitra que peu de succès.
Les noms des choses aussi sont transformés, des objets tous plus fantasques les uns que les autres sont inventés. D'ailleurs, le collège où van a suivi ses études s'appelle Chose.
C'est aussi une très belle histoire d'amour. Ada et Van, qui sont en réalité frère et soeur, vont être séparés plusieurs fois, durant de longues périodes, finiront se retrouver vers leur cinquante ans et passer leur restant de leurs jours à voyager ; Ada à filmer toute sorte de papillons et Veen à écrire des essais et autre s articles notamment sur la Question du Temps mais aussi de la Folie.
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Même si j'ai lu et beaucoup aimé Lolita, Ada ou l'ardeur me faisait peur. C'est vrai que ce roman est exigeant, d'abord par son nombre de pages (plus de 750), mais surtout par son style baroque, dense et foisonnant, qui intègre des références et des jeux langagiers quasiment dans toutes les phrases, comme autant d'énigmes à résoudre. Pour dire vrai, je n'ai pratiquement rien compris aux 50 premières pages et tout le long du bouquin j'avais conscience de passer à côté de beaucoup de choses.

En ce qui concerne les références, je recommande d'ailleurs l'écoute d'un épisode radiophonique de France Culture, Nuits magnétiques - Ada, le roman des manuscrits (1990). Avec quelques exemples qui ne sont que la pointe de l'iceberg, le présentateur montre bien le génie de Nabokov, la complexité de cette entreprise romanesque et le vertige qu'elle appelle. 

Malgré l'aspect labyrinthique et crypté de l'oeuvre, la trame centrale reste assez facile à suivre (heureusement, vous me direz !). Il s'agit de l'histoire des amours interdites d'Ada et Van, du début de leur adolescence à leurs vieux jours, une histoire émaillée d'érotisme, de botanique et d'art, dans un contexte géographique et temporel fantasmagorique.

Bref, la lecture d'Ada ou l'ardeur est ardue (n'est pas Nabokov qui veut quand vient le temps de faire des jeux de mots), mais l'engagement en vaut vraiment la peine !
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Mériterait largement 5 étoiles pour le "niveau" de littérature auquel ce livre se situe mais c'est mon avis que je traduis ici en étoiles. En termes de niveau de créativité, d'audace, de renouvellement qu'il a apporté à la littérature, je place Ada ou l'ardeur à l'altitude où je vois, par exemple, Ulysse de Joyce ou Au-dessous du Volcan de Lowry , c'est-à-dire des livres où est poussée très loin la transgression des formes antérieures de l'écriture et qui font donc évoluer la littérature. D'autres livres (ceux, par exemple, de Claude Simon, la croyance des voleurs, de Michel Chaillou, Nedjma de Kateb Yacine, Les Chants de Maldoror de Lautréamont etc..) sont allés, dans des directions différentes, aussi loin mais ceux-là je les ai adorés. Je suis plus partagé sur Ada : il y a pourtant beaucoup, beaucoup de pages très belles. Nabokov a une manière souvent sublime ( et souvent drôle) d'écrire, de décrire telle ou telle chose, mais, par exemple, les inserts de bout de phrases en toutes sortes de langues réelles (russe, anglais..) ou inventées, l'invention omniprésente de mots, de noms, la ré-invention de la géographie terrestre ne m'ont pas plu.
Si je regarde la vie de l'auteur, Ada est quasiment le dernier livre écrit, à la fin des années 1960, par cet homme qui, alors, n'a à nouveau plus de contraintes financières (après le succès de Lolita - que je trouve beaucoup plus accessible - et de part ses 20 ans passés comme prof d'université aux USA et son activité de conférenciers, ses autres droits d'auteur) et s'autorise à laisser libre court à ce que lui permet sa grande culture littéraire et son origine très aisée ; la description, très habile, de la naissance de l'amour sous toutes ses formes, entre 2 (puis 3) jeunes adolescents qui ont tout ce qu'ils veulent (notamment un château et son parc pour les vacances, une fortune sans fond, tous les livres possibles..), dans ce monde où les jeunes héritiers peuvent culbuter les domestiques de 10 ans s'ils y mettent un peu de discrétion pour étouffer un scandale qui serait tout relatif vu les moeurs familiales qui n'évitent pas la transgression de tabous ancestraux et quasi-universels.. Cette "immoralité" n'empêche pas que la description de ces relations extraordinaires - dans tous les sens du terme - est magnifique chez Nabokov qui, comme ses personnages, après avoir vécu une enfance et une adolescente comblées de culture et de richesses, a subi l'exil et s'en console probablement comme il peut vers la fin de sa vie, notamment en fondant ici dans une nouvelle géographie personnelle l'ex-empire russe et les USA.
L'arbre généalogiques et les 4 premiers chapitres sont à lire avec une grande attention ( Nabokov est exigeant avec le lecteur, qui s'en trouvera proportionnellement récompensé) car ils constituent la base de la suite. La longue 1ère partie est souvent assez sublime. La suite est souvent plus délirante, décousue, mais il faut lire jusqu'au bout, bien sûr, car plusieurs passages (la mort d'un des personnages, les réflexions sur le temps et l'espace..) valent le coup.
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Nabokov est un des auteurs rusdes majeur et il le prouve encore une fois avec ce roman qui est un classique ou mériterait de l'etre.Le livre est long mais sans longueurs inutiles qui l'affaiblirait.Le style est classique mais dynamique et les personnages attachants.Le theme central est intemporel mais permet,lorsque comme ici le talent de l'auteur est au rendezvous de vreer des oeuvres incontournables.
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Moins connu que Lolita, ce roman reste du Nabokov. Il s'agit de la mise en scène d'une autre nymphette qui n'a rien d'un ange et qui use de sa séduction pour commettre des forfaits? Son amant n'est pas, cette fois, son beau-père, mais un jeune homme distingué et de trois ans son aîné, un paon loquace qui fait la roue. Moins scandaleux de fait que Lolita, ce roman est néanmoins épicé d'une sensualité rare et qui provoque de biens étranges mouvements de l'esprit.
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Avant-propos à une ultérieure et difficile critique :


I think it is really all a matter of love: the more you love a memory, the stronger and stranger it is.

-Vladimir Nabokov

«ADA», le roman de Nabokov se partage en 5 parties.
La première fait la moitié de «ADA». On y apprend les amours incestueuses de jeunesse de van Veen pour sa cousine Ada durant un séjour à Ardis.
La deuxième partie se termine sur la rupture d'avec Ada selon l'insistance de son père.
La troisième partie raconte le mariage d'Ada suite à ses multiples vicissitudes amoureuses.
La quatrième partie raconte le retour d'Ada en 1922 alors que van Veen écrit son traité sur « La texture du temps ».
La cinquième partie, une sorte de coda, raconte la réunion de tous (Ada Veen, Lagosse, Noutkin, Knox et Oranger) lors de la célébration du quatre-vint-dix-septième anniversaire de van Veen et la terminaison de ce mémoire qui sera publié de façon posthume.

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