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sur 688 notes
Mudgirl (fille-boue), une fillette, est abandonnée par sa mère possédée par un délire mystique dans des marais de la Blake Snake River dans les Adirondacks aux États-Unis. Alors qu'elle était en train de mourir étouffée par la boue, un trappeur la sauve. Ensuite, l'enfant est recueilli par un couple de quaker qui l'adopte et lui donne le nom de sa fille décédée : Meredith Ruth Neukirchen (M.R. -Mister?). La fillette grandit en vivant dans la religion quaker. Elle devient une femme, Mudwoman (la femme-boue) forte, intelligente, et elle accède à un prestigieux poste en devenant la première femme présidente d'une université aux États-Unis au lendemain des attentats du 11 septembre 2001. Alors qu'elle se rend pour donner une importante conférence non loin de la ville de ses parents adoptifs, Meredith décide de louer une bagnole pour explorer les environs. Elle a un accident, ce qui l'empêche de présenter son discours. Son accident semble déclencher en elle une crise, car il apparaît très difficile d'enfouir son passé dans les méandres de son âme. Les souvenirs refont surface en même temps que Meredith assume ses nouvelles fonctions et en luttant contre la misogynie de ses pairs. Très stressée, Meredith développe une dépression nerveuse à la suite d'une tentative de suicide d'un étudiant sur le campus. Comment s'en sortira-t-elle? Dans quelle spirale infernale la jeune femme est-elle entraînée? Qui pourra l'aider à s'en sortir? Qui l'aimera finalement?

Mes impressions

Ce livre m'a marquée et je vais m'expliquer en deux temps à partir de la crise intérieure qui habite Meredith; ensuite, je vais m'attarder à la crise collective sévissant aux États-Unis.

La crise intérieure : En occupant les fonctions de présidente d'une université, Meredith est confrontée à un éclatement de ses valeurs. En ayant grandi dans une famille marquée par la religion quaker prônant l'égalité entre les êtres, la non-violence, les idéaux, la compassion, l'entraide, la bonté, le silence, le calme, etc., elle tombe dans un milieu conservateur, misogyne, loin de ses valeurs progressistes. En essayant d'aider un étudiant frisant la folie, elle ne respecte pas ses fonctions et les conseils juridiques. En plus, l'étudiant rate sa tentative de suicide et il est plongé dans le coma. Il est maintenu en vie par un respirateur artificiel. Ce drame l'amène à explorer celui qu'elle a vécu enfant. Elle a été jetée dans la boue par sa folle de mère. La boue est partout dans le livre. Elle définit Meredith (Mudgirl, Mudwoman), elle l'entraîne dans une rêverie associée à l'intériorité, à un retour à la mort et elle lui permet de se cacher, d'accéder au mystère. le chapitre où Meredith se maquille s'avère en ce sens très représentatif. Voici le résultat :

«Elle était haletante, distraite et agitée comme si on l'avait brutalement tirée d'un rêve. Sa tenue…n'était pas vraiment débraillée, mais quelque chose laissait à désirer – et ses cheveux, eux, étaient ébouriffés comme si elle avait à peine eu le temps de se donner un coup de peigne et son visage – le pauvre visage ravagé de M.R.! – la trahirait en fin de compte car il était étrangement enflé autour de la bouche et mouillée en hâte, étrangement, avec une sorte de pâte qui, en séchant, avait foncé comme de la boue. Finie la Walkyrie au visage rayonnant, son visage ressemblait maintenant à l'un de ses visages-masques primitifs des Demoiselles d'Avignon de Picasso. (p. 362)


Source : Wikipédia
La lectrice ou le lecteur semble se retrouver dans un monde inversé au sens hégélien du terme où elle ou il est confronté à un jeu de contradictions entre ce qui est démontré et ce qui est caché. le rôle de la boue engendre une rêverie associée au masque, à la folie. Meredith masque sa dépression nerveuse à ses collègues. La rêverie de la boue est profondément morbide…

La boue entraîne vers des profondeurs où la descente peut être infinie et elle engendre la mort par étouffement. C'est une image puissante de lutte contre la nature, un retour vers un ailleurs primitif. Et Meredith a été projetée dans la boue enfant. Sa mère voulait la tuer. C'est un acte puissant car celle qui l'a mise sur la Terre la retourne à la terre. Sa descente vers l'intériorité de son être l'amène à essayer d'exulter son imposture, mais aussi à tenter de trouver un peu d'apaisement relié au geste maternel.

Son père adoptif va l'aider à guérir un petit peu de sa dépression nerveuse. En ce sens, Meredith s'éloigne de la terre de la mère pour rejoindre une dialectique associée au père en tant que sauveur.

Le livre par le biais de son héroïne entraîne la lectrice ou le lecteur dans un thriller psychologique vertigineux et l'autrice joue avec son inconscient en explorant ce qui est tolérable et ce qui ne l'est pas. Comment survivre à l'horreur?

Crise collective : Au lendemain des attentats terroristes du 11 septembre, les États-Unis plongent dans une crise les entraînant dans une guerre contre l'Irak. Les actes des terroristes servent à légitimer la guerre. le peuple s'avère alors victime d'une annihilation. Cette crise collective, Meredith la ressent. Elle vient encercler celle qu'elle vit. Comme le remarque l'instance narratrice :

«Il y a aussi de la pauvreté en Amérique -et pas seulement économique. Une pauvreté d'esprit.» (p. 264)

Et le gouvernement américain de l'époque mentionne qu'il va déclencher la guerre en Irak au nom de la liberté. Les Américains n'apparaissent plus libres dans leur pays, car ils ne se sentent plus en sécurité selon le gouvernement. Alors, il faut s'en prendre au mal. En ce sens, la montée de l'extrême droite aux États-unis se vit aussi dans les universités américaines. La dépression nerveuse va de pair avec cette idéologie, car Meredith se sent menacée par ses collègues qui ont des valeurs plus conservatrices et ils sont en faveur d'une «morale individuelle plus stricte». Alexander Stirk représente ce retour aux valeurs plus strictes et il en fait la promotion sur le campus. Il est à l'opposé des valeurs progressistes de Meredith. Pour elle, il a des problèmes et elle doit l'aider. La crise aux États-Unis a des impacts sur les individus comme Alexander.

Je pourrais encore continuer longtemps à parler de ce livre tant il y a à dire… C'est un livre rempli de symboles, de mythes, de croyances. L'Amérique avec ses peurs, l'Amérique avec ses folies, l'Amérique avec ses détritus se retrouvant partout, l'Amérique et son odeur de pourriture.

Mais surtout, il présente une héroïne fascinante qui a vécu l'horreur, qui tente de camoufler son drame intérieur, mais qui est rattrapée par ce qu'elle a vécu.

Je vous le recommande sans hésitation. Comme pour mes deux autres lectures de livres de Joyce Carole Oates, Mudwoman s'avère une lecture marquante,.

Avez-vous lu Mudwoman? Qu'en avez-vous pensé? Comment trouvez-vous cet article?

Bien à vous,

Madame lit

https://madamelit.ca/2024/03/28/madame-lit-mudwoman-de-joyce-carol-oates/
Lien : https://madamelit.ca/2024/03..
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Une mère abandonne sa fille dans les marais des Adirondacks, la jetant dans la boue ...
Mudgirl va être miraculeusement sauvée puis placée en famille d'accueil pour ensuite être adoptée par un couple de quakers qui vont la chérir, ayant perdu leur propre fille ...
Ils sont résolus à lui faire oublier sa terrible histoire...
Elle devient Mérédith-Ruth Neukirchen, 1ère femme présidente d'université.
Brillante, Mudwoman se veut irréprochable et se consacre entièrement à sa carrière.
Un irrépressible besoin de revenir sur les lieux de sa naissance va faire ressurgir les traumatismes du passé ...
Elle va doucement basculer vers la folie ...
Jewel, Jedina, Mudgirl, Mérédith-Ruth, MR, Merry, Mudwoman : 7 prénoms mais une même personne ...

"Préparée, elle doit être préparée "
Phrase fil rouge du roman.
Moi aussi je m'étais "préparée" à une lecture exigeante connaissant JCO mais je vous avoue que j'ai vraiment souffert 🥵
Une écriture verbeuse avec des longueurs à n'en plus finir ...
On navigue entre passé, présent, cauchemars et réalité, on peine à s'y retrouver ...
Sur fond d'une histoire sordide, c'est également une réflexion sur le monde universitaire aux États-Unis, sur le contexte social et politique (trop d'ailleurs) sur la guerre en Irak, le tout parsemé d'hallucinations d'une femme psychologiquement torturée qui évolue en eaux troubles.

Un roman pourtant encensé donc je suis peut-être passée à côté mais après avoir parcouru ma lecture moi aussi en eaux troubles, je me suis littéralement enlisée tout comme Mudwoman la femme de la boue ...

J'ai lu plusieurs romans de cette auteure prolifique, j'ai adoré "les chutes", j'en ai abandonné certains mais allez comprendre pourquoi j'y reviens toujours 😉
Babysitter m'attend dans ma pal, espérons qu'il va me réconcilier avec cette grande dame ! 📚
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Joyce Carol Oates a le don de raconter l'âme humaine. Elle dépeint le monde avec lucidité et distance. Elle décrit la noirceur, l'égoïsme et l'hypocrisie sans jamais tomber dans le "drama", ni les lamentations.

Dans Mudwoman j'ai retrouvé son style incisif et précis pour décrire la psychologie de Mérédith, enfant abandonnée puis adoptée. Perdue entre deux mères : le souvenir de celle qui la jettera dans la boue et l'autre qui attend d'elle qu'elle remplace sa Mérédith... Sa descente vers la folie est narrée sobrement. On la sent. On la vit.
Quant à la fin... je n'en dirai rien. Et c'est déjà tellement.

Merci madame Oates.
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Joyce Carol Oates nous délivre un destin exceptionnel, celui d'une petite fille, abandonnée par sa mère – dévote et folle à lier – et jeté dans la boue d'un marais de la Black Snake des Adirondack ! Sauvée in-extremis par un trappeur, elle sera recueillie par un couple de Quakers, et ainsi deviendra Meredith Ruth « M.R. » Neukirchen. Puis grâce à son intelligence, elle parviendra à se hisser - être la première femme - à la tête d'une grande université de renom ; non sans franchir les obstacles de sa féminité, et de mettre en exergue ses qualités d'écoute, de gentillesse qui feront obstacle à la rigidité des règles de fonctionnement de ce grand service d'enseignement ; car elle n'est pas du genre à se plaindre, ni à parler avec dédain, amertume ou reproche. L'éthique est son flambeau dans ce carcan de la société ; d'autant que sa vie privée est un long tunnel de solitude !

À cela s'ajoute un conflit larvé entre les pro et anti adepte de la guerre avec l'Irak. Auquel se rajoute une vie sentimentale pour le moins en état larvaire !

Bien sûr, avec le temps et les pressions de son activité professionnelle, une dépression arrive qui la conduit à s'approcher des lieux de sa désastreuse enfance afin d'en connaître les lieux, les circonstances et éventuellement ses parents. Situation éminemment compréhensible pour toute personne qui souhaite connaître les racines de son existence.

Un roman qui suggère fortement à se poser des questions, sur soi-même, mais encore sur le destin de notre civilisation. Car quelles sont et doivent être les normes, les limites et les devoirs de celle-ci ?

Un livre envoutant, d'une grande profondeur et sensibilité, et sur lequel nous ne pouvons rester insensible. Un coup de coeur pour moi avec Mudwoman. Et je ne résiste pas à citer avec cet apophtegme de Tomas Hobbes : Homo homini lupus - L'homme est un loup pour l'homme – Sans doute la morale de ce livre pour cette auteure !

Lien : https://bookslaurent.home.bl..
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Second ouvrage que je découvre de Joyce Carol Oates, et seconde fois que je suis impressionnée par la performance littéraire. Ecriture fine et structure habile happent immédiatement le lecteur, pour qui, comme pour l'héroïne, le réel semble petit à petit moins certain, plus flou. Et quand par-dessus cette réalité flottante, vient se poser un entremêlement morbide entre passé et présent, le lecteur finit lui aussi - mais avec délice - prisonnier de la trame de ce roman.
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Je n'avais jamais lu de roman de J.C Oates mais j'ai retrouvé un certain nombre de traits communs à d'autres écrivains américains lus dernièrement ( L. Kasischke, , R. Banks , L. Erdrich...). D'abord une grande rigueur dans la structure du récit, un bel équilibre dans le dosage des parties dynamiques et des parties documentaires et une grande fluidité dans l'alternance des temporalités. Peu de points faibles dans ce type de livres ou derrière l'évocation à rebours de la vie d'une présidente d'université il est question à la fois de filiation , de la condition des femmes dans les rapports de pouvoirs et de la problématique des transfuges de classes. Mais c'est peut être là , que se situe la limite du livre sur un plan littéraire , qui ne parvient pas toujours à être autre chose qu'un cahier des charges rempli de manière efficace et roborative ,de thématiques attendues. Rien de plus en définitive qu'un beau livre un peu impersonnel.
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Meredith a été abandonnée dans la boue par sa propre mère à l'âge de 5 ans. Plus qu'abandonnée d'ailleurs, l'intention était de la tuer...
Sauvée puis adoptée, elle a ensuite très bien réussi sa vie. Elle a maintenant 41 ans et elle est présidente d'Université. Mais le jour où elle doit donner une conférence dans une ville proche du lieu où elle a été retrouvée, elle semble irrésistiblement attirée vers cet endroit. Bouleversée, son équilibre apparent semble soudain se désagréger, ses certitudes s'effondrent et elle ne maîtrise plus ses émotions. Il semble être temps pour Mudgirl, devenue Mudwoman, d'explorer le passé et de se reconstruire.
Quel talent ! Avec quel maestria J.C.Oates mène ce récit ! Je ne suis pas surprise mais cependant à chaque fois épatée. La construction est comme d'habitude brillante et l'écriture, si particulière, me saisit, me touche profondément.
Je rejoins Piatka (auteur d'une belle critique datant du 19 décembre 2013): à quand le prix Nobel de littérature ??
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Ça faisait longtemps que j'avais envie de lire un roman de Joyces Carol Oates, j'en ai eu plusieurs entre les mains avant de finalement me décider pour celui-ci. Bon, eh bien, disons-le tout de go, ce fut une grande déception et je ne suis absolument pas en accord avec toutes les critiques élogieuses que j'ai pu lire concernant ce livre.
En fait, j'ai tout de suite été agacée par cette lecture, en grande partie à cause de l'écriture qui use et abuse des parenthèses, de l'italique et des digressions : on s'y perd et l'intérêt s'effrite très rapidement. Et puis c'est d'une lourdeur ! Agacée aussi par cette personne qu'est devenue Mudgirl : une femme nommée uniquement par ses initiales « MR », idem d'ailleurs pour certains autres personnages désignés par une lettre, Monsieur « S » par exemple. C'est très rédhibitoire à mes yeux, impersonnel, désincarné, froid. On a l'impression qu'il ne s'agit pas de vraies personnes, du coup le capital sympathie (et empathie) est ramené à zéro. Bref, je n'avais qu'une hâte : tourner la dernière page…
C'est dommage car l'ambiance installée était plutôt réussie avec un côté très visuel, presque cinématographique au début (dans l'esprit de True Detective ce qui est un très bon point à mes yeux). Mais après il y a trop de choses, un peu tout et n'importe quoi, ça se disperse et on se perd. Toutefois j'ai décidé de ne pas m'arrêter sur cette mauvaise impression et de tenter d'autres ouvrages de Joyce Carol Oates qui pourraient bien davantage me plaire.
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M.R.Neukirchen, première femme présidente d'une grande université de la Ivy League, bardée de diplômes, de principes moraux et de compétences, est une forteresse vide sur le plan affectif : elle a mis entre elles et ses parents adoptifs, quakers et provinciaux, toute la distance que son poste et ses responsabilités pourraient justifier, elle ne voit son amant secret, astronome et marié, qu'à de rares et furtives occasions, elle n'a ni enfants, ni amis.

Un accident la met face à face , brutalement, avec tout un passé refoulé, enfoui littéralement dans la fange : enfant, la petite Jedina Kraek , a manqué être noyée par sa mère biologique dans les eaux boueuses de la Black Snake, elle n'a dû son salut qu'à l'intervention d'un braconnier à demi demeuré. Elevée à la dure par une famille d'accueil sous le nom de Jewell, sa soeur aînée retrouvée plus tard, tuée par leur mère démente, elle échappe encore une fois à la misère grâce à son adoption par un couple de quakers cultivés et aimants qui lui donnent le nom de leur fille disparue. Devenue non sans dérision « Merry » -Meredith- Ruth Neukirchen a échappé une fois encore à cette affection parentale qui lui paraît aliénante, et au désir d'un professeur qui lui a révélé ses compétences à enseigner- pour donner libre champ à son potentiel intellectuel dans une grande université américaine.

Loin de tout et de tous, elle se choisit un prénom quasi masculin , fait de ses initiales : M.R Neukirchen, la présidente…

C'est là, en pleine gloire professionnelle, que son passé la rattrape, sans lui laisser de répit.

Tout l'édifice qu'elle s'est construit pour le mettre à distance se lézarde : cauchemars, malaises, fautes, hallucinations , souvenirs se mêlent désormais sans garde-fous à sa vie bien rangée d'universitaire de premier plan. le contexte politique est lui aussi chaotique : la guerre d'Iraq, l'obsession du terrorisme musulman post-11-septembre- créent dans le microcosme intellectuel de profondes divisions. Bientôt, M.R. s'effondre, comme cet étudiant mythomane qui souffre d'un délire de la persécution, comme ce professeur de mathématiques qu'elle a fui autrefois, comme cette mère démente qu'elle revoit assommée de calmants à l'asile. Réfugiée quelque temps chez son père adoptif, elle tente de se reconstruire avant de repartir pour reprendre sa vie professionnelle, et commencer peut-être, sur le tard, une vie affective. Mais n'est-elle pas Mudwoman plus que M.R.- et par là même vouée à la solitude, et en butte aux dangers auxquels celle-ci expose une femme qui a ouvert les vannes à son passé ? cette femme de boue n'est-elle pas le seul point commun entre Jedina, Jewell, Merry et MR ?

Un grand livre, très sombre, remarquablement écrit- les passages relatifs à l'enfance dramatique de M.R. sont magistraux- mais il est parfois difficile de s'identifier en permanence à un personnage aussi éclaté et aussi défensif – à la fois vide et hanté. Les –nombreux- épisodes relatifs à sa vie professionnelle, essentiellement faite de contraintes mondaines et administratives- sont parfois oiseux et lourds, le contexte politique laborieusement intégré à la trame du récit : on a, comme MR elle-même, quelque peine à y attacher notre intérêt. La fin est très ouverte, vers la rédemption ou la catastrophe, selon la grille de lecture de chacun…
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Mudwoman, par Joyce Carol Oates. Très vite on sait de quoi il s'agit. Les protagonistes sont en place : une petite fille de 3 ans, dont la mère, une déshéritée, tente de se débarasser en la jetant dans la boue des marais, et que sauve un pauvre bougre de trappeur alerté par le Roi des Corbeaux ; une femme, M. R. (pour Méredith Ruth), déjà mûre, diplômée de Harvard, présidente d'une université réputée, ce qui est en soi une aberration pour certains de ses collègues, de droite en particulier. On est en 2003 et “W” Bush s'apprête à intervenir en Irak, sur la base de fausses allégations entretenues par les “faucons” américains.
M. R. a un amant, un astronome, beaucoup plus souvent dans les étoiles ou dans sa famille légitime que près d'elle. Elle assume sa solitude.
La suite s'étire sur plus de 500 pages, émaillée de retours en arrière ou de développements parasites. On fait la connaissance des parents adoptifs de mudgirl devenue mudwoman, alias M. R. : Agatha et Konrad sont des quakers et protègent leur fille au-delà de son bien et de la vérité. M. R. veut le bien d'autrui, la culpabilité est sa marque. Elle se manifeste quand un étudiant, conservateur et mal dans sa peau, se fait agresser, ou le prétend, vient lui en rendre compte en tentant de la piéger, et finit par se suiciider. Sa droiture morale l'empêche d'accepter un don de 35 millions de dollars, car il émane d'un géant économique, pollueur de surcroît. Ca ne passera pas auprès des administrateurs de l'Université, et elle paiera cher son isolement.
Diverses anecdotes (les avances de son professeur de maths au Lycée, sa liaison avec un collègue conservateur et pingre), ses cauchemars (son viol, le meurtre d'un de ses ennemis qu'elle débite en morceaux, son marriage avec celui qui l'a sortie de la boue et qui est revenu de la guerre du Golfe de 1991, atrocement mutilé) ponctuent un texte qui n'avance pas beaucoup, et qui est alourdi de multiples digressions qui le dispersent en tous sens.
Plutôt qu'apprendre à mieux connaître M. R., on suit son parcours : après avoir quitté l'Université, malade, elle séjourne dans la ville de ses parents, apprend à apprécier son père, puis retourne à l'Université. Mais que s'est-il passé ? M. R. a donné l'impression de cheminer, mais elle a tourné en rond. Revient-on donc forcément à ses démons, après les avoir chassés ?
Les traumatismes de l'enfance et les retours sur le passé, l'amour et sa recherche vaine, l'épreuve du pouvoir et ses frustrations sont au centre de ce roman et en font la richesse. Mais il s'égare souvent, n'a pas le bon rythme, ni cette grâce que l'on trouve dans d'autres romans de JCO.
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