Cette fille, elle n’a vraiment peur de rien. Lucifer en personne pourrait descendre sur Terre, elle serait la première à lui chercher misère. C’est peut-être pour ça qu’on s’entend si bien. Elle me pousse à me surpasser. Si je ne l’avais pas auprès de moi, je serais devenue probablement aussi trouillarde que mon père. Que tout le monde, en fait. Personne ici n’oserait faire ce que Molly fait. Ce n’est pas pour rien qu’on dit qu’elle est barge dans le village. Mon père pense que j’ai rompu tout contact avec elle. S’il savait…
Avec le temps, je me suis habituée à cette existence monotone. Je pense qu’à force, j’y ai même fixé mes repères, espérant vainement qu’on vienne m’y libérer. C’est comme si j’avais des chaînes ; je peux toujours marcher, mais au-delà d’un certain moment, je ne peux que reculer. Toujours et encore faire machine arrière, comme si réellement ça allait empêcher le mal de frapper à notre porte.
Réaliser qu’Adam est dans la même académie que moi. C’est presque trop beau pour être vrai. J’ai l’impression de rêver. Pendant si longtemps il m’avait manqué. J’avais eu tellement de mal à l’oublier et aujourd’hui, il était ici. On était à nouveau réunis. Je pose une main sur ma poitrine. J’ai beau dire à mon cœur de se calmer, il n’en fait qu’à sa tête.
Je pense qu’il y a deux types de personnes : ceux qui ont un cœur et ceux qui font semblant d’en avoir un. Il y a ceux qui vivent et ceux qui meurent. Ceux qui se battent et ceux qui pleurent. Il n’y a pas de place pour le reste. Tout ou rien, voilà ce à quoi nous avons droit. Une vie où il faut soit mourir en silence, soit souffrir une éternité.
La vérité c’est que je n’ai jamais éprouvé l’envie de m’orienter vers la médecine. Rejoindre la communauté des riches immortels n’a jamais été mon rêve, mais bel et bien celui de mon père. Je pense qu’en fait, tout ce qu’il désire, c’est que je vive mieux que lui. Que j’ai une vie plus paisible et surtout, plus sûre.