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EAN : 9782930657332
murmure des soirs (01/12/2016)
3.67/5   3 notes
Résumé :
Anonyme dans la foule, aucune marque visible ne permettait de la distinguer. Elle n’avait pas non plus accompli d’action extraordinaire qui l’aurait rendue mémorable. Pourtant Bruna avait une particularité qui en faisait une personne exceptionnelle. Rescapée des camps de concentration de Ravensbrück et Bergen-Belsen, elle avait vu ce qu’elle n’aurait jamais dû voir et subi ce qu’elle n’aurait jamais dû subir. Elle en avait été marquée pour la vie. Son témoignage, re... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
« Que retenir dans le flot des souvenirs ? Lesquels méritent, plus que d'autres, d'être consignés ? » Question déterminante pour un écrivain, et plus encore lorsqu'il travaille sur la mémoire des autres. En 2014, Marc Pirlet a publié un court récit fondé sur les souvenirs de Bruna, Polonaise communiste rescapée du camp de Ravensbrück. La mort de Bruna, un an plus tard, laisse l'auteur avec toutes les questions qu'il n'a pas pu lui poser. Un nouveau dialogue s'engage alors, avec les lieux — le cimetière où elle repose, qui évoque par sa disposition un nouveau camp de concentration, le mémorial de Ravensbrück, Bedzin, sa ville natale en Pologne, Billy-Montigny, où elle a vécu...
Ce petit livre, paru dans le même format, pourrait n'être qu'un « post-scriptum en forme d'éloge et de remerciement », comme le présente son éditeur. On y retrouve les « chutes » des entretiens avec Bruna, de son vivant : tous les souvenirs ne sont-ils pas d'égale importance, s'ils ont survécu aux décennies ? Des plus saugrenus (la grand-mère qui, voyant pour la première fois des bananes, les prend pour des haricots géants) aux plus terribles (cette déportée sortant du rang, à Ravensbrück, pour se planter devant la surveillante en chef, alors enceinte, et vouer son enfant à naître sourd et aveugle). Souvenirs ténus, souvenirs précieux : qui se permettrait de les juger ? Ils sont comme un chant d'oiseau que l'on ne remarque pas, mais que Bruna écoute, au milieu d'un bois, après s'être évadée, et qui la rassure. L'oiseau plane tout le long de ce récit et accompagne, témoin discret, les épisodes de sa vie. À Ravensbrück, il survole le camp, porteur de rêve d'évasion à tire d'aile. À la fin de sa vie, place de l'Opéra, quand elle peut à peine marcher sur ses genoux douloureux, un oiseau à la patte blessée s'attache à elle. Infiniment précieux, ces oiseaux, car ils témoignent de la vie d'une petite note ténue. « Un jour comme un oiseau » : n'est-ce pas cela qui nous aide à voir la lumière.
Mais ce récit est plus qu'un post-scriptum. C'est une réflexion nourrie aux témoignages d'autres déportés et dans un dialogue muet avec celle qui l'a inspiré. Une incroyable énergie se dégage de ce portrait de la vieille dame. La volonté de survivre au camp, bien sûr, mais aussi celle de sortir jour après jour, lorsque l'âge est venu, et de se rendre au même café pour ne pas s'enfermer dans sa solitude. Un effort épuisant qui a fini par la tuer. Volonté d'aller au bout de ses souvenirs, de son récit, même si raconter est devenu une épreuve, volonté de voir les photographies de Ravensbrück, même si elle sait qu'elles lui feront mal... Il n'y a pas de leçon à tirer d'une vie qui ne s'est jamais voulue exemplaire, mais un témoignage sur les priorités de la vie. Lorsqu'il rencontre Bruna, Marc Pirlet écrivait un roman qui lui tenait à coeur et qu'il a interrompu malgré les deux cents pages déjà rédigées. Peut-être ne s'y remettra-t-il jamais. Mais la priorité était d'écouter Bruna, comme, un jour, pour Bruna, la priorité fut de s'arrêter dans sa fuite pour écouter un chant d'oiseau.
Lien : http://www.jean-claude-bolog..
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Bruna avait 16 ans lorsqu'en 1941, elle se fait arrêter par la Gestapo et déporter au camp de Ravensbrück avant de rejoindre celui de Bergen-Belsen. Son témoignage a été recueilli en mars 2013 par Marc Pirlet et publié sous le titre « Histoire de Bruna » en 2014.

L'année qui suit cette publication, Bruna décède, soulagée que son histoire ne tombe pas dans l'oubli.

Marc Pirlet rédige ici un dialogue muet posthume, frustré de tout ce qu'elle n'a pas eu le temps de lui confier, attristé aussi de ces rencontres qui n'auront désormais plus lieu.

Ce dialogue « en forme d'éloge et de remerciements » revient sur leurs échanges, sur la personnalité modeste de Bruna mais également sur le travail de Marc Pirlet, sur ses recherches, ses doutes, ses sentiments face au témoignage qu'il devait recueillir.

C'est poignant, doux, terriblement beau et triste à la fois.

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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Bruna était fière de son livre, d’avoir dans les mains ce petit objet à couverture bleu-gris qui racontait sa vie et qu’on pouvait acheter dans les librairies. Il lui avait coûté tant d’efforts et de peines. Elle en était fière, oui, et bien plus que ça ; pourtant, elle ne l’avait pas lu. Pourquoi lire un livre qu’elle connaissait par cœur et qui, une fois encore, une fois de plus, allait la replonger dans la violence de ses souvenirs ?
Elle en avait un exemplaire sur la table de son salon. Quand elle était assise à regarder par la fenêtre la place de la Bergerie, il lui arrivait de le prendre et d’en parcourir au hasard une page ou deux. Un étrange phénomène de dédoublement se produisait alors : tandis qu’elle lisait, elle oubliait que la jeune fille du livre, c’était elle. Elle compatissait aux souffrances de cette inconnue et se disait : « Pauvre petite ! » Puis elle revenait dans la réalité et, toute surprise, elle prenait conscience qu’elle avait lu un épisode de sa propre vie.
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Que retenir dans le flot des souvenirs ? Lesquels méritent, plus que d'autres, d'être consignés ? C'est une question qui se posait sans cesse à moi quand j'écoutais Bruna. La question n'est pas sans intérêt pour qui -comme c'était mon cas- doit écrire un récit biographique. Il est évident que tout n'y a pas sa place, un tri s'impose, sous peine de créer une oeuvre sans fin, étouffée sous les détails et par la même rendue illisible. Mais dans une vie passée au crible de la mémoire, à quoi reconnaît-on un détail ? La mémoire n'a-t-elle pas déjà elle-même opéré le tri en laissant s'effacer les souvenirs anodins ? Quand une vieille femme de près de quatre-vingt-dix ans évoque son enfance et sa jeunesse, tout ce dont elle se souvient -et qui a donc résisté au temps- n'est-il pas d'égale importance ? La résistance à l'oubli d'un fait qui nous paraît futile, insignifiant, n'est-elle pas la preuve qu'au contraire, lorsqu'il s'était produit, il avait laissé une empreinte profonde dans notre sensibilité ?
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