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sur 124 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Au milieu d'un florilège d'étés avec des écrivains : Pascal, Valery, Montaigne, Proust, Victor Hugo, Homère, Machiavel etc… le jeune Postel (pas Jean-Philippe que j'aime bien mais Alexandre dont je n'avais rien lu) invente un Automne de Flaubert où il saisit l'écrivain en pleine débâcle littéraire et pécuniaire à Concarneau où celui-ci a décidé, à la mi-septembre 1875, de rejoindre deux connaissances pour se changer les idées (Georges Pouchet savant naturaliste et Georges Pennetier directeur du Muséum de Rouen). Une échappée d'arrière-saison tonique et plutôt savoureuse pour le lecteur malgré la déprime de l'écrivain dont la sinistrose pendant cette parenthèse bretonne n'entame jamais la placidité assurée de ses deux acolytes. Trois personnages donc dans ce petit “roman” et un cadre marin pour faire se tutoyer littérature et sciences dites autrefois naturelles. Entre coquillages et crustacés, dans les relents de retours de pêches et de sardines éviscérées, les odeurs d'huile rance des vieilles conserveries de la Ville Close, voilà Flaubert installé à la pension Sergent et sa table trop bien garnie : “gorgé de homards et de tourteaux”. C'est l'ami Pouchet qui la lui a recommandée. Entre un voisin de chambre qui tousse gras, des cabinets trop éloignés, une aimable Charlotte auprès de laquelle il ne se sent plus de conter fleurette… il attend des lettres de Caroline (sa nièce) fixant son sort à Croisset, s'essouffle à la nage sur la plage des Dames et, de rêves en cauchemars, apparaît d'abord tel « un gros enfant qui mange, dort, chie et trompe l'ennui comme il peut » (p. 109).

Dans la chambre où il se morfond et « fait des siestes trop longues », c'est là justement que le guette Postel. Car là prend corps, sur le papier du moins – entre dégustations, excursions et dissections au vivier laboratoire –, le plan et l'ébauche de la légende de Saint Julien L'hospitalier ; un jour de repli quand Pouchet a annoncé qu'il n'y aurait pas de promenade possible. D'un bref et intense moment biographique (du 16 septembre au 1er novembre 1875) bruissant des silences éloquents dont la littérature aime s'emparer, Postel construit une mise en scène vivante faite de réminiscences et d'une succession de tableaux où peuvent même s'immiscer à l'occasion d'une procession de Pardon à Pont-Aven d'anciennes divinités païennes. Il raconte un "sursaut intérieur", malaxe la vase de l'ennui et les ruminations flaubertiennes qui précèdent l'acte d'écrire à l'origine du conte médiéval le plus échevelé qui soit (Saint Julien est le premier des Trois Contes, dernière oeuvre achevée publiée de Flaubert souvent présentée comme son apothéose stylistique, après une longue série de revers critiques qui l'ont assez ébranlé pour lui faire envisager d'en finir avec l'écriture). Un dialogue silencieux semble s'installer. Tandis que les deux savants s'absorbent dans leurs travaux respectifs, Pennetier adepte de la théorie de la génération spontanée avec ses infusoires et Pouchet se plongeant dans les entrailles d'une raie ou "mutilant" un turbot, Flaubert en perte de son art, comme ce homard qu'il a vu muer a laissé sa carapace, s'abandonne à la substance des vieilles légendes ancrées dans son souvenir et à la matière colorée des éclats d'un vitrail de la cathédrale de Rouen pour accoucher de sa créature. A chacun d'aller puiser dans ce petit récit plein de verdeur au style réjouissant ce que peuvent avoir à se dire littérature et anatomie...
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Ah, le voilà mon coup de coeur ! Et je ne perds pas de temps pour le dire, comme ça, même si vous ne lisez que les premières lignes de ma chronique, au moins, vous le saurez !
« Un automne de Flaubert »… déjà, ce titre, quelle merveille, j'en aime tous les mots (oui, je sais, il n'y a que deux substantifs, mais lesquels...) et ce bandeau (moi qui déteste les bandeaux) représentant un tableau d'Eugène Boudin… Impossible de résister...
Ah, ce roman… passionnant par son contenu : la cinquante-troisième année de Flaubert - sachant qu'il mourra à 57 ans, il est quasiment rendu à la fin de sa vie -, où il alla, ce qu'il fit de cette année-là, l'état d'esprit dans lequel il se trouve etc. etc ... tout cela m'a intéressée et m'a beaucoup émue aussi. J'ai été élevée au biberon flaubertien (je vous l'avais déjà dit, je crois) et j'ai lu un certain nombre de biographies sur Flaubert. Mais là, et c'est ça qui est complètement magique, Alexandre Postel nous le rend VIVANT, notre bonhomme. Oui, il est là, devant nous, inquiet à cause de problèmes financiers (ce à quoi il n'a jamais été confronté auparavant,) fatigué par la vie, fragilisé par une santé défaillante, inquiet quant à sa capacité à faire une phrase, triste, mélancolique, ne supportant plus la médiocrité ambiante et pourtant, pourtant, tellement plein de vie, insatiable bouffeur, fou de bains de mer (vous aviez déjà imaginé, vous, Flaubert nageant ? Hugo, oui, mais Flaubert?), curieux comme pas un, sensible, plein d'humour, d'idées, de liberté d'esprit... Oui, il est là, en chair et en os, débarquant en l'année 1875 à Concarneau (il veut voir la mer), où il va observer les dissections de son ami et naturaliste Georges Pouchet qui découpe au scalpel tout ce qui lui tombe sous la main en fait de turbot, homard ou lièvre de mer. Flaubert regarde la vie quitter ces pauvres bestioles et soudain, le processus de création littéraire émerge en lui, l'imagination s'active mystérieusement, l'inspiration prend forme, se nourrissant de cela même qui lui semble en tous points éloigné...
Fascinante alchimie...
Le soir, tandis que l'odeur des sardines se dissipe doucement sur la ville, coincé dans sa petite chambre d'hôtel, il commence l'écriture de « La légende de saint Julien L'Hospitalier ». Et là, Alexandre Postel nous offre le fascinant spectacle de la création littéraire et de ce goût d'écrire qui revient : l'on voit, en effet, comment s'élabore, dans l'hésitation, le tâtonnement, les errements, une phrase parfaitement rythmée dans laquelle chaque mot est pesé, soupesé, pensé, examiné, comme au scalpel, fond et forme, sens et sonorité…
Et le prodige a lieu là, sous nos yeux.
Et c'est magique !
Flaubert a vaincu, il s'est hissé encore une fois au sommet, est parvenu au sublime, terrassant la mélancolie et les premières ombres de la mort.
Et puis, encore une chose… Allez, cerise sur le gâteau… l'écriture flaubertienne d'Alexandre Postel est un délice, n'ayons pas peur des mots… On y sent une fréquentation régulière et assidue des romans du bonhomme, un goût puissant pour lesdits écrits et surtout une sympathie profonde pour celui qui signait « ta vieille nounou décrépite » lorsqu'il écrivait à sa nièce…
Un texte remarquable. Mon coup de coeur.
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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La quatrième de couverture est explicite mais ne dit pas tout de ce court roman que j'ai lu le sourire aux lèvres. Mettre en scène le personnage de Flaubert vieillissant, déprimé, rongé et pas très fier de ses soucis d'argent, c'est une belle idée car le personnage est loin d'être ordinaire. Ses contradictions, ses souvenirs mélancoliques, ses habitudes, ses relations aux autres, à sa famille et à ses amis, tout est intéressant sous la plume d'Alexandre Postel, dont j'ai lu et apprécié le premier roman lors du jury du prix Première, Un homme effacé.

A Concarneau, Flaubert recherche la compagnie de ses amis scientifiques, les docteurs Pouchet et Pennetier. Observer leurs travaux sur les animaux marins l'intéresse et le fascine à la fois : cela renforce évidemment ses convictions scientistes mais il se laisse également toucher – à son grand étonnement – par des croyances populaires comme un pardon de pêcheurs. Avec ses amis, il fait de longues promenades, il se baigne dans la mer, il écrit quelques lettres, notamment à sa nièce Caroline (tant il est anxieux de sa situation financière) et à son amie George Sand. C'est le portrait d'un homme certes excessif qui se dessine (dans la nourriture, les appétits sexuels) mais aussi attachant et assoiffé de reconnaissance qui se dessine.

Les semaines passant, Gustave retrouve peu à peu le goût d'écrire. C'est ainsi qu'il dresse le plan et les premières pages de ce qui deviendra La légende de saint Julien l'Hospitalier (texte qui sera publié dans Trois Contes). Après le portrait de l'homme, de l'oncle, de l'ami, c'est celui de l'écrivain qui s'offre au lecteur et c'est au processus de création littéraire que nous sommes conviés. Nous voilà au plus près de Flaubert réfléchissant, se documentant, taillant et retaillant ses phrases, polissant ses mots comme ses plumes. Et là, je dois avouer que j'ai eu le sourire aux lèvres durant toute ma lecture tant l'auteur, Alexandre Postel, a lui-même travaillé son texte, tout comme son sujet d'inspiration. Son style est parfait pour moi, ce fut un vrai plaisir de lecture.
Lien : https://desmotsetdesnotes.wo..
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Alexandre Postel nous propose dans ce court roman de suivre un épisode de la vie du célèbre écrivain, Gustave Flaubert. Lorsque ce roman s'ouvre, force est de constater que tout va mal pour notre cher Gustave. Son avenir financier semble très incertain en raison des mauvaises affaires de son neveu par alliance, il est en pleine dépression et ses travaux d'écriture semblent au point mort.

Pour se ressourcer, l'écrivain prend la direction de Concarneau. le lecteur est ainsi invité à suivre cette période qui va permettre à Flaubert de se remettre le pied à l'étrier. Promenades, bains de mer, repas parfois gargantuesques à base de fruits de mer et rencontre de deux mondes, le monde littéraire avec le monde des sciences, de par les discussions et interactions que va avoir l'écrivain avec deux hommes de sciences. Petit à petit, l'inspiration revient et Flaubert va recommencer à écrire.

Je suis loin d'être un expert de Gustave Flaubert et je serai donc bien incapable de dire ce qui relève de faits historiques avérés ou ce qui relève de la fiction. Ce que je peux dire, par contre, c'est que cette plongée dans la vie de cet homme et aussi dans le processus d'écriture m'a complètement happé. Ce roman se lit d'une traite, en raison de sa petite taille évidemment, mais aussi et surtout en raison d'une plume de très grande qualité. Quelques passages autour de la science prennent peut-être un peu trop de place mais ce n'est pas dérangeant tant cette rencontre entre deux mondes que tout semble opposer est fascinante.

Ce roman d'Alexandre Postel est donc une belle découverte et on prend un plaisir certain à suivre cette tranche de vie de Gustave Flaubert. Dommage que cela soit si court car on en redemande !
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Si j'ai choisi de lire ce livre, ce n'est pas pour Flaubert, pas du tout même! Aussi bizarre que cela puisse paraître, je me suis dit qu'il ne s'agissait probablement pas de Gustave, bien connu pour ses écrits, mais plutôt d'autre chose, d'une ville, d'un animal, d'un autre truc qui s'appellerait Flaubert..oui, je sais, je tiens une sacrée couche parfois! C'est sans doute que je n'imaginais pas Alexandre Postel écrire sur Flaubert, l'auteur de Salambô ou de l'éducation sentimentale;
me suis-je bien faite comprendre, j'ai choisi ce roman car il était de la plume de ce jeune auteur, Alexandre Postel, qui m'avait fait passé un joli moment avec ses deux pigeons.
Et alors là, bravo! réussite totale! le couple Postel-Flaubert ça marche!
Pour deux raisons chez moi:1- Postel m'a fait découvrir un Flaubert dont j'ignorais presque tout( les lectures imposées au lycée, même si on apprécie le roman, ne donnent pas toujours le désir d'en savoir plus sur l'auteur, on n'a ni l'âge ni l'intérêt pour ces choses là...)
2-Flaubert a mis en valeur ce jeune écrivain de façon magistrale! Quelle belle écriture! Quel sens de la description, de la mise en situation, et quel humour dans son style!
Voici un roman à lire, il rend Flaubert sympa, ce qui est déjà très bien, mais en plus, on revit une époque de découvertes scientifiques, on y apprend des tas de choses (sur la raie, l'écrevisse ou le homard) là-bas, il y a plus d'un siècle à Concarneau, on peine avec notre héros devant sa table d'écrivain, on se goinfre avec lui dans cette pension de famille, on relit les lettres qu'il écrit à sa nièce, on passe le temps, et on mesure ce temps qui passe.... Très belle (re) découverte!
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Délicieux petit exercice que celui réalisé par Alexandre Postel : à partir de recherches dans les archives et dans la correspondance de Gustave Flaubert, il imagine et nous conte dans le détail le séjour que fit à Concarneau au cours de l'automne 1875 l'auteur de "La Légende de Saint Julien l'Hospitalier". le plaisir procuré par cette lecture provient de son sujet, mais aussi du style de son auteur qui est comme un reflet de celui de son maître : avant tout un régal à savourer.

Atteint de mélancolie, Flaubert était très préoccupé par le risque de perdre Croisset, la propriété où il vivait près de Rouen depuis trente ans ; l'air de la mer et la fréquentation d'amis scientifiques, alors qu'il se battait déjà avec ses "deux bonshommes", devaient lui faire, pensait-il, le plus grand bien. Comme un homard se met à l'abri pour muer, il s'exile de la Normandie pour une lente guérison.

Voici donc notre homme installé dans une auberge ; nous le suivons dans ses visites au laboratoire de son ami chercheur qui dissèque les poissons, ses promenades et bains de mer, mais surtout dans ses pensées. Sa mélancolie se résorbe peu à peu. le travail d'écriture de Flaubert, l'obsession de la recherche du mot juste, celle de sa place dans la phrase, l'équilibre de celle-ci dans son ensemble, la recherche de la transmission fidèle de l'émotion ressentie par son personnage, la lutte permanente (quasi obsessionnelle et, dit-il, "perdue d'avance") entre ce qu'il aimerait pouvoir écrire et ce qu'il écrit nous sont rapportés avec une étonnante vraisemblance par Alexandre Postel. Les ratures, abandons, reprises, nouvelles formulations sont chez bien des écrivains des instruments courants, mais chez Flaubert tout se passe comme s'il n'était jamais totalement satisfait de son pinceau, de sa toile et de ses couleurs ou de son ciseau et du matériau à sculpter ; c'est cette tension asymptotique vers le style presque parfait qui fait le rayonnement de son oeuvre.

On trouve dans la Correspondance de Flaubert de nombreux passages où il se plaint de la considérable dépense d'énergie qu'il lui faut mobiliser pour accoucher d'une phrase qui ait l'heur de ne pas trop lui déplaire. Ici, nous assistons au spectacle fascinant du travail d'écriture de seulement quelques fragments de sa "Légende" et l'on est décontenancé en essayant d'imaginer ce qu'il a dû lui en coûter pour composer Madame Bovary.

À la fin de son court essai littéraire, Alexandre Postel a placé cette réflexion : « D'où vient l'inspiration, comment naissent les livres, ce qui pousse un homme à écrire, ces questions-là ne méritent pas qu'on s'y attarde. (…) Seule compte l'oeuvre accomplie ». Pour notre plaisir et en heureuse contradiction avec ses propos, il nous fait découvrir Flaubert à son atelier d'écriture.
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Très bon roman qui sent bon la biographie de fin de vie d'un monument de la littérature Française. Ces pages décrivant un épisode important de la vie de Gustave Flaubert, s'appuyant sur sa correspondance avec sa nièce
Caroline (Caro, Carolo, Loulou . . . dans ses lettres) au moment où il craint pour ses fiances et son éventuelle obligation de vendre « sa » propriété Normande du Croisset, près de Rouen.
Il questionne sa nièce pour savoir si la maison va rester à sa disposition :
« Lis ce que la mère Sand m'écrit sur lui, (Croisset) : « Si ce n'était pas au-dessus de mes moyens je l'achèterais et tu y passerais ta vie durant. Je n'ai pas d'argent mais je tâcherais de placer un petit capital. Réponds-moi, sérieusement, je t'en prie. Si je puis le faire, ce sera fait. » – Hein ? Qu'en dis-tu ? »
Dans cette période d'incertitude où il va concevoir ses « trois contes », il s'isole plus ou moins à Concarneau pour y réfléchir, pour respirer le bon air marin en compagnie de gens simples.
L'auteur nous invite superbement dans l'intimité de ce géant de la littérature en imaginant les tourments et les affres que peut représenter pour quelqu'un qui, finalement, n'est qu'un rentier n'ayant jamais travaillé (ni même préparé un repas par exemple) la perspective de la faillite.
Un roman breton parlant d'un normand vraiment très immersif...
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En cette année 1875, Flaubert, 53 ans, est au bout du rouleau. Comme son héroïne Emma Bovary, il est neurasthénique. Menacé de ruine, il a perdu de nombreux amis. Vivant reclus dans sa propriété De Croisset, à quelques encablures de Rouen, il souffre de la solitude. Pire, le grand écrivain n'écrit plus. « Il a abandonné (…) son encyclopédie de la Bêtise », « Bouvard et Pécuchet ».
« Faute de pouvoir atteindre le calme en lui-même, c'est à la mer qu'il le demandera ». Il se rend à Concarneau où il retrouve Georges Pouchet, un naturaliste passionné par les poissons. Les bains de mer, les balades dans les landes, la gaîté des compagnons qu'il fréquente, les repas pantagruéliques vont lui redonner un peu de joie. Bien qu'il pense, dans les périodes sombres, que « la science est le plus parfait accomplissement de l'esprit » et qu'il a « voué sa vie à des occupations puériles », il reprend la plume et amorce l'écriture de l'un des « Trois contes », « La légende de Saint-Julien l'Hospitalier ».
En construisant le récit des deux mois que Flaubert passa en Bretagne, Alexandre Postel, avec son style classique, élégant et précis, synthétise ce qui fait la quintessence du personnage : sa mélancolie, son hypocondrie, son obsession pour le beau, qui « rejoint toujours le vrai », et pour la phrase juste, son désintérêt pour la politique, ses jugements sur ses contemporains (sur Hugo, qu'il admire, mais à qui il reproche les « inepties » proférées « sur le compte de Goethe » ; sur Zola et son naturalisme qui ne cherchent que le vrai et non le beau), sa claustration, son immense correspondance, son autodérision, son dégoût de l'argent, lui qui ne sait qu'écrire (« or le style, le style en soi, ne se paye pas » écrit-il à son amie Léonie Brainne), sa haine des bourgeois et de la bêtise humaine...
En se penchant sur une infime partie de la vie de l'auteur de « salammbô », il dépeint les affres de la création littéraire.
Un an avant le bicentenaire de la naissance du Normand, n'hésitons pas à nous plonger, comme l'a fait Alexandre Postel, dans sa correspondance pour mieux comprendre le destin de cet homme tourmenté qui a laissé une oeuvre magistrale et immortelle.

EXTRAITS
- Il s'imaginait avoir tout sacrifié – mariage, fortune, plaisirs – à son indépendance et à sa liberté ? Il comprend qu'il n'est ni libre, ni indépendant.
- Son sexe est mou comme un navet bouilli.
- Il a su que déchoir était son destin.
- le travail de la phrase ne consiste-t-il pas à figer les idées dans l'éternité du style ?
Lien : http://papivore.net/litterat..
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Un court roman sympathique qui nous fait découvrir Flaubert dans une mauvaise passe. Il se réfugie à Concarneau, se promène, se baigne, marche, regarder des dissections de poissons... Tout cela est avéré.
Et l'auteur, en essayant de se réapproprier le style de Flaubert, ou du moins, en le citant, va imaginer ce qu'il va se passer pour Flaubert et comment il va peu à peu reprendre la plume.
Le plus intéressant - outre le fait de "reconnaître" des endroits de Concarneau pour ceux qui y sont allés - est surtout de voir comment Flaubert travaillait, reprenait, ciselait ses phrases. Quel travail que celui d'écrivain!
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« Il vainquit les Troglodytes et les Anthropophages. Il traversa des régions si torrides que sous l'ardeur du soleil les chevelures s'allumaient d'elles-mêmes, comme des flambeaux ; et d'autres qui étaient si glaciales que les bras, se détachant du corps, tombaient par terre ; et des pays où il y avait tant de brouillard que l'on marchait environné de fantômes ».
La légende de Saint-Julien l'Hospitalier / Trois contes – Gustave Flaubert

Publié en 1877, Gustave Flaubert en avait commencé l'écriture des années auparavant. Mais d'autres oeuvres majeures seront achevées avant. En 1875, fatigué, épuisé physiquement et nerveusement, en difficulté financière et, lui aussi, environné des spectres du passé, décide de passer un séjour à Concarneau à l'automne de sa vie. de ces faits véridiques, Alexandre Postel en fait un roman où se mélangent effluves marins et humeurs nostalgiques.

Flaubert déprime, il se sent inutile et ses relations avec sa nièce sont chaotiques. Dans un miroir, il a l'impression que sa vie va de Charybde en Scylla, que bientôt l'hiver de sa destinée tombera comme neige sur les cimes du désespoir. Tout l'ennuie, tout le lasse. Il croit apercevoir une lueur de renouveau lorsque son amie George Sand lui conseille d'aller rendre visite à Victor Hugo. Mais c'est le contraire qui se produit. Flaubert se sent comme le homard que croque le père des « Misérables », un roi qui ne s'amuse plus.
Puis, il se souvient de la Bretagne, de Concarneau et soudain, il songe que là-bas un Phénix peut renaître de ses cendres en régénérant ses esprits non par le feu mais par la mer et l'arôme de ses richesses. Il y retrouve son ami Pouchet qui dissèque mollusques et poissons. Entre bains de mer et repas gastronomiques, il essaie de se replonger dans l'histoire médiévale de Saint-Julien.

Une très belle évocation de la mélancolie d'un écrivain, de ce que peut ressentir chaque être vivant lorsqu'il se regarde dans un miroir avec les marques du temps et les regrets qui se réfléchissent au coeur de la psyché.
L'autre intérêt est l'écriture d'Alexandre Postel qui a su magistralement se fondre dans l'ambiance du dix-neuvième siècle et particulièrement dans celle de Flaubert. le « père » de Madame Bovary n'est en rien un de mes écrivains de prédilection et pourtant comme une envie de redécouvrir son oeuvre parce qu'une fragrance particulière s'est portée sur mes yeux, par le mélange d'un temps passé et d'une histoire littéraire.

Un roman comme un tableau où derrière chaque mot s'est dessiné non pas une plume mais un pinceau, un pinceau cherchant sur sa palette les couleurs d'une vie, d'un parcours, d'un paysage toutes les nuances pour produire un portrait aux variations énigmatiques de l'âme. Patrick Grainville dans « Falaise des fous » grave plusieurs fois sur ses pages « Parce que Monet peint », comme une envie de le paraphraser avec un « Parce que Flaubert a écrit ».
Lien : https://squirelito.blogspot...
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